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« Tant que le monde rural ne sera pas impliqué dans les politiques agricoles … »

Publié le mercredi 9 décembre 2015 à 23h15min

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 « Tant que le monde rural ne sera pas impliqué dans les politiques agricoles … »

En prélude à l’élection présidentielle, le Réseau des organisations paysannes et syndicales agricoles (ROPSA) a organisé une audience foraine avec les différents candidats. Dans cette interview, le président du ROPSA, Adama Ouédraogo, revient sur les objectifs de cette activité et dévoile les attentes du monde rural vis-à-vis du nouveau président.

Journaliste : Pouvez-vous nous présenter votre structure ?
Adama Ouédraogo (A.O.) : Le Réseau des organisations paysannes et syndicales agricoles (ROPSA) est né à partir des résultats d’une étude sur les organisations paysannes au Burkina. Cette étude a porté sur les forces et faiblesses des organisations paysannes et surtout leur mode de gouvernance. C’est à partir de cette étude que nous avons compris qu’il faut que les agriculteurs, éleveurs, forestiers se mettent ensemble pour travailler, pour mieux défendre leurs intérêts. C’est dans ce cadre que nous avons mené des activités, notamment en rapport à la loi d’orientation agro-sylvo-pastorale que le Conseil national de Transition a votée. Le réseau regroupe 42 organisations et nous avons signé une Charte pour mener le plaidoyer auprès des autorités, mais aussi auprès de nos collègues producteurs.

Vous avez organisé le 26 novembre dernier, une audience foraine avec tous les candidats à l’élection présidentielle. De quoi a-t-il été question ?
L’audience foraine s’inscrivait dans le cadre du programme de plaidoyer. L’objectif était de connaitre les programmes de société des différents candidats. Ensuite, il s’agissait de les amener à prendre en compte les préoccupations des agriculteurs, si toutefois, dans leurs programmes de société, ces questions n’apparaissent pas. Avant la date des audiences, nous avons envoyé un questionnaire comportant 14 questions, liées à des thèmes spécifiques au monde paysan. Ces questions portent, entre autres, sur l’accès et la maitrise de l’eau, aux intrants agricoles, la protection et la promotion des produits locaux, l’accaparement des terres, la promotion de l’agriculture urbaine et périurbaine.

Un bilan de cette audience ?
Nous avons été très satisfaits. Satisfaits, parce que nous avons invité tous les 14 candidats à l’élection présidentielle. Les candidats qui ont un intérêt pour le monde rural ont répondu favorablement à notre invitation. Il s’agit des candidats Tahirou Barry du Parti de la renaissance nationale (PAREN), Zéphirin Diabré de l’Union pour le progrès et le changement (UPC), Roch Marc Christian Kaboré du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) et Adama Kanazoé de l’Alliance des jeunes pour l’indépendance et la république (AJIR). L’agriculture occupe plus de 86% de la population. Cette couche constitue une véritable force pour notre démocratie. Je profite féliciter Roch Marc Christian Kaboré pour son élection, il fait la fierté du monde paysan et du Burkina.

Justement, quelles sont vos attentes vis-à-vis du nouveau président ?
Aujourd’hui, les besoins du monde rural sont énormes. Ce qui a poussé les gens à s’insurger les 30 et 31 octobre 2014, c’est la vie chère. La cherté de la vie se résume au problème d’alimentation, d’abord. Tant que le président élu ne prend pas en compte certaines préoccupations du monde rural, il ne pourra pas résoudre le problème de la vie chère. Pour nous, il faut que les agriculteurs aient accès aux intrants agricoles pour multiplier la production nationale. Cela va aussi diminuer le coût de la vie. Les agriculteurs doivent également accéder aux bons crédits. Je dis bons crédits, parce que ceux octroyés aujourd’hui aux paysans, aux éleveurs ne sont pas adaptés. Il faut des crédits de longue durée et de moindre taux d’intérêt. Je me réjouis déjà d’entendre qu’il y a un gouvernement populaire qui sera mis en place, parce que le président élu doit travailler avec toute la classe politique.

