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Les enjeux de la cop 21 pour le Burkina Faso : note contributive de la commission du droit de l’environnement de l’UICN/Burkina

Publié le mercredi 9 décembre 2015 à 19h17min

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Les enjeux de la cop 21 pour le Burkina Faso : note contributive de la commission du droit de l’environnement de l’UICN/Burkina

A propos de l’UICN et de la CDE/UICN/BF

L’UICN, l’Union internationale pour la conservation de la nature est la plus grande et la plus ancienne des organisations internationales environnementales, Elle contribue à trouver des solutions pragmatiques aux défis les plus pressants en matière d’environnement et de développement dans le monde. À travers son travail, l’UICN s’efforce de valoriser et de conserver la nature, de garantir une gestion efficace et équitable de son utilisation, et de mettre en place des solutions basées sur la nature pour relever les défis mondiaux relatifs au climat, à l’alimentation, et au développement. L’UICN est soutenue dans son action par des experts bénévoles réunis dans des commissions spécialisées dont la Commission du Droit de l’Environnement qui est composée de membres qui doivent aider l’UICN dans la promotion et le renforcement des lois et des politiques de l’environnement, la surveillance des législations nationales et régionales ainsi que les affaires légales émergentes concernant l’environnement.
A l’occasion de la COP 21, la Commission du Droit de l’Environnement de l’UICN/Burkina propose une esquisse sur les enjeux de cette réunion pour le Burkina Faso. Cette contribution ne reflète pas les positions officielles de l’UICN mais des opinions scientifiques émises par la Commission.

La forte concentration des gaz à effet de serre - notamment le dioxyde de carbone, le méthane, l’oxyde nitreux et les gaz fluorés - dans l’atmosphère entrainent le dérèglement climatique, et compromettent dangereusement l’existence des populations et rendent précaires leurs systèmes de production. C’est le phénomène des changements climatiques qui sont définis comme « des changements de climat qui sont attribués directement ou indirectement à une activité humaine altérant la composition de l’atmosphère mondiale et qui viennent s’ajouter à la variabilité naturelle du climat observée au cours de périodes comparables ». Ces changements engendrent des conséquences dramatiques dont la perte de la diversité biologique, les sècheresses récurrentes, les inondations et les évènements climatiques extrêmes (tsunami, ouragan, tempêtes), la contingence des rendements agricoles et des ressources en eau, l’exacerbation des vulnérabilités et la compétition accrue quant à l’accès aux ressources la virulence des germes et la recrudescence des maladies, la perturbation du métabolisme
Pour faire face à cette affection du système climatique par les activités humaines, les Etats ont adopté, à New York (Etats-Unis) le 9 mai 1992, la Convention-Cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) qui s’est fixée pour objectif de stabiliser les concentrations des gaz à effet de serre dans l’atmosphère afin d’empêcher toute perturbation du système climatique, des écosystèmes et de la production alimentaire. Toutefois, la CCNUCC ne prévoit pas d’objectifs de réduction quantifiés, ni de délai de réduction.
En 1995, la 1ère Conférence des Parties (COP) à la CCNUCC a établi le Groupe Spécial sur le Mandat de Berlin pour la réalisation d’un accord sur de nouvelles mesures en faveur de la lutte contre les changements climatiques. C’est dans cette dynamique que le 11 décembre 1997 à Kyoto (Japon), un Protocole relevant de la CCNUCC a été adopté. Celui-ci engage les pays industrialisés et les pays en transition vers une économie de marché, à réaliser des objectifs quantifiés de décroissement de leurs émissions de gaz à effet de serre entre 2008 et 2012. Plus spécifiquement, les pays développés ont été assignés à réduire d’environ 5,2% leurs émissions de gaz à effet de serre, entre 2008 et 2012, par rapport au niveau de 1990. Toutefois, le Protocole de Kyoto n’a qu’une durée d’application limitée et doit donc être négocié périodiquement.
La COP, à travers ses différentes sessions, s’est attelé à cette tâche ardue qui demeure d’actualité à l’orée du Sommet de Paris sur le climat. Ainsi, de Bali (COP 13, 2007) à Lima (COP 20, 2014) en passant par Poznan (COP 14, 2008), Copenhague (COP 15, 2009), Cancun (COP 16, 2010), Durban (COP 17, 2011), Doha (COP 18, 2012), Varsovie (COP 19, 2013) et Lima (COP 20, 2014), les Etats Parties à la CCNUCC ont à chaque fois réaffirmé leur volonté de combattre les changements climatiques même si les négociations ont de la peine à aboutir.
La COP 21 apparaît ainsi comme un défi à relever, au regard des enjeux qui s’y dessinent et qui vont assurément déterminer et impacter la trajectoire de la construction de la société de demain, que nous voulons pour nous-mêmes et pour les générations futures. La conclusion d’un accord contraignant et la mobilisation des fonds aux fins de l’atténuation et de l’adaptation aux changements climatiques sont au cœur des enjeux que revêt cette Conférence pour le Burkina Faso.

