Quelque part en Afrique, et non loin de chez nous, lorsque les animaux ont soudainement péri personne n’a su pourquoi. Ensuite, ce sont les enfants qui ont été les victimes. Puis les mères ont donné naissance à des enfants mort-nés, malformés, et les tout-petits ne parlaient plus.
Certains affirmaient que les victimes de ces affections mystérieuses habitaient des foyers « maudits » et d’autres disaient que les familles elles-mêmes étaient maudites.

Mais lorsque les docteurs ont réalisé une série d’examens sur les 18 enfants morts, ils ont alors découvert la vérité : les enfants, tous âgés de moins de cinq ans, avaient été intoxiqués au plomb (source).
Des années durant, le recyclage non réglementé de batteries de voitures a causé la fuite de grandes quantités de plomb dans les sols, contaminant la terre autour des habitations.

Lorsque le prix de plomb est monté en flèche cinq années durant, les résidents populations se sont mis à extraire le précieux métal du sol, balayant de petits nuages de poussière mortels chargés de minuscules particules de plomb dans l’air.
Le plomb est une substance toxique qui s’accumule dans l’organisme et a une incidence sur de multiples systèmes organiques. Il est particulièrement nocif pour les jeunes enfants.

L’OMS classe le plomb parmi les 10 produits chimiques gravement préoccupants pour la santé publique qui appellent une action des États Membres pour protéger la santé des travailleurs, des enfants et des femmes en âge de procréer.
Inhalées ou ingérées, ces minuscules particules de plomb sont mortelles. Environ 143 000 personnes meurent chaque année d’intoxication au plomb.
Une fois que le plomb pénètre dans l’organisme, il peut atteindre le cerveau, les reins et le foie. Il peut se concentrer dans les dents et les os, et atteindre des niveaux de concentration de plus en plus dangereux.

Même de faibles niveaux de contamination au plomb laissent des cicatrices à vie, en particulier pour les enfants, dont l’avenir peut être compromis par des problèmes d’élocution, des difficultés d’apprentissages, des dommages cérébraux, l’anémie et des comportements anti-sociaux.

L’exposition au plomb contribue à environ 600 000 nouveaux cas de déficience mentale chez les enfants chaque année. En plus de gâcher l’avenir de ces enfants, les pertes économiques sont énormes : l’exposition au plomb, en causant une baisse du QI chez les enfants, entraîne une perte 977 milliards de dollars par an dans les pays à faible et moyens revenus.

Ces chiffres et tragédies choquantes, comme l’intoxication au plomb massive survenue, soulignent la nécessité d’agir pour mettre fin à une des pratiques les plus dévastatrices au monde : le recyclage non réglementé des batteries au plomb acide.
Chaque véhicule dans le monde est doté d’une de ces batteries qui représentent plus de 80 % de la pollution mondiale au plomb. Etant donné l’augmentation rapide de l’utilisation des véhicules dans les pays en développement, la quantité de plomb présente dans l’environnement ne peut qu’augmenter.

Bien que le recyclage du plomb contenu dans ces batteries usagées puisse représenter un revenu vital pour ces familles, en particulier dans les pays en développement, le recyclage et la fonte du plomb se font dans des conditions insalubres et dangereuses : parfois au sein du foyer, parfois à l’aide d’une hache pour ouvrir les batteries en deux. Ces pratiques laissent échapper de grande quantités de plomb dans l’environnement et les conséquences pour les écosystèmes et la santé sont dévastatrices.

De manière encourageante et volontariste, la communauté internationale a d’ores et déjà prouvé sa volonté de mettre fin à la pollution au plomb. Aujourd’hui, seulement 3 pays au monde utilisent encore du carburant au plomb, la principale source d’exposition humaine à la substance toxique.

Des réussites similaires ont été enregistrées avec le plomb dans la peinture : 59 pays ont désormais réglementé son usage avec l’aide de l’Alliance mondiale pour l’élimination de la peinture au plomb, une organisation créée par le Programme des Nations unies pour l’environnement et l’Organisation mondiale de la santé.
Nous savons que lorsque la communauté internationale agit de manière concertée, elle est capable de franchir des obstacles apparemment insurmontables. Nous savons également ce qui doit être fait pour contrer cette menace insidieuse, qui détruit des vies, compromet l’avenir des enfants et endommage les écosystèmes.

Nous pouvons commencer par améliorer la qualité des batteries au plomb et par là même réduire le besoin en recyclage. Nous pouvons aussi recourir à des technologies de meilleure qualité afin d’éviter que le plomb soit fondu à deux reprises pour pouvoir être réutilisé. Nous pouvons également insister pour obtenir de meilleures réglementations des secteurs de la fabrication et du recyclage du plomb. Nous pouvons enfin encourager nos gouvernements à mettre en œuvre des programmes de collecte à l’échelle nationale afin de réduire les quantités de plomb fondues et vendues par les ferrailleurs dans le secteur informel.

Si nous parvenons à mobiliser la communauté internationale pour mettre ces mesures en œuvre, nous aurons de bien meilleures chances d’atteindre certains des objectifs de développement durable énoncés dans le programme de développement à l’horizon 2030 à savoir, le droit à une vie saine, le droit à des opportunités d’apprentissage tout au long de la vie et le droit de vivre dans des villes sûres tout en protégeant les écosystèmes vitaux.

C’est pour cette raison que le Burkina Faso déposera un projet de résolution lors de la prochaine Assemblée des Nations Unies pour l’environnement (UNEA) demandant au PNUE de travailler en collaboration avec les gouvernements et d’autres parties prenantes afin d’aider les pays à moyens et faibles revenus à moderniser l’industrie des batteries au plomb.

Il est crucial que les pays du monde nouent un partenariat avec l’UNEA, l’organe de prise de décision sur l’environnement le plus puissant au monde avec comme opportunité la possibilité d’élaborer des programmes et des politiques encourageant un recyclage des batteries au plomb de façon respectueuse vis à vis de l’environnement.

Les enjeux sont grands. Si nous n’agissons pas maintenant, nous continuerons à compromettre notre planète Terre, l’avenir de nos enfants, la capacité de nos économies et la santé de nos citoyens. Si nous ne disposons pas de l’antidote, nous ne pouvons pas continuer à nous intoxiquer.

NB : La plupart des chiffres proviennent du site web de l’OMS