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Crise politique au Burundi : Le retour à la case départ ?

Publié le dimanche 17 mai 2015 à 08h42min

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Crise politique au Burundi : Le retour à la case départ ?

Le coup d’Etat annoncé au Burundi mercredi dernier aura finalement connu le sort du pétard mouillé. Deux jours seulement après le soulèvement de militaires qui “destituaient” le Président Pierre Nkurunziza, la traque a changé de camp. Les principaux acteurs du coup manqué ont été arrêtés par les fidèles de Nkurunziza, ce dernier a regagné son palais de Bujumbura et les manifestations des populations ont repris.

"Personnellement, je le reconnais, notre mouvement a échoué" ; "Nous avons rencontré une trop grande détermination militaire pour soutenir le système au pouvoir". Ces propos tenus jeudi nuit par le numéro 2 des putschistes burundais Cyrille Ndayirukiye sonnaient le glas de la tentative de coup de force entreprise la veille seulement. Ils marquaient dans le même temps la fin de l’espoir qui s’était emparé de nombre de burundais opposés à un troisième mandat du Président Pierre Nkurunziza ; eux qui avaient très vite exulté à l’annonce du coup d’état par le Général Godefroid Niyombaré. Les événements se sont ensuite accélérés ce vendredi matin avec l’arrestation des leaders de la mutinerie, dont le numéro 2 de la rébellion et ancien ministre de la défense, le général Cyrille Ndayirukiye et deux commissaires ; pendant que le Général Niyombaré qui avait lui aussi annoncé qu’il se rendait restait encore introuvable jusqu’à ce vendredi nuit. « Nous avons décidé de nous rendre. J’espère qu’ils ne vont pas nous tuer », déclarait- il tôt ce vendredi matin, avant de couper tout contact. Est- il entré dans la clandestinité par peur d’être arrêté et exécuté sommairement, ou a- t- il été arrêté par les hommes de mains de Nkurunziza sans grand bruit ? Nul ne le sait pour l’instant.

Des prisonniers encombrants !

A ceux qui s’inquiètaient déjà du sort des putchistes, le porte-parole de la présidence, Willy Nyamitwe répondait invariablement ce vendredi matin, « Le droit sera dit. » Tout en rassurant qu’il n’y avait pas à craindre pour leur vie. Sauf que pour ceux qui ont connu la barbarie de la guerre civile au Burundi et les méthodes du maquisard Pierre Nkurunziza, il ne faut surtout pas prendre cela pour argent comptant. Seul bémol, font remarquer certains observateurs, dans ce double contexte marqué par une adhésion non feinte d’une grande partie de la popultion au coup d’etat avorté, et l’attention accrue de la communauté internationale sur ce pays qui traine déjà une tiste réputation, tous gagneraient à éviter la moindre horreur. Sinon se serait remettre en cause les accords d’Arusha acquis à l’issue d’interminables négociations et au prix de maints compromis.

Une Armée déchirée désormais

L’un des enseignements de cette crise c’est qu’elle met à nu l’unité tant vantée de l’Armée burundaise. Une véritable unité de façade, comme viennent nous rappeler les récents événements. On se rappelle que le 02 mai déjà, au temps fort des manifestations anti troisième mandat de Pierre Nkurunziza, des contradictions s’étaient étalées au grand jour qui opposaient le ministre de la défense au chef d’état- major de l’Armée le général Prime Niyongabo. Le ministre de la Défense le général Pontien Gaciyubwenge avait rappelé le devoir de neutralité de l’Armée, tout en condamnant les atteintes aux droits constitutionnels des populations ; pour se voir contredit par le chef d’état- major de l’Armée en ces termes à peu près : les militaires doivent rester loyaux aux institutions et aux autorités du pays. A l’annonce du coup d’état, le premier a rallié la mutinerie alors que le second et ses hommes menaient la contre offensive. Se pose alors la question de l’après élection. Que le président à venir se nomme Nkurunziza ou Tartampion, il devra recoller les fissures apparues au sein de l’Armée, lesquelles fissures ont pris d’importantes proportions avec cette crise.

Toujours des incertitudes sur les élections

En attedant, à Bujumbura la capitale, la confusion de la journée de jeudi a cédé à celle de vendredi. Les populations sont encore sorties à l’appel de Vital Nshimirimana, porte-parole du collectif anti-troisième mandat. Leurs mouvements avaient commencé le 26 avril dernier pour être interrompues pendant deux jours par la tentative de coup d’état, avec les affrontements à l’arme lourdes entre militaires. Et les civiles se disent désormais décidés à réussir là où les hommes en treillis ont échoué. C’est dans ce climat de confusion que la pression a repris. Quatre anciens chef d’état du Burundi ont encore exhorté Nkurunziza a renoncer à ce troisième mandat. Ils ont été rejoints par les Etats- unis d’Amérique pour qui ce troisième mandat sera source d’instabilité pour le pays. Les positions de principe sont réaffirmées, d’autres avec un peu plus de poigne.

