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Enquête à Orodara où deux visions du monde s’affrontent 2/2

Publié le samedi 16 juillet 2016 à 06h00min

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Enquête à Orodara  où deux visions du monde s’affrontent 2/2

Le seul patrimoine culturel immatériel accepté par les musulmans est, à notre connaissance, Allah. Et pour eux, « il n’y a de dieu que Dieu ». Il n’en est pas de même pour les religions animistes, polythéistes.

À cause du sang versé, et de la connotation négative du terme « fétiche » généralement appliquée aux autels sacrificiels, les dénigrements ne manquent pas au sujet des religions traditionnelles, dans les commentaires des Africains convertis aux religions du Livre. Ainsi, au sujet des rites sèmè, pour nombre de protestants, « leurs manières-là, c’est du Satan ! ». Ils oublient que le dieu de l’Ancien Testament, le dieu d’Abraham et de Jacob, réclamait le sang des bœufs par flots (voir Job) ; c’était un dieu vengeur et sans pitié, qui lançait sortilèges et plaies à toute occasion. Ce Dieu-là est aussi celui du Coran.

Les Sunnites, eux, retiennent leur langue, mais ont demandé aux autorités administratives qu’un arrêté soit pris pour que le rite du dwo n’ait lieu que la nuit, ce qui leur permettrait d’exercer leur “propre” culte la journée en toute tranquillité. Ainsi “sans doute” serait célébré par eux un culte de la lumière, et par les coutumiers, un culte des ténèbres. Ce manichéisme insensé est nuisible à la paix entre les communautés, il est diviseur et en cela diabolique au sens étymologique du terme [diable, du grec diabolos : qui désunit, qui divise ; ou calomniateur, selon une autre traduction, ce qui revient au même]. D’ailleurs, les coutumiers Sèmè sont les premiers à affirmer que les sorciers œuvrent la nuit, et les Sunnites les derniers à publier qu’Al-^icha‘, la prière de la nuit, devrait en principe durer toute la nuit, ce qui ne fait pas pour autant d’eux des sorciers !

Les oppositions fondamentales entre l’animisme et les religions importées

L’animisme des Sèmè (comme toute croyance selon laquelle des animaux, des éléments naturels ou des objets abritent des puissances surnaturelles et reflètent l’idée d’une indispensable fusion de l’homme et du monde qui l’entoure), diffère essentiellement des religions importées par la proximité du monde invisible qu’elle considère (génies et mânes des ancêtres) et le patrimoine culturel immatériel qu’elle mobilise. La plupart des religions traditionnelles ouest-africaines partagent néanmoins l’idée d’un dieu créateur plus lointain. Pour les Sèmè, c’est Diòno, ou encore Diònosô ou Diossò, “le grand d’en haut”.

Pour ceux qui croient au Dieu des religions importées (et imposées), “Il” a placé l’homme au sommet de sa création, au-dessus des animaux et des éléments naturels, placés là pour lui, pour qu’il en fasse ce que bon lui semble.

Ces deux conceptions du rapport de l’homme à son environnement et au monde sont radicalement opposées, contradictoires et inconciliables. Pour l’animisme, il s’agit de fusion avec la nature ; pour les religions du livre, il s’agit de la dominer. Et pour l’islam sunnite qui détient la sunnà, la vérité, il s’agit aussi de suprématie sur les autres religions, d’hégémonie.

La tolérance a-t-elle des limites ?

La société sèmè a été, est et sera toujours accueillante à l’égard de l’étranger : il est sacré et doit être bien reçu s’il est de passage [Nombreuses sont les histoires dans lesquelles un mendiant, un lépreux, se révèle être un génie bienfaisant venu proposer un pacte aux humains]. S’il reste, il est d’autant mieux accepté s’il est utile à la communauté, et davantage s’il s’y intègre complètement. La question est de savoir où se situe la limite de la tolérance, si l’accueilli décide de jouer son propre jeu aux dépens des coutumes de la communauté qui l’accueille.