Il nous faut un co-projet de société, pour des questions de complémentarité, afin de résoudre les problèmes du Burkina. Il faudra qu’on résolve aussi la question fondamentale de la terre. L’un des problèmes du monde paysan, c’est l’accaparement des sols. Il y a également le problème de la participation des agriculteurs à l’élaboration, à la négociation et à la mise en œuvre des politiques agricoles. Tant qu’il n’y aura pas cette implication, il n’y aura pas de véritable développement. Les chambres régionales d’agriculture qui représentent le monde paysan ne sont pratiquement pas financées. On avait promis, à la mise en place de ces structures, 300 millions de F CFA par an pour leur fonctionnement, mais rien n’est fait. Ce qu’elles reçoivent est très minime. Même la somme promise ne suffisait pas pour le développement et l’encadrement des agriculteurs et éleveurs. Si on pense qu’on peut développer l’agriculture, sans les acteurs eux-mêmes, on se flatte, il y aura toujours problème. En plus de ces difficultés, on doit ajouter la maitrise de l’eau. Il faut de petits ouvrages de retenues répartis dans tout le pays. Le Burkina a aussi un problème de transformation, de promotion et de protection de ces produits locaux. L’exemple de la SN SOSUCO est patent en ce sens. Parfois, on a du sucre dans les magasins et on se permet de donner des autorisations pour importer du sucre. Il faut donc des mesures pour protéger notre production nationale. En plus de la protection, il faut que les burkinabé consomment ce que nous produisons.

Comment avez-vous vécu la journée du 29 novembre, jour des élections couplées ?

J’étais très fier, parce qu’on ne s’attendait pas à cela. Les élections ont été repoussées à plusieurs reprises. Malgré tout, il y a un engouement de la part des agriculteurs en particulier, et de toute la population en général, qui ont pu se rendre dans les différents bureaux de vote pour élire leur candidat.

Interview réalisée par Djakaridia SIRIBIE

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Vos commentaires

  • Le 10 décembre 2015 à 04:12, par Romuald P. SAWADOGO En réponse à : « Tant que le monde rural ne sera pas impliqué dans les politiques agricoles … »

    Félicitations pour ces interpellations à prendre en compte les préoccupations du monde paysan.

  • Le 10 décembre 2015 à 09:07, par yabsoré En réponse à : « Tant que le monde rural ne sera pas impliqué dans les politiques agricoles … »

    " Je me réjouis déjà d’entendre qu’il y a un gouvernement populaire qui sera mis en place, parce que le président élu doit travailler avec toute la classe politique."
    Un gouvernement populaire ne signifie pas, ne signifie pas travailler avec toute la classe politique. nous travaillons pour avoir un gouvernement responsable devant tout le monde , dans le cas contraire , qu’il soir sanctionné par l’alternance soit au niveau interne du parti ou groupe au pouvoir soit par une alternative qui prenne effective en compte les aspirations du monde rural

  • Le 10 décembre 2015 à 09:27, par yabsoré En réponse à : « Tant que le monde rural ne sera pas impliqué dans les politiques agricoles … »

    "Le Burkina a aussi un problème de transformation, de promotion et de protection de ces produits locaux".
    le problème burkinabé réside plus dans l’ absence d’une culture du nationalisme chez les burkinabè eux mêmes. on transforme les produits nationaux pour répondre aux besoins exprimés. il nous faut changer de mentalité pour répondre au mot d’ordre du CILSS : produisez et consommez sahélien dont la transposition au niveau national donne consommons ce que nous produisons et produisons ce que nous consommons. Kouka Denis,ingénieur de 3é agrométéo de la 3è promotion, formé à l’agrhymet , une l’école du CILSS pour la prise en compte de l’information météorologique pour l’accroissement de la production du monde rural, a dit avoir contribué au formatage du mot d’ordre sous régional.

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