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Initiative pour la transparence dans les industries extractives : Cette décision qui déjoue les ‘’plans’’ de Joseph Kabila

Publié le jeudi 25 avril 2013 à 21h35min

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Initiative pour la transparence dans les industries extractives : Cette décision qui déjoue les ‘’plans’’ de Joseph Kabila

Si à Ouaga, les acteurs de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE) n’ont pas encore fini de célébrer l’obtention par le Burkina du statut de pays conforme, à Kinshasa, ce n’est pas du tout la joie. Et pour cause, la récente décision du conseil d’administration de l’ITIE suspendant temporairement de ses rangs le pays (République démocratique du Congo-RDC-), a déçu plus d’un et quelque peu déstabilisé les plans des politiques.

Secret de polichinelle, ce n’est pas le partage équitable des revenus des richesses du sous-sol qui préoccupe au fond tous les acteurs de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives sous nos tropiques. Certains y vont avec des arrière-pensées, celles de défendre, de préserver leurs intérêts. Même les politiques dont le rôle premier est d’assurer un partage équitable des richesses nationales ne sauraient dans cette affaire se prévaloir d’une odeur de sainteté. S’ils s’engagent à fond dans l’ITIE, à y voir de près, c’est pour tirer les dividendes politiques que procure le prestigieux label d’une conformité à la norme internationale de bonne gouvernance dans le secteur minier.

Mais, les autorités politiques de la République Démocratique du Congo, pour avoir fait preuve d’un zèle excessif dans le portage du projet ITIE, viennent de se faire avoir de la façon la plus lamentable.

Doublement raté pour Kabila fils

Et quand le 17 mars 2013 le géant (minier) congolais est stoppé net dans sa lente et louvoyante progression en matière de promotion de la transparence minière pour, dit-on, « un défaut d’exhaustivité et de qualité des données fournies », ce sont les tenants du pouvoir à Kinshasa et au premier chef Joseph Kabila, qui reçoivent, directement et de plein fouet, le choc.

Ainsi, si le président Kabila avait espéré secrètement se refaire une virginité politique avec une obtention du statut de pays conforme à l’ITIE, surtout avec le discrédit de sa réélection contestée de novembre 2011 et l’instabilité chronique dans l’est du pays du fait des mouvements rebelles, c’est doublement raté. Kabila fils a en effet fait de l’ITIE-RD Congo une affaire personnelle.

Pour comprendre nos allégations, faites un tour sur le site de l’ITIE RDC : http://www.itierdc.com/

Dans la page d’accueil du site, la photographie du président congolais occupe une bonne partie de l’espace. Et dans son mot de bienvenue le chef de l’Etat indique que les mines sont l’un des fils de la trame sur laquelle se tisse l’histoire du peuple congolais et la RDC fonde un véritable espoir sur ses richesses minières. C’est bien dit de la part du numéro un congolais. Seulement, les résultats n’ont pas suivi.

« Tout ça pour ça »

Pas plus tard qu’en janvier, Joseph Kabila affirmait également que son pays était en parfait accord avec les exigences de l’ITIE quant à la transparence et à la bonne gouvernance dans le secteur minier.

Et en laissant le 1er mars 2013 le soin à son ministre du Plan et président du comité exécutif de l’ITIE-RDC, Olivier Kamitatu, de transmettre le dossier de candidature du pays à la conformité au secrétariat exécutif de l’ITIE, le président Kabila ne pouvait guère s’imaginer le sort que Clare Short, présidente de l’ITIE, et les autres membres du Conseil d’administration de l’institution allaient lui réserver, à savoir la suspension de la RD Congo du processus ITIE pour un an. Une suspension qui, de surcroît, est assortie d’une menace à peine voilée de radiation pure et simple, si du côté du Kinshasa les correctifs nécessaires ne sont pas apportés avant le 17 avril 2014. « Tout ça pour ça », a-t-on envie de s’écrier au regard notamment de l’engagement dont ont fait preuve les autorités congolaises.

On dit souvent que la défaite est orpheline, mais le président Kabila, évidemment, n’est pas le seul responsable du fiasco. Cette suspension de la RDC de l’ITIE ne doit pas, on l’imagine, faire la fierté du Premier ministre Augustin Matata Ponyo, surtout après un an aux affaires ; tout comme du ministre congolais des Mines, Martin Kabwelulu, lui qui avait le sentiment d’avoir réussi en 2011-2012 sa présidence de l’Association des pays producteurs des diamants (ADPA) ; sans oublier, bien sûr, le Monsieur ITIE de la RD Congo, Olivier Kamitatu.

88 millions de dollars non versés au trésor public

Malgré cette épouvantable désillusion, les autorités congolaises semblent avoir fait bon cœur mauvaise fortune, comme si elles avaient déjà pris toute la mesure de leurs insuffisances qu’elles entendent apparemment corriger et se remettre dans le sens de la bonne marche de la transparence minière telle que prônée par Oslo, siège de l’ITIE.

Certainement, c’est dans cette optique que l’on peut comprendre les récentes déclarations du coordonnateur national de l’ITIE-RDC, Jérémy Mack Dumba, qui a révélé que 88 millions de dollars américains payés par les entreprises minières du Katanga en 2010 au titre de redevances n’avaient pas été versés au trésor public.

ITIE-RDC et ITIE-BF, deux processus comparables

En tous les cas, Kabila et ses hommes ont intérêt à revoir leur façon de porter le projet ITIE en RDC. Se montrer toujours premiers porteurs n’est pas forcément profitable et ils l’auront certainement appris à leurs dépens.

Au Burkina Faso, les acteurs de l’ITIE n’ont pas toujours eu Blaise Compaoré devant le dossier ITIE pour le faire progresser jusqu’à bon port. Le pays jouit du statut de pays conforme à l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives depuis le 27 février 2013.

Comparer le processus d’adhésion de la RD Congo à l’ITIE à celui du Burkina Faso n’est pas du tout surréaliste, même si les deux Etats ne jouent pas dans la même catégorie en matière de richesses minérales. En 2009 lorsque le Burkina accédait au statut de pays candidat, la République démocratique du Congo de Joseph Kabila était déjà dans les starting-blocks, avec le même statut de pays candidat acquis un an plus tôt en 2008 et prête à se jeter dans la course pour la transparence minière. Cinq ans après, c’est le petit Burkina, dernier candidat, qui réussit son examen à la conformité ITIE, pendant que le géant minier congolais (RDC) se voit ainsi recaler, au grand dam des politiques, et certainement, aussi des miniers et autres acteurs des organisations de la société civile du pays.

Grégoire B. BAZIE

Lefaso.net

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