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Soutenance à l’ISTIC : Lassané Ouédraogo analyse le rôle des médias pendant l’insurrection populaire

Publié le dimanche 22 mars 2015 à 22h53min

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Soutenance à l’ISTIC : Lassané Ouédraogo analyse le rôle des médias pendant l’insurrection populaire

Après 30 mois de formation à l’Institut des Sciences et Techniques de l’Information et de la Communication (ISTIC), Ouédraogo Lassané a soutenu son mémoire de fin de cycle ce jeudi 19 mars. Les Dr Firmin Gouba (président du jury), Cyriaque Paré (Directeur de mémoire) et M. Bilélé ont apprécié son étude sur le thème « contribution des médias à la résolution de la crise d’octobre-novembre 2014 au Burkina Faso : cas de Sidwaya et de l’Observateur Paalga. » C’était au sein même de l’institut, en présence de sa famille et de ses camarades, venus le soutenir. Il a obtenu la note de 16/20.

Il y a cinq mois de cela, Lassané Ouédraogo ne s’imaginait pas traiter d’un tel sujet. En effet, son thème portait initialement sur l’analyse de la communication de l’Assemblée Nationale. Mais au moment de faire l’enquête de terrain, l’assemblée a été incendiée, les députés mis au chômage et le personnel dans la rue. Le Burkina a connu une crise sociopolitique en fin octobre début novembre 2014, qui a conduit au départ du pouvoir du président Blaise Compaoré et à l’instauration d’une Transition.

Cette crise dénommée, insurrection populaire, révolution populaire ou soulèvement populaire selon l’expression des médias trouve ses origines dans l’ambition du régime déchu de modifier l’article de la Constitution qui limitait le nombre des mandats présidentiels à deux. Après trois à quatre jours d’instabilité, le Burkina est arrivé à éviter le chaos. Les médias ont joué un rôle actif dans cette crise avant, pendant et après l’insurrection populaire. Ouédraogo Lassané qui a donc été obligé de changer de thème et a décidé de faire de cette situation, le nouveau sujet de son travail. Il s’est intéressé à la « contribution des médias à la résolution de la crise d’octobre-novembre 2014 au Burkina Faso : cas de Sidwaya et de l’Observateur Paalga. » Son étude a visé principalement à montrer l’apport des deux quotidiens à la résolution de la crise d’octobre-novembre 2014.

Il a à travers une analyse de contenu de tous les articles ayant traité de la crise du 1er octobre au 31 décembre 2014 dans les deux journaux, examiné la place accordée à l’actualité de la crise, et leur positionnement. Ouédraogo Lassané a aussi procédé à des entretiens avec des personnes ressources et des structures professionnelles de la presse. Il a mené une enquête auprès de 50 journalistes et de 100 lecteurs pour recueillir leurs avis sur la question.

Des résultats satisfaisants

Toutes ces démarches lui ont permis d’aboutir à la conclusion que les deux journaux ont dans le traitement de l’information contribué à la résolution de la crise. L’actualité de la crise a occupé une place importante dans les parutions de ces deux journaux. Avant l’insurrection, les deux journaux bien qu’ayant des positions différentes, ont contribué à une expression plurielle des opinions.

En effet, avant l’insurrection populaire, dans le mois d’octobre, « Sidwaya a couvert plus les activités de ceux qui prônent le référendum et la modification de l’article 37 que ceux qui s’y opposent. Il a donc consacré 19 comptes rendus au pouvoir en place et à ses alliés, contre 12 pour la partie adverse qui avait pourtant plus de manifestations. »

Pour lui, « même si le quotidien d’Etat a plus fait d’échos pour son maître d’alors, c’est à dire le régime déchu, le journal a au fil de ses parutions fourni du dialogue entre les différents acteurs en conflit. »

L’observateur Paalga en tant que journal privé a joué « un rôle de veille ». Il s’est opposé au référendum et à la révision de l’article 37. Au fil de ses parutions, le journal a tiré la sonnette d’alarme et a dénoncé les abus du régime déchu en vue de faire passer en force son projet de révision de l’article 37.

