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Grandes manœuvres pour la participation des « Burkinabè de l’étranger » à la présidentielle 2015 (4/5)

Publié le lundi 24 mars 2014 à 00h50min

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Grandes manœuvres pour la participation des « Burkinabè de l’étranger » à la présidentielle 2015 (4/5)

Pas un jour, au Burkina Faso, sans son « Burkinabè de l’étranger ». Conférence des ambassadeurs + assemblée générale du Conseil supérieur des… Burkinabè de l’étranger (CSBE) obligent. Ce matin (mercredi 12 mars 2014), dans la « Chronique du gouvernement », opération du Service d’information du gouvernement (SIG) dans les grands médias du Burkina Faso, les « Burkinabè de l’étranger » étaient à l’ordre du jour. Le SIG dit même qu’ils étaient « au menu de l’actualité diplomatique au Faso ».

« La participation de nos compatriotes vivant à l’étranger à la vie politique de la nation, qui constitue à ce jour le maillon manquant de la chaîne de leur participation pleine et entière au développement de la patrie fera partie des sujets de réflexion ». Ce « maillon manquant », c’est le vote des « Burkinabè de l’étranger » (aux « élections présidentielles et référendaires ») institué depuis la loi du 7 mai 2009 mais jamais exercé jusqu’à ce jour. Un « déficit » souligne le ministère des Affaires étrangères et de la Coopération régionale qui est garant, via le CSBE, des intérêts des Burkinabè vivant à l’étranger.

Si la CENI est en charge de l’organisation des élections au Burkina Faso, en ce qui concerne les « Burkinabè de l’étranger », les ambassades et les consulats généraux, et plus globalement le MAE/CE, auront des tâches majeures à assumer : « élaboration de la base de données à travers l’enrôlement biométrique et la confection des cartes consulaires, la sensibilisation, la mise en place des Commissions électorales indépendantes d’ambassades, la détermination des centres de vote, l’élaboration d’un plan de communication, l’organisation pratique du vote ». C’est dire que les ambassadeurs et les consuls généraux vont avoir « du pain sur la planche » jusqu’à l’échéance de 2015. D’autant plus que ce n’est pas dans les pays les mieux organisés que se trouvent les principales communautés de « Burkinabè de l’étranger ».

Difficile de trouver des informations en la matière faute d’identification des ressortissants burkinabè à l’étranger. Ce ne sont pas toujours des « jeunes cadres dynamiques » mais souvent des ruraux peu alphabétisés. On notera d’ailleurs que si la IVème Conférence générale du CSBE débute demain (jeudi 13 mars 2014), la IIIème Conférence générale s’est tenue en 2007, autrement dit il y a une éternité. Quel que soit le discours politique tenu aujourd’hui, il faut reconnaître que la diaspora burkinabè n’a pas, par le passé, suscité d’intérêt majeur. Il est vrai aussi que pour les populations burkinabè « délocalisées », la mère-patrie, même si elle restait prégnante dans leur quotidien (ne serait-ce que par la langue), n’était pas la réponse à toutes leurs préoccupations.

J’ai le souvenir, au mitan des années 1980, d’un jeune étudiant burkinabè, à la Sorbonne, qui ne cessait de me répéter qu’il « préférait être pauvre à Paris que riche à Ouaga » car dans la capitale française il avait le sentiment de partager une « richesse nationale » tandis que dans la capitale burkinabè il n’y avait rien à partager, que la chaleur, la poussière, la misère... Les choses ont changé. Pour lui aussi. Il fait une brillante carrière dans une institution internationale basée à… Paris.

Une certitude cependant, il n’y a pas, au Burkina Faso, cette fascination de « l’Occident » que l’on constate à Dakar, à Bamako, à Abidjan… Et malgré les difficultés économiques et sociales du pays, et les contraintes familiales qui pèsent sur les jeunes générations, on ne rencontre guère d’adeptes de l’expatriation pour l’expatriation.

Les pays qui accueillent les plus grandes communautés burkinabè sont tous africains. Trois seraient « millionnaires » en Burkinabè : Côte d’Ivoire (3,5 millions), Ghana (3 millions), Mali (1 million). Viendraient ensuite le Bénin, le Togo, le Sénégal et le Niger avec, chacun, 400 à 500.000 Burkinabè. On dit aussi que les pays producteurs de pétrole d’Afrique centrale (et notamment la Guinée équatoriale) et ceux du golfe persique sont devenus des pôles de fixation pour les Burkinabè à la recherche d’un job. Ils seraient quelques milliers seulement (4.500) en France et en Italie, quelques centaines aux Etats-Unis et au Canada.

