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Barrage de Samendéni : Le cri du cœur des populations affectées

Publié le mercredi 28 octobre 2015 à 23h04min

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           Barrage de Samendéni : Le cri du cœur des populations affectées

Cela fait bientôt un an que nous populations affectées par la réalisation des infrastructures du barrage de Samendéni avons choisi de fédérer nos énergies au sein d’un Cadre de Concertation afin de faire valoir nos droits légaux et légitimes dans le processus de délocalisation et d’indemnisation conduit par la Coordination du PDIS. Un an durant lequel nous avons tenté de manière responsable d’alerter l’opinion nationale burkinabè sur le triste sort des huit mille (8 000) ménages qui constituent les dix sept (17) villages affectés directement et indirectement par la construction d’un barrage qui paradoxalement devrait les sortir de la pauvreté.

Cependant, la dérive de la Coordination du PDIS par rapport aux objectifs qui lui étaient assignés conduit inéluctablement de nos jours nos populations dans une situation de précarité sinon de misère qui pourrait engendrer des conséquences socioculturelles et économiques graves dans toute la zone de réalisation du barrage de Samendéni.
Comment comprendre qu’un projet d’Etat destiné à créer de la richesse, des emplois et lutter contre la pauvreté en milieu rural puisse s’exécuter en méprisant les aspirations socioculturelles et économiques des populations concernées dans un processus de délocalisation et d’indemnisation entaché d’irrégularités gravissimes ?
Pourquoi l’Unité de Coordination du Projet Samendéni qui conduit depuis plus de sept (7) ans le processus de délocalisation et de réinstallation des populations affectées par le barrage n’est jusque- là pas parvenue à délocaliser et à réinstaller ne serait- ce qu’un seul village dans des conditions minimums malgré les sommes colossales débloquées à cet effet sur le compte des contribuables burkinabè ? Un projet de développement socioéconomique d’envergure nationale qui a suscité autant d’espoir pour la lutte contre la pauvreté en milieu rural, doit- il contribuer à propager la misère et l’anxiété au sein des populations bénéficiaires ?
Voilà donc autant de questionnements et d’inquiétudes qui ont suscité l’indignation générale de nous populations affectées par la construction du barrage dont la réalisation n’a engendré en réalité que la détérioration drastique de nos conditions essentielles d’existence. C’est donc dans la quête d’un mieux- être pour ces populations affectées que le cadre de concertation s’est engagé résolument pour faire valoir nos droits légaux afin qu’une justice équitable soit rétablie dans le processus de délocalisation et d’indemnisation des villages de la zone de construction du barrage.
Nous ne réclamons pas aujourd’hui que l’Unité de Coordination du Projet de Samendéni nous bâtisse des maisons en dur comme la Maitrise d’Ouvrage de Donsin a su bien le faire pour les populations de la région de Ziniaré. Nous ne réclamons pas non plus les indemnisations conséquentes tel que octroyées par le projet Bagré pôle et le Millenium Chalenge pour des délocalisations de populations dans des contextes semblables. Mais nous souhaitons simplement que les promesses qui ont été faites aux populations pour l’acceptation du projet dans la zone soient tenues car nous savons que c’est bien sur la base de ces prévisions budgétaires et du Plan de Gestion Environnemental et Social (PGES) que l’Etat et ses partenaires ont mobilisé les ressources financières nécessaires à l’exécution de ce projet. Conscient de ces efforts consentis par tous nos gouvernants en faveur du barrage de Samendéni, le cadre de concertation relance son cri de cœur afin que des mesures concrètes soient prises pour atténuer ou mieux mettre fin à la hantise et à la misère des populations affectées dont l’avenir s’est assombri depuis quelques années. Car le vrai développement est un processus dans lequel il faut obligatoirement tenir compte de la dimension socioculturelle et économique des êtres humains bénéficiant de ce développement.
Vu que les autorités de la transition ont fait du respect des droits humains, des règles d’équité et de la justice sociale leur leitmotiv, le cadre de concertation vient encore par cet écrit les interpeller sur le triste sort des populations affectées par la réalisation du barrage de Samendéni en soulignant ici quelques points saillants de nos préoccupations profondes consignées dans notre mémorandum.
 LA REMISE DES COPIES PROTOCOLES SIGNES :
Les protocoles de paiement des indemnisations des vergers et des infrastructures individuelles ont été signés par les populations affectées pour la plupart au cours des années 2011 et 2012. Jusque- là toutes nos populations n’ont pas toujours reçu les copies de ces documents juridiques qui récapitulent les états des inventaires et les critères d’évaluation des indemnisations. Les protocoles sont détenus par le PDIS et sans aucune raison valable alors que les populations les sollicitent ardemment pour effectuer des réclamations légitimes.
 LA MISE EN PLACE D’UNE COMMISSION MIXTE D’EXAMEN DES RECLAMATIONS :
Les processus de recensement, d’évaluation et de paiement des indemnisations aux populations sont dans l’ensemble entachés d’irrégularités et d’erreurs dans presque tous les villages affectés par le barrage. Cela a suscité logiquement des contestations et les populations un cadre juridique réglementaire pour réclamer leurs pleins droits. Les critères d’évaluation et d’indemnisation ont été définis sans le consentement des populations affectées et de nos jours beaucoup des droits fondamentaux doivent être valorisés.
La communauté des peulhs qui résidait sur le site du chantier de barrage a été déguerpie depuis 2010 sans aucune forme de dédommagement de son patrimoine.

