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Le drame de l’orpaillage

Publié le mardi 7 août 2012 à 23h00min

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Un éboulement est survenu, le jeudi 19 juillet 2012, sur un site d’orpaillage à Bouéré, localité située à quelques encablures de la ville de Houndé. Bilan  : deux morts et trois blessés  ! Des situations dramatiques du genre, le Burkina Faso en a déjà connu, avec toujours, à la pelle, des morts et des blessés. Malgré l’interdiction de l’orpaillage pendant l’hivernage, des individus investissent les mines artisanales, au péril de leur vie. Ils veulent, coûte que coûte, trouver de l’or, advienne que pourra ! Dans un monde où l’argent est roi, on comprend la détermination et l’impertinence de ces chercheurs d’or, mais les dangers auxquels ils s’exposent sont plus forts que leurs ambitions. S’introduire dans les galeries en saison pluvieuse, à la recherche du précieux métal, s’avère suicidaire, à cause de l’humidité et de la friabilité des terres.

Le pire ou l’irréparable peut arriver à tout moment, à la désolation de tous, comme ça a été le cas à Bouéré. Pareille situation, pour ne citer que cet autre cas, était également arrivée en août 2008 à Konkèra, province du Noumbiel où une trentaine d’orpailleurs, des « bras valides de la Nation », avaient péri dans un éboulement. Les victimes avaient trouvé la mort en s’engouffrant nuitamment dans la mine d’or, pourtant fermée en son temps, dans le cadre de la mesure d’interdiction de l’orpaillage pendant l’hivernage. Et il fallait voir leurs tombes « fraiches » sur place, pour mesuer les conséquences désastreuses de l’orpaillage en saison pluvieuse. Tout le village de Konkèra avait sombré dans l’émoi.

Que de tristesse ! Dans la douleur, des sentiments de regret s’étaient même emparés de certains esprits. Un habitant de Konkèra avait indiqué : « Si ces jeunes gens avaient respecté la mesure d’interdiction, ils ne seraient pas morts ». Pour celui-ci comme pour d’autres, l’irréparable aurait pu être évité, si les victimes avaient voulu entendre raison. Hélas ! Le scénario est toujours le même : pendant l’hivernage, des orpailleurs bravent la loi, en s’introduisant frauduleusement dans les mines au péril de leur vie. Les plus chanceux s’en tirent avec des blessures, les moins chanceux trépassent. Des familles sont affectées ou endeuillées ! A la vérité, les risques d’éboulement sont « très » élevés pendant l’hivernage.

Malgré tout, des chercheurs d’or continuent de faire fi de cette donne, allongeant malheureusement, la liste des victimes des éboulements. Comment s’y prendre alors, pour faire comprendre à des orpailleurs, assoiffés d’or et d’argent, qu’ils courent à leur perte dans une telle entreprise. Question à mille balles ? ! Et dire que certains d’entre eux sont contre la fermeture des sites artisanaux pendant l’hivernage, on se rend vite compte de la complexité de la situation. Ceux-ci pensent dur comme fer que le gouvernement veut « couper » leur pain, en prenant la mesure évoquée. Que pouvons-nous alors dans un milieu où l’ignorance et la soif de l’or dominent sur tout. C’est vraiment délicat. Pour autant, les autorités n’ont pas démissionné, puisqu’elles ont perçu le danger de l’orpaillage en saison pluvieuse, en prenant une mesure pour l’interdire. Le gouvernement a certes, interdit la pratique, mais un « véritable » travail de sensibilisation doit être fait, au niveau local.

Et c’est là que la responsabilité des communes est engagée à plus d’un titre, surtout à l’heure de la communalisation intégrale. Elles doivent prendre la relève, en sensibilisant les populations, notamment les orpailleurs de leur ressort territorial, à l’existence même de la mesure de fermeture des mines en saison pluvieuse, son bien-fondé et ses implications. Certains chercheurs d’or sont au courant de cette décision, d’autres, par contre, n’en savent rien. Raison pour laquelle les autorités municipales, dont les territoires regorgent de mines artisanales, devraient redoubler d’effort pour sensibiliser les orpailleurs avant, pendant et pourquoi pas après la saison pluvieuse. Des campagnes de sensibilisation exploitant divers canaux (théâtres-forums, causeries éducatives, projection cinématographique….) pourraient être organisées annuellement pour faire passer le message, dans l’espoir de limiter les dégâts.

Aussi cette démarche pourrait-elle, à la longue, contribuer à faire prendre conscience aux orpailleurs, surtout les plus durs, qui n’ont que la logique de l’argent en tête. Comme obstacle à la réalisation de ces initiatives, d’aucuns verront le manque de moyens financiers, quand on sait que les dieux des finances n’habitent pas nos communes. Là encore, les autorités communales, les plus entreprenantes, pourront certainement bénéficier de l’appui de l’Etat et des partenaires techniques et financiers. Pour d’une cause aussi noble que celle-ci, il y a toujours des bonnes volontés pour apporter une éventuelle aide.

Les décideurs locaux doivent donc œuvrer autant que possible, à sensibiliser les orpailleurs. La force légitime peut être utilisée à l’endroit des récalcitrants, mais l’accent doit être mis d’abord, sur la sensibilisation, dans l’optique de prévenir les drames.
L’orpaillage en saison pluvieuse a déjà fait de nombreuses victimes, à telle enseigne que la mesure d’interdiction gagnerait à être davantage vulgarisée pour être pleinement acceptée par tous.

Kader Patrick KARANTAO (stkaderonline@yahoo.fr )

Sidwaya

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