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Panafricanisme : Elliot Percival Skinner, premier ambassadeur afro-américain en Haute-Volta

Publié le vendredi 10 juin 2016 à 03h18min

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Panafricanisme : Elliot Percival Skinner, premier ambassadeur afro-américain en Haute-Volta

Très peu de personnes connaissent aujourd’hui son histoire et l’image qu’il a incarnée dans la promotion du panafricanisme. Et pourtant, il fut le premier ambassadeur afro-américain en Haute-Volta, aujourd’hui Burkina Faso. Qui est cet anthropologue et diplomate dont l’intérêt pour les cultures africaines fascinait plus d’un ? Réponse dans une conférence animée ce jeudi 9 juin 2016 par le Dr Lazare Ki-Zerbo au sein de l’Université Ouaga 1 Pr Joseph Ki-Zerbo

Il est des hommes victimes de l’histoire et de l’amnésie des humains. Le Pr Elliott Percival Skinner est de ceux-là. Mais au Burkina Faso, son souvenir reste encore vivace dans la mémoire de ceux qui l’ont connu au cours de leur enfance, qui l’ont côtoyé à l’âge adulte et qui retiennent de lui, l’image d’un homme simple, humble, curieux et ouvert. Des qualités que certains disent retrouver en Tulinabo Mushingi, l’actuel ambassadeur des Etats-Unis d’Amérique au Burkina Faso. Skinner de par ses écrits et son engagement pour la cause des Noirs pourrait être une source d’inspiration pour la jeunesse, surtout estudiantine. D’où la tenue d’une conférence sur la vie de l’homme, conférence animée à l’Université de Ouagadougou qui porte, depuis peu, le nom d’un autre panafricaniste, le Pr Joseph Ki-Zerbo.

De la bataille d’Adoua

Parler du Pr Elliot Percival Skinner, c’est aussi faire un clin d’œil aux devanciers du mouvement panafricaniste. Et parler du mouvement panafricaniste, c’est faire un clin d’œil à l’Ethiopie et à la célèbre bataille d’Adoua à l’issue de laquelle l’empire éthiopien, dirigé par Menelik II, battit les forces italiennes à la fin du 19e siècle. Cette victoire d’un peuple africain sur une nation européenne a, selon Lazare Ki-Zerbo, impulsé le mouvement des panafricanistes. Et des universitaires tels que W.E.B Dubois, Cheick Anta Diop et Joseph Ki-Zerbo y ont joué un rôle important. Ceux-ci étaient convaincus que « la connaissance est un instrument de libération des peuples ».

Troublé par le syndrome de l’ « Etranger »

Né en 1924 à Trinité-et-Tobago, Elliott P. Skinner a grandi avec sa tante barbadienne qui était mariée à un portugais. Sa terre natale était selon le conférencier, un pôle de convergence des peuples et ressemblait à l’actuelle Côte d’Ivoire. Enfant, Skinner était donc sensible à toutes les cultures. A 18 ans, il se rend à New York aux Etats-Unis où il rejoint l’armée et s’engage dans la seconde guerre mondiale. Curieux, il s’intéresse à l’anthropologie mais de retour aux USA il rêve de devenir dentiste. Skinner est désillusionné par la suite et se rend compte que la question de « l’Etranger » est vivace. Et même aujourd’hui, Lazare Ki-Zerbo souligne que les pays africains n’ont pas encore réussi à dépasser ce syndrome de l’Etranger. D’où les actes de xénophobie un peu partout sur le continent et ailleurs.

« Fier de ses racines »

Le jeune Elliott Skinner oublie son rêve de dentiste, se consacre à l’anthropologie et s’intéresse peu à peu aux monarchies africaines et à l’empire des mossi en particulier. Entre octobre 1955 et janvier 1957, il séjourne en république de Haute-Volta. Il y reviendra mais cette fois en tant qu’ambassadeur en 1966 dans un contexte marqué par l’insurrection populaire qui a contraint le président Maurice Yaméogo à la démission. Elliot y restera pendant trois ans. Son court séjour au pays donna lieu à la publication de deux œuvres dont :
-  The Mossi of the Upper Volta : An analysis of the Political Development of a Sudanese People (1964) et
-  A Glorious Age in Africa : The Story of Three Great African Empires (1965)
Selon l’ambassadeur Tulinabo Mushingi, ces écrits et bien d’autres publications qui s’en sont suivies, sont la preuve que « Skinner était fier de ses racines africaines et engagé à faire avancer les relations entre l’Afrique et les USA ».

