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B. Hassane Baadhio, écrivain africain

Publié le jeudi 28 octobre 2004 à 06h27min

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A quelques semaines de l’ouverture, dans notre capitale, du Xe Sommet de la Francophonie, nous vous proposons cette réflexion sur la langue française. Pour l’auteur, "La belle française" doit entrer en symbiose identitaire avec les autres langues nationales.

Avenir de la langue française et dynamique de la paix

Dans les jours à venir, le Burkina Faso accueillera le Xe Sommet de la Francophonie. La Francophonie se définissant comme étant un espace ayant en partage l’usage en commun de la langue française, il nous est loisible de bien vouloir réfléchir sur une thématique faite de prospective et de suggestions.

Comme pour appréhender les bases de la Francophonie de demain. Mais d’abord, quel avenir pour la Francophonie aux XXle siècle ? Voici une question essentielle ( ?) au centre de tous les enjeux de la langue française.

L’évolution d’une langue est à l’image de son vécu. En l’occurrence, la langue française « étant une langue internationale, elle ne peut qu’être à l’image des vécus de cet ensemble qu’est la Francophonie ».

Par ensemble, il faut bien comprendre dimension positive du partage d’un même parler. Ce qui fait le ciment d’une communauté culturelle, puisque tout va du culturel pour revenir au culturel, rayonnant sur plusieurs continents.

Quelles richesses alors quand on sait bien que les apports dans la diversité et la différence ont toujours été un plus dès l’instant où ils ont un dénominateur commun. Voici pourquoi, d’ores et déjà, sans esprit de polémique, le mot Francophonie doit prendre le pas sur le terme référentiel langue française.

Il ne s’agit plus ici de définir la Francophonie comme étant l’usage en commun de la langue française. Mais plutôt, de partir de l’usage en commun de ce parler, avec nos us et coutumes, nos forces et faiblesses, nos rêves et réalités. Ainsi définie, la Francophonie est un bel espace fait de grands espaces et de grandes espèces qui vont nécessiter pour son avenir de grands travaux.

Dans l’affirmation du meilleur de soi, la langue française, pour revenir à elle, est une belle langue dont l’utilisation pourrait s’accroître si elle sait orienter son utilité vers des centres d’intérêts propres au développement de toute langue. Faut-il ajouter ici, la corrélation entre cette langue internationale et la multitude de langues nationales qui, elles aussi, apportent un véhicule identitaire à l’espace francophone.

Alors se pose la lancinante question, sous le couvert d’une langue internationale de l’avenir des langues nationales, parce que support, on allait dire édifice, à quelques degrés divers de l’usage d’une langue du grand espace. La richesse d’une langue témoigne de la vivacité de la création dans l’espace où cette langue est parlée, utilisée. De fait, la langue devient ou un vecteur ou un support dans cet Espace.

Pour ce qui nous intéresse, la belle française, langue de beauté, doit œuvrer à une sorte de symbiose identitaire avec les autres langues nationales en tant que fondement culturel. Partant de cette image que, parce que c’est la langue internationale, on pourrait la comparer à une poule (aux œufs d’or ?) couvant des poussins indépendants.

Vous comprendrez que l’évolution de la langue française pour plus de dynamique culturelle et de rayonnement doit impérativement redéfinir (positivement) les langues nationales. Qui se doivent, elles aussi, d’être véhiculées, profitant de l’essor des technologies qu’offrent ces siècles et millénaires.

Quels donc seront les domaines-clés de l’avenir de la langue française ? Trois points centraux se dégagent. Premièrement : la science ou l’évolution scientifique de la langue Science et littérature étant complémentaires, il nous apparaît nécessaire d’approfondir l’interaction de ces deux domaines pour aboutir à une symbiose au bénéfice de la langue.

Une langue, ce n’est pas seulement son usage, mais c’est aussi, et surtout son alphabet. L’usage du son, sa résonance, ont leur importance dans le vécu comme dans le cosmos. La nature-cosmos nous offre beaucoup d’exemples en ce sens.

Considérant que derrière chaque alphabet se cache une ossature de mots et de sons, il y a comme l’usage consacré de la fixité du mot : dans le temps et dans l’espace. Observez bien une phrase. Vous noterez qu’il y a ce que j’appelle la linéarité de la phrase. En effet, c’est dans une direction horizontale qu’on écrit les mots qui, pour être fixes - d’où la notion de fixité- donnent un sens à la phrase.

A l’inverse, regardez, entre autres, un arbre. Tel quel, il est droit, fixé à la verticale. De fait, la fixité de l’arbre est la direction verticale. Quelle symbiose-alchimie retrouverez-vous entre fixité horizontale des mots et fixité verticale d’un arbre ? Vous serez étonnés de constater beaucoup de ressemblances qui, sans doute, ne sont pas le fruit du hasard.

Pensez aux formes des lettres de l’alphabet. Si vous prêtez une attention particulière, vous verrez que depuis la jeune plante qui grandit, venant du néant ou de la nature-cosmos jusqu’à l’arbre centenaire ayant ses fruits, il y a des parties de l’arbre qui ressemblent étrangement aux lettres de l’alphabet. Et pas seulement français.

Dans l’araméen, langue parlée par le prophète Jésus, on trouve quelques lettres ayant la même forme que certaines parties d’un arbre.

