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Béatrice Damiba, présidente du Conseil supérieur de la communication : « Le CSC au Burkina peut se vanter d’être représentatif de ce quatrième pouvoir qu’est la presse »

Publié le mardi 25 juin 2013 à 20h43min

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Béatrice Damiba, présidente du Conseil supérieur de la communication : « Le CSC au Burkina peut se vanter d’être représentatif de ce quatrième pouvoir qu’est la presse »

Avec la révision constitutionnelle du 11 juin 2012, notre Loi fondamentale consacre désormais en son titre XIV ter, le Conseil supérieur de la communication en tant qu’autorité administrative indépendante. Dans une logique de consolidation et d’opérationnalité de cette consécration constitutionnelle, l’Assemblée nationale a voté le 14 mai 2013, une loi organique portant attributions, composition, organisation et fonctionnement du Conseil supérieur de la communication. Retour sur les impacts de cette loi dans le cadre d’un entretien réalisé le 20 juin 2013 avec la présidente de l’institution de régulation de l’information, Béatrice Damiba. Lisez !

Lefaso.net : Comment le CSC se porte-t-il aujourd’hui dans un contexte national où la régulation de l’information est à géométrie variable ?

Béatrice Damiba (BD) : Je pense que le CSC malgré tout se porte bien. Il ne faut pas rester figé sur des acquis. Et le CSC est dans une dynamique de changement, de réadaptation permanente à l’évolution, notamment à l’évolution technologique. Ce qui fait que depuis ces deux dernières années, nous avons entrepris de relire les textes de base de la communication au Burkina, que sont le Code de l’information, le Code de la publicité, et aussi d’élaborer une nouvelle loi sur la communication audiovisuelle parce qu’elle n’existait pas. Nous avons également entrepris et obtenu la constitutionnalisation du Conseil supérieur de la communication, et évidemment comme conséquence, une nouvelle loi organique a été élaborée et vient récemment d’être adoptée par l’Assemblée nationale.

Tous ces nouveaux textes tendent à amener le Conseil supérieur de la communication à être en phase justement avec l’évolution et aussi sur la base de certaines bonnes expériences, acquises dans d’autres pays, et dont le CSC pouvait s’inspirer. C’est ainsi que par exemple la loi organique qui vient d’être adoptée consacre la permanence des Conseillers qui jusque-là n’étaient pas permanents, et donc n’étaient pas toujours disponibles. C’est ainsi aussi que par harmonisation, le mandat est ramené à cinq ans une seule fois pour les Conseillers. Le mode de désignation aussi des membres du collège sera un petit peu modifié. Donc, voilà un peu cette dynamique.

L’autre chantier, c’est aussi la décentralisation du CSC qui a déjà une délégation régionale à Bobo, qui aura bientôt une délégation régionale à Fada pour couvrir l’Est, mais qui aussi depuis 2012, a recruté des représentants individuels au niveau des provinces pour permettre à l’institution de mieux couvrir le Burkina Faso en termes de suivi des contenus des médias. Il s’agit donc de toujours travailler à combler les insuffisances et à renforcer l’institution par un meilleur ancrage de celle-ci dans le paysage institutionnel du Burkina Faso.

Je pense donc qu’à l’heure actuelle, on peut dire que le CSC, par rapport au CSI à sa création en 1995, au bout donc de 18 ans d’existence, le Conseil supérieur de la communication est devenu une institution adulte, une institution mûre et qui, quand même, a une certaine autorité dans le domaine du suivi des médias au Burkina.

Lefaso.net : A quel niveau se trouve aujourd’hui la loi organique dont vous avez fait cas et qui est relative à la constitutionnalisation du CSC, quand on sait qu’après l’Assemblée nationale elle doit être soumise au Conseil constitutionnel avant sa promulgation ?

BD : Comme ce processus ne relève plus vraiment du CSC, je ne peux pas vous dire aujourd’hui à quelle étape ce processus se trouve. Je sais qu’il y avait tout un paquet de lois ordinaires mais aussi de lois organiques comme par exemple la loi organique relative au Médiateur du Faso qui a aussi été adoptée à la même période et qui doit aussi être soumise effectivement au contrôle de constitutionnalité. A l’heure actuelle, je ne sais pas où on en est avec ça. J’espère qu’elle suit son chemin normalement.

Lefaso.net : Avec cette loi, le CSC devient une autorité administrative indépendante. Est-ce à dire qu’il détient désormais l’effectivité du quatrième pouvoir à l’image de l’Assemblée nationale qui détient le premier pouvoir en démocratie telle que conçue à l’origine ?

