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Emmanuel Kaboré : « L’Afrique doit aller au rendez-vous du développement avec les énergies renouvelables »

Publié le mercredi 25 mars 2015 à 23h22min

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Emmanuel Kaboré : « L’Afrique doit aller au rendez-vous du développement avec les énergies renouvelables »

Hier directeur général et aujourd’hui président directeur général de l’entreprise Projet Production Solaire (PPS), Emmanuel Kaboré est un pionnier de la promotion des énergies renouvelables au Burkina, devenu incontournable dans le secteur, grâce à sa persévérance et aux bons résultats de ses actions. Son entreprise PPS est le partenaire officiel de la 4e édition du Salon International de l’Environnement et des Energies Renouvelables de Ouagadougou (SIERO) prévue du 23 au 26 avril prochain. Dans cet entretien, Emmanuel Kaboré parle de cette SIERO 2015, des enjeux des énergies renouvelables pour les pays africains, ainsi que de bien d’autres problématiques du secteur de l’énergie.

Lefaso.net : Vous passez de Directeur Général à Président Directeur Général, pouvez-vous nous éclairer sur ce changement de statut ?

C’est l’air des alternances. A PPS il y aura changement à la direction. Ainsi en a décidé le conseil d’administration. Je m’occuperai d’autres axes pour le développement de PPS à l’intérieur comme à l’extérieur.

Quel sens donnez-vous au partenariat que vous avez avec IRENA et les établissements financiers ?

IRENA est l’organisme international pour les énergies renouvelables. Ils œuvrent pour la promotion des énergies renouvelables et notre pays a ratifié cette organisation.
Au Burkina Faso, des structures telles PPS (Projet Production Solaire) le Réseau des Caisses Populaires, Ecobank ont bénéficié des appui-conseils de IRENA pour contribuer à l’accès aux énergies renouvelables à crédit. Nous avons par exemple reçu des formations à 2ie, en Inde (Bangalore) et à Lomé au Togo dans ce cadre.
Cet appui-conseil permet à ces structures financières d’accompagner le projet en finançant à crédit les installations solaires des clients qui le désirent dans des conditions soutenues et définies par IRENA, la Banque et les entreprises professionnelles du solaire. (Les opinions des utilisateurs ont été prises en compte par l’organisation).
C’est dire que celui qui a besoin d’une installation solaire dès aujourd’hui peut le faire et payer sa facture en une année, deux ou trois ans avec PPS, Ecobank, le Réseau des Caisses Populaires, BOA et d’autres structures financières bientôt.
Je tiens à signaler que sous-peu les autres banques et d’autres entreprises professionnelles du solaire permettront de parfaire ce projet, PPS est la première entreprise, mais ne sera pas la seule, le projet veut le plus grand nombre de professionnels. Un coordonnateur pour la CEDEAO, en l’occurrence Dr Paul Ismael Bachir OUEDRAOGO, vient d’ailleurs d’être installé à 2IE par IRENA et tous les partenaires.

Vous êtes le partenaire officiel de la 4e édition du Salon International de l’Environnement et des Energies Renouvelables de Ouagadougou (SIERO), que faut –il attendre donc de votre participation ?

Nous participerons comme exposant et nous profiterons donner des explications sur le crédit solaire avec les banques aux visiteurs, aux professionnels du solaires et à toute la population. C’est un avantage pour les populations et pour nous entrepreneurs du solaire et nous pensons qu’il faut que l’information passe bien.
Nous profiterons faire des promotions des panneaux en partenariat avec nos partenaires européens. Nous serons à 600F CFA/Wc pour nos panneaux.
Exemple : un panneau de 200Wc sera à 115 000FCFA, celui de 250Wc sera à 143750, les 255Wc à 146625. Ceux qui connaissent le domaine savent quelle opportunité nous donnons avec des panneaux d’origine et de marque rassurante pour ne pas citer les pays, les clients nous connaissent. Nous avons à peu près plus de 1200 panneaux pour cette opération.

Il nous revient que certains de vos partenaires de l’Hexagone seront de l’édition 2015 du SIERO. Vous confirmez ?

Nous confirmons que nous avons des partenaires de la France qui seront avec nous comme d’habitude.

Vous êtes très engagé sur les questions d’énergies renouvelables aussi bien au Burkina Faso qu’en Afrique. Pourquoi un tel engagement ?