Par ailleurs, la société sèmè a été, jusqu’ici, tolérante aux idées religieuses des autres. Anne Fournier, chercheur qui travaille depuis plusieurs années sur les sites sacrés et la coutume chez les Sèmè, précise : « Les religions animistes savent comment inclure certaines nouveautés, notamment des fétiches. Tant que les nouveautés viennent de sociétés qui fonctionnent sur le même principe, et qui partagent à peu près le même socle de croyances, cela ne pose pas de problème. En accueillant les nouvelles religions, les Sèmè ne pouvaient s’attendre à les voir revendiquer ensuite une exclusivité qui ne fait pas partie de leur propre mode de pensée ».

Une autre question est de savoir où se situe la limite de la tolérance s’il ne s’agit pas d’un accueilli, mais d’un membre de la communauté qui ne joue plus le jeu de sa propre communauté, mais celui d’une religion importée pour générer autour de lui une communauté parallèle afin qu’elle le soutienne, et que soit accordé davantage de crédit à ses visées personnelles, aux dépens de sa communauté d’origine.

Les Sunnites prêchent la tolérance dans les statuts de leur mouvement national, mais les faits témoignent du contraire, la presse en a rempli des colonnes. Au niveau strictement local, en 2016 les Sunnites de la mosquée du quartier Kouarino ont voulu empêcher les fidèles de la mosquée shiite du quartier Sogo de fêter Mouloud, la naissance de Mahomet.

Plus subrepticement, comme c’est arrivé à Monsieur S…, enseignant, musulman shiite entré dans la mosquée sunnite du quartier Kouarino pour y prier, dès qu’il a été repéré comme non-sunnite [par les quelques poils qu’il a juste sous la lèvre inférieure, et sa façon de prier, les bras le long du corps], sans être chassé ouvertement il a été poussé, par chaque nouvel arrivant, jusqu’à se retrouver dehors !

Qu’est-ce qui rend le lieu investi par les Sunnites si important pour les Sèmè ?

Historiquement, c’est là où s’est très longtemps tenu le marché, ainsi que son fétiche qui en protège les activités et évite les troubles inhérents à toute concentration humaine ; quand le marché a été déplacé en centre-ville, son fétiche l’a suivi, laissant sur place trois autels auxquels les Sèmè coutumiers sacrifient en des occasions particulières. En l’an IV de la révolution, il avait été question d’y faire une auto-gare, en laissant accessible aux coutumiers la zone qui les concernait. Cette “sollicitude” à l’égard de la religion traditionnelle autochtone peut étonner, de la part de révolutionnaires décidés à balayer les forces “arriérées et rétrogrades” du pays. Ce qui étonne aujourd’hui, c’est que cette simple reconnaissance de la liberté “universelle” de culte est refusée aux Sèmè par des musulmans qui prétendent, par ailleurs, prêcher la tolérance. Cliquez ici pour lire la suite sur regions.lefaso.net

Jacques Zanga Dubus
ozdubus@gmail.com

[En ce qui concerne la culture locale, Anne Fournier, chercheur de l’IRD (Institut de Recherche pour le Développement) qui travaille depuis 2009 sur les sites sacrés et la tradition chez les Sèmè, nous a été d’une aide précieuse.]

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Vos commentaires

  • Le 16 juillet 2016 à 18:08, par Siddik En réponse à : Enquête à Orodara où deux visions du monde s’affrontent 2/2

    Dommage que le modérateur laisse passer de telle réflexion dont le principal objectif serait de conduire à un violent affrontement entre des frères.

