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Vendeurs ambulants à Ouagadougou : Les combattants "dans l’ombre" de la pauvreté

Publié le samedi 4 juin 2005 à 10h18min

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Des milliers de jeunes vivent du petit commerce d’articles à Ouagadougou. Couramment appelés "les vendeurs ambulants", ces jeunes font un parcours du combattant à travers vrai capitale burkinabè dans ses moindres recoins pour "proposer" leurs marchandises.

L’informel y gagne, les clients aussi ...
Sidwaya Plus est allé à la rencontre de ces jeunes pour comprendre leur monde.

C’est peut-être l’un des rares "corps de métiers" où la présence des filles est encore moins visible. Pourquoi ? Les vendeurs ambulants ont leur petite idée là-dessus. Pour Théophile Bonkoungou, qui transpirait à grosses gouttes. Ce jour-là sous un soleil de plomb, "il est rare de voir des vendeuses ambulants d’habits, de montres, de débardeurs ...".

D’autant plus que l’activité semble pénible. "Etre vendeur ambulant est très fatiguant. Je fais au moins dix fois le tour du grand marché de Ouagadougou par jour", ajoute Bonkoungou. "Les filles sont plutôt vendeuses de bananes, de alôco, renchérit Ousmane". Et Seydou, un autre vendeur ambulant de s’interroger : "Je ne comprends pas pourquoi les filles ne s’intéressent pas à ce secteur". Les avis sur l’absence "tacite" de filles dans le métier divergent.

Chacun y a sa petite idée. Soit ! Est-ce un métier trop dur pour les filles ou est-ce par désintérêt qu’elles s’aventurent peu ou pas ? Qu’ils soient d’en haut ou d’en bas, les vendeurs ambulants affirment que les Burkinabè s’habillent ou se ravitaillent auprès d’eux, en objets utilitaires.

"Même des gunters s’habillent dans la friperie", avoue un jeune vendeur ambulant "c’est moins cher et la qualité y est", reconnaît Gisèle Pouya, une cliente qui vient régulièrement s’approvisionner à la rue de l’hôtel de ville, à deux pas du grand marché de Ouagadougou. "On s’y habille vraiment à moindre frais", a-t-elle laissé entendre. Et d’ajouter : "j’ai déjà vu des tenues vestimentaires de 13 000 FCFA alors qu’on les rencontre à la friperie à des prix bas", a confié Gisèle, satisfaite d’avoir payé deux hauts sautés à 2 750 FCFA au terme d’un marchandage à rebondissement. La loi du marché, chez les vendeurs amblants, est "le qui dit mieux".

C’est un monde fait de tractations. Chacun essaie d’arracher de l’autre le maximum. "Dis-moi ton prix", lance un vendeur ambulant à une cliente. "Je prends les deux chemises (des hauts sautés) à 2 500 FCFA", a-t-elle répondu.

Et le dialogue marchand se poursuit. "Quel est ton prix plafond ? Il y a des endroits où ça coûte plus cher. Mon prix est le meilleur. Je te les offre à 2 750 FCFA", poursuit le vendeur. La cliente Mlle Gisèle Pouya après un moment d’hésitation se convainc à débloquer la somme de 2 750 FCFA. Chacun repart satisfait d’avoir réalisé une bonne affaire. Au bureau, dans la rue, dans les maquis ou bars etc., les vendeurs ambulants proposent leurs marchandises aux Ouagalais. Ceintures, boucles d’oreilles, pantalons, montres, maillots de sport, débardeurs, dans les maquis ou les bars, etc, voilà les produits que les vendeurs ambulants liquident à travers les artères de la capitale.

L’activité requiert du courage et des muscles tant les distances à parcourir sont longues. "Je fais au moins 10 fois le tour du grand marché", affirme Théophile Bonkoungou. "Je me bats comme un militaire pour gagner mon pain quotidien", renchérit Ousmane Tiendrébéogo, vendeur de pantalons. Même si avoue-t-il le marché est "timide" en ce comment, il n’en demeure pas moins que le métier peut nourrir son homme. "Dans la journée, on peut se retrouver avec 1 000 FCFA de bénéfice". Des bénéfices qui se réalisent à la satisfaction des uns et des autres. Leurs produits sont prisés des Ouagalais. Valérie Ilboudo venue s’acheter des tableaux et des fleurs, affirme que "les produits des vendeurs ambulants sont de très bonne qualité...". Toutefois, note-t-elle, "il arrive parfois que la qualité ne soit pas de mise. Souvent, on est embêté par les vendeurs ambulants. Ils veulent obliger le client à payer leurs produits".

"Des pantalons climatisés, ..."

Pour inciter les Ouagalais à délier le cordon de la bourse, les vendeurs ambulants n’y vont pas par quatre chemins. La règle est claire : "amener coûte que coûte le client à payer la marchandise". Tel est leur leitmotiv. "Ici des pantalons climatisés pour la chaleur, venez, des boucles d’oreilles pour vous rendre plus belle Madame, ces chaussures sont pour vous, des hauts sautés ou des décolletés à bas prix ! Des boucles d’oreilles, pour ta copine ! Les slogans sont légion ...".

Autant d’appels pour attirer dans "ses filets" les clients qui tardent à se décider. La stratégie apporte ses fruits. "J’arrive à subvenir à mes besoins tant bien que mal grâce à ce métier", affirme Théophile Bonkoungou. Sangla Harouna, le sac au dos, les deux mains tenant qui des décolletés, qui des maillots, reconnaît que "le marché est capricieux en ce moment". "Les hauts sautés sont les plus demandés. Les filles sont nos principales clientes.

Mais cela ne suffit pas. Parfois, certains articles sont déphasés et on n’a plus d’argent pour prendre de nouveaux lots". Qu’à cela ne tienne, il semble décidé à poursuivre cette activité d’autant plus dit-il "au-delà de la fatigue, j’encaisse en moyenne par jour 2 000 FCFA de bénéfice". Il s’approvisionne au marché du secteur 10 de Ouagadougou. La méthode consiste à payer des articles chez le grossiste de manière à les revendre dans la rue.

La plupart d’entre eux avouent que leurs articles proviennent soit de Lomé, de Dubaï, Singapour. "La chinoiserie envahit le marché burkinabè au grand bonheur du consommateur. Ce, d’autant que Gisèle Pouya pense que ces produits s’acquièrent à moindre coût. Ça dure, quand tu achètes une friperie tu te sens seule dedans", ajoute-t-elle, l’air timide mais heureuse d’avoir fait une bonne affaire. Circuler partout pour liquider des articles, semble être la voix choisie par les vendeurs ambulants pour combattre la pauvreté.

Ils sont des milliers à tirer leur épingle du jeu grâce à ce commerce. Chaque jour signifie pour eux parcourir des kilomètres pour espérer vaincre sa misère. Leur manière à eux de lutter contre la pauvreté et partant de s’auto-employer.

Si Sangla Harouna évalue la distance qu’il parcourt par jour entre 15 - 20 km. Théophile Bonkoungou, lui affirme ne pas avoir une idée de celle-ci. "Faute de mieux" dit-il, on se débrouille. "Une debouillardise" qui contribue à faire reculer les frontières du chômage au Faso. Des jeunes combattants affrontent les coups durs du soleil, les vicissitudes du marché en quête d’un perpétuel mieux-être. L’informel gagne du terrain au profit d’un nouveau métier auquel s’adonnent "volontiers" des jeunes de la capitale.

Pour cela, ils doivent déambuler, rôder autour du grand marché des lieux publics, des services pour avoir leur pain quotidien : le fruit de la sueur de leur front !

S. Nadoun COULIBALY (coulibalynadoun2002@yahoo.fr)
Sidwaya

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