La question de l’énergie est une passion pour moi et c’est également ma formation de base. Je suis personnellement convaincu que le développement de l’Afrique passe obligatoirement par l’accès à l’énergie. Et il faut que l’Afrique qui prend le développement en marche ne reparte pas en arrière pour suivre les autres en commençant par la forêt, les énergies fossiles, le nucléaire pour arriver aux énergies renouvelables.
Tout le monde est d’accord que les énergies renouvelables sont les énergies de demain à cause de la limite des stocks du pétrole et gaz et surtout à cause du réchauffement climatique.
L’Afrique doit aller au rendez-vous du développement avec les énergies renouvelables. C’est là que l’Afrique doit poser ses marques.
Nous accusons le coût élevé des énergies renouvelables. Non, non et non !
Il faut que les Africains se battent pour que les coûts soient obligatoirement revus à la baisse parce qu’il y va de la survie de notre planète ; les autres le savent mais ils ne seront pas devant le combat pour deux raison : ils n’ont pas les ressources renouvelables et ils n’ont pas plus de 70% de leur population qui n’a pas accès à l’énergie électrique.
Je lance un cri fort aux dirigeants des grandes puissances et à leurs peuplent : « arrêtez de nous conseiller d’utiliser des groupes électrogènes fonctionnant au fuel lourd dans nos sociétés minières et nous les conseiller pour la production électrique car l’Afrique doit rester une terre de refuse comme dans les Saintes Ecritures ». Vous devez aider l’Afrique à maintenir l’écosystème.

Comment appréciez-vous le niveau de développement des énergies renouvelables au Burkina Faso ?

Sans vergogne, je dirai que le niveau de développement des énergies renouvelables au Burkina Faso est très critique.
Comme je l’ai déjà dit avec vous, « l’énergie est un besoin vital comme le mil qu’on mange et mieux que le coton qu’on exporte ». Partant de là, je vois qu’au Burkina nous sommes en malnutrition énergétique. Nous avons l’énergie solaire, nous avons les panneaux solaires partout, les gens paient bien ces panneaux, mais très mal exploités, très mal installés et très mal utilisés.
C’est dommage de faire des installations solaires avec des batteries qui vont être changées au bout d’une année à deux. Ces cas sont les plus fréquents même dans les projets.
Il faut que nous ayons des installations durables et que la SONABEL permette à ceux qui le peuvent de pouvoir faire des installations injectées au réseau ; je propose même que la SONABEL ait une cellule de contrôle des installations solaires. Nous sommes prêts pour les accompagner.
Sinon il y a assez d’installations solaires et autres énergies renouvelables au Burkina, mais le profit ne compense pas la dépense.
Il faut également éviter les produits de mauvaise qualité qui vont constituer un danger pour notre environnement. Si vous changer des batteries chaque année, vous constituez un stock dangereux. Il faut que les gens acceptent des produits durables.

Le SIERO 2015 se tient dans un contexte marqué par la récurrence des délestages, quelles solutions préconisées vous pour résorber un tant soit peu cette question ?

Pour être honnête, l’énergie solaire comme source de secours en cas de délestage n’est pas mon slogan.
Nos installations solaires vous permettent d’utiliser et la SONABEL et votre source solaire. Avec ces types d’installation vous ne sentez pas le délestage, mais vous faites également des économies sur vos factures d’électricité, puisque vous utilisez votre énergie produite par le solaire et non la SONABEL même s’il n’y a pas de délestage. Alors qu’une installation solaire de secours est non utilisée tant qu’il n’y a pas de coupure d’électricité.

Votre effectif est passé de 2 techniciens en 2010 à plus de 35 employés de nos jours. Comment expliquez-vous ce bond significatif ?

Nous expliquons ce bond significatif par le fait que PPS a la ferme volonté d’être plus proche des populations, de ces clients qui ont besoin de nos services.
Cela nous permet de répondre aux besoins de Mangodara en même temps que ceux de Nadiagou, de Arbinda et de Toma. Nos clients sont en villes, au village, dans les zones de chasse, en classe, à la maternité, dans les champs d’irrigation etc. Et nous nous sommes engagés à les satisfaire.
Ils nous font confiance et nous permettent de pouvoir payer ces salariés qui sont à leur service.
Nous profitons de vos lignes pour nous excuser auprès de ceux qui n’ont pas été souvent vite satisfaits. Plus rien ne sera comme avant…

Peut-on en conclure que les énergies renouvelables nourrissent leurs hommes au Faso.