Par ailleurs, le fruit du citronnier ou du papayer a la forme de la lettre O. Sans oublier le contenu des graines. Lettre 0 comme l’œuf d’un oiseau. Chaque graine appelant une forme.

La lettre Z (minuscule) : sa forme fait penser à l’abdomen d’une fourmi. Observer encore les branches d’un arbre, vous constaterez plusieurs formes géométriques. En plus de certaines formes qui font appel à des alphabets. C’est ainsi que, pour prendre deux exemples, vous découvrirez que :

* Certains fruits d’un arbre ont une ressemblance terrible avec un des signes du zodiaque. Derrière l’univers quelle constellation entre linéarité verticale et celle horizontale ?

* D’autres fruits ont une ressemblance frappante avec la lettre arabe noun.

C’est dire que les formes de l’arbre font appel à un langage. D’où la combinaison des formes géométriques et de l’alphabet.

C’est beau de comprendre qu’un arbre, dès le début, pousse (on le constatera par la tige) comme Un ou en arabe selon la forme de l’alphabet l’alif donc symbole de l’Unité. Cette unité se subdivise à travers branches et racines souvent invisibles.

Racines invisibles mais souterraines comme elles sont : alors qu’elle alchimie ou métaphysique de l’existence où toute existence est langage ? Rien n’est fortuit. Unité dans laquelle on retrouve les formes : géométrique et de l’alphabet.

Il nous apparaît important de plaider pour une meilleure lisibilité de cet état de fait. Car il y a une corrélation entre les règnes végétal, animal et humain qui, il faut le dire, font appel à des formes.

A travers la fixité, on doit faire appel à deux concepts complémentaires : la linéarité et l’horizontalité où on retrouve des formes.

Le vocabulaire fondamental - pour revenir à lui - connaîtra sûrement un développement important dans les siècles à venir. Comme la grammaire, il verra son essor grâce à des théories et autres recherches fondamentales appliquées à la matière.

C’est pour ce faire que la Francophonie gagnerait de l’avance en misant sur la création d’un Centre de recherches sur le vocabulaire fondamental, la littérature appliquée et la communication du développement.

Le Burkina Faso pourrait accueillir un tel centre. Puisque, nous le disons, la Francophonie regroupe des ensembles et des espaces linguistiques et culturels divers, il y a une véritable richesse à asseoir une identité de la dynamique culturelle.

Le deuxième point : qui est consacré à l’avenir de la langue française, vous rappellera sans doute une thématique chère à Léopold Sédar Senghor : le métissage culturel et la civilisation de l’universel.

Senghor, en véritable homme de culture, a justement compris l’importance de la dynamique culturelle pour un véritable rayonnement du métissage culturel et de la civilisation de l’universel.

Dans deux ou trois siècles, cette thématique s’imposant, le nom de Léopold Sédar Senghor rejaillira. Et l’histoire retiendra qu’un Francophone aura autant que faire se peut, contribué à une meilleure lisibilité de la connaissance de soi en s’enrichissant des apports d’autrui.

Méticuleusement, la construction d’une humanité, consciente de ses racines culturelles plusieurs et diverses, va permettre une meilleure compréhension des peuples. C’est ce fondement qui nous amène à évoquer le troisième point du domaine-clé de l’avenir de la langue française dans les temps futurs : La Langue universelle.

Se parler, se comprendre, s’accepter et se tolérer deviendront réalité dès lors que la greffe du métissage culturel aura gagné peuples, nations et continents. Les racismes, les plus abjects, les esclavages les plus sournois, les dominations les plus perfides laisserons place à un rire humain collectif.

Et dès l’instant où le parler s’alimente du rire pluriel des nations, des nationalités deviendront une. Et les langues, à l’intérieur de ces nationalités évolueront vers une unité de parler.

C’est alors, et seulement alors que, la langue universelle naîtra. Puisque, dans les siècles à venir, nous tendrons vers l’évolution d’une langue universelle, cette langue aura comme première conséquence positive son propre plaidoyer pour la définition d’une paix mondiale.

Par et pour le parler : le mot se définissant comme un objet ressource de paix. Le IIIe millénaire, pensons-nous, connaîtra d’énormes bouleversements singulièrement positifs. Les êtres humains se connaîtront mieux, et plus leurs cultures deviendront une, plus leurs langues deviendront une, leurs regards un et leurs identités une.

La langue française doit apporter sa contribution à ce rayonnement des plus positifs. Il y va et de son avenir, et de sa raison d’être en tant que langue internationale. Puisque nous avons évoqué le mot et puisque Léopold Sédar Senghor a contribué au rayonnement de la Francophonie, voici, en guise de conclusion, mon hommage, à mon maître, à ce grand savant des mots :

« De la bouche jaillit des mots / des mots jaillit la parole / de la parole jaillit la paix / et de la paix / jaillit l’Eternité de l’univers.

Les mots ont leur fixité / le langage son domicile / la paix son repère culturel / et la culture son essence du développement : voici le progrès d’une langue, pour une langue et par une langue.

A travers la fixité des mots -pour toi Senghor qui n’est plus l’éternité du son : qui transmettra le message sinon l’identité du néant ? - j’arrive parce que je suis un passager du mot.


Auteur de « Hommage à la Femme africaine »
- E-mail : hassane.baadhio@laposte.net
- Tél : (00226 76 63 11 65)

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