LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Soyez un repère de qualité. Certaines personnes ne sont pas habituées à un environnement où on s’attend à l’excellence.” Steve jobs

Témoignage sur… : Feu Salif Déré

Publié le mardi 10 septembre 2013 à 18h46min

PARTAGER :                          
Témoignage sur… : Feu Salif Déré

Ce témoignage sur l’illustre disparu, El hadj Salif Déré Ouédraogo pourrait surprendre parce que nous n’avons pas eu de relations connues, ni familiales, ni professionnelles.

Et pourtant, nous fûmes par moments proches, cet aîné, ce grand Monsieur et moi ; c’est un homme dont les qualités reposaient l’humilité, la discrétion, la générosité, le respect des autres, la piété… Dans les “maximes”, la Rochefoucauld ne dit-il pas : " La parfaite valeur est de faire sans témoins ce qu’on serait capable de faire devant tout le monde ". Cette citation reflète la vie d’El hadj Salif Déré qui a su allier des réalités théoriquement incompatibles à savoir, la vérité, la morale, la discrétion et la réussite dans les affaires. Les auteurs américains Robert G. Salomon et, Kristine R. Hanson, dans leur excellent ouvrage intitulé : " la morale en affaires, clé de la réussite", édité aux nouveaux Horizons et traduit de l’américain au français par Sophie Marnat, peignent en quelque sorte l’homme d’affaires Salif Déré Ouédraogo. Ce livre m’avait servi de support pour une conférence publique suivie de débats, que j’avais donnée au Centre culturel américain sur le même thème : " Morale et succès dans les affaires ".

Naturellement, Salif Déré était tout indiqué pour présider et partager les secrets de sa réussite avec les 90 invités (hommes d’affaires, économistes, financiers, enseignants, étudiants). Malheureusement, après avoir donné son accord de principe, il se désista une semaine avant la conférence soit le 05 octobre 2000 en évoquant des raisons convaincantes, conformes à sa personnalité :
- Refus de paraître prétentieux ou “donneur de leçons” ;
- Refus d’être présenté comme homme exemplaire, vertueux et parfait, alors qu’en tant qu’homme, il se sait imparfait ; surtout devant la presse qui était invitée. Aussi, avait-il souhaité être remplacé, ce qui avait été fait en la personne d’un Directeur général de Banque, très discret lui aussi. Il faut savoir qu’il n’a fait que l’école coranique, mais qu’il s’est auto-formé en français (parler, écrire, lire).

Il fut un moment responsable, dans le cadre de la francophonie, et il m’avait demandé de proposer quelqu’un à qui il cèderait ce poste qui n’était pas le sien.
C’est en 1976, alors chef intérimaire des ventes à la CICA Ouaga (Groupe CFAO) avant mon affectation, comme premier directeur voltaïque de CICA Bobo en mars 1977, que j’ai connu ce grand Monsieur ; idem pour d’autres hommes d’affaires tels que feu “Président Oumarou Kanazoé”… Yaméogo Salif RELAX (CICA Bobo en 1977), etc.

Ensuite, nous avions entretenu des relations sporadiques lorsque, passé à la RAN (chemins de fer), incontournable à l’époque, je fus affecté en 1982 comme chef d’Agence commerciale de la RAN Ouaga. Mais, c’est à la Chambre de commerce où j’ai servi pendant des années comme membre de l’Assemblée consulaire, que j’ai mieux connu et apprécié l’homme. En effet, il était président de la Commission professionnelle et avait souhaité que je fus son vice-président, mais je lui avais proposé que ce soit un autre élu consulaire de Bobo, et moi-même au poste de secrétaire ; ce qu’il avait accepté. Ainsi, Monsieur (Solo) Souleymane CIREBA, entrepreneur en bâtiments, devint vice-président.

Il faut rappeler que Salif Déré, Balima, El Hadj Djanguinaba Barro et, autres, étaient actionnaires de la SONACEB Bobo dont j’étais le Directeur Général (Société nationale des cartons et emballages du Burkina), en partenariat avec le grand groupe français SICAL (LUMBRES) et des privés nationaux.
Bien sûr, Djanguinaba, qui du reste était le plus gros actionnaire après l’Etat, SICAL et aussi un client important à travers sa société la SOFIB (huilerie savonnerie) comme la MABUCIG, la SOSUCO, la CITEC,.. est différent à bien des égards de Salif Déré.