BD : Ce nouveau statut d’autorité administrative indépendante devra permettre au CSC d’affirmer davantage son indépendance et son autorité. On ne peut pas le comparer à l’Assemblée nationale, parce que les conseillers ne sont pas des représentants élus par les médias. Il y a des représentants des médias au niveau du collège, il en aura toujours ; ce qui est différent d’autres pays. Même en France, les médias ne désignent pas des représentants au CSA. Par rapport à une instance occidentale comme le CSA, je me dis que le CSC est beaucoup plus représentatif des médias qui y ont aussi leurs représentants. Mais il y aura toujours des conseillers qui seront désignés par certaines autorités comme le chef de l’Etat, ou le président de l’Assemblée, ou le président du Conseil constitutionnel qui, eux aussi sont détenteurs du pouvoir du peuple c’est vrai, mais indirectement.

Moi je pense qu’aujourd’hui, le CSC au Burkina peut se vanter d’être représentatif de ce quatrième pouvoir qu’est la presse et pour laquelle presse d’ailleurs il voue l’essentiel de ses activités en termes d’accompagnement, de contrôle, de suivi des activités, de formation, de défense et de protection du journaliste.

Lefaso.net : Quelle appréciation faites-vous de la composition du Conseil supérieur de la communication telle que prévue par la future loi organique ?

BD : Dans la nouvelle loi organique, il est prévu maintenant 9 membres au lieu de 12, qui seront choisis par le chef de l’Etat (3), par les associations des professionnels de la presse (3 également), le président de l’Assemblée, le président du Sénat et le président du Conseil constitutionnel. Nous souhaitons que ce soit davantage sur la base des profils pour que le collège ait une composition diversifiée du point de vue des profils et qu’également l’aspect de la dimension genre puisse être pris en compte.

Lefaso.net : Au regard des autorités de désignation comme vous venez de décrire, ne trouvez-vous pas que le risque de politisation de l’institution s’en trouvera grandi ?

BD : Je ne pense pas. C’était toujours comme ça, même dans sa composition actuelle, ce sont les mêmes, à part le président du Sénat qui n’existait pas et n’existe pas encore, qui désignent les conseillers. Mais il faut dire que l’essentiel est que l’association des professionnels soit aussi prise en compte.

Moi je trouve que notre méthode est meilleure. Au Sénégal par exemple, c’est le chef de l’Etat qui désigne tout le monde. Mais des associations lui proposent trois, et lui il choisit parmi ces trois. Ça revient à dire que c’est le chef de l’Etat seul qui désigne les gens, alors qu’ici, la désignation vient de plusieurs autorités et le chef de l’Etat ne conteste pas quand on lui fait les propositions ; il se contente de prendre les décrets.

Je pense donc que la composition du Conseil supérieur de la communication est plus représentative que la plupart des instances de régulation de la communication dans d’autres pays.

Lefaso.net : Quelle est votre analyse sur les rapports entre le CSC et le Conseil constitutionnel ?

BD : Nous avons toujours eu de bons rapports avec le Conseil constitutionnel, surtout pendant la période électorale, le Conseil constitutionnel a toujours désigné 1 membre ; ce sera toujours le cas, en l’occurrence un magistrat. A l’heure actuelle même, le vice-président du CSC émane de la famille des magistrats ; il a été désigné par le Conseil constitutionnel.

Nous n’avons aucun problème dans nos rapports. Bien au contraire, nous échangeons beaucoup avec eux. Nous n’avons donc aucun problème de collaboration avec le Conseil constitutionnel.

Lefaso.net : Les conseils seront désormais tenus au secret des délibérations à vie. Qu’est-ce qui, selon vous, fonde cette astreinte ?

BD : Cela ne change rien à la réalité. Il n’y a pas de secret d’Etat dans les délibérations du Conseil supérieur de la communication ; donc c’est juste une question d’écriture. Mais cela ne pose aucun problème en fait.

Lefaso.net : Qu’en est-il du dispositif mis en place par le CSC pour la régulation du contenu des nouveaux médias ?

BD : Il fallait bien en tenir compte. D’ailleurs, dans les projets de lois en cours d’adoption sur la presse écrite, l’audiovisuel, etc., on a déjà prévu des dispositions sur les médias en ligne. Mais, il nous a été recommandé de réfléchir à une loi spécifique pour les médias en ligne ; ce qui n’est pas encore le cas. Il se peut que dans les prochaines années, il y ait une loi spécifique se rapportant donc aux médias en ligne.

Lefaso.net : Peut-on en savoir sur vos attentes par rapport au séminaire du RIARC que vous accueillez ?

BD : Comme tout rendez-vous, ce sera pour nous des retrouvailles avec les autres instances de régulation, et nous espérons qu’au sortir de ce séminaire de deux jours, on aura des réponses, ou au moins, le début des réponses aux questions que tout le monde se pose par rapport au développement très rapide des technologies et de la convergence numérique qui est au centre du thème de ce séminaire.

Evidemment, il ne s’agit pas de trouver des solutions toutes faites du jour au lendemain, mais d’avoir une réflexion qui permette de dégager des pistes en harmonie avec toutes les autres instances.

Entretien réalisé par Fulbert Paré

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