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Amadou N. Yaro, DG de l’ENAREF : « Plus de 10 mille agents financiers, comptables et statisticiens ont été formés à l’ENAREF en 24 ans »

Publié le vendredi 18 mai 2012 à 02h30min

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Créée en 1988, l’Ecole nationale des régies financières est actuellement une référence dans la sous région. Plus de 10 mille agents financiers, fiscalistes, comptables et statisticiens ont été formés dans cette école depuis sa création. C’est ce que soutient Amadou N. Yaro, directeur général de l’ENAREF dans l’interview qu’il nous a accordée. Il revient également dans cet entretien sur ses missions à la tête de cette école ainsi que ses besoins.

Lefaso.net : Vous êtes, depuis novembre 2011, le DG de l’ENAREF. Comment se porte aujourd’hui l’école ?

Amadou Nébila Yaro : Depuis novembre 2011, je peux dire que l’ENAREF se porte bien. Les objectifs que nous nous sommes assignés en novembre 2011 pour le premier trimestre 2012 se sont concrétisés par des résultats probants. Nous avons commencé à mettre en route les importants projets que nous avions, du reste, annoncés dès notre prise de fonction. Il s’agissait, entre autres, d’engager l’école dans un nouveau type de management basé sur la qualité et tourné vers la satisfaction des attentes de nos clients que sont les Etats, les collectivités territoriales, mais aussi les entreprises publiques et privées.

De ce point de vue, nous avons engagé l’école dans le processus de la certification ISO avec pour objectifs d’adopter et de mettre en place des règles de gestion conformes aux normes internationales et de faire de l’ENAREF le centre de référence en Afrique en matière de formation dans les domaines financiers mais aussi économiques. Nous nous étions aussi donné pour objectif d’améliorer la qualité des enseignements afin de prendre en compte les nouveaux enjeux et défis auxquels nos pays sont confrontés dans les domaines financiers et économiques et de renforcer la cohésion sociale au sein du personnel.

Tout cela s’est traduit par des résultats dont les plus significatifs sont la réalisation d’un audit diagnostic de l’école qui a révélé les points forts mais surtout les points faibles de notre institution dans sa quête de l’excellence. Il y a aussi une meilleure connaissance du patrimoine mobilier et immobilier à travers un inventaire complet des installations de l’école et la création de nouveaux cadres de concertation aussi bien au niveau du personnel qu’avec les élèves et vacataires officiant à l’ENAREF.

Créée en 1988, l’ENAREF a pour mission de former des agents du Trésor public et des impôts pour le Burkina Faso et pour d’autres pays. Quel bilan faites-vous aujourd’hui de la mission assignée à l’Ecole ?

L’ENAREF dès 1988, en plus des agents des impôts et du trésor, formait aussi des financiers, c’est-à-dire des agents qui travaillent dans les services centraux du Ministère de l’économie et des finances.
Au regard des résultats, nous pouvons affirmer que le bilan est largement positif. En termes d’effectifs, environ dix milles agents sont passés par l’ENAREF dans les filières « fiscalité », « finances », « comptabilité » et « statistiques ». L’ENAREF a formé des stagiaires en provenance des pays de l’UEMOA, de l’Afrique centrale (précisément le Tchad, le Gabon