Immortaliser l’homme

Des souvenirs lointains de Skinner, des Burkinabè en ont. Le chef de Nobéré avait à peu près 7 ans quand il rencontra pour la première fois le diplomate américain. A l’entendre, Skinner était bien intégré à sa famille qui admirait son intelligence, son humilité, sa curiosité ; bref sa dimension humaine. Mme Kadidja Kiélo, elle, se rappelle bien le séjour de trois mois qu’elle passa avec Skinner aux Etats-Unis et le spectacle du mythique James Brown.

Susciter des vocations

Eliot P. Skinner ne doit pas être oublié et Moustapha Thiombiano, fondateur de la chaine de radios Horizon Fm, pense bien qu’il mérite une rue en son nom et même une association. Quant aux étudiants qui ont découvert, pour la plupart, l’histoire de cet afro-américain mort en 2007, ils pensent qu’il est enfin temps que l’Université Ouaga 1 Pr Joseph Ki-Zerbo ait un département en anthropologie. En attendant, le Pr Filiga Michel Sawadogo, ministre en charge de l’enseignement supérieur, a émis le vœu que cette conférence suscite des vocations auprès des jeunes étudiants pour la rédaction de mémoires et de thèses.

Herman Frédéric BASSOLE
Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 10 juin 2016 à 09:03, par lagitateur En réponse à : Panafricanisme : Elliot Percival Skinner, premier ambassadeur afro-américain en Haute-Volta

    Ce fut bien de rendre hommage à un homme aussi intègre et dévoué pour la cause des peuples noirs. Merci aux organisateurs de cette conférence pour m’avoir fait connaitre un tel homme. Je pense qu’il faut de plus en plus organiser des conférences du genre pour rappeler à la jeunesse l’oeuvre de grands hommes (comme Lumumba, N’Krumah, Mandela, Sankara, Cheich Anta Diop, Martin Luther King, Aimé Césaire, etc.) qui ont lutté pour notre cause et qui restent des exemples pour nous. Ces hommes-là peuvent être des repères pour une jeunesse désemparée qui a perdu toutes les références. Cela peut par exemple nous aider à réorienter la jeunesse d’aujourd’hui en clin à l’incivisme et aux actes de vandalisme de tout genre.
    Je propose à l’Union Africaine de créer la maison des héros africain (le nom importe peu) où seront produites, exposées et animées des œuvres et des émissions sur nos héros dont certains sont morts injustement pour avoir lutté pour la cause de leur contient, de leur peuple.

  • Le 10 juin 2016 à 10:11, par Iba Karim En réponse à : Panafricanisme : Elliot Percival Skinner, premier ambassadeur afro-américain en Haute-Volta

    Merci beaucoup au Dr Lazare ki-ZERBO qui par son sens panafricaniste nous fait découvrire un grand panafricaniste qu’est Elliot Percival Skinner. Je souhaite que des organisations comme le CEDA ou le PATHFDA que nos grands panafricains nous ont legué soient les relais des images des grands hommes Africains. Merci

  • Le 10 juin 2016 à 14:04, par changeons En réponse à : Panafricanisme : Elliot Percival Skinner, premier ambassadeur afro-américain en Haute-Volta

    Pourquoi ne pas dire tout simplement, Université Joseph Ki Zerbo de Ouagadougou et vouloir coûte que coûte garder Ouaga 1. Pauvreté d’esprit ? Au lieu de Ouaga 2, dites tout simplement Université de Gonsé et cela fera aussi une reconnaissance pour ce village. J’en a marre !!!!

  • Le 10 juin 2016 à 18:35 En réponse à : Panafricanisme : Elliot Percival Skinner, premier ambassadeur afro-américain en Haute-Volta

    "Université Ouaga 1" se comprend à la lumière de "Université Paris I"
    "Université Ouaga 2" est également en parallèle à "Université Paris II"
    Comprenne qui pourra !

  • Le 18 juin 2016 à 08:18, par Natty Rebel En réponse à : Panafricanisme : Elliot Percival Skinner, premier ambassadeur afro-américain en Haute-Volta

    Iba Karim, le Centre d’Etudes pour le Développement Africain (CEDA) et le réseau Partenariat Hommes Femmes pour le Développement Africain (PARTEHFDA) ont été des espaces d’intervention du panafricaniste Lazare. Il intervient ce 19 juin à 9 h dans l’émission "Racines" de Ouaga FM

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