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PÔLE DE CROISSANCE DE BAGRÉ : Plus de 1500 paysans dans le train du développement

Publié le mardi 3 juillet 2012 à 00h06min

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Le Projet pôle de croissance de Bagré (PPCB) aussi appelé « Bagrépôle » est en marche depuis le 5 avril 2012, date de son lancement officiel, par le Premier ministre Béyon Luc Adolphe Tiao, en compagnie d’autres personnalités dont le directeur de production de la Banque mondiale, Madani Tall. D’un coût d’environ 67 milliards de FCFA, Bagrepôle est le plus grand projet agroindustriel que le Burkina Faso ambitionne de mettre en place avec le soutien de la Banque mondiale. A l’heure actuelle, plus de mille cinq cents paysans ont déjà eu leurs parcelles. Certains ont commencé la mise en valeur de leur propriété.

Vendredi 22 juin 2012. Il est environ 12 heures 30 minutes à la rive gauche du périmètre aménagé de Bagré. Sous un soleil accablant, Abdoul Karim Ouédraogo, la cinquantaine bien sonnée, est en train de désherber son champ de maïs. Le paysan est compagné dans sa tâche par des membres de sa famille. « Habituellement, je travaille avec une douzaine de personnes, mais aujourd’hui nous sommes six seulement parce qu’il n’y a pas grand-chose à faire pour le moment », affirme-t-il. Monsieur Ouédraogo fait partie des premiers bénéficiaires de la superficie aménagée dans le cadre de la mise en œuvre du Projet pôle de croissance de Bagré (PPCB) ou « Bagrépôle », officiellement lancé le 5 avril 2012. L’Etat burkinabè et ses partenaires dont la Banque mondiale envisagent faire de la localité (Bagré), située à près de 250 kilomètres de Ouagadougou et à environ 40 kilomètres au sud de Tenkodogo, une grande zone de production agroindustrielle.

Au nombre de 1 520 personnes, les premiers attributaires de parcelles cultivables, à l’image de Abdoul Karim Ouédraogo, ont débuté l’exploitation des superficies mises à leur disposition. Une précision : il ne s’agit pas encore des grands producteurs ou agrobusinessmen qui viendront booster la production, mais de ceux que les responsables de la Maîtrise d’ouvrage de Bagré (MOB) appellent les « petits producteurs ». En effet, l’Etat, à travers la MOB, a décidé de résoudre la question des populations locales avant que les grands investisseurs n’arrivent sur le site. Après de petits problèmes au départ, tout semble entré dans l’ordre en ce qui concerne la question foncière. Les premiers responsables de la MOB, le maire de la commune rurale de Bagré, ainsi que les villageois rencontrés affirment que « la question du foncier qui se posait est réglée ».

Les désormais propriétaires de parcelles cultivables sont contents. Visiblement, ils ne veulent pas décevoir ceux grâce à qui ils ont eu les terres. Pour Augustine Kéré, par exemple, le fait d’être dans la localité de Bagré est un privilège dont il faut profiter. « D’ici, nous sommes capables de nourrir tout le pays grâce au Pôle de croissance de Bagré. Pourvu qu’il y ait la volonté et un soutien conséquent », déclare la jeune dame apparemment très ambitieuse. « Nous allons tout faire pour que les autorités qui nous ont fait confiance, ne soient pas déçues. Cela permettra à nos frères qui n’ont pas encore eu de parcelles d’en avoir », affirme pour sa part, Boga Lankoandé, un autre producteur à Bagré, nouvellement attributaire de périmètre aménagé. Son argumentation est partagée par Abdoul Karim Ouédraogo. « Je compte appliquer dans mon champ, ce que j’ai appris en matière de culture de banane en Côte d’Ivoire. L’on nous a aussi fait visiter des plantations du genre dans la zone de Bobo-Dioulasso et de Dédougou.

Nous sommes tenus de réussir. Si nous réussissons, cela ouvrira la porte à d’autres personnes », soutient-il.

1 200 hectares aménagés

Contrairement aux autres bénéficiaires de parcelles, Abdoul Karim et 18 autres producteurs ont des espaces assez vastes. « On nous a remis 70 ha pour faire des plantations de bananes. Nous sommes au nombre de 19 personnes », relève monsieur Ouédraogo, ajoutant que compte tenu de la mauvaise campagne agricole écoulée, les autorités leur ont demandé de produire du maïs avant de passer à la plantation de banane.
A entendre le conseiller en Formation des jeunes agriculteurs (FJA) à la MOB, Yacouba Kéré, l’espace aménagé pour installer les « petits producteurs » pour l’instant, est de 1 200 hectares. Il précise qu’au regard du nombre de demandeurs, chaque attributaire ne pouvait obtenir qu’un demi-hectare. Les attributaires dans l’espace aménagé sont issus de seize villages d’exploitants installés de part et d’autre du barrage de Bagré.