A Paris, et à Rouen, où nous étions allés en forte délégation (hommes d’affaires, ministère du Commerce…), conduite par l’ex-ministre du Commerce, Kader Cissé, dans le cadre de la création de l’ISGE (Institut supérieur de génie électrique) fonctionnel depuis quelques années (cf. excellent publi-reportage réalisé par la Chambre de commerce et récemment diffusé par la TNB), le président Salif Déré avait posé à cette occasion des actes positifs discrets de portée incommensurable. Et qui l’a su ?

Je pourrais témoigner sur des pages, mais il faut toujours respecter la propension du disparu à la discrétion. Malheureusement, je le voyais très peu, peut-être une fois tous les 3 ans, ce qu’il m’avait toujours reproché, surtout que j’habite à 10 minutes de chez lui.

En effet, combien de Burkinabè savaient que je le connaissais depuis 1976 et auraient compris mes fréquentations ?
Par exemple, je ne l’avais pas vu depuis 2011 et c’est en juin 2013 que son grand ami Amadé Bangrin Ouédraogo m’a dit un soir qu’il venait d’accompagner mon grand frère Salif Déré à l’aéroport pour des soins en France pour deux semaines.
A son retour de France, j’étais passé un soir chez lui pour le saluer et il m’avait dit qu’il souhaitait que je lui rende souvent visite parce qu’il aimait échanger avec moi sur divers sujets même pendant 5 à 10 mn seulement ; malheureusement je n’ai pu le faire jusqu’à cet évènement malheureux. D’où ce témoignage dans la presse qui est une première dans ma vie.

Décédé le 16 /08 /2013 à Paris et inhumé le 23/08/2013 à Ouaga l’intervalle dans lequel j’étais moi aussi en clinique, donc absent de tout. Quels regrets !
Paix à son âme et que Dieu bénisse sa famille et veille sur elle
Cher grand frère de valeur, dors en paix et que la terre du Burkina, que tu as beaucoup servie dans la très grande discrétion, te soit légère.
Très sincèrement

FOFANA Demba

L’Express du Faso

PARTAGER :                              

Vos commentaires

  • Le 11 septembre 2013 à 08:03 En réponse à : Témoignage sur… : Feu Salif Déré

    Que la terre du Burkina lui soit légère.

  • Le 11 septembre 2013 à 13:12, par Tk En réponse à : Témoignage sur… : Feu Salif Déré

    Que la terre du BF lui soit legere ! Beau temoignage Demba !

  • Le 11 septembre 2013 à 13:21 En réponse à : Témoignage sur… : Feu Salif Déré

    paix à son ame

    • Le 11 septembre 2013 à 15:04 En réponse à : Témoignage sur… : Feu Salif Déré

      Paix à l’âme du défunt.
      Dommage, je ne suis plus un adolescent. Je cherche toujours des personnes qui ont réussi et qui accepte de parler aux jeunes en commençant ainsi : "Je ne suis plus jeune, je ne prétends pas avoir réussi. Mais j’ai parcouru un bout de chemin. Mon age et mon expérience me donnent l’avantage et m’autorisent à vous parler". Ainsi, les Kanozoé, les Deré, les Bangrin, les Diawara et autres Nassa avaient et ont le DEVOIR de parler aux jeunes pour leur donner envie de réussir. Ce n’est pas le malin. Si Dieu te crée arbre à fourche, c’est que le bon Dieu veut que les petits enfants te montent. C’est mon proverbe que je viens d’inventer !

  • Le 11 septembre 2013 à 18:56, par Soum En réponse à : Témoignage sur… : Feu Salif Déré

    Joli geste de reconnaissance . Ça n’arrive pas souvent et pour plusieurs raisons que les hommes parlent bien de ceux qui leur ont rendu beaucoup de services. Monsieur Demba également fait beaucoup pour ce pays par son franc parler et sa générosité intellectuelle. Je lui souhaite bon rétablissement. Les morts n’étant jamais morts en Afrique, votre ami vous lira au même titre que tous ceux qui liront votre article un de ces jours.

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique