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Mali 2014 : IBK ne veut toujours pas comprendre qu’il n’est qu’en « présidence surveillée » (3/3)

Publié le dimanche 16 février 2014 à 08h39min

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Mali 2014 : IBK ne veut toujours pas comprendre qu’il n’est qu’en « présidence surveillée » (3/3)

Ils sont venus. Ils sont tous là. UE, UA, ONU. Pour rappeler à Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) que les accords de Ouagadougou du mardi 18 juin 2013 engagent tous ses signataires. Et que ce sont ces mêmes accords qui font qu’il est, aujourd’hui, président de la République (cf. LDD Mali 0121/Lundi 3 février 2014). Djibrill Y. Bassolé, ministre des Affaires étrangères du Burkina Faso, a même fait le déplacement à Koulouba, le mardi 21 janvier 2014, pour transmettre à IBK un message de Blaise Compaoré, médiateur de la Cédéao.

Message de « fraternité et de solidarité » scellant « des relations séculaires » entre le Mali et le Burkina Faso. Bassolé a rappelé à son interlocuteur que « l’accord cadre du 6 avril 2012 et l’accord préliminaire du 18 juin ont favorisé le retour à l’ordre constitutionnel par la mise en place d’une transition et la tenue de l’élection présidentielle. Ces accords ont aussi consacré les éléments essentiels pour la préservation de la souveraineté du Mali à savoir la reconnaissance par toutes les parties de l’unicité du territoire, de la laïcité, des droits humains et des libertés fondamentales ». Il a ajouté qu’il « appartient désormais aux Maliens de définir les modalités pour la poursuite et la finalisation du processus de dialogue politique pour aboutir à la restauration d’une paix stable et durable au Mali ». Enfin, il a suggéré qu’il serait « utile de profiter de la grande mobilisation actuelle de la communauté internationale pour la mise en œuvre efficiente de l’accord de Ouagadougou, en particulier ses dispositions relatives au cantonnement des combattants des mouvements armés du Nord Mali, afin de créer la confiance indispensable à un dialogue inclusif et fructueux ».

On ne peut pas être plus clair. Et pourtant, pour l’être plus encore un commando d’une quinzaine de personnalité a débarqué à Bamako (mais aussi à Mopti) au cours du dernier week-end (1/2 février 2014). Tous représentants du Conseil de sécurité. Dirigés par le diplomate français Gérard Araud. Un diplomate, mais pas n’importe lequel. Araud a été ambassadeur en Israël, directeur général des affaires politiques et de sécurité au Quai d’Orsay ; il est actuellement ambassadeur, représentant permanent de la France au Conseil de sécurité et chef de la mission permanente française auprès des Nations unies à New York. Cerise sur le gâteau : le 5 janvier 2012 il a été élevé à la dignité d’ambassadeur de France ! Araud est diplomate. Avant son entretien avec IBK, il n’a pas manqué d’affirmer que le « rétablissement de l’ordre constitutionnel » au Mali « nous le devons au peuple malien ».

O.K., on ne va pas chicaner pour quelques morts français, tchadiens et « minusmaniens ». Ce qui lui a permis d’enfoncer le clou : « Les membres du Conseil de sécurité souhaitent appuyer la mise en place, dès que possible, d’un dialogue national inclusif pour une solution durable au Nord du Mali. Une solution qui ne peut être que malienne, décidée par les Maliens et pour le Mali ». A l’issue de sa visite, Araud a été tout autant diplomate : « Le président a affirmé sa volonté de réunifier, de réconcilier les Maliens, ce qui ne m’a pas surpris ; mais aussi, du côté des groupes armés, tous ont naturellement dit qu’ils se plaçaient dans le cadre de la souveraineté et de l’unité du Mali ». Et s’il réaffirme que « le Mali ne peut pas exister avec les groupes armés », c’est pour rappeler que, justement, les accords de Ouagadougou posent clairement la nécessité du cantonnement et du désarmement.

« Nous partons de Bamako impressionnés par la dignité du peuple malien, par la vitalité des institutions. Le Mali a des institutions légitimes et c’est à ces institutions de diriger le processus de réconciliation et nous sommes rassurés par ce que nous voyons de part et d’autre – autorités et groupes armés – pour parvenir à une vraie réconciliation », a ajouté Araud. C’est mettre les maliens face à leurs responsabilités. Avec diplomatie. La même diplomatie utilisée pour dire que « l’aboutissement de la négociation » doit se faire à Bamako même si des discussions préliminaires peuvent être menées dans « les capitales voisines ».

Le « dialogue » plutôt que la « confrontation », c’est la feuille de route qui, selon l’ONU, est celle de IBK ; même si c’est jouer sur les mots et ne pas leur donner le même sens que le chef de l’Etat malien. Tout cela dans un contexte régional délicat ; et dans un contexte politique intérieur qui ne l’est pas moins. Au cours des mois passés, IBK a beaucoup voyagé. Son hyperprésidence, confortée par une Assemblée nationale à sa dévotion* présidée par Issaka Sidibé, « père de la belle-fille présidentielle »**, donne peu de visibilité à son premier ministre, Oumar Tatam Ly***.

Ly est pourtant l’instigateur du « contrat de législature » (cf. note *), qui se veut un acte politique fondateur fixant la configuration de la majorité présidentielle mais fait craindre, à certains commentateurs, le retour à la « politique du consensus » chère à Amadou Toumani Touré (ATT). C’est encore Ly qui s’est déplacé à Bruxelles, ces derniers jours, pour s’entretenir avec José Manuel Barroso, président de la Commission européenne, et Kristalina Georgieva, Commissaire chargée de l’aide humanitaire d’urgence, ainsi qu’avec les responsables de la Mission EUTM-Mali qui assure la formation de l’armée malienne. Mais les entretiens ont surtout concerné, dans le cadre du suivi de la conférence des donateurs de mai 2013, les PTF (partenaires techniques financiers).

Selon Ly, sur les 1.902 milliards de francs CFA octroyés par les donateurs, 1.400 milliards ont déjà fait l’objet d’accords de financement signés et 767 milliards (soit environ 40 % des ressources) ont été engagés et ont fait l’objet de décaissements. Les PTF « ont salué les efforts de l’Etat dans la lutte contre la corruption et la délinquance financière et en matière de décentralisation ». Ly travaille. Dans le cadre du Programme d’actions du gouvernement (PAG 2013-2018) mais aussi dans le long terme fixé par l’Etude nationale prospective (ENP Mali 2025) qui se veut « un élément important du processus de réflexion sur le renouveau de la planification au Mali, fondé sur la définition des grands objectifs de développement du pays, au terme d’une démarche participative et en s’inscrivant dans une perspective à long terme de la société malienne suivant un horizon excédant la durée des mandats électoraux »****.

Reste à savoir, dès lors que la nouvelle Assemblée nationale est en place, quand et comment aura lieu le prochain remaniement ministériel. Que l’on dit imminent. Si Ly ne devrait être voir son poste remis en question, il est probable que plusieurs ministres perdent leur portefeuille, à commencer par Zahabi Ould Sidi Mohamed, ancien fonctionnaire des Nations unies, qui a bien du mal, face à IBK, à assumer sa tâche de ministre des Affaires étrangères.

* Un contrat de législature a été signé par 14 formations politiques de la nouvelle Assemblée nationale (ADP, Adema, APR, ASMA, UDD, CNID, MPR, Miria, CDS, RPM, Yelema, UM-RDA, Codem, FARE) regroupant 112 députés. Il n’y a donc que 35 députés « d’opposition » appartenant essentiellement à l’URD, au Parena et au PDES.

** Ce qui fait hurler une partie de la presse malienne qui, en dressant l’état des lieux des connexions familiales ou amicales, dénonce une « IBKarchie » après une « ATTcratie ».

*** Oumar Tatam Ly vient d’épouser religieusement Riyahata Touré, la fille de Younoussi Touré, président de l’Assemblée nationale intérimaire pendant la transition (le président en titre, Dioncounda Traoré, assurant l’intérim de la présidence de la République ; Touré était le premier vice-président). Considéré comme « un des rares cadres et hommes politiques [maliens] qui ne trainent aucune casserole », cet ancien premier ministre de Alpha Oumar Konaré (1992-1993), a été membre fondateur de l’Adéma-PASJ avant de créer l’Union pour la République et la démocratie (URD) avec Soumaïla Cissé (challenger de Ibrahim Boubacar Keïta lors de la présidentielle 2013) dont il était jusqu’à présent le président.

**** Discours de Oumar Tatam Ly lors de la cérémonie d’ouverture de la journée nationale de la prospective au Mali – 23 janvier 2014.

Jean-Pierre BEJOT
La Dépêche Diplomatique

P.-S.

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Vos commentaires

  • Le 16 février 2014 à 09:33, par MemoireVive En réponse à : Mali 2014 : IBK ne veut toujours pas comprendre qu’il n’est qu’en « présidence surveillée » (3/3)

    Surveillé ou pas, c’est son problème. Depuis que la médiation burkinabé bat de l’aile vous avez jeté votre dévolu sur IBK. Quand un journal a un titre aussi ronflant "dépêche diplomatique" il se doit de se départir de ses intérêts partisans propres afin de présenter à ses lecteurs de haut-niveau des analyses sérieuses. Vous n’irez nulle part parce que vous avez vendu votre âme à qui vous rendez services, il vaut mieux pour vous rejoindre la chorale de la cour que de vous afficher sur la place du marché.

    • Le 16 février 2014 à 11:05, par Élève de maternelle. En réponse à : Mali 2014 : IBK ne veut toujours pas comprendre qu’il n’est qu’en « présidence surveillée » (3/3)

      En quoi la médiation Burkinabé bat de l’aile ?. Le Mali joue au chat et à la souris avec sa rébellion Touareg depuis plus de 60 ans sans solution définitive. La médiation qui a battu de l’aile est celle de l’Algérie dont les accords n’ont pas permis au Mali de guérir définitivement des sa Maladie Touareg mais plutôt de tomber dans un coma. C’est la médiation Burkinabé en relation avec la communauté internationale qui a permis de sortir le Grand Ma...de son coma et posé les bases d’une guérison définitive du Ma....encore faut-il que le Ma... soit conscient de la profondeur de son mal et de la nécessité de suivre la prescription pour l’éradication du mal. Le conflit israélo palestinien à plus de 70 ans et la médiation Américaine y est toujours active avec des accélérations des pauses des reprises sans qu’on parle de battre de l’aile. Les grands conflits ne se règlent pas à coup de bâton magique mais par par des négociations longues et fastidieuses. La médiation Burkinabé a à peine 2 ans avec des résultats tangibles ( le Ma...est debout intégré à la communauté mais pas complètement guéri ) et des perspectives prometteuses sous réserve que les tâches prévues en aval de la mise en place des institutions légitimes soient exécutées par les parties belligérantes. La balle est dans le camp du Ma....et non de la médiation Burkinabé et de la communauté internationale qui n’attendent que la volonté des autorités Maliennes pour l’aider à déroulé le reste de la feuille de route pour une paix Malienne définitive entre Malien dans un Mali unique et unitaire dans ses frontières intangibles.

  • Le 16 février 2014 à 21:31, par malien En réponse à : Mali 2014 : IBK ne veut toujours pas comprendre qu’il n’est qu’en « présidence surveillée » (3/3)

    Le burkinabe considèré les petit français comme leur dieux vive ibk abat les petit français

  • Le 17 février 2014 à 07:46 En réponse à : Mali 2014 : IBK ne veut toujours pas comprendre qu’il n’est qu’en « présidence surveillée » (3/3)

    Avez vous oublié que le BURKINA a fait deux guerres avec son voisin du MALI ? N’attiser pas le feu entre ces deux peuples car vous n’irez pas au combat et le développement de nos états nous vous intéresse pas. De grâce, que la médiation soit retirer à BLAISE au profit de L’ALGÉRIE, en quoi cela nous regarde t-il ? Attention à vos prises de positions qui peuvent être interpréter comme celles de notre peuple. Arrêter ça tout de suite.....

  • Le 17 février 2014 à 11:37, par LINDEPENDANT En réponse à : Mali 2014 : IBK ne veut toujours pas comprendre qu’il n’est qu’en « présidence surveillée » (3/3)

    LA DEPECHE DIPLOMATIQUE DE J.P. BEJOT EST EN ECRITURE SURVEILLEE ; DESORMAIS. COMPTE PAS SUR LA DST...

  • Le 17 février 2014 à 11:39, par LE JUSTE En réponse à : Mali 2014 : IBK ne veut toujours pas comprendre qu’il n’est qu’en « présidence surveillée » (3/3)

    OUI PEJOT JE CROIS COMME TOI QUE IBK DOIT FAIRE COMME BLAISE,ADO ET AUTRES PRÉSIDENTS DE L’AOF. JOUER LE RÔLE QUI EST DANS LE SCRIPT,SINON GARE ; IL N’A AUCUNE LIBERTÉ DE PENSER QUOI QUE CE SOIT MAIS SEULEMENT APPLIQUER CE QUI EST DÉJÀ PENSE UN POINT C’EST TOUT. OUI J.M PEJOS OU BEJOT TU A RAISON IL DOIT SUIVRE ! IL A INTÉRÊT A SUIVRE LE MAÎTRE SI NON A.T.T POURRA LUI DONNER CONSEIL QUANT ILS SE RETROUVERONT A DAKAR.DANS TOUS LES CAS S’IL CONTINU DE PENSER ON LÂCHERA LES FAUVES. MERCI A TOI
    LE JUSTE

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