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Issa Zerbo, sportif et enseignant à l’Université de Ouagadougou : La désaffection des étudiants au sport « est plus une question de manque de volonté qu’autre chose »

Publié le lundi 24 septembre 2012 à 03h24min

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Issa Zerbo, sportif et enseignant à l’Université de Ouagadougou :  La désaffection des étudiants au sport « est plus une question de manque de volonté qu’autre chose »

Docteur et Maître-assistant au Département de Physique, Unité de formation et de recherches en Sciences exactes et appliquées de l’Université de Ouagadougou (UO), ceinture noire 3ème dan de Wushu et également pratiquant de Tai Chi Chuan, Issa Zerbo est le président de la section Arts martiaux de l’Université Club de Ouagadougou (UCO), le directeur technique du Club Shaolin Kempo - Tang Lang Pai de l’UO. Au niveau de la Fédération burkinabé de Kung Fu, il occupe le poste de directeur technique de la Ligue du Centre. A travers ces lignes, il aborde notamment le dernier championnat national de sa discipline et souhaite voir l’UCO redynamiser le sport universitaire.

Le Progrès (L.P.) : Depuis quand pratiquez-vous le Kung fu wushu ?

Issa Zerbo (I.Z.) : Je pratique le Kung fu Wushu depuis février 1986 à Attécoubé, un quartier d’Abidjan, sous la direction de Sifu Denis Banhoro, l’actuel directeur technique national de la Fédération ivoirienne des Arts martiaux chinois.

L.P. : Comment appréciez-vous le niveau d’ensemble des pratiquants de Kung fu wushu au Burkina Faso, comparativement à celui des autres au niveau international ?

I.Z. : Le niveau est en train d’être au diapason de celui des autres pratiquants de la sous-région et ce, d’autant plus que nos athlètes depuis un certain nombre d’années arrivent à pratiquer les taos (équivalents de kata japonais) internationaux codifiés, que ce soit à mains nues ou avec armes - courtes ou longues.

L.P. : Le Wushu comme discipline olympique, est-ce demain la veille ?

I.Z. : On avait pensé qu’en 2008 aux jeux de Pékin, le Wushu allait être mis à l’essai. Et c’était d’ailleurs dans cette optique que les tao internationaux codifiés avaient été mis en place afin de répondre aux normes olympiques. Malheureusement, la discipline a été seulement vue au JO de Pékin en démonstration. Toutefois, le combat se poursuit. Car intégrer le milieu olympique n’est pas du tout chose aisée.

L.P. : En tant que directeur technique de la Ligue du Centre, quel bilan et perspectives faites-vous du dernier championnat national de Kung fu wushu, les 25 et 26 août 2012 ?

I.Z. : Je peux affirmer que les finales étaient d’un niveau assez élevé. Dans les catégories Séniors et Juniors, on peut se réjouir de constater que certains arrivent à bien exécuter des tao internationaux codifiés, ce qui veut dire que nous sommes prêts pour des compétitions au plan international. Certaines demoiselles ont également fait sensation dans ces tao. Tout cela entre en droite ligne de la politique de perfectionnement de la direction technique nationale. Pour pallier les insuffisances techniques notées çà et là, je crois que la seule valeur qui vaille, c’est le travail, et rien que le travail. Car les tao internationaux exigent des pratiquants davantage d’efforts à tous points de vue. Et seuls celles et ceux qui travailleront assidûment engrangeront les meilleurs résultats.

L.P. : Comment s’en sont tirés vos élèves à ce championnat national ?

I.Z. : De façon globale, j’avoue que j’ai été un peu déçu. En effet, sur dix athlètes inscrits au départ, sept ont pu effectivement prendre part à la compétition. Sur les sept, quatre s’en sont tirés avec des médailles. Florence Bazoum a obtenu quatre (4) médailles d’or et une (1) de bronze. Pulchérie Lankoandé a eu une (1) médaille d’argent, Dianda Gaëlle a eu une (1) médaille de bronze, le seul garçon, à savoir Yacouba Zonon, a eu une (1) médaille de bronze. On voit bien que c’est une victoire féminine. Cela est extraordinaire parce qu’on avait plutôt l’habitude de voir des compétiteurs masculins.

L.P. : Et comment vous expliquez-vous cet état de fait ?

I.Z. : Cela est dû en grande partie au fait que les habituels chalengeurs messieurs ont fini leurs études à l’Université de Ouagadougou et l’ont donc quittée. Du coup, ils sont dans des localités qui ne leur permettent plus de compétir au nom de notre club. Ils sont soient enseignants du secondaire ou du supérieur pour certains d’entre eux. Bien entendu, cela pose un problème de relève car de plus en plus, les étudiants ne viennent pas beaucoup vers la pratique des arts martiaux. Je ne sais pas véritablement la cause de ce délaissement, d’aucuns diraient que c’est peut-être le calendrier un peu trop chargé de ces dernières années à l’Université de Ouagadougou.

L.P. : Et à votre avis, qu’est-ce qui justifie ce désamour de plus en plus prononcé des étudiants vis-à-vis du sport ?