En fait, nul n’en sait rien. Mais ces informations sont extraites du mémoire soutenu en juin 2009 par Edouard Bouda, pour l’obtention du diplôme de conseiller des Affaires étrangères. Comme son mémoire (« Le rattachement des Burkinabè de l’étranger à leur pays d’origine et leur apport au développement » édité en 2011 sous le titre « Le rattachement et l’apport de la diaspora au Burkina Faso. Les retombées de l’émigration et les contributions parallèles au développement ») a obtenu la mention très bien et que le président du jury n’était autre que Laurentin Somda, qui a été secrétaire général du MAE/CR et ambassadeur au Canada, on peut légitimement penser qu’il est le mieux placé pour savoir ce qu’il en est des approximations à ce sujet.

Je ne sais pas quelle fonction Bouda occupe au sein de la diplomatie. Mais son point de vue, exprimé voici cinq ans, sur la situation de la diaspora burkinabè est à des années-lumières de la volonté exprimée aujourd’hui par les autorités. « Actuellement, écrit le MAE/CR dans la Chronique du gouvernement (mercredi 12 mars 2014), la contribution de la diaspora burkinabè au développement du pays est très importante, néanmoins, eu égards aux compétences et aux capacités de nos compatriotes à l’étranger, il est impératif pour nous de travailler à la capitalisation de ces atouts pour la patrie ». En 2009, Bouda écrivait : « Les Burkinabè de la diaspora accusent, à tort ou à raison, les autorités burkinabè de les ignorer au profit d’intérêts politiques en nouant et en promouvant des relations amicales avec des pays qui leur sont hostiles (Côte d’Ivoire, Libye…). Ainsi, après les meurtres, les expulsions (très souvent abusives) et la spoliation de Burkinabè de la Côte d’Ivoire, de la Libye, du Gabon, de la Guinée équatoriale, etc., force est de constater que l’Etat burkinabè n’a à ce jour déposé aucune plainte en vue de la protection des intérêts de ses ressortissants, ce qui fait dire à plus d’un que l’Etat ne s’intéresse aux Burkinabè de l’étranger que quand il s’agit de leur demande de soutenir le développement du Burkina en accroissant leurs investissements. En effet, l’Etat ne laisse percevoir aucun signe qu’il les défendrait à chaque occasion en tout temps. Cette attitude de « prédateurs » n’est pas sans susciter la méfiance des Burkinabè de la diaspora qui préfèrent agir là où se trouvent leurs intérêts ».

Bouda estimait que le CSBE manque « de moyens d’action et de poids politique », et serait utilement remplacé par un ministère des « Burkinabè de l’étranger ». Sauf, bien sûr, que le CSBE a une fonction représentative des « Burkinabè de l’étranger » tandis qu’un ministère n’aurait qu’une fonction administrative. Parfois trop de démocratie tue la démocratie.

Une certitude cependant : les « Burkinabè de l’étranger » ont eu, par le passé, trop souvent le sentiment d’être des Burkinabè de deuxième catégorie. Quand tout va bien, on ne peut que se réjouir que, par leur travail à l’étranger, ils financent les familles restées au pays (c’est d’ailleurs, souvent, la seule vision positive que l’on a d’eux). Quand tout va mal pour eux, ils sont vite oubliés. Ainsi ceux qui, pendant une décennie, ont été les victimes de la « crise ivoiro-ivoirienne » et ont dû regagner, contraints et forcés, le Burkina Faso après avoir été spoliés, n’ont guère vu leurs dossiers défendus auprès de la nouvelle administration ivoirienne. « Ils ne relèvent plus de la gestion du MAE/CR mais de l’action sociale et beaucoup se sont intégrés » m’affirme le secrétaire général de ce même MAE/CR, Marc Somda, à qui j’ai posé la question. O.K. !

Il n’empêche que le sentiment est fort d’avoir été « dégagés en touche » ; et la frustration est plus forte encore pour ceux qui ont connu un certain niveau de vie ailleurs de devoir se contenter, désormais, d’une maigre « assistance sociale ». Le problème est d’autant plus ardu que ce ne sont pas quelques dizaines ou centaines d’individus qui sont concernés mais des centaines de milliers pour ne pas dire plus.

Jean-Pierre BEJOT
La Dépêche Diplomatique

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Vos commentaires

  • Le 23 mars 2014 à 00:51, par Moussa En réponse à : Grandes manœuvres pour la participation des « Burkinabè de l’étranger » à la présidentielle 2015 (4/5)

    Bel article Mr Bejot ! Bien documente et bien articule. Depuis le debut.