« Sur la seule rive droite, nous dénombrons dix villages. Tandis qu’à la rive gauche, nous avons six villages », indique le conseiller en FJA.
De l’avis de Yacouba Kéré, pour les petits exploitants, l’Etat n’a pas dépensé moins de sept à dix millions de FCFA par hectare aménagé. Pour lui, l’Etat n’attend presque rien en retour des exploitants villageois. « Le petit producteur à qui on offre la parcelle, n’aura que la redevance à payer puisqu’on lui donne l’eau pour l’irrigation. Le montant de la redevance est de 12 500 F CFA par campagne, alors que dans l’année, le producteur ne peut faire que deux campagnes, soit 25 000 FCFA annuellement », souligne-t-il.

Pour leur part, les exploitants villageois, souhaitent toujours l’appui des autorités, sans lequel, affirment certains, le travail sera impossible. « Nous voulons que le Projet pôle de croissance de Bagré nous aide à améliorer nos conditions de vie. Pour ce faire, nous souhaitons qu’on nous aide avec des pompes et de l’engrais, par exemple. Cela nous permettra d’être efficaces », plaide Abdoul Karim Ouédraogo. Quant à Souleymane Gaméné, il souhaite que l’Etat les aide à bien aménager les superficies qu’on leur a attribuées. En effet, selon lui, le terrain n’est pas bien aménagé partout. « Tel que l’aménagement est fait, il sera très difficile de faire l’irrigation dans certaines zones. C’est pourquoi, nous voulons que l’Etat qui a déjà consenti des efforts pour nous, fasse encore un peu d’effort à ce niveau », argumente t-il. De son côté, Mamouta Zabsonré, une autre future productrice, demande plutôt aux autorités de les aider avec des semences et des intrants de qualité.

Renforcement de capacité des producteurs

En vue de renforcer les capacités des attributaires de parcelles, des formations sont organisées à leur endroit. Ainsi, le premier groupe de 360 producteurs a bénéficié d’une formation de dix jours sur place à Bagré (du 18 au 28 juin 2012) aux techniques agricoles. Pour l’un des formateurs, Bachour Pierre Barro, la formation a consisté, dans un premier temps, à présenter les cahiers des charges aux producteurs. « Nous avons détaillé le contenu du cahier des charges afin que les producteurs comprennent quels sont les interdits et les conduites à tenir face aux périmètres irrigués », souligne le formateur. Il ajoute que l’autre module a concerné la gestion des infrastructures hydrauliques. Dans ce module, les apprenants ont abordé par exemple, les différents canaux d’irrigation, à savoir, les canaux primaires, secondaires, tertiaires, etc.

« Pour ces différents canaux, nous avons situé les responsabilités des différents responsables techniques et des paysans eux-mêmes. Nous leur avons appris à mieux gérer l’eau », précise monsieur Barro.
En outre, les producteurs ont appris les techniques de production de riz en vue de leur permettre d’avoir des rendements élevés. Dans ce module, ils ont évoqué l’intervention avant la culture, les types de semences ainsi que d’engrais à apporter au sol, les périodes durant lesquelles il faut apporter ces intrants, etc.

Les paysans formés, apprécient positivement. « La formation nous a permis de comprendre beaucoup de choses. Nous avons appris, par exemple, qu’il est interdit de brûler les feuilles des arbres dans nos champs ou bien d’utiliser des herbicides de mauvaise qualité . Ce sont des choses que nous ne savions pas », avoue Souleymane Ganamé.
Pendant que les « petits producteurs » s’affairent sur leurs espaces respectifs, les opérateurs économiques s’impatientent. C’est le cas de Willam Kwendé, Président-directeur général (P-DG) d’Agritech-Faso, une entreprise spécialisée dans l’agro-business. Monsieur Kwendé considère « Bagrépôle » comme une opportunité et s’impatiente d’investir dans la zone (voir encadré).

