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SANTE PUBLIQUE : Le péril des alcools frelatés

Publié le mardi 19 juin 2012 à 01h36min

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La commercialisation de liqueurs de qualité douteuse, communément appelées « frelatés » ou encore « frelons », fait incontestablement partie des secteurs d’activités prospères en ce moment au Burkina Faso. Jadis importés, ces alcools font aujourd’hui l’objet d’une production locale aux contours très nébuleux. Des unités de fabrication opérant dans une clandestinité déroutante déversent sur le marché des quantités énormes de ces produits dont la production échappe à tout contrôle de qualité. Mais le plus hallucinant dans l’affaire est le laxisme dont fait preuve l’autorité face à la prolifération sauvage de ces alcools pourtant dangereux pour la santé.

En cette matinée ensoleillée d’avril 2012, le kiosque de JB ne désemplit pas. Situé non loin de la salle de ciné du secteur 29, ce kiosque est le lieu d’une animation presqu’ininterrompue dans cette partie du quartier. L’attraction, ce sont les liqueurs. Les inconditionnels de ce type de boissons ne manquent pas. Les kiosques comme celui-là, sont nombreux dans la ville de Ouagadougou. Les liqueurs et autres vins frelatés sont leur spécialité. Dans le milieu, on les appelle « raccourcis ». Avec des taux d’alcool fortement élevés, on n’a pas besoin de beaucoup d’argent pour avoir sa « dose ». 200 FCFA suffisent largement pour ne pas envier celui qui aura dépensé des milliers de francs CFA au maquis pour quelques bières. En plus, le client a un éventail de choix : « Kassapreko », « Don carlos », « Don Garcias », « Eperon », « Pastis », « Vieux Menthos », « Gin Harpon », « Dry Gin », « Venus », etc. En sachet, en bouteille ou en carton, peu importe. L’essentiel ici, c’est de pouvoir se saouler à moindre coût.

Pourtant, l’origine de ces produits pose problème. Dans un passé récent, ce genre de boissons était exclusivement importé. Mais voilà que depuis quelques temps, certains hommes d’affaires évoluant dans le domaine et voulant maximiser leurs gains, ont décidé de les produire localement. Désormais, seuls les ingrédients sont importés. Tout le processus de distillation se passe sur place à Ouagadougou. L’activité est très luxuriante. Le nombre sans cesse croissant de consommateurs de ces liqueurs en dit long sur l’étendue du marché. Selon un spécialiste du Laboratoire national de santé publique (LNSP), l’heure est grave. La menace est de taille. Avec un niveau de vie continuellement en chute libre, de nombreuses personnes n’ont plus que ce genre de boissons comme recours, pour étancher leur soif d’alcool. Les unités de production prolifèrent comme des champignons dans les quartiers. Impossible d’avoir un œil sur leurs activités. La plupart d’entre elles fonctionnent dans la clandestinité et leurs produits échappent à tout contrôle. Au ministère en charge du commerce, impossible d’avoir la moindre information claire sur ces usines d’un genre nouveau.

Une affaire de gros bonnets

A la Direction générale de l’industrie (DGI), on s’avoue pratiquement impuissant face à la situation. Avant de lancer leurs activités, certains promoteurs se soumettent aux démarches administratives prévues à cet effet. Ils fournissent un dossier en bonne et due forme pour l’obtention de l’autorisation d’implantation de leurs unités. Mais dès qu’ils ont ce document, ils disparaissent dans la nature. L’adresse fournie à l’autorité devient caduque. Impossible de les repérer dans la ville. Conscients de la mauvaise qualité de leurs produits, ils deviennent des fugitifs, se déplaçant de quartier en quartier pour éviter les contrôles et autres taxes. Au nom de la facilitation de la création des entreprises, la création de ce genre d’unités n’est soumise à aucune disposition particulière au niveau du ministère. Là-bas, on les appelle « unités de production d’alcool alimentaire », au même titre que les brasseries et sont logées à la même enseigne que les autres industries alimentaires, telles les boulangeries. Une simple demande timbrée à 200 FCFA, adressée au ministre en charge du commerce, dans laquelle le prétendant fait, notamment une brève description de son matériel de production et précise son adresse suffit pour que l’autorisation lui soit accordée.

D’autres n’ont même pas la moindre trace dans les registres du ministère. Le répertoire de ces unités disponible à la DGI est très squelettique. Mais les responsables ne se font pas d’illusion. Le plus gros lot est dans la clandestinité et il est pratiquement impossible de se faire une idée de ce qui se passe en réalité sur le terrain. Disséminées même dans les quartiers d’habitation, la plupart de ces unités travaillent la nuit. Par le passé, soutient un agent du LNSP, certains faisaient l’objet de dénonciation auprès du Laboratoire. Mais depuis un certain temps, ces dénonciations se font de plus en plus rares. « Derrière ces unités, il y a de gros bonnets qui sont prêts à tout. C’est pourquoi les gens ont peur de les dénoncer », explique-t-il.