1. La conclusion d’un accord universel juridiquement contraignant sur le climat
Lors de la 16ème COP, les Etats Parties ont adopté de nouvelles institutions et de nouveaux processus à savoir le Comité de l’adaptation, le Mécanisme technologique constitué du Comité exécutif de la technologie, du Centre et Réseau des technologies climatiques et du Fonds vert pour le climat (FVC). Les Etats Parties ont surtout établi, lors de la 17ème COP, une 2ème période d’engagement au titre du Protocole de Kyoto (2013 – 2020) et mis en place le Groupe de travail Ad ’hoc sur la plateforme de Durban (ADP) avec pour mandat « l’élaboration d’un protocole, ou d’un autre instrument juridique convenu ayant force de loi au titre de la Convention, et applicable à toutes les Parties ». Cette Plateforme offre aujourd’hui des chances pour aller vers la signature d’un Accord global, inclusif et ambitieux à la COP 21.
La COP 15 est celle qui a subi le plus gros échec tant les espérances étaient grandes pour la conclusion d’un accord international sur le climat qui succéderait au Protocole de Kyoto. Depuis cet échec, les progrès accomplis pour maintenir le réchauffement climatique en deçà de 2°C – suivant les recommandations du Groupe Intergouvernemental d’Experts sur l’Evolution du Climat - d’ici la fin du siècle ont été insignifiants. Malgré le consensus obtenu à Lima lors de la COP 20, aucune nouvelle obligation n’a été fixée pour les États en termes de réduction des gaz à effet de serre. Un des enjeux majeurs de la 21èmeConférence, qui se déroule à Paris, sera ainsi de parvenir à un accord contraignant et universel afin de maintenir le réchauffement mondial en deçà de 2° C tel que préconisé par le GIEC. Cet objectif est très ambitieux. Certes, toutes les parties s’accordent, notamment sous l’influence des rapports établis par la communauté scientifique, sur la nécessité de parvenir à un tel accord. Mais plusieurs obstacles rendent les négociations particulièrement difficiles. On peut ainsi mentionner : la volonté de préserver les intérêts nationaux des États négociateurs, la disparité des niveaux de développement entre ces mêmes États, ou encore le décalage entre la culture de l’immédiateté qui caractérise l’action politique, rythmée par les cycles électoraux, et les exigences du long terme, qui doivent commander la gestion des changements environnementaux et climatiques.

2. La mobilisation des fonds pour le financement du climat et les enjeux connexes
Le financement du climat constitue l’autre enjeu majeur que représente la COP 21 pour le Burkina Faso. Institué par le biais du Fonds Vert sur le Climat (FVC), il devrait permettre de :
-  financer la recherche, pour avoir une meilleure perception des changements climatiques et son impact ;
-  adapter au mieux les infrastructures ;
-  aider les populations à mieux gérer les risques à venir ;
-  encourager des actions au niveau local pour réduire les risques des changements Climatiques ;
-  financer de nouvelles technologies ainsi que des infrastructures pour réduire les émissions de GES.
La COP 20 qui s’est tenue à Lima, a proposé la mobilisation de 10,2 Milliards $ US et demandé d’accélérer la mise en fonction des guichets du fonds du secteur privé, de l’adaptation et de l’atténuation et de veiller à garantir des ressources pour le renforcement des capacités.
Le FVC doit prendre en compte les besoins des pays en développement avec une répartition équilibrée entre l’adaptation et l’atténuation. Les préoccupations du Burkina Faso sont orientées autour des questions liées à l’adaptation, au transfert de technologie, au renforcement des capacités et au financement pour faire face aux impacts des changements climatiques. Le pays entend bénéficier de ce financement à travers les projets initiés – ou à initier - dans le cadre du Plan National d’Adaptation et la Contribution pour le climat prévue déterminée au niveau national (INDC) pour le renforcement des capacités techniques, humaines et institutionnelles, les formations académiques et la recherche, les programmes de fertilité des sols et les programmes de résilience climatique.
Par ailleurs, dans la mesure où les pays africains - dont le Burkina Faso - sont les plus affectés par le dérèglement climatique malgré leur faible contribution à l’émission des gaz à effet de serre, ils militent pour le respect du principe des responsabilités communes mais différenciées, étant donné que les pays industrialisés sont en grande partie responsables des changements climatiques actuelles et qu’ils disposent des ressources financières nécessaires pour alimenter le FVC. Les pays africains sont surtout favorables à la priorisation de la responsabilité historique des pays industrialisés dans le dérèglement climatique, face à la problématique de la responsabilité qui incomberait aux pays émergents.
Le BF doit œuvrer, à travers le Groupe Africain et le G77 + la Chine, pour l’adoption d’un accord qui succèderait au Protocole de Kyoto pour le maintien du réchauffement climatique en deçà de 2°C d’ici la fin du siècle, le financement de la résilience aux changements climatiques en Afrique et le transfert de savoir-faire et de technologies écologiquement rationnels. Dans tous les cas, les bonnes pratiques en matière de gouvernance dans les opérations d’exécution des projets qui seront financés dans le cadre du FVC s’avèrent primordiales pour le Burkina Faso.

Pour la Commission du Droit de l’Environnement de l’UICN/Burkina,

Habib Ahmed DJIGA
Président
Expert Juriste/Chercheur environnementaliste
bourguy@gmail.com

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