Je ne vous dirai pas le contraire puisque moi comme plusieurs dizaines d’entrepreneurs vivent et font vivre grâce aux énergies renouvelables.

Est-ce que la mesure gouvernementale de détaxation des produits solaires importés a eu un impact sur le développement du secteur des énergies renouvelables dans le pays ?

Evidemment oui. Je suis personnellement en train de travailler sur le thème dans le cadre de mon mémoire.
L’impact socio-économique est énorme, sans compter le fait que beaucoup ont remplacé le groupe électrogène polluant, la motopompe par l’énergie solaire. Un grand bien pour l’écosystème.
Depuis la détaxation en 2012 des produits solaires, des dizaines d’entreprises ont été créées, employant plusieurs jeunes ; des activités utilisant l’énergie et génératrices de revenus ont été créées dans des zones non électrifiées, des populations ont eu facilement accès à l’eau potable grâce à des pompes solaires ; des commissariat de police, des gendarmeries, des mairies, peuvent utiliser des ordinateurs, des imprimantes ou des photocopieurs dans des zones non électrifiées où ils sont installés ; des populations ont accès à l’information audio-visuel etc.
Quels messages avez-vous à donner aux gouvernants africains par rapport à l’importance qu’il faut accorder à la promotion des énergies renouvelables ?
Mon message est simple. Les grandes puissances sont puissantes par leur économie, leurs armes à destruction massive, leur industrie ou leur capacité de pollution, leur démocratie.
L’Afrique n’aura pas une monnaie plus puissante que le dollar, l’Afrique n’annexera pas la RUSSIE et les USA, l’Afrique ne donnera pas des leçons de démocratie à la France et à l’Allemagne. Mais l’Afrique pourra être le continent non pollué, le continent qui maintien l’équilibre écologique et nous pourrons menacer de perturber cet équilibre, l’Afrique pourra être le continent sans alerte de pollution, l’Afrique pourra être le continent des lunes de miel sans fiel, sans pollution, l’Afrique pourra être le continent de paradis écologique sans être paradis fiscaux.
S’il vous plait chers dirigeants Africains, notre autonomie énergétique doit se faire avec les énergies renouvelables (Solaire, hydraulique, biomasse).
Arrêtez les commandes des centrales à fuel lourd, imposez les énergies renouvelables à ceux qui viennent exploiter nos minerais.
Je suis même tenté de vous demander d’installer des panneaux dans tout le désert et vous verrez qu’il n’y aura plus de terroriste, misez plus dans l’appui aux énergies renouvelables que dans les achats d’armes.
Vous rendrez l’Afrique plus puissante que les grandes puissances, vous rendrez un grand service à toute l’humanité. Les autres sont déjà pollués, ils n’ont plus le choix. J’invite les gouvernements Africains à détaxer tous les équipements des énergies renouvelables, voyez comment subventionner et encourager fortement les installations des centrales d’énergies renouvelables.
Formez vos étudiants dans les énergies renouvelables.

Comment PPS et vous-même vous vivez la transition politique ?

Nous vivons en transition. Nous attendons la Pâques.

Vous avez pris une part active à l’insurrection. Etes-vous aujourd’hui satisfait de la gestion des affaires du pays ?

Pour moi ceux qui sont aux commandes de la transition ne devraient pas gérer les affaires du pays, mais aider plutôt le pays à transiter vers le réel changement.
Je souhaite que ce soit ainsi vu par le peuple comme par ceux qui gèrent la transition.
Pour gérer les affaires d’un pays, on se prépare avec un programme politique, on prépare ses hommes. Ils ne peuvent pas faire comme un gouvernement installé sur la base d’un programme élu.

Pensez-vous que la situation politique actuelle est plus favorable au développement des énergies renouvelables que par le passé ?

Nous sommes en transition. Certaines actions peuvent être des actions de transition. Le budget n’a prévu qu’environ 250 millions pour les énergies renouvelables. C’est insignifiant. Nous demandons à tous ceux qui concourent au pouvoir au Burkina d’insérer le développement des énergies renouvelables dans leur programme s’ils l’on oublié.

Quelque chose vous est-il resté sur le cœur et que vous voudriez exprimer ici ?

Je vais juste remercier vos éditions, le SIERO, tous les clients de PPS et tous les employés de PPS. Que Dieu bénisse le Burkina Faso !

Interview réalisée par Grégoire B. Bazié
Lefaso.net

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