Pendant l’insurrection populaire, les deux organes ont contribué à informer les populations sur la situation. L’échec du vote de la loi, l’incendie de l’assemblée nationale ainsi que d’autres bâtiments publics et privés, le nombre de morts et de blessés, la démission du président Blaise Compaoré, sont autant d’informations que les deux médias se sont évertués à apporter à la population. Ces médias tout en condamnant les pillages ont appelés au calme et à la retenue. Après la période d’accalmie, Sidwaya et l’Observateur Paalga ont contribué à la mise en place de la Transition à travers des plaidoiries pour une transition apaisée. La vulgarisation et l’explication de la charte ainsi que les chantiers de la Transition ont aussi été abordés.

L’enquête auprès des journalistes et des citoyens a montré que Sidwaya et l’Observateur Paalga ont fait un travail appréciable pendant la crise. En effet, 78% des enquêtés pensent que Sidwaya a contribué à la résolution de la crise, contre 81% pour l’Observateur Paalga.

Des lacunes relevées des deux côtés

Cependant, plusieurs lacunes sont à noter. Pour le cas de Sidwaya, 78% des enquêtés pensent que les journalistes font de l’auto censure. Il est aussi ressorti le traitement de l’information en fonction du pouvoir, et la dissimulation d’information aux lecteurs. Ouédraogo Lassané prend pour exemple les événements survenus après le conseil extraordinaire des ministres ayant examiné le projet de loi sur la modification de l’article 37. « Des manifestations ont eu lieu dans les quartiers avec les barrages des grandes voies et la visite des domiciles des députés par des groupes de jeunes. Tandis que les autres journaux en parlaient, Sidwaya n’a en aucun moment, fait un article sur ces événements ». Il ajoute « La marche des femmes de l’opposition dans l’après-midi du 27 octobre, à quelques mètres de Sidwaya n’a pas été couverte par le journal, pendant que cela faisait la Une des autres quotidiens ».
Pour lui, cela s’explique en partie par le fait que le ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement soit le directeur de publication, qui dispose d’une manière ou d’une autre d’un droit d’intervention dans le traitement de l’information du quotidien d’Etat.

En ce qui concerne l’Observateur Paalga, les limites se résument à « la publication précipitée de certaines informations sans vérification et de certains propos va-t’en guerre qui auraient pu être nuancés. »

Dans sa parution du lundi 27 octobre, le journal a fait un compte rendu d’une rencontre des responsables du CDP avec les représentants provinciaux du parti. On pouvait lire à la Une les propos du secrétaire exécutif du parti Assimi Koanda, « S’ils brûlent vos maisons, brûlez les leurs ». Cet appel à la violence relayé par l’Observateur a servi à envenimer la situation.

En plus de cela, le journal a commis la faute professionnelle de révéler l’identité du président de la Transition sur son site dans la nuit du 16 au 17 mars, avant même que le collège de désignation n’ai fini d’auditionner les candidats.

Dans un cas comme dans l’autre, Ouédraogo Lassané a fait des propositions pour un meilleur traitement de l’information, surtout en période de crise.

De bonnes critiques pour Ouédraogo Lassané

Les membres du jury, malgré quelques insuffisances, ont, à l’unanimité, félicité le candidat pour son travail. Il leur aurait présenté un document presque sans faute majeure, bien structuré, dans un style simple et agréable à lire. Pour Cyriaque Paré, son directeur de mémoire, « il a posé des pistes de réflexion sur un thème d’actualité qui pourrait faire l’objet d’autres études. » A Bilélé Bénin, membre du jury d’ajouter que « le document pourrait non seulement intéresser les responsables des deux quotidiens concernés mais aussi des autres médias. »

Le jury à l’issue des délibérations, a donné la note de 16 sur 20 à Ouédraogo Lassané qui est désormais conseiller en Sciences de l’Information et de la Communication.

Aïssatou Diallo (stagiaire)
Lefaso.net

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