 LA RESTITTUTION DES RETENUES DE 20% EFFECTUEES SUR CERTAINS PAIEMENTS :

Pour payer les indemnisations des infrastructures individuelles, le PDIS a retenu à la source 20% des montants sans aucun accord préalable des populations concernées sous le prétexte de les approvisionner en terre et eau pendant les reconstructions des habitats. Ces retenues qui s’élèvent à plus de 500 millions ont fait l’objet de beaucoup de controverses car ces fonds sont gérés directement par le PDIS en toute illégalité. Ces prélèvements illégaux sur des indemnisations déjà dérisoires n’ont surtout pas permis à nos populations affectées d’achever leurs constructions. Les populations réclament la restitution de ces retenues.

 L’INDEMNISATION DE TOUS LES ELEMENTS RECAPITULES DANS LE P G E S DU PDIS :
C’est le document du Plan de Gestion Environnementale et Sociale (PGES) qui valide le projet auprès de ses bailleurs de fonds nationaux et étrangers. C’est donc sur la base des estimations faites lors des études préalables du PGES que l’on évalue et octroie une enveloppe financière pour l’exécution de l’ensemble des activités du projet. Comment comprendre donc aujourd’hui que la coordination du PDIS cherche à nous convaincre au cours de l’exécution du projet que certains éléments du PGES tels que les arbres ligneux (karité, néré, tamarin et Baobab), le bétail, la volaille et les tombes humaines ne seront plus indemnisés faute d’argent.

