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A vrai dire, avons-nous besoin d’une nouvelle constitution ?

Publié le dimanche 28 août 2016 à 23h55min

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A vrai dire, avons-nous besoin d’une nouvelle constitution ?

Dans la vague de précipitation qui sa suivi la fuite de Blaise Compaoré, l’histoire s’est accélérée au pays des hommes intègres. Ainsi, on a vu surgir de nulle part des spécialistes de tout bord, chacun venant proposer sa solution à chaud. Et comme en la matière le peuple « qui ne sait rien a tout de suite confiance » à ces universitaires, académiciens dont le grand mérite se résume le plus souvent à leurs prouesses devant la presse nationale et internationale, s’est laissé emporter. Après tout, le vent de liberté après 27 années de Compaoré peut souvent jouer des tours et certains en ont bien profité pour placer leurs pions.

En mal de promotion au CAMES qui reste la seule structure de référence, ces académiciens se sont engouffrés dans la politique politicienne. Au moment où l’on cherche à construire un Burkina nouveau, chacun est venu avec son remède et le pauvre peuple est tombé dans le panneau.

Le premier remède qui nous a été proposé a été la réforme du code électoral

Avec le recul, on peut se rendre à l’évidence que ceux qui ont suggéré, proposé et appuyé l’idée d’interdire leurs anciens camarades… avaient leur agenda caché. Ils ne l’ont pas fait pour le bien ou l’intérêt du peuple. La preuve est que cette réforme leur a ouvert un boulevard vers le pouvoir et la méthode continue. Après tout, ils ont tous été à cette école et ils ne savent faire que cela.

Quant aux dignitaires écartés par la voie légale et non la voie légitime, eux-aussi devaient avoir la décence de proposer un stand-by pour ne pas offrir l’opportunité de se faire écarter. Bon, ils sont restés aveuglés par le pouvoir et même quand ils l’ont perdu, ils ne savent pas retrouver certaines habitudes de l’opposition. C’est une question de culture politique.

Cette réforme du code électorale par la bande à Zida nous a coûté combien ? Plus de 500 millions de nos francs et ce sont ces mêmes prétendus intellectuels qui se sont partagé cet argent en frais d’expertise, d’avocat, de voyage… A l’arrivée, la cour de la CDEAO a condamné le Burkina Faso et on est tout de même passé outre. Avec quelle conséquence pour l’image du pays ?

Le deuxième remède est ce projet d’une nouvelle constitution

Je rappelle que nous sortons de 27 années de régime Compaoré dont plus de 20 ans avec une constitution octroyée, comme l’écrivait un certain Soma avec tout le mal qu’il pense de la démarche et procédure d’élaboration et d’adoption. Aujourd’hui, le même est dans une équipe qui, comme celle de 1991 avec un certain Bognessan, va nous proposer une constitution octroyée. Encore ! En d’autres termes, quand c’est octroyé par les autres ce n’est pas bon… si l’on suit bien le raisonnement.

Je rappelle encore que quelque que soit ce que l’on va proposer, la constante va rester c’est-à-dire la nature de l’Etat, la vision républicaine, les organisations politiques, les modes d’accès au pouvoir, les accords de coopération, les droit et devoir de citoyen… Bon c’est quoi on veut changer et qui nécessité l’écriture d’une nouvelle constitution ?

Je rappelle encore que si chaque fois que l’on a des problèmes, on change de constitution, il faut tenir compte du coût et des conséquences. Un pays a des bases et l’on ne peut pas y toucher comme ça. Un coup d’œil sur l’histoire nous permet de voir que l’on n’a pas forcément besoin de changer de constitution pour rentrer dans la modernité. Consultons Wikipédia :
« La Constitution des États-Unis a été acceptée le 17 septembre 1787 par une convention réunie à Philadelphie, et après ratification, s’applique depuis 1789. Elle a été modifiée par l’ajout de vingt-sept amendements. C’est la deuxième plus ancienne constitution écrite encore appliquée dans le monde après celle de Saint-Marin. » et
« Saint-Marin est un État indépendant. C’est une des plus anciennes républiques du monde après l’Islande, et c’est en tout cas la plus ancienne république du monde ayant continuellement existé depuis sa création. Sa Constitution, qui date de 1600, est la plus ancienne constitution encore en vigueur de nos jours. »

A vrai dire, trois raisons essentielles militent en faveur de l’arrêt de cette commission
Premièrement, je pense que nous venons de loin, certes, mais nous avons une constitution qui peut être amenée et adapté au contexte actuel et traduire notre vision du future. C’est sur ce dernier point d’ailleurs que je veux que cette commission, qui est essentiellement constituée de juristes, devra être dissoute, comme le dirait un autre Bamba.