  • Le 16 juillet 2016 à 19:54, par WHISKY En réponse à : Enquête à Orodara où deux visions du monde s’affrontent 2/2

    Il est temps pour tous les NON-MUSULMANS d’appliquer à l’islam et à ses adeptes sa propre version de tolérance et de cohabitation religieuse À la Mecque où l’islam est né, la tolérance de l’islam et de son dieu Allah interdit l’accès aux NON-MUSULMANS et à tout ce qui n’est pas MUSULMAN À Médine où le prophète de l’islam est mort et enterré la tolérance de l’islam interdit également l’accès aux NON-MUSULMANS et tout ce qui n’est pas MUSULMAN

  • Le 16 juillet 2016 à 22:44, par wedaga En réponse à : Enquête à Orodara où deux visions du monde s’affrontent 2/2

    M. Jacques ZANGA. Vous débutez très mal votre analyse. Si vous ne connaissez rien du Coran, ne commencez pas à vous attaquer à ceux que vous appelez "Protestants". La Bible n’est pas pour les protestants seulement mais la "Parole de Dieu" pour tous. Et ceux qui la partagent habituellement sont des chrétiens, je dirai des croyants.
    Aussi, votre analyse étend le conflit : vous introduisez votre écrit par ce que vous caractérisez de pensée ou dire des protestants : traiter les "religions traditionnelles" de Satan
    Pourquoi une telle introduction ? Les protestants sont-ils impliqués dans ce conflit ? Pourquoi ne pas introduire par le Coran (puisqu’il s’agit ici de mosquée) ou les musulmans ?
    Parce que vous savez certainement qu’ils ne toléreront pas votre analyse blasphématrice.
    Vous pensez pouvoir par ce genre d’écrit contribuer à la construction d’une paix ? Dommage, vous feriez mieux vous abstenir ! En temps de crise, le silence du sage est plus constructeur que la médiation de l’insensé. N’écrivez pas pour écrire, sinon que vous courez le ridicule, et au delà du ridicule, vous êtes un artisan de troubles.

  • Le 16 juillet 2016 à 23:27, par bush En réponse à : Enquête à Orodara où deux visions du monde s’affrontent 2/2

    Je suis convaincu d’une chose : si les sunnites reconnaissent d’autres prophètes, ils doivent en même temps comprendre que personne n’a le monopole de la vérité sur la connaissance de DIEU. MERCI POUR CET ÉCLAIRAGE CAR BEAUCOUP DE PERSONNES NE VEULENT PAS EVOQUER CETTE PROBLEMATIQUE DE L’HISTOIRE ET DE VERITE.

  • Le 17 juillet 2016 à 09:58, par SOME En réponse à : Enquête à Orodara où deux visions du monde s’affrontent 2/2

    M Dubus, ton article montre (entre autres) l’importance absolue des archives ; malheureusement en Afrique, nous avons négligé cet aspect, même par les intellectuels. Quand on voit des journalistes utiliser des enregistrements d’événements nationaux, les effacer pour enregistrer des dessins animés pour leurs enfants…. C’est dire ! Allez voir l’état des archives nationales ! Qui les fréquente même ? Aussi pourquoi la marque T a été effacée et par qui ? La corruption, l’égoïsme, l’irresponsabilité, etc. voila les vrais maux de nos cultures. Mais alors pourquoi la justice a-t-elle agi de cette sorte si partiale contre les seme ? Il est clair que cette affaire devait etre reglée depuis longtemps. L’ère compaore et l’influence du faiseur de roi de l’époque, M Djaguinaba Barro, ne peut pas être si éloignée que ca. De là à croire que c’est lui qui instrumentalise tout cela, et donc derrière le djihadisme ? Certains seraient prêts de l’insinuer. Il est clair que cette affaire de terrain n’est pas une simple affaire de terrain.

    Beaucoup accusent M Dubus de parti pris : c’est un parti pris légitime ; c’est même un devoir, pour moi. Ceux qui sont prompts a accuser sanas aucune réflexion quelconque, devraient aller lire les autres articles et aussi les commentaires additifs faits par M Dubus, avant d’accuser ce monsieur d’islamophobie ou autre. Il y en a qui sont tellement tarés qu’ils ne peuvent même pas comprendre les enjeux ici.

