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Dialogue : A sankariste, sankariste et demi

Publié le mardi 22 février 2005 à 05h45min

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Habituée qu’elle est à entendre les éternels déchirements qui caractérisent le clan sankariste, l’opinion publique ne fut guère étonnée par l’annonce de la candidature à la présidentielle de maître Bénéwendé Sankara, ce qui porte à deux le nombre de ’’sankaristes’’ à la course au pouvoir.

L’autre, Ernest Nongma Ouédraogo, a connu ses moments de gloire à l’époque de la Révolution dite ’’populaire’’. Deux hommes aux points de vue quelque peu différents dus sans doute au contexte actuel. Et puis... entre générations différentes, il n’est pas aisé d’échanger... Même entre ’’sankaristes’’ bon teint !

Nongma : Comme ça, tu veux lutter avec nous ?

Me Sankara : Pas avec vous ! Je vais tenter de gagner l’élection...

Nongma : Comme moi ?

Me Sankara : J’en sais rien ! As-tu déjà vu deux ’’PF’’ dans un seul Faso ?

Nongma : Dommage qu’on ne m’ait pas écouté pour l’union !

Me Sankara : Les prêches étaient bons dans leur fond ! Sans doute les prêcheurs ne sont-ils pas les bons !

Nongma : Il n’y a plus aucune créativité dans ce pays...

Me Sankara : En tout cas, nous excellons très bien dans l’art du folklore...

Nongma : On ne fait que copier... et mal ! On ne parle plus de consommer burkinabè...

Me Sankara : Et pourtant...

Nongma : Regarde ce qu’on fout de notre coton ! Nous, nous serions arrivés à le consommer entièrement !

Me Sankara : Oui... vous envisagiez d’en fabriquer des soutiens-gorge et des cache-sexes !

Nongma : Un peu plus de sérieux, mon gars !

Me Sankara : C’était dommage pour vous que le pays ne fût ni une île ni une planète suspendue en dehors du système solaire !

Nongma : Tu devrais relire certains discours du grand camarade...

Me Sankara : Autre temps, autres murs, n’est-ce pas ? De nos jours, prudence et diplomatie sont deux clés essentielles pour entrer dans la case politique. Moi, je te comprends ! T’as une formation de flic chargé de faire respecter la loi et régner l’ordre à tout prix !

Nongma : Veux-tu dire que je suis un vieux meuble à mettre au rebut ?

Me Sankara : Ce n’est pas ce que j’ai dit ! Je te fais simplement remarquer que nous sommes au 21e siècle et qu’il est quasiment impossible de vivre en autarcie...

Nongma : Nous ne disons pas le contraire, mais nous choisissons nos relations...

Me Sankara : Dommage, il y a de nombreux problèmes partout chez vos amis !

Nongma : Ça, c’est la part de la désinformation savamment orchestrée par l’impérialisme et ses suppôts !

Me Sankara : Ce mot-là a perdu toute sa substance avec la globalisation ! Y a que les syndicalistes qui l’utilisent dans leurs luttes...

Nongma : Avec ça, tu te dis sankariste !

Me Sankara : Je n’ai guère vocation au martyre, alors j’essaie de rester lucide et... réaliste !

Nongma : Ah ! Les enfants sont beaucoup trop pressés de nos jours...

Me Sankara : Moi, je pense que lorsque les anciens paraissent au bout du rouleau, il faut laisser faire les enfants !

Nongma : C’est le nerf de la guerre qui manquera le plus dans cette campagne.

Me Sankara : J’ai toujours pensé que cela restait secondaire, quand on est convaincu de défendre des programmes lumineux !

Nongma : Même les révolutions se font avec des sous ! Comment réagiront les mécènes du sankarisme en voyant les sankaristes dispersés ?

Me Sankara : A qui la faute ?

Nongma : Tu ne vas tout de même pas m’accuser d’être la cause de l’atomisation des sankaristes !

Me Sankara : Enfin... laissons à l’histoire le temps et le soin d’en détecter les coupables...

Nongma : Quand je vois qu’avec un candidat unique on aurait pu tenir la dragée haute à celui-là...

Me Sankara : De qui parles-tu ?

Nongma : De Blaise, pardi !

Me Sankara : A ma connaissance, il n’a jamais annoncé sa candidature !

Nongma : Tu voudrais sans doute qu’il te fasse un dessin ; ou qu’il t’expédie un confidentiel le signifiant ? En tout cas, ce ne sera pas facile pour lui...

Me Sankara : Et pourquoi ?

Nongma : Bismarck disait qu’on « n’est jamais plus faible que lorsqu’on paraît soutenu par tout le monde ». Y a beaucoup trop de grenouilles dans cette mare-là...

Me Sankara : Pourvu que règne la transparence...

Nongma : Tu y crois, toi ?

Me Sankara : Des raisons de ne pas y croire ? De toutes les façons, nous serons très vigilants.

Nongma : Oui, mais, en attendant, toi tu traînes quelques casseroles avec les juges...

Me Sankara : Laisse tomber ! Le vent finira bien par tourner un jour !

Nongma : C’est pour quand ? Toi, tu n’as pas encore fini de rêver...

Propos incidemment recueillis par Le Journal du Jeudi

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