 L’INDEMNISATION DES TERRES EVALUEES DANS LA CUVETTE DU BARRAGE :
La loi sur le foncier rural exige une indemnisation juste et appropriée pour toute expropriation même pour cause d’utilité publique. Les terres se trouvant dans la cuvette du barrage ont été recensées depuis 2007 et jusqu’à nos jours, aucun processus concret d’indemnisation n’est engagé pour dédommager les populations. Environ 20 mille hectares de terre seront envahis par les eaux et le PDIS prétend que l’Etat burkinabè n’a pas encore débloqué de l’argent pour de tels dédommagements. Il faut donc redéfinir des critères d’indemnisation de toutes les terres susceptibles d’être affectées par les crues d’eau et engager le processus de leurs dédommagements.
 L’AMENAGEMENT TOTA L DES SITES D’ACCUEIL DES POPULATIONS DEPLACEES :
Les aménagements des sites d’accueil des populations affectées ont été effectués depuis les années 2010 pour la majorité des villages à délocaliser. Ces travaux sont pour la plupart inachevés et/ou insuffisants pour une réinstallation des populations dans des conditions de vie descentes bien que la coordination du PDIS prétend avoir injecté plus de 900 millions pour cela. Les sites d’accueil aménagés dans les villages de Cikôrôlà et KôKôrô sont pratiquement inhabitables et certains hameaux de culture (Tountoun de Djifoloma et Tiögö de Sadina) n’ont pas toujours eu un point de chute alors que la mise en eau du barrage est annoncée pour juin 2016.
 LE MANQUE D’INFRASTRUCTURES SOCIOECONOMIQUES E T CULTURELLES SUR LE S SITES D’ACCUEIL DES VILLAGES :
L’absence d’infrastructures socioéconomiques et culturelles sur les sites d’accueil des villages délocalisés va impacter certainement la vie des populations délocalisées. En effet, tous les sites d’accueil des villages déplacés manquent du minimum indispensable pour une vie en collectivité. Il n’y’a pas de marchés, pas de lieux de cultes (mosquées et églises), ni des enceintes de divertissements culturels et sportifs pour la jeunesse. Pourtant ces réalisations sont indispensables à l’épanouissement réel de nos populations sur les terroirs d’accueil. Peut-on vraiment vivre dans un village sans aucun marché, ni de mosquée ou d’églises ?
 LE DESENCLAVEMENT ROUTIER DE TOUTE LA ZONE DU BARRAGE :
Les routes précèdent tout développement et cela est une logique qui devrait prévaloir dans le cas de la zone des villages affectés par le barrage de Samendéni. Le PDIS dans le cadre de la délocalisation de ces villages, n’a réalisé aucune piste d’accès et de communication routière entre sites d’accueil des populations déplacées. Les difficultés de trafic sont donc réelles et cela a des conséquences graves sur le transport et donc sur toute l’économie de la zone d’aménagement du barrage. Il est inconcevable que la seule piste rurale aménagée depuis l’exécution du projet soit celle qui conduit à la direction du chantier et dans les contrées de collecte des agrégats de réalisation des travaux.
 LA REALISATION DES A E P S SUR LES SITES D’ACCUEIL :
De nos jours, les plus grandes difficultés des populations affectées par le barrage de Samendeni résident dans les questions liées à la disponibilité de l’eau potable. Les forages réalisés par le PDIS sur les sites d’accueil sont en nombre insuffisant et pour la plupart sont négatifs c’est-à-dire sans eau. Le manque de cette denrée vitale traumatise nos populations qui n’ont jamais connu des difficultés liées au manque d’eau. Pourquoi donc La Coordination du PDIS n’a pas réaliser au profit des populations déplacées des mini adductions d’eau potable simplifiées (AEPS) avec châteaux préférant engloutir des centaines de millions pour réaliser des forages qui n’ont jamais fourni une seule goûte d’eau depuis leurs réceptions.
 LE REGLEMENT DE TOUTES LES QUESTIONS FONCIERES :
Les questions foncières sont de nos jours la cause de toutes les tensions sociales qui existent entre les populations affectées et délocalisées pour le barrage de Samendéni. Les sites d’accueil des villages font l’objet de toute sorte de contestation et les parcelles octroyées aux populations par le PDIS ne comportent aucun document administratif. Les seuls documents officiels remis aux populations par le PDIS sont ces bouts de papiers qui tiennent lieu de fiche de recensement et aussi de propriété. Ces réinstallations sur des sites empruntés et non indemnisés sont- elles donc définitives ou temporaires pour les populations.
 LE DEBOISEMENT DE LA CUVETTE D’EAU DU BARRAGE :
Le PIDS a entrepris depuis l’année 2012 les travaux de déboisement de toute l’étendue d’eau du barrage. C’est ainsi que des équipes de tronçonneurs et de charbonniers ont investi toute la zone du barrage pour exploiter des milliers d’arbres au mépris des conséquences désastreuses sur l’environnement de la zone. Jusqu’à nos jours, aucune information véritable n’est donnée ni aux autorités locales ni aux populations affectées sur la destination exacte des recettes générées par ces opérations de vente des produits des forêts que nous avons pu entretenir depuis des années. Cette exploitation inqualifiable de la forêt de zone du barrage a des répercutions négatives sur les rendements des cultures des paysans et surtout des éleveurs qui n’ont plus d’espace de pâturage.
 LE CAS SPECIFIQUE DU VILLAGE DE BAZON :
Le village de Bazon est situé en amont du barrage de Samendéni dans les plaines de la vallée du Mouhoun et il est certainement en danger à cause des crues d’eau qui seront issues de la réalisation du barrage de Samendéni.
Pour ne pas délocaliser ce village, le PDIS à préféré le protéger par une digue dont l’aménagement a coûté plus d’un milliard et qui malheureusement s’est avérée inefficace en moins de deux ans. Aujourd’hui les populations de Banzon sont anxieuses du fait que des incertitudes réelles planent sur leur avenir. Depuis trois saisons, la moindre petite pluie engendre des inondations des cultures et des habitations dans le village. Il semble que le Coordonnateur du PDIS aurait dit aux populations que seul le président du Faso peut décider sur la question de délocaliser Banzon.