    La question c’est pourquoi ces manoeuvres pour faire voter les Burkinabe de la diaspora. Pourquoi maintenant ? Pourquoi cette annee alors que le pouvoir de la 4e Republique a use de toutes sortes de subterfuges pour soutenir et expliquer que le vote de la diaspora n’est pas a la portee du Burkina Faso - financierement parlant disaient-ils... mais aussi sur le plan organisationnel ? Des missions ont meme ete depeche des missions pour precher l’impossibilite du vote de la diaspora Burkinabe. Pourquoi donc toute cette agitation a la veille de la Presidentielle de 2015 ?

    A bon entendeur, salut !

    Merci encore Mr Bejot !

    Je n’attends pas les reponses a ces questions dans vos ecrits. Un grand journaliste comme vous ne commettra jamais cette erreur. Ces questions sont pour vos lecteurs. Que ceux qui savent lire entre les lignes, le fassent. Le vote de la diaspora en 2015 est loin d’etre un cadeau offert par le pouvoir a la diaspora. Le Pouvoir de la 4e Republique n’est pas devenu brusquement genereux ! Il faut craindre que le vote de la diaspora soit la porte ouverte a tous les dangers - notamment la fraude electorale et son cortege de problemes. Personne n’est dupe !

    A bon entendeur, salut !

    Merci Mr Bejot.

  • Le 23 mars 2014 à 00:51, par Moussa En réponse à : Grandes manœuvres pour la participation des « Burkinabè de l’étranger » à la présidentielle 2015 (4/5)

    Bel article Mr Bejot ! Bien documente et bien articule. Depuis le debut.

    La question c’est pourquoi ces manoeuvres pour faire voter les Burkinabe de la diaspora. Pourquoi maintenant ? Pourquoi cette annee alors que le pouvoir de la 4e Republique a use de toutes sortes de subterfuges pour soutenir et expliquer que le vote de la diaspora n’est pas a la portee du Burkina Faso - financierement parlant disaient-ils... mais aussi sur le plan organisationnel ? Des missions ont meme ete depeche des missions pour precher l’impossibilite du vote de la diaspora Burkinabe. Pourquoi donc toute cette agitation a la veille de la Presidentielle de 2015 ?

    A bon entendeur, salut !

    Merci encore Mr Bejot !

    Je n’attends pas les reponses a ces questions dans vos ecrits. Un grand journaliste comme vous ne commettra jamais cette erreur. Ces questions sont pour vos lecteurs. Que ceux qui savent lire entre les lignes, le fassent. Le vote de la diaspora en 2015 est loin d’etre un cadeau offert par le pouvoir a la diaspora. Le Pouvoir de la 4e Republique n’est pas devenu brusquement genereux ! Il faut craindre que le vote de la diaspora soit la porte ouverte a tous les dangers - notamment la fraude electorale et son cortege de problemes. Personne n’est dupe !

    A bon entendeur, salut !

    Merci Mr Bejot.

  • Le 23 mars 2014 à 09:01, par né hors le Faso En réponse à : Grandes manœuvres pour la participation des « Burkinabè de l’étranger » à la présidentielle 2015 (4/5)

    MONSIEUR BEJOT,je suis avec attention vos réactions sur cette question du vote des Burkinabé a l étranger aujourd hui ,je voudrais vous faire comprendre quelque chose ,en effet ,pour voter il faut avoir le sens du patriotisme ,je dirai ce que je sais ,en l occurrence le cas de la cote d ivoire ,vous savez sur les 3,5 millions de Burkinabé de la cote je vous dirai seulement 30% sont vraiment patriotes (je dit patriote ,prêt pour mourir pour la patrie)dans de pareilles situations je pense que associer ces personnes y compris LES C EST LA NATURE SINON !!! ce serait donner du tabac aux poussins ,alors nous devons nous que le sens du patriotisme est en bon point avant de se lancer dans de tels programmes merci

  • Le 23 mars 2014 à 11:31, par freeway En réponse à : Grandes manœuvres pour la participation des « Burkinabè de l’étranger » à la présidentielle 2015 (4/5)

    QUE LE GOUVERNEMENT se dépêche afin que la démocratie survienne au Faso ainsi le peuple gagnera la coupe.assez de burkinabé vivent a l’étranger,de ce fait la CENI doit veillez a ce que tous les burkinabé participent aceptte vote,et les burkinabés vivant a l’extérieur et les burkinabés vivant a l’exterieur.

