« Nous avons enregistré son premier album dans un studio bricolé avec des pare-brises de camion », Camille Loumelle, coproducteur de Victor Démé
« Ses belles mélodies, ses bons conseils qui sont toujours difficiles à suivre » marqueront éternellement les fans de l’artiste, selon Camille Loumelle, coproducteur de Victor Démé. Programmateur musical à l’Institut français de Ouaga, Camille a été le révélateur de l’artiste décédé le 18 septembre 2015. Nous l’avons rencontré fin janvier 2016.
Lefaso.net : Comment avez-vous reçu la nouvelle de la mort de Victor Démé
C’était un moment très compliqué, d’une part, parce que c’était en plein milieu d’une situation politique très difficile (le putsch de Diendéré) et d’autre part, nous étions en train d’organiser la tournée de Baba Commandant en Europe, un des très proches musiciens de Victor. Nous étions très motivés et d’un coup la triste nouvelle est tombée. Je ne savais pas comment l’annoncer à l’équipe. Une nouvelle très lourde et plus forte que nos combats. Avec les mouvements, on ne pouvait pas partager la peine avec la famille, encore moins envoyer de l’argent, c’a été vraiment un moment très difficile.
Etiez-vous au courant de sa maladie ?
Victor avait quand même un rythme de vie très soutenu. Sa maladie a été diagnostiquée comme un palu par les équipes médicales qui n’étaient pas en grève. Ils n’ont, donc, diagnostiqué que le palu alors que c’était plus que ça. Ils lui ont prescrit des médicaments qui lui ont permis de tenir deux jours. Malheureusement il souffrait d’une hémorragie interne qui le rendait très faible. Le palu a été soigné. Et je pense que c’est l’hémorragie interne qui a eu raison de lui.
Vous avez été le révélateur de cet artiste au monde entier. Comment cela s’est passé ?
J’ai rencontré Victor avec Abdoulaye Sanou et Séraphin Sanou (le petit frère de Salaka Vinse) lors de la Semaine nationale de la culture (SNC) à Bobo-Dioulasso en 2003. En 2004, on s’est encore revu avec Roger Wango. On se verra pour la troisième fois à Ouaga et Abdoulaye Sanou alias Doudou m’a suggéré de faire une maquette pour son tonton Victor. Il m’a dit que je serai surpris. Nous nous sommes mis au travail avec comme résultat un titre extraordinaire avec de la guitare.
Au moment de le mixer, c’est devenu quelque chose de magique. Tout le monde était impressionné. Et c’était le premier album que nous avons enregistré avec des boites d’allumettes, trois micros, dans un studio qu’on avait bricolé avec des pare-brises de camions. C’a été vraiment quelque chose de très simple. Victor avait une naissance musicale. Et c’est en 2008 qu’il y a eu le gros déclic pour la scène internationale, avec le prix des auditeurs de la radio France inter.
Comment se fait-il qu’il ait été connu beaucoup plus au niveau international que national ?
C’est effectivement le paradoxe. Malheureusement, la plus belle musique n’est pas forcément la plus diffusée.
Qu’en est-il de l’album sur lequel il était avant son decès ?
C’est un album d’une douzaine de titres baptisé « Yafakè » ou « PARDON » en français. C’est sans doute le mot de la fin pour Victor. L’album est sorti le 27 novembre et nous sommes en train d’organiser la diffusion avec ses filles au niveau du Burkina. Victor est mort, mais sa musique demeure éternelle.
Que peux-t ’on retenir de Victor ?
Ses belles mélodies, ses bons conseils qui sont toujours difficiles à suivre. Et je suis très, très fier de lui. C’est grâce à lui que j’ai rencontré ma femme, et c’est grâce à moi qu’il a rencontré sa deuxième femme. Mon fils et son petit-fils portent le même prénom Fousséni.
Propos recueillis par Bassératou KINDO
Lefaso.net
Vos commentaires
1. Le 8 juin 2016 à 17:44, par l’errant En réponse à : « Nous avons enregistré son premier album dans un studio bricolé avec des pare-brises de camion », Camille Loumelle, coproducteur de Victor Démé
Merci !
Merci d’avoir sorti ce géant des cabarets. Cherchez encore vous en trouverez. Au Burkina, les vrais artistes ne sont pas sur la scène ! RIP Victor.
2. Le 8 juin 2016 à 18:08, par Time Will Tell En réponse à : « Nous avons enregistré son premier album dans un studio bricolé avec des pare-brises de camion », Camille Loumelle, coproducteur de Victor Démé
Bel article malheureusement trop court. des questions sur le bref parcours (les succès en europe, les grands souvenir...) nous permettrons de garder bcp de choses de l’artiste. boites d’allumette en enregistrement c’est quoi ? rebondir sur certains propos allait nous faire mieux comprendre.
3. Le 9 juin 2016 à 08:17, par Ana En réponse à : « Nous avons enregistré son premier album dans un studio bricolé avec des pare-brises de camion », Camille Loumelle, coproducteur de Victor Démé
Merci pour l’article.
c’était un grand artiste..
4. Le 9 juin 2016 à 13:01, par Innocent En réponse à : « Nous avons enregistré son premier album dans un studio bricolé avec des pare-brises de camion », Camille Loumelle, coproducteur de Victor Démé
Bonjour
Une réelle biographie de l’homme par ceux qui l’ont connu depuis ces débuts nous permettra de mieux le connaitre et pourquoi pas inspirer des jeunes ou même des cinéastes.
Que la terre lui soit légère. Amen
5. Le 9 juin 2016 à 22:25 En réponse à : « Nous avons enregistré son premier album dans un studio bricolé avec des pare-brises de camion », Camille Loumelle, coproducteur de Victor Démé
RIP l’artiste. Je me souviens quand j’etais tout petit qu’il venait jouer la guitare sous les manguiers dans le quartier Dogona a Bobo, a l’epoque non loti.Vers 1986, je me souviens qu’ila remporté un prix a un concours de musique organisé par Radio Bobo. Il s’appelait Deme Saibou. Je n’ai plus entendu parler de ce Monsieur jusqu’en 2009 ou a bord d’un vol d’Air France, je decouvre qu’il etait sur la selection qu’on nous proposait aux cotès des geants de la Musique- Je compris alors que "le sans abri musicien" avait fait du chemin. A une emission radio, il a raconté une histoire qui m’a emu : au decès de sa maman, il lui fut refuse de monter a bord du corbillard pour accompagner sa mêre a sa derniere demeure parce que entre tepmps, il avait change de religion. J’espere que le Fasonet nous reviendra avec un article plus complet sur ce genie de la melodie. Encore une fois, RIP.
6. Le 10 juin 2016 à 07:51, par Ousmane SAWADOGO En réponse à : « Nous avons enregistré son premier album dans un studio bricolé avec des pare-brises de camion », Camille Loumelle, coproducteur de Victor Démé
Ça fait vraiment plaisir de lire cet article si bref et si touchant sur les débuts de Victor DEME. L’artiste savait que j’étais son fan ; et, la seule fois que nous avons pu échanger lui et moi, c’était au téléphone. Ce jour là, on a bien rigolé au téléphone ; il m’a prodigué des conseils et fais des bénédictions. Ce jour là, j’étais aux anges ! Ce jour, je n’oublierai jamais ! A Dieu l’artiste, A Dieu. RIP.