 LES MESURES D’ASSISTANCE ET D’AIDE AUX POPULATIONS :
Dans le souci de faciliter la bonne exécution du processus de délocalisation et de réinstallation des villages touchés par les travaux de construction, le PGES du PDIS prévoit une assistance aux populations affectées sous des formes multiples (matériel agricole, vivres, intrants etc.…). Mais lors de la visite des travaux effectuée par le Président KAFANDO et son gouvernement en février 2015, le PDIS à organisé une cérémonie symbolique de remise aux populations de matériels et de vivres qu’ils ont vite récupérés dès que nos autorités ont quitté les lieux. De nos jours, les populations sont laissées à elles- mêmes sans aucune forme d’assistance ou d’accompagnement pour alléger les effets pervers de notre délocalisation.

 L’OCTROI D’INDEMNITES DE COMPENSATION DES PREJUDICES :
Dans le processus de délocalisation et de réinstallation des populations affectées par le barrage de Samendéni, nous avons malheureusement constaté beaucoup de désagréments, de brimades et des injustices comparativement à ce qui se passe dans des projets de la même envergure que le PDIS. Pour cela, il faut donc octroyer aux populations affectées une indemnité compensatrice des préjudices moraux, socioculturels et économiques qu’elles doivent durant quelques générations.
 LA MISE EN PLACE D’UN FONDS DE REINSERTION SOCIOECONOMIQUE DES POPLUATIONS :
La réalisation des infrastructures du PDIS crée nécessairement des perturbations au niveau des facteurs de production et donc de toute l’activité économique dans la zone géographique du barrage. Pour donc favoriser une meilleure réinsertion économique des populations déplacées, il faut nécessairement mettre en place un fond de financement des micros projets au profit des jeunes et des femmes pour soutenir la relance des activités économiques dans les villages affectés.

Fait à Bobo Dioulasso le 18/10/2015

Pour le Bureau Exécutif
Le Président du Cadre de Concertation
des Populations Affectées par le Barrage de Samendéni

Abdouramane S. OUATTARA

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Vos commentaires

  • Le 29 octobre 2015 à 13:40, par Les corrompus En réponse à : Barrage de Samendéni : Le cri du cœur des populations affectées

    La solution est simple. Balayer cette foutue coordination pour la remplacer par une équipe plus réaliste et expérimentée. Pourquoi Bagrépôle réussit et Samendeni piétine. C’est simple. A Samendeni, les cadres de la Coordination sont mouillée jusqu’à la moelle épinière. Ils sont sclérosés et amnésiques face à nos problèmes de terres, de bien être. Ce sont des experts en combines et non de développement.

  • Le 29 octobre 2015 à 13:56, par Ali En réponse à : Barrage de Samendéni : Le cri du cœur des populations affectées

    Tout simplement pathétique.

  • Le 29 octobre 2015 à 16:34, par ministre En réponse à : Barrage de Samendéni : Le cri du cœur des populations affectées

    Monsieur Abdouramane demandé simplement une audience auprès du président de la transition, juste le transmettre la même lettre que je viens de lire car je pense qu’il faut que les gens sachent que les choses ont changés.
    beaucoup de projet de ce genre sont totalement mal géré et les fonds sont pillés sans que personnes ne puisse dire mot.
    tout ses retenus d’argent dont vous avez parlez sont simplement des détournement de fond a l’endroit même des dirigent de ce projet et autres personnes qui par leur couverture ont permis de les mettre dans ses postes.

    Je suis vraiment découragés quand je pense que je paye mes impôts pour que des gens s’enrichis illégalement sa me brûle le cœur !!! mais dieu est grand tôt ou tard ils vont tous payés.

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