Il manque à cette commission des personnes capables de traduire la vision. S’y sont engouffrés des juristes qui ne savent et que règlementer. Or, avant d’en arriver là, il faut des compétences pour traduire, comme dans le cas des pères fondateurs des USA, notre vision du pays sur le très très très long terme. Les constitutions à la gloire du prince régnant, on n’en veut pas. Or comme vous le voyez déjà, la lutte est serrée entre les partisans de de la forme républicaine qui veulent déshabiller le chef et ceux de la forme présidentielle qui veulent garder leurs acquis et prestiges. Et nos enfants dans tout ça ? Et les enfants des enfants des enfants de nos enfants ? Vous avez pensé au Faso dans 200 voire 1000 ans ?

La deuxième est que rien ne presse. Si l’on doit réformer notre Etat, nous en avons le temps et les moyens. On fait comme la Tunisie en commettant une chambre constituante qui va travailler sur 5 voire 10 ans pour produire quelque chose qui va tenir dans la durée. Une constitution, c’est bâtir un pays dans sa tête avant de le réaliser physiquement et c’est la raison pour laquelle ceux qui n’ont pas les constitutions solides, les institutions solides vont s’effondrer très vite. Après tout, « les caisses de l’Etat sont vides » et cette commission nous coûte combien. Alors qu’une chambre constituante peut être constituée de personnes bénévoles travaillant sur la durée en vue de produire un projet de constitution consensuel et non un projet octroyé.

Le mode de validation de ce projet que l’on voit venir. C’est vrai que les acteurs de cette commission se sont inquiétés à un certain moment de voir le document qui risque d’être adopté par l’Assemblée Nationale (si cela arrange certains adeptes du régime parlementaire). Mais la commission souhaite un référendum. Le mot est lancé et cela m’a fait rire. Que vaut un référendum au pays des hommes intègres où 70% ne savent pas lire et sur les 30 % nous avons 10% de francophones utiles (niveau BEPC). Sur ces 10%, combien vont lire le projet de constitution avant le referendum pour voter en connaissance de cause ?
Non, je ne suis pas pour l’adoption à l’AN mais je crois que le référendum va nous plonger dans celui de 1991 où plus de 98% des votants n’avaient jamais vu le document de projet de constitution qui a pourtant été adopté. C’est ça « le vote des bêtes sauvages ».

Au stade actuel des choses, reconnaissons que :

La commission n’a pas les compétences intellectuelles et morales requises. Certains membres ont été trempés dans la transition dont nous n’avons pas fini de compter les dégâts,
La procédure d’élaboration est exactement celle de 1991 décriée par Soma et qui risque de nous conduire vers une constitution à la gloire du chef ou à l’aspiration de ceux qui veulent lui tirer le tapis sous les pieds,

Prenons le temps de mettre quelque chose de solide en place en tenant compte de la durée et de la vision ainsi que de nos ressources.

Rien ne presse et nous courons vers le risque de faire commettre les mêmes fautes parce que certains ont vu l’opportunité de manger dans la commission quel que soit le résultat. Quoi qu’il en soit, on ne va pas inventer la roue et si l’on a une constitution qui ne marche pas, prenons des mesures conservatoires sur les points à polémique avant d’avoir les mesures nécessaires pour une application sereine ou un amendement comme dans le cas des USA.

A vous les spécialistes et académiciens de toutes carapaces, vous ne pouvez rien nous proposer de nouveau qui n’existe pas de l’histoire politique des nations. Comme quoi, même si le Bon Dieu te casse la jambe et qu’il te montre une nouvelle démarche, tu vas toujours devoir te remuer les fesses.

Abou Bamba DOUKARE (ABD)

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Vos commentaires

  • Le 28 août 2016 à 22:15, par BADSON En réponse à : A vrai dire, avons-nous besoin d’une nouvelle constitution ?

    Bonne analyse. Très d’accord avec cette analyse. Les mêmes rapaces sont là encore avec leur pratiques. Ils nous ont trompé en nous faisant croire que Blaise était le problème alors qu’eux-mêmes sont plus assoiffés de pouvoir que Blaise COMPAORE. Sinon, je ne comprends pas cette histoire de régime parlementaire ou présidentiel. Au Burkinabè qui savent discerner de faire attention et d’avoir l’oeil sur ses dinosaures d’une certaine race qui ne veulent pas se reposer et conseiller les jeunes mais qui veulent toujours rester au pouvoir. La jeunesse Burkinabè doit ouvrir l’œil et ne pas suivre l’argent qu’on utilise pour les corrompre.

  • Le 28 août 2016 à 22:56, par LY En réponse à : A vrai dire, avons-nous besoin d’une nouvelle constitution ?

    Il faut se dire la vérité : La présente révision constitutionnelle est inopportune et c’est un gouffre financier pour un pays dont les voyants financiers sont au rouge vif. Elle aurait été opportune sous la Transition afin de marquer le saut qualitatif opéré par l’insurrection, mais il eût fallu pour se faire prolonger la période de transition. L’article 37 détonateur de l’insurrection populaire a déjà été verrouillé par le CNT. Sans être juriste, je dirais qu’il n’ y a donc plus d’urgence actuellement à changer de Constitution surtout que l’on voterait mécaniquement pour le texte fondamental sans savoir la teneur du document. Que Dieu bénisse encore et toujours le Burkina Faso !

  • Le 28 août 2016 à 23:06, par Kabore En réponse à : A vrai dire, avons-nous besoin d’une nouvelle constitution ?

    Je dirais , oui ! Nous avons besoin dune nouvelle constitutions même si elle n’est pas prioritairr. Pour 4 raisons
    1) son ambiguïté sur d’alternance,
    2) nous somme tous d’accord qu’ils faut une rupture total avec l’ancien système qui s’est basé sur plusieurs insuffisance de cette même constitution,
    3) pendant que nous ayons toujours les yeux ouvert par cette galère que nous vivons.
    4) en fin, pendant que l’opposition vrais existe toujours.
    Je m’excuse pour celui ou celle pour lesquelles, mes propos sont malheureusement vexents

  • Le 28 août 2016 à 23:27 En réponse à : A vrai dire, avons-nous besoin d’une nouvelle constitution ?

    Vive le PCRV ! Ce parti visionnaire qui avait prédit que le pouvoir de Blaise ne peut être renversé ni par la voie électoraliste, ni par des réformettes ; Il a été taxé d’incivisme ; Le temps lui a donné raison. En quoi un régime parlementaire changera fondamentalement le quotidien des Burkinabè ? seule la RNDP peut nous sauver

  • Le 29 août 2016 à 03:42 En réponse à : A vrai dire, avons-nous besoin d’une nouvelle constitution ?

    Monsieur Doukare, je salue votre sens de la Nation et de la Patrie en ce qui concerne le foireux projet d’écrire une nouvelle Constitution pour le Burkina Faso.
    En vous référant aux pays jouissant d’une stabilité constitutionnelle à savoir Saint Martin et les États-Unis, vous démontrez preuve à l’appui que la présente Constitution en vigueur au Faso pourrait faire l’objet des amendements tout en évitant cette commission budgetivore au moment où des nbreux défis s’imposent aux Burkinabè.
    Les gouvernants qui sont nés avec des cuillères en or dans leur bouche doivent avoir la compassion envers les paysans, les vendeurs à la sauvette, les brai seules de poissons qui tirent le diable par la queue pour sur-vivre, car à vrai dire ils sous-vivent.
    Les pouvoirs Exécutif et Législatif, maître d’œuvre de cette supercherie de Commission pour la rédaction d’une Nouvelle Constitution doivent expliquer au Peuple souverain quel impact cette Constitution apportera dans l’amélioration du panier de la ménagère, du prix du pain, de l’urbanisation pour éviter les innlndations récurrentes d’année en année.
    Que ces messieurs de la présidence, du gouvernement et de l’Assemblée nationales adoptent un train de vie aussi simple que celle jadis adopté par l’immortel Thomas Sankara.
    Comme amendement, tout président du Burkina Faso doit ipso facto refuser toute détention présente ou recherche future d’une nationalité étrangère pour se soustraire des poursuites de la Justice républicaine Burkinabè. La Première Dame doit adopter la nationalité de son mari de président tout en rejetant toute allegiance à son pays d’origine qu’elle pourrait recouvrir en cas de divorce.
    Consacrer un amendement pour fermer le robinet du déshonneur initié par Blaise compaore après être ne en HV devenu Burkina Faso président durant 27 ans et devient suiveur de sa femme pour devenirnnéo-ivoirien.
    M’Africain pré-colonial disait " on ne fait pas un masque sans se référer à l’ancien".
    Monsieur Roch Marc Christian Kabore, vous n’avez pas besoin d’une nouvelle constitution pour la démocratie et le développement au Peuple du Faso, mais pour encadrer votre ego de pouvoir personnel.
    Un contemporain Thomas Sankara est aux cœurs des Burkinabè pour avoir osé une façon d’être Burkinabè, suivons ses glorieux pas et le Peuple ne bous publiera jamais.

  • Le 29 août 2016 à 14:29 En réponse à : A vrai dire, avons-nous besoin d’une nouvelle constitution ?

    Chers intellectuels, et si vous sensibilisez les populations ????
    Parmi vous combien prennent le temps d’expliquer aux paysans ce qui se passe dans le pays ? Et vous voulez quel changement dans le pays ?
    Imaginez si chaque personne qui a été à l’école pouvait prendre 01 heure tous les trois mois afin de s’entretenir avec un illettré.
    J’oublie que vous ne pouvez le faire. Parce qu’ils ne sont pas capable de comprendre. On oublie que c’est parce qu’ils sont visionnaires qu’ils ont inscrits les intellectuels et payés leurs études.
    Les intellectuels sont responsables de ce qui arrive à notre pays !!!

  • Le 8 septembre 2016 à 12:54 En réponse à : A vrai dire, avons-nous besoin d’une nouvelle constitution ?

    Moi, je dis que la vraie revolution commence à se faire sentie. pas la révolution dont on crie nuit et jour mais celle du pouvoir et de l’individualisme. Que chacun menage sa monture pour le nouveau virage !

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