Aveu d’impuissance ?

Insalubrité, équipements de production précaire et non conformité du processus de fabrication sont autant de défaillances qui caractérisent ces unités. Conséquence, le marché est inondé de ces produits de contrebande, très toxiques et dangereux pour la santé. Ainsi, il est très fréquent de rencontrer ces liqueurs avec des suspensions surprenantes à l’intérieur. De la même manière, l’on rencontre des « Pastis » qui refusent de se troubler au frais ou au contact de l’eau. Or, la particularité de cette liqueur, en temps normal, c’est de se troubler dès le moindre contact avec l’eau ou après quelques temps au frais. Une autre façon de reconnaître ces fausses liqueurs, explique un spécialiste du LNSP, consiste à regarder de près ce qui est écrit sur les étiquettes d’emballages.

Il s’agit, le plus souvent, d’emballages précaires fabriqués au Nigeria, sur lesquels on peut lire un français approximatif du genre « Produit du London » ou « Produit du France ». Conservées pendant une certaine durée, certaines de ces liqueurs peuvent s’évaporer et laisser leurs emballages vides. Au Laboratoire national de santé publique, on dit ne contrôler que les entreprises dûment autorisées par le ministère. Cette institution n’ayant pas une force de police, son action n’est pas contraignante aux yeux de nombreux acteurs. Les conséquences de ces alcools sur la santé sont désastreuses, explique un spécialiste. Lorsque le processus de distillation n’est pas bien mené, ils peuvent contenir des substances très nocives comme le méthanol. Il peut causer le cancer du pancréas, des attaques du système nerveux et, à terme, la cécité.

Au regard de l’ampleur du danger encouru, on peut légitimement se demander pourquoi des mesures vigoureuses ne sont pas prises pour endiguer le phénomène. Est-ce le pire qu’on attend avant de réagir ? Pour mémoire, en décembre 2011, un alcool frelaté a engendré 162 morts en Inde. Quant on sait que ce sont les ressortissants de ce pays qui sont le plus dans cette activité au Burkina, il y a lieu de s’inquiéter.

Par Yacouba Ladji BAMA

Le Reporter

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Vos commentaires

  • Le 19 juin 2012 à 10:45, par raogo En réponse à : SANTE PUBLIQUE : Le péril des alcools frelatés

    Prenons le courage d’interdire les alcools frelatés parce qu’il constitue un dangers pour la jeunesse africaine.
    tout ce qu’il peut nuire à la jeunesse doit être interdit ( Alcool, drogue....)

  • Le 19 juin 2012 à 12:26 En réponse à : SANTE PUBLIQUE : Le péril des alcools frelatés

    la jungle n’est pas seulement dans les marches de la population,la jungle se trouve dans ce que nous mangeons et buvons
    l’un dans l’autre le seul responsable c’est le gouvernement qui cherche a nous liquider,comme ça ces gourous auront le pays a eux seuls. c’est bien joué tout ça sinon dans un état de droit,en une semaine vous ne verrez plus trace de ces frelatés dans ce pays puisqu’il suffit d’une opération de destruction de ces drogues et ensuite une forte amende si jamais quelqu’un se fait prendre entrain de les vendre. c’est aussi simple que cela mais comme ce sont ces gourous qui sont derrière ce commerce illicite,il y aura rien. et finalement je me pose la question ce qu’ils font de tous ces sous amassés dèjà que ce sont les mêmes qui volent,pillent,détournent nos ressources aussi comme l’or par exemple

  • Le 19 juin 2012 à 12:37, par GO En réponse à : SANTE PUBLIQUE : Le péril des alcools frelatés

    Nos autorités devaient purement et simplement interdire ces alcools frelatés dans notre pays.
    Cela ne fait que du mal.
    Que gagne le pays ces alcools frelatés.
    Rien que maladie et mort de nos frères.
    Nos doit lutter contre ça car c’est bien néfaste comme la drogue. Donc on espère que nos autorités ne font pas continuer à fermer les yeux sur ça.

  • Le 19 juin 2012 à 13:24, par Habaaaaaa En réponse à : SANTE PUBLIQUE : Le péril des alcools frelatés

    Tout Alcool est dangereux frelaté ou pas. Ne faites pas le jeu des lobby.

  • Le 20 juin 2012 à 16:39 En réponse à : SANTE PUBLIQUE : Le péril des alcools frelatés

    Un regime qui regner a vie sans faire du bon job a tout interet a favoriser le developpement de l’ alcool, surtout frelate. Quand les jeunes desoeuvres sont perpetuellement bourres, ils ne cherchent plus qu’ a etre bourres et ne pensent plus a la science de leur misere. Pas si betes que ca, nos rois africains.

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