Pierre Nkurunziza restera t- il encore sourd a ces “ultimes” appels ? Seule certitude, il a retrouvé son palais et a même adressé un message à ses concitoyens et à la communauté internationale ce vendredi soir. Dans son adresse, le président burundais a tenu à rassurer la communauté internationale et la population burundaise : la vie a repris son cours normal au Burundi. Aux éléments des forces de défense et de sécurité, il n’a pas manqué de dire toute son admiration. Il a salué “l’efficacité et la rapidité dont ils ont fait preuve pour stopper le projet macabre de détruire les institutions démocratiquement élues”. A ceux qui sont encore sortis manifester à l’appel des oragnisations hostiles à sa candidature, il a demandé d’arrêter leurs mouvements. “Que ceux qui ont des doléances à présenter passent par la voie du dialogue et de la concertation et non par la voie de la violence", a- t –il lancé aux participants à ces manifestions qu’il qualifie de “soulèvement”.

Pierre Nkurunziza est par contre resté très peu bavard sur sa candidature à l’élection présidentielle, véritable pomme de discorde dans la crise actuelle. Ce bout de phrase toutefois dans lequel certains voient le signe de sa farouche détermination à se porter candidat : “Allons aux élections dans la sérénité comme les pays de la région et la communauté internationale le recommandent”. C’est pourtant cette posture sienne qui a fait afficher ce décompte au compter : plus de 20 morts dans les affrontements, plusieurs chefs militaires mis aux arrêts après la tentative avortée, plusieurs dizaines de milliers de burundais réfugiés au Rwanda, en République démocratique du Congo et en Tanzanie dans la crainte d’une guerre civile,... et on en oublie certainement. Mais lui fait toujours la sourde oreille. Un retour à la case départ ? Les jours à venir nous le dirons.

Pour rappel, c’est le 25 avril dernier que le parti de Pierre Nkurunziza l’a désigné candidat à l’élection présidentielle du 26 juin prochain. Une candidature contestée par l’opposition pour qui Pierre Nkurunziza ayant fait deux mandats consécutifs, la constitution et les accords d’Arusha lui interdiraient un troisième. Dans le camp Nkurunziza, le premier mandat n’ayant pas été le fruit d’une élection au suffrage universel, c’est maintenant qu’il doit entamer son second mandat. Dans cette guerre des interprétations des textes, l’Eglise catholique, la société civile, la communauté internationale dans sa grande majorité avaient condamné une troisième candidature du Président sortant. Peine perdue car Nkurunziza était déjà à l’étape de sa campagne électorale. Le front hostile à sa candidature dès le lendemain de sa désignation était dans la rue avec ses militants. C’est au comble des manifestations que ses pairs de l’Afrique de l’Est l’ont convié à une réunion de sortie de crise à Dar es- Salam en Tanzanie. Et c’est de là- bas qu’il a appris sa destitution. Une destitution qui n’aura finalement duré que deux jours.

Samuel Somda
Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 17 mai 2015 à 11:40, par Ya Yaboin En réponse à : Crise politique au Burundi : Le retour à la case départ ?

    Je n´aime pas les dictateurs qui braconnent la constitution de leur pays pour s´accrocher au pouvoir, mais lä je tire mon chapeau a N´Kurunziza qui a ordonne´un proces contre les puchistes . Imaginez-vous s´aurait ete le monstre Naba Laibse (Blaise ) quel aurait ete le sort des puchistes ?? Certainement des tombes inconnues. Merci Dieu de nous avoir debarrasse´ de ce tueur froid.

  • Le 18 mai 2015 à 00:11, par matheo En réponse à : Crise politique au Burundi : Le retour à la case départ ?

    je pense que la seule et lunique personne qui puisse regler les comptes a ce delinquant de president est le peuple burundais. je trouve q la mobilisation nest pas de taille et il faut laccentuer

  • Le 18 mai 2015 à 08:54, par daddy En réponse à : Crise politique au Burundi : Le retour à la case départ ?

    burundi est différent du burkina faso

  • Le 18 mai 2015 à 12:49, par justin kunda En réponse à : Crise politique au Burundi : Le retour à la case départ ?

    la situation au Burundi me dérange sérieusement , il n’y a aucune condamnation de la part des états Africains , l’actuel président doit partir pour laisser la place à d’autres ,c’est cela la démocratie, il a fait ces 2 mandats , les dictateurs au pouvoirs en Afrique doivent savoir que le temps de manipuler des constitution est révolu , c’est histoire de toucher à la loi fondamentale reste purement Africain , c’est une honte .

  • Le 18 mai 2015 à 13:09, par Ghislain Mandiki En réponse à : Crise politique au Burundi : Le retour à la case départ ?

    Pourquoi les dirigeants africains nous classent dans leur "patrimoine",parmi leurs "choses" ???

  • Le 18 mai 2015 à 20:17, par OBAMA LE DEMOCRATE En réponse à : Crise politique au Burundi : Le retour à la case départ ?

    Pour éviter ses bêtises de certains chefs d ’États africains il faut un seul mandat et tu parts .Sinon quand on laisse faire 2 ils vont prendre le gout de faire 3 et plus.Ils aiment ça. c est des affamés ils ne comprennent rien dans la gouvernance.Pour eux c est remplir les poches et non un service offert au peuple. A bas ses roussettes.

  • Le 20 mai 2015 à 17:35, par Jeunedame seret En réponse à : Crise politique au Burundi : Le retour à la case départ ?

    Raté parce qu’il était absent. Malgré ce flash de coup d’état, le président insiste tjrs ? Répétez un massacre d’état ; sinon vous lui donnerez raison de briguer plus de 4 mandats. Le pouvoir à vie, c’est pas sur terre.

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