Alban KINI (alban_kini@yahoo.fr)


Le maire de Bagré, Sambo Daboné, à propos des attentes de la commune et de la question foncière

« Nos attentes sont nombreuses en ce qui concerne le projet. Le pôle de croissance de Bagré est une opportunité pour nous. Il va créer beaucoup d’emplois pour les jeunes et c’est ce que nous voulons. Il y aura également des opérateurs économiques dans notre localité. Nous souhaitons que la population profite des opportunités qui leur sont offertes.

Sur le terrain, les premiers bénéficiaires sont installés sur 1 200 hectares et produisent essentiellement le maïs pour le moment. Les producteurs attributaires de parcelles bénéficient d’une formation actuellement (Ndlr : du 18 au 28 juin 2012) pour améliorer leur performance agricole. Il ne faudrait plus qu’ils soient des producteurs traditionnels comme ceux que nous avons l’habitude de voir. Notre souhait est qu’on accélère les aménagements pour l’exploitation paysanne parce que les gens en ont besoin.

Actuellement, il n’y a pas de difficultés en tant que telles. Certes, il y a eu des périodes assez chaudes mais les choses sont rentrées dans l’ordre. Ce que certains ont qualifié de problème foncier est intervenu lors des distributions de parcelles. Certaines personnes n’étaient pas contentes parce qu’elles n’ont pas eu de parcelles. Mais de nos jours, tout est rentré dans l’ordre. Grâce à la sensibilisation, nous avons pu calmer les ardeurs des uns et des autres. Nous avons été appuyés par l’Etat et d’autres partenaires. On a expliqué aux gens de se patienter parce qu’il y aura beaucoup d’aménagement et que tout le monde aura sa part au fur et à mesure ».

Propos recueillis

par A.K.


Willam Kwendé, un entrepreneur dont la société ambitionne profiter du pôle de croissance de Bagré

Selon le Président directeur général (PDG) de Agritech-Faso, William Kwendé, le Projet pôle de croissance de Bagré est une opportunité avérée pour sa société du groupe Agritech basé à Singapour en Asie. « Nous sommes très intéressés par le Projet pôle de croissance de Bagré parce qu’il peut nous permettre de développer des projets et des investissements à plus grandes échelles », explique-t-il. Et d’ajouter que la société a l’intention de mettre en place une unité d’extraction de beurre de karité de très grande capacité à Bagré .

A entendre le P-DG, la société est actuellement en « accord stratégique » avec le pôle de croissance de Bagré. « Nous attendons que l’on puisse nous octroyer les parcelles agricoles et industrielles pour commencer la production du tournesol et l’installation des unités industrielles », indique William Kwendé. Entre autres avantages, le P-DG mentionne que Bagré est située à proximité de plusieurs pays tels que le Bénin, le Togo, le Ghana. Pour lui, cela peut permettre d’importer de la matière première de ces pays, la transformer à Bagré et pouvoir ensuite l’exporter vers d’autres pays. L’opérateur économique souhaite que d’autres groupes internationaux, notamment les groupes asiatiques, viennent s’installer dans la zone de Bagré.

A.K.

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 3 juillet 2012 à 16:22 En réponse à : En fait, la politique ça colle plus !

    Bonjour,
    Juste une simple réflexion de ma part pour qu’on en débâte.
    Avec un peu de recule, on se rend compte que le politicien n’intervient pas dans l’amélioration des conditions de vie ; des exemples allant de la voiture, téléphone, la télévision jusqu’à l’avion nous montre ce fait.

    Aussi éthique soit-il, le politicien d’aujourd’hui, encore moins le politicien africain, ne pourra jamais tenir tête face aux intérêts des personnes ou entités extrêmement riches(c’est simple à entre-voir une fois qu’on se rend compte que l’argent équivaut le pouvoir)

    Juste pour dire que, pour que tous les burkinabés sortent de la pauvreté, il n’y a qu’une seule solution :ÉDUCATION,ÉDUCATION et encore ÉDUCATION.

    Pour s’en sortir, il n’y pas milles solutions, nous devrons simplement parvenir à dompter la nature (je parle des ressources naturelles, y comprises les ressources humaines ; on devrait même commencer par celles-ci) ! En fait, l’argent n’a aucune valeur sans les ressources naturelles ; et selon cette logique, il serait préférable de ne pas chercher à sauter du coq à l’âne (par exemple en ne sachant pas que plus on monte, plus la pression diminue...)

    Tout devient simple et clair avec cette logique !!!

    Non seulement les gens se comporteront bien (en ne cassant pas les bien publics par exemple), mais aussi tout le monde participera activement à la recherche de solutions aux maux !!

    Merci.

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