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Valère D. Somé : « J’avais déjà dit que l’insurrection populaire a été une révolution manquée »

Publié le vendredi 11 novembre 2016 à 21h35min

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Valère D. Somé : « J’avais déjà dit que l’insurrection populaire a été une révolution manquée »

L’homme ne laisse jamais indifférent lorsqu’il parle. Il est en effet connu pour son langage franc et direct. Nous avons rencontré pour vous Valère D. Somé, à la faveur du lancement, le 5 novembre 2016, de sa maison d’édition « Le Millénium » et de deux tomes de ses recueils de textes politique.

Lefaso.net :Pouvez-vous vous présenter pour ceux qui ne vous connaissent pas encore ?

Valère Somé(VS) : Moi c’est Valère Somé. Je suis socio-anthropologue et actuellement j’œuvre en tant que consultant en sciences sociales. En même temps, je suis devenu depuis hier samedi 05 novembre 2016, libraire-éditeur. J’anime une petite librairie pour m’occuper et occuper aussi la jeunesse.

Lefaso.net : Vous venez donc de lancer une librairie et deux tomes de « Recueil de textes politiques ». Pouvez-vous nous en parler ?

VS : En effet, j’ai édité un livre intitulé « Recueils de textes politiques : articles et interviews ».Le premier tome couvre la période de 1995 à 2002 et le deuxième la période de 2002 à 2015. Il s’agit de tous mes articles qui ont été publiés les uns dans les revues scientifiques et les autres dans la presse nationale. Il y a des textes qui sont bien connus pour ceux qui me lisent et d’autres qui étaient moins connus ou qui n’étaient même pas encore publiés.

J’ai estimé qu’avant de passer à autre chose, il était bon de présenter tous mes articles, faire le balayage avant de commencer la publication d’autres œuvres inédites. Il fallait donc faire le point et mettre toutes ces œuvres à la disposition de mes lecteurs avant d’entreprendre quelque chose de nouveau.
Il y a beaucoup de manuscrits et de textes qui dorment et comme je suis maintenant éditeur moi-même, je vais commencer par m’éditer.

Lefaso.net : On ne peut pas s’empêcher de faire un détour pour parler de la situation nationale. Quels regards portez-vous sur la gouvernance politique actuelle ?

VS : Cela n’a vraiment rien à voir avec mes recueils de textes politiques qui s’arrêtent en 2015. Mais entre-temps il y a l’insurrection populaire qui est passée par là.
Premièrement, j’avais dit à l’époque dans « Bendré » que ce soulèvement populaire a été manqué et les buts confisqués. C’est une révolution manquée.
Depuis lors, il vous appartient à vous de voir si ce que j’ai dit est faux. Aujourd’hui, les tenants de cette insurrection le reconnaissent et moi je l’avais déjà déclaré.

Deuxièmement, il y a eu les élections avec un nouveau régime dirigé par Roch Marc Christian Kaboré. J’ai gardé le silence jusque tout dernièrement à l’émission « Sur la brèche » de la télévision nationale. Sinon, j’avais gardé le silence pendant bientôt un an, avant de dire qu’il faut faire très attention et mettre en garde sur le fait que les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets. Et que le régime actuel, par certains comportements de animateurs, ressemble fort à ce que nous avons toujours connu…

J’ai dit à cette émission que j’ai toujours agi en franc-tireur, me mettant en dehors des batailles des partis politiques. Ce qui ne veut pas dire que je ne fais pas de la politique. Comme j’ai eu à le dire, la politique se fait aussi ailleurs en dehors des partis politiques.

Cependant, j’estime aujourd’hui que compte tenu de la situation qui est grosse de dangers pour l’unité nationale et la stabilité, j’ai alors dit qu’il fallait un sursaut national.

J’ai donc décidé de réintégrer pour ce qui me concerne mon parti d’origine. Parce que c’est le seul parti qui reflète mes convictions. Et comme j’aspire à prendre sa tête, nous convoquons un congrès extraordinaire le 12 novembre prochain au siège du Liptako N’gourma. Je vous invite donc à participer à ce congrès parce que le congrès va se pencher sur la situation nationale, en donnant sa lecture politique et ses propositions de solutions pour l’avenir. Vivement donc, rendez-vous à la clôture du congrès de la CDS (Convergence pour la démocratie sociale).

Lefaso.net : On vous connait pour avoir été l’un des proches du président du CNR Thomas Sankara. 28 ans après, le dossier est toujours pendant devant la justice burkinabè. Votre commentaire ?

VS : Là encore je vais me répéter. Mais comme la répétition est pédagogique, j’ai eu à dire « Sur la brèche » que ça m’étonnerait que le dossier en justice voit son terme parce que tant que certains personnages sont encore aux affaires, je suis sceptique quant au fait que ce dossier trouve une bonne résolution.

L’histoire de ce pays ne commence pas seulement les 30 et 31 octobre 2014. L’histoire moderne de ce pays commence depuis l’indépendance politique en 1960. Et donc des problèmes se sont posés et il y a eu des acteurs.

A propos de la mort de Thomas Sankara, je pense qu’il faut attendre la conclusion de ce dossier pour voir ceux qui ont véritablement pris part à cet assassinat et à sa gestion. Mais moi, j’ai mes convictions sur le fait qu’avec certaines personnes qui animent encore ce pouvoir ou en détiennent une parcelle, et qui influencent la justice, ce dossier ne peut avoir un dénouement heureux dans le sens de rendre une vraie justice.

Lefaso.net : A qui faites-vous allusion en parlant de ceux qui influencent la justice ?

VS : Je ne veux pas devancer l’iguane dans l’eau et j’ai aussi dit dans l’émission que le diable n’est pas celui qu’on croit. Ce n’est pas parce que je n’ai pas le courage d’indexer les gens mais je ne devance pas l’iguane dans l’eau. Permettez-moi donc de m’en tenir à cette allusion.
Si j’interviens dans ce sens en indexant des gens, je vais influencer la justice. Que la justice fasse donc son travail et on verra.

Lefaso.net : Un appel à lancer ou un dernier mot ?

VS : Ce que je veux dire vous concerne directement. Je pense que toute personne qui veut intervenir sur vos sites, comme Lefaso.net, doit être identifiée. Vous pouvez en collaboration avec le CSC (Conseil supérieur de la communication) réglementer sérieusement ces pages.

On doit prendre exemple sur le cas des sociétés de téléphonies mobiles. Toute personne qui veut intervenir doit être inscrite sur vos registres avec sa carte d’identité quitte à ce qu’elle utilise un pseudonyme. Cela éviterait que des irresponsables, des lâches, ceux qui n’ont pas le courage de leurs opinions se cachent pour insulter des gens. Il faut que chacun soit responsable de ses idées et de ses actes. Sinon on laisse la porte ouverte à la calomnie et la délation gratuite, à des lâches qui manipulent l’opinion. Je crois que je vais écrire pour interpeller le CSC dans ce sens.

De deux, je pense que mon ambition en ouvrant cette librairie c’est de mettre des armes à la disposition de cette jeunesse. Je persiste à croire qu’il n’y a pas de génération consciente avec des gens qui n’ont pas de formation politique. Ce sont des excités et des activistes seulement qui se font manipulés pour regretter leurs actes 5 ou 6 mois plus tard.

Oui, la génération est consciente lorsqu’elle est bien formée. Thomas Sankara disait qu’ « un militaire sans formation est un criminel en puissance ». Moi, j’ajoute qu’un jeune sans formation est un activiste bête, nuisible pour la société.

Propos recueillis par Angelin Dabiré
Lefaso.net

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