I.Z. : Pour moi, cela se justifiait du fait de l’absence de structure appropriée pour coordonner le sport universitaire. Maintenant qu’une telle structure existe, en l’occurrence l’UCO, je nourris l’espoir qu’elle parviendra à organiser véritablement le sport afin d’intéresser le maximum d’étudiants.

L.P. : L’instabilité dans laquelle baigne l’Université de Ouagadougou depuis plusieurs années n’en est-elle pas aussi une cause ?

I.Z. : Je ne crois pas ! En réalité, c’est plus une question de manque de volonté qu’autre chose. Car malgré ces mêmes difficultés que connaît l’Université, il y a toujours quelques étudiants qui trouvent le moyen et le temps de faire le sport. Si l’UCO arrive à une bonne organisation du sport universitaire de sorte à favoriser la participation de ses disciplines membres aux différentes compétitions, elle a toutes les chances d’amener ou de ramener beaucoup d’étudiants à la pratique du sport.

L.P. : Pour revenir aux médaillés tantôt cités, comment appréciez-vous les uns et les autres, malgré l’absence des anciens ténors qui ont quitté le club ?

I.Z. : Pour certains quand même, je dirai que c’est la continuité. Une athlète comme Florence Bazoum par exemple a commencé les compétitions en 2008 et elle s’en est toujours tirée avec des médailles d’or. L’année dernière, elle a même été élue championne sportive AJSB (ndlr : Association des journalistes sportifs du Burkina) au niveau du Wushu. Cette année encore, son palmarès a été à nouveau assez éloquent.

L.P. : Qu’est-ce que l’UCO en réalité ?

I.Z. : L’UCO, c’est l’Université Club de Ouagadougou, une structure sportive qui a été mise en place en juin 2011 en vue de gérer le sport au sein de ladite Université. Cette organisation s’est inspirée de ce qui se passe dans certaines universités de la sous-région ouest-africaine, comme l’AUC qui est l’Abidjan Université Club (en Côte d’Ivoire), le Dakar Université Club. A l’intérieur de cette structure se trouve plusieurs sections dont la section Arts martiaux regroupant quatre (4) disciplines martiales présentes sur le campus et une non présente. Pour celles présentes à l’Université, on a le Kung fu wushu, le Vovinam Viet Vo Dao, le Vo Vietnam et le Taekwondo. Le judo, bien que n’étant pas pratiqué à l’interne, pour faute d’infrastructures adéquates, participe effectivement aux compétitions sous la tutelle de l’UCO.

L.P. : Qu’a pu apporter l’UCO de concret jusque-là aux arts martiaux pratiqués à l’Université de Ouagadougou ?

I.Z. : Sous la coupe de l’UCO, la section arts martiaux, représentée par le Taekwondo, a pu prendre part en avril 2011 à Lomé au Togo à une compétition inter universités. Nos athlètes se sont illustrés de la plus belle manière en dominant leurs adversaires de l’Université hôte. Au niveau des 3e Jeux universitaires tenus du 4 au 13 mai dernier, la section arts martiaux a été représentée pour la première fois, par le Taekwondo. Les taekwondokas de l’UCO se sont bien battus également. Quant aux autres disciplines martiales, elles participent régulièrement à leurs championnats nationaux respectifs. Il s’agit notamment des Clubs de Vovinam Viet Vo Dao, de Vo Vietnam, de Wushu qui ont déjà pris part à leur championnat au niveau national. Le Taekwondo est en ce moment aux phases éliminatoires de la Ligue du Centre en vue de son championnat national.

L.P. : Quels sont en ce moment les besoins de fonctionnement de l’UCO ?

I.Z. : L’UCO est une jeune structure qui essaie d’exposer ses problèmes à ses premiers responsables qui sont les autorités de l’Université de Ouagadougou. C’est vous dire qu’elle est dépendante en grande partie de la subvention qu’elle reçoit de l’Université. Pour augmenter nos chances de réussite, nous travaillons à intéresser certains partenaires techniques et financiers aux activités que nous menons. Mais de façon générale, les disciplines sportives regroupées au sein de l’UCO travaillent avec le strict minimum. Pour les arts martiaux dont je suis le responsable, on a un besoin criant en tatami par exemple. Nous lançons donc un appel à tout bienfaiteur de venir en aide à l’UCO, afin d’encourager le sport en milieu universitaire.

L.P. : Que’est-ce que le Wushu vous apporte au quotidien ?

I.Z. : Depuis un certain nombre d’années, je suis tourné vers l’aspect interne du Wushu, c’est-à-dire le Tai chi chuan. Ce qui ne m’empêche pas bien sûr de continuer de donner des enseignements concernant la partie externe de l’art appelée communément boxe de Shaolin. Pour revenir à votre question, la pratique du Tai chi me procure beaucoup de bien, d’autant plus qu’il n’est un secret pour personne qu’une telle discipline est bien pour la santé.

Interview réalisée par
Hermann

Le Progrès

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