    Grosso modo, in fine, il s’agit de la place que nous réservons à nos cultures traditionnelles à l’étape actuelle de notre vie et de leur avenir. On parle de patrimoine immatériel : c’est quoi au fait ? Qu’en faisons-nous ? Voila la question de fond que pose M Dubus. Aujourd’hui tout le monde s’extasie devant la chine en oubliant (c’est surtout les africains qui l’oublient) que la chine est devenue ce qu’elle est en se fermant aux cultures occidentales et autres au travers de toute son histoire. Il est absolument hors de question que nos cultures se transforment en folklore pour touristes en mal de retour à cet essentiel qu’ils ont eux-mêmes éliminé.

    Savez vous-même d’où vient ce mot « fétiche » et ce qu’il veut dire ? Rien ! Il ne veut rien dire. Le mot « fétiche » du portugais « feticaos » qui signifie « objets » pour indiquer les représentations dans les religions africaines, lorsqu’ils ont débarqué en Afrique au 14e siècle et non rien compris (puisque eux chrétiens, ils détenaient la vérité : déjà, on y était). Or on oublie que Jésus avait posé la question a Ponce Pilate qui voulait le juger : « Qu’est-ce que la Vérité ? ». Et cette question avait tellement mis le représentant de l’empereur César dans un tel embarras qu’il voulait le libérer en disant qu’il n’a rien trouvé pour condamner cet homme Jésus. Mais les chefs religieux juifs intégristes ont menacé de dénoncer le gouverneur Ponce Pilate a l’empereur César s’il ne le condamnait pas. C’est ainsi que Ponce Pilate, pour avoir la paix, a livré Jésus à son sort pour qu’il soit crucifié : il s’en est lavé les mains (c’est de là que vient l’expression « Je m’en lave les mains »).

    Merci à M Dubus de ne pas s’en laver les mains. Nous devrions prendre exemple plutôt que de se lancer dans une histoire de tolérance, droit, d’islamophobie, etc. Allez en Arabie saoudite parler de votre religion, sans aborder même le fait de vouloir le pratiquer ouvertement, et vous verrez ce qui vous arrivera. L’islam africain était ouvert mais depuis que les sous sont arrivés, c’est le djihadisme borné. Dieu n’a jamais demandé cela ; c’est l’homme qui l’a mis sur le dos de dieu : christianisme, judaïsme, islam, c’est pareil. Que n’a-t-on pas fait au nom de dieu ? Pauvre Dieu ! Ce dieu là ; LEUR dieu à eux, je n’en veux pas. Dieu propose, mais n’impose pas : il a donné la liberté a l’homme et dieu lui-même ne peut plus la lui retirer. Commencez vous même par garder votre liberté de penser. Et votre pensée, c’est votre culture.
    SOME

  • Le 17 juillet 2016 à 16:05 En réponse à : Enquête à Orodara où deux visions du monde s’affrontent 2/2

    Bravo à M. SOME. Pour son analyse. Les religions sémitiques n’ont fait que nous diviser. Et mieux nous infantiliser. Elles sont arrivėes a nous faire admettre que les croyances de nos ancêtres sont démoniaques. Et comme nous manquons de personnalté, nous nous laissons tirer par le bout du nez. Piteux. Les traumatismes de l’esclavage et de la colonisation sont tenaces. Mais nos générations actuelles ne devraient avoir aucune excuse, pour avoir été à l’école et plus ou moins acquis une certaine instruction, différente de celle de nos aïeux. Qui se sont retrouvés un jour astreints à l’impot et aux travaux forcés. Et confrontes à deux nouvelles religions qui vous parlent d’un enfer et d’un paradis. Nos générations actuelles peuvent aller à la source du savoir. Et se rendre compte que toute religion, révélée ou pas, est intimement liée à la société au sein de laquelle elle a été révėlée. C’est du viol, que de contraindre un quidam à se convertir à une autre religion. Que de lui coller un prenom aux consonnances sémites, quand surtout nous avons des prénoms lestés de sens. Que de l’amener à adpter un certain style d’habillement aux antipodes de nos us. Que de le contraindre à enterrer ses défunts d’une manière totalement diffėrente. Que de lui interdire de célébrer les funérailles comme ses pères et grand-pères célébraient. Nous nėgres, burkinabė en l’occurence, sommes tellement bourrės de complexes. Essayez de vous procurer un cheveu naturel d’une représentante de la gent féminine adulte ! C’est une aventure ! Toutes nos femmes (et nos filles et nos mamans) refusent leur tignasse crépue et préfèrent s’encombrer la tête de mèches dans le meilleurs des cas, et dans le pire des cas de cheveux de cadavres de brésiliennes ou d’hindoues ! L’ennuie est que jusque là, la femme est et demeure le PIVOT du foyer. Et de la famille. Car c’est elle qui éduque. Il m’arrive personnellement de passer des nuits blanches. Nous ne pouvons pas nous développer dans la civilisation d’autrui. Alors que la notre est déjà en partie enterrée ! Sinon entièrement.