  • Le 23 mars 2014 à 11:48, par ibine claué En réponse à : Grandes manœuvres pour la participation des « Burkinabè de l’étranger » à la présidentielle 2015 (4/5)

    LA participation de la diaspora est un processus que nous respectons pleinement.a moins pour quelqu’un qui ne souhaite pas la paix,puisse dénigrer ce processus.la démocratie est la voix royale de la démocratie donc veillons a sa sauvegarde.merci

  • Le 23 mars 2014 à 11:50, par boureima ouedraogo En réponse à : Grandes manœuvres pour la participation des « Burkinabè de l’étranger » à la présidentielle 2015 (4/5)

    c’est une très bonne initiative de vouloir œuvrer pour la participation des burkinabés de l’étranger aux élections présidentielles de 2015 . c’est sûr que les consules des différentes villes de l’intérieur auront du pain sur la planche .il faut ajouté que l’ambassade ne fait que délivré des cartes de séjours mais aucune action de proximité pour les populations qu’il représente dans ce pays .ils sont livré à eux même ! les consules et autres ne sont là que pour récolté de raquetté l’argent de nos parents par des cotisations qui ne finissent jamais .l’ambassade a besoin ... ; le consule a besoin ....il faut donc revoir ce côté .il faut épaulé et non pillé .merci

  • Le 23 mars 2014 à 12:12, par sawadogo mamadi En réponse à : Grandes manœuvres pour la participation des « Burkinabè de l’étranger » à la présidentielle 2015 (4/5)

    il faut plus rapprochement entre consules et population , organiser des journées de sensibilisation .il faut souligner aussi que nombreux sont les burkinabés de la diaspora qui ne connaissent pas la vie politique de leur pays d’origine . si il y avait
    des représentants des partis politiques qui étaient actifs , ils auraient pus s’imprégner de la vie politique de leur pays .

  • Le 23 mars 2014 à 12:56, par PERRE MARCEL En réponse à : Grandes manœuvres pour la participation des « Burkinabè de l’étranger » à la présidentielle 2015 (4/5)

    CERTES que c’est bien bon de vouloir que les Burkinabé vivant y participent dans l’élection de leur président:mais avant tous nous voulons que l’organisation du référendum ne tarde plus.suite a ça on verra le reste.ok ??

  • Le 23 mars 2014 à 18:30 En réponse à : Grandes manœuvres pour la participation des « Burkinabè de l’étranger » à la présidentielle 2015 (4/5)

    Que veut PRIOTISME pour vous ?Vous connaissez tres mal la sensiblité de la DIASPORA .Pour nous etre patriote ,c’est de ne jamais oublier d’ou l’on vient,et pour ça ,poser la question a un Diaspo pour entendre sa reponse au lieu ,de dire des connories .Tous les diaspos connaissent tres bien les realites du burkina ,je dirai mieux meme plus quelqu’un au faso ,et a meme capable de resoudre des problemes ,tres mal vue de l’interieur.Le seul regret que Nous avons ,contre eux (citoyen de l’interieur) ,c’est leur l’arrogance ,et leur fierté tres mal placé, pas du tout ouvert sur le monde ,et tres renfermer sur leur nombril :ceci n’est pas du tt du patriotisme ,mais l’ignorance ,et NOUS ESPERONS BCP QU’AVEC L’ALTERNANCE ,TTES CES MANIERES VONT TOMBEES ,pour rendre les citoyens responsables du bien COMMUN ....

  • Le 24 mars 2014 à 19:28, par le fils du pays En réponse à : Grandes manœuvres pour la participation des « Burkinabè de l’étranger » à la présidentielle 2015 (4/5)

    il faut noter que cette décision d’introduire les burkinabés vivant a l’extérieur dans le scrutin a venir est une oeuvre a féliciter,cela va permettre donc de renforcer cette démocratie et d’avoir des élections pleine ou les burkinabés de près ou de loin auront leur mot a dire.

  • Le 24 mars 2014 à 19:40, par l’etalon En réponse à : Grandes manœuvres pour la participation des « Burkinabè de l’étranger » à la présidentielle 2015 (4/5)

    Félicitation donc a nos autorités pour cette initiative,c’est un geste qui va vraiment d’une part ou d’une autre renforcer la démocratie dans notre pays ;qui avait dit donc qu’il y’avait pas la vraie démocratie au Burkina Faso ?

  • Le 24 mars 2014 à 21:34, par dja rasta En réponse à : Grandes manœuvres pour la participation des « Burkinabè de l’étranger » à la présidentielle 2015 (4/5)

    Une grande porte s’est ouvert pour la diaspora burkinabé partout dans le monde et surtout ivoirienne,avec la fusion de cette masse au électeurs vivants sur le territoire la politique du pays des hommes intègres a gagne un nouveau souffle. mobilisons en 2015 pour aller élire notre président.

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