  • Le 17 juillet 2016 à 21:05, par Somsoré En réponse à : Enquête à Orodara où deux visions du monde s’affrontent 2/2

    Mr Jacques Zanga Dubus,

    Votre article est très dangereux en ce genre de situation. Vous prenez position dans votre analyse pire vous remontez sur l’histoire du Prophète (PS) et ses compagnons en essayant de vous aventurer dans une histoire que tu connait même pas.
    Il faut faire la paix !!!!

  • Le 18 juillet 2016 à 09:23 En réponse à : Enquête à Orodara où deux visions du monde s’affrontent 2/2

    Jugez les religions sur le comportement des leurs adeptes ; et le monde deviendra invivable. me le journaliste ne trouvera plus sa plume. Et il ne serait pas un trouble dans le monde entier sans que se soit la cause du journaliste. Journaliste=Diable.

  • Le 18 juillet 2016 à 10:13, par Dedegueba SANON En réponse à : Enquête à Orodara où deux visions du monde s’affrontent 2/2

    Moi je valide l’écrit. On ne peut pas tous être d’accord avec l’écrit, en vertu de la liberté d’opinion.
    Vis à vis d’un tel tel sujet, ceux qui "bottent en touche" sont plus dangereux que ceux qui disent ouvertement qu’ils sont pour ou contre.
    La vérité, lorsqu’elle est patente n’a pas de couleur, d’ethnie de région etc... Elle s’impose à tous. Sous prétexte que la "chose religieuse" est délicate, on laisse perdurer des dérives extrémistes qui accouchent d’un monstre, qu’il aurait fallu étouffer dès sa naissance.Tout ça parce qu’on eu peur dire dire NON.
    Dites- moi, comment deux individus peuvent- ils s’entendre sur un sujet, s’ils sont chacun convaincus d’avoir raison ? Alors soyons raisonnables en étant humbles en reconnaissant notre dimension humaine, donc susceptible à l’erreur, toute chose qui génère la tolérance source de cohabitation avec le prochain.
    Bravo pour cet écrit.

  • Le 18 juillet 2016 à 12:39, par Tie En réponse à : Enquête à Orodara où deux visions du monde s’affrontent 2/2

    La resolution de ce problème se trouve entre les mains des fils de la localité. Nous qui sommes nés dans les religions importées, que nous voulions ou pas, notre essence c’est notre culture. Population d’Orodara, le vivre ensemble est plus que jamais une réalité.
    Les religions importées sont comme la politique. Donc sachions raison gardée car l’africain, c’est sa culture. Ce phénomème d’acculturation se trouve dans toutes les localités du pays. Aujourd’hui, la jeunesse ignore beaucoup de choses du traditionnel et le moderniste a pris place en lieu et place du traditionnel. Avant l’arrivée de ces religions importées, comment l’homme avec grand "H" était formé pour assumer son rôle dans la société à laquelle il appartient. Femmes et Hommes étaient initiés et chacun respecte les ainés du clan ainsi que ses camardes d’âges. La paix règnait. On ne connaissait pas la pauvrété ou la richesse, ni le plus fort et le plus faible car le riche venait au secours du pauvre le plus fort au secours du faible, car chacun avait obligation de defendre son camarade en toute circonstance et surtout defendre l’honneur de tout le village. La parole donnée était sacrée et définitive. Mais aujourd’hui le fait de pietiner nos cultures, ce qui était inadmissible dans nos sociétés est devenu admissible. Aujourd’hui la parole donnée le matin est retirée le soir, parce que l’argent fait le larron. Du coup le principe coutumier vole en éclat. Fils du Burkina-Faso, faisons en sorte à garder notre dignité en respectant nos coutumes et que l’administration moderne et le politique en tiennent compte. Aussi les religieux doivent demander l’implantation de leur site loin des lieux où s’y tiennent les cultes coutumiers du village car quoi qu’on dise, nul ne peut et n’a le droit d’empêcher son existence (culte coutumier). Bien au contraire les derniers arrivés (religions importées) doivent respecter les premiers (animistes) et tout le monde vivra dans la paix et l’harmonie du village sera renforcée. Que ce soit la pratique des religions importées ou celle de l’animiste, c’est la foi qui compte et tous croient en Dieu sauf le chemin choisi pour l’adorer qui diffèrent mais nous sommes tous les enfants de Dieu.

  • Le 20 juillet 2016 à 13:48, par Jacques Zanga Dubus En réponse à : Enquête à Orodara où deux visions du monde s’affrontent 2/2

    « L’espace culturel des sème a changé depuis l’introduction des religions révélés, le passage du colon, l’arrivée d’autres groupes sociaux à Orodara, etc etc. »

    Internaute “Le Canon”, vous décrivez parfaitement les phénomènes acculturants, en oubliant cependant l’école, MAIS « l’arrivée d’autres groupes sociaux à Orodara » a toujours été souhaitée par les Sèmè. Ils ont toujours su que sans “l’étranger”, ils ne pourraient se développer. Relisez, dans la deuxième partie de l’enquête, les spécificités de la “puissance” nommé Djòmò tobrà Tiên : rassembleur, mais aussi qui invite les “étrangers” à venir s’installer sur le territoire sèmè, à la simple condition d’en respecter les coutumes, à défaut d’y adhérer.

    « Ce changement est pour de bon et plus rien ne sera comme avant ».

    Ce n’est pas si sûr. Il faut une réelle et grande volonté, de la détermination et peut-être de la foi, mais il est possible de “restaurer” une culture acéphale qui, comme la planète fait sa révolution, se renouvelle à chaque génération de 40 ans. Un électrochoc comme l’agression sunnite (véritable complot de génocide culturel) peut suffire à raviver la culture sèmè. Si cela advient, et que le résultat du complot engage un processus de re-culturation, il faudra remercier les sunnites !

    « J’aurais compris et accepté entièrement votre position si les sunnites étaient allés s’installer sur le terrain sans aviser une autorité habilitée comme on le constate souvent dans les non lotis »

    C’est pourtant ce qui s’est passé. Le mouvement sunnite a construit la mosquée en 1998 sur une réserve attribuée provisoirement à un autre mouvement, l’Alliance musulmane d’Afrique, pour la construction d’un orphelinat. Au cours du premier mandat (2000 – 2005), du maire Coulibaly Télé Antoine, Barro Diongwale Sidiki est allé à deux reprises voir le maire avec les papiers de l’Alliance musulmane d’Afrique qui aurait “vendu” au mouvement sunnite la réserve en question, mais sans aucun papier de vente, ni qu’aucune opération de transfert auprès des Domaines n’ait été entreprise. Le maire lui a répondu que les papiers présentés ne donnaient au mouvement sunnite aucun droit sur la réserve. Alors ils ont cherché à régulariser la situation, en montant un dossier pour la construction d’un collège d’enseignement technique et d’une mosquée. Est-ce que ce n’est pas forcer la main de l’administration que de construire d’abord, et de chercher à régulariser ensuite ?

    « Ils ont un titre de propriété ou au moins un début de titre de propriété ».

    Ils ont un arrêté provisoire d’attribution qui fait précisément mention des conditions à respecter dans des délais prescrits, sans le respect desquels le terrain peut être retiré. Ils ont aussi une attestation provisoire pour s’être acquitté des droits d’attribution. Mais ils n’ont pas de permis d’exploiter, et en conséquence, dans un respect strict de la loi (puisqu’ils en référent à la justice, donc au respect de la loi), ils ne devraient pas être autorisés à exploiter le site, et si les autorités administratives avaient fait respecter la loi, les Sunnites n’auraient pas ajouté un auvent, et la mosquée n’aurait pas été saccagée.

    « Dans tous les cas, l’administration a été informée d’une manière ou d’une autre de leur présence en ce lieu ».

    Quelle administration ? Celle contrôlée à l’époque par le Sunnite Djiguenaba Barro ? Combien de fois faudra-t-il répéter qu’aucune enquête de faisabilité n’a été réalisée lors de la procédure d’attribution, ce qui suffit pour entacher la procédure d’attribution. En outre, la construction d’une mosquée au Burkina Faso est soumise à l’approbation des chefs traditionnels et coutumiers, et de l’administration, et cette approbation n’a pas été demandée.
    La procédure d’attribution d’une réserve foncière comporte 9 points :
    1. Demande de l’intéressé ;
    2. Etude de faisabilité par les Domaines ;
    3. Lettre de mise à disposition, signée par le maire ;
    4. L’intéressé monte un dossier avec le receveur des Domaines ;
    5. Entrent en action d’autres services, le cadastre et la Direction de l’urbanisme, pour vérifier le bornage et calculer la superficie, pour que les droits puissent être calculés. Pendant ce temps, l’intéressé doit faire établir le plan architectural du projet.
    6. Émission d’un arrêté d’attribution provisoire, préparé par les Domaines, signé par le maire. Cet arrêté provisoire énonce toutes les conditions à remplir dans des délais prescrits. Le non-respect de ces conditions et/ou délais peut entraîner des pénalités, ou le retrait du terrain ;
    7. Notification par les Domaines du montant des droits d’attribution.
    8. Après s’être acquitté des droits, l’intéressé reçoit une attestation provisoire ;
    9. Enfin, quand les investissements prévus ont été réalisés dans les délais prescrits, et contrôlés par les Domaines, un permis d’exploiter peut être émis.

    L’étape 2 de cette procédure permet de vérifier si une réserve a un caractère coutumier ou non. Cette étape a été “sautée”. Pourquoi, sinon parce qu’il y a de la magouille dans cette histoire d’attribution ?

    « Aussi, les coutumiers qui se réveillent aujourd’hui pour revendiquer cet espace doivent s’en prendre aussi à eux-mêmes pour avoir laissé faire depuis des années ».

    Tout-à-fait, et comme l’a dit fort justement SOME dans un commentaire : « Ils ont “pêché” dès le départ par leur esprit de conciliation », esprit de conciliation qu’ils risquent fort de “réviser” désormais, après cette désolante histoire. Selon de nombreuses voix entendues, issues de la complexe chefferie sans chef, il n’y aura plus jamais de mosquée sunnite sur le territoire d’Orodara. Et qu’on note bien que c’est une information que je transmets, pas que j’impose ou que j’aurais insidieusement suggérée aux Sèmè, ce serait m’accorder une importance que je n’ai pas.

    « Vous trouverez dans des musées des objets sacrés censés être inamovibles »

    Vous semblez avoir lu les articles en diagonale. J’y ai cité Anne Fournier, chercheur à l’IRD qui étudie depuis des années sur les sites sacrés sèmè : « Il est généralement possible de déplacer rituellement au moins certains autels, chez les Sèmè comme ailleurs. Il s’agit cependant d’une procédure exceptionnelle qui nécessite l’accord de la puissance honorée à l’endroit considéré, et le paiement d’une amende rituelle qui peut être très coûteuse ». Le dièton, chef du village, nous a assuré quant à lui que si ces trois fétiches avaient pu être déplacés, ils l’auraient été, et les Sèmè n’auraient pas engagé autant de tractations à l’amiable pour les sauvegarder. Il y avait de l’amertume dans sa voix : le sentiment que l’échec d’une conciliation amiable – en fait une fin de non-recevoir, exprimée par le recours du mouvement sunnite à une procédure judiciaire – représentait pour lui un terrible gâchis.

    « Moi, je suis musulman. Les enseignements que j’ai reçus venant du prophète Muhammad (paix et salut d’Allah sur lui) m’interdisent d’insulter les croyances autre que la mienne ».

    Néanmoins, le verset 9 de la Sourate 61, dite Le rang, dit : C’est Lui qui a envoyé Son messager avec la guidée et la Religion de Vérité, pour la placer au-dessus de toute autre religion, en dépit de l’aversion des associateurs. N’ai-je pas raison de supposer que “ pour la placer au-dessus de toute autre religion” peut être interprété par certains comme “pour dominer toute autre religion”, voire “détruire toute autre religion” ?

    « Sachez qu’il n’y a pas plusieurs versions du Saint Coran ».

    En effet, il n’en reste qu’une, officielle, celle imposée par le Khalife Ousmane.

    « Si vous connaissiez l’histoire d’Ibrahim (Abraham, sur lui la paix d’Allah)), celle de Moussa (Moise, sur lui la paix d’Allah)), de Youssouf (Joseph, sur lui la paix d’Allah)) l’aversion que vous avez pour les religions révélées et particulièrement pour l’Islam diminuerait beaucoup ».

    Je connais davantage que vous ne le supposez, et cependant je connais bien peu, mais suffisamment sur les religions prétendument révélées pour les fuir comme des pestes.

    « Sachez que des pans entiers de l’histoire de l’Islam se sont déroulés en Afrique ».

    Tout-à-fait, et plus précisément dans la corne de l’Afrique : les trois religions dites révélées, ou du Livre (bien qu’ils soient nombreux, les trois religions confondues) ont leur source dans le Croissant fertile, qui va du Nil au Jourdain.

    « L’Islam n’est pas une religion étrangère à l’Afrique ».

    Stop ! Abraham, Moïse, Joseph, d’accord, et en Égypte au temps des pharaons, mais Muhammad, non. l’Arabie ne fait pas partie de l’Afrique, et l’islam est venu en Afrique par les conquêtes et le commerce, mais aussi le trafic d’esclaves.

    « Aucun musulman ne devrait soutenir que des coutumiers soient injustement dépossédés de leur lieu de culte ».

    Que le mouvement sunnite d’Orodara vous entende !

    « Aussi, aucun musulman ne devrait accepter que des sunnites soient déguerpis injustement parce qu’ils pratiquent une religion autre que celles des autochtones d’une localité ».

    Là, vous fabulez ! Aucun Sèmè ne reproche à qui que ce soit de pratiquer une autre religion que la sienne. Les Sèmè ont supposé, à tort, que les deux cultes pouvaient cohabiter, ce que les Sunnites refusent absolument, sinon il n’y aurait jamais eu de conflit, comme il n’y en n’a aucun avec les onze autres mosquées de la ville.

    « Apprenez de l’Islam à la bonne source »

    Y en aurait-il plusieurs ? La seule source de l’islam c’est le Coran officiel puisque les autres ont été détruits, et c’est à cette source-là que je vais puiser, quand nombre de musulmans, malheureusement illettrés et non arabophones, sont contraints de faire confiance à des “interprètes”, imams, marabouts ou charlatans trop souvent douteux, qui portent juste l’attirail théâtral qui en impose. Il est par ailleurs très intéressant de comparer les traductions du Coran en français, puisqu’elles sont multiples, et les “variantes” permettent d’apprendre beaucoup sur les arrière-pensées des uns et les autres. L’islam est la seule religion qui n’a aucun besoin d’intercesseur, et pourtant ils sont une multitude, et mettez-en deux d’obédience différente dans la même pièce, ils vont s’arracher les yeux !

    Conversation à distance entre l’internaute Le Canon et Jacques Zanga Dubus

    [le verset cité du Coran est extrait de la traduction française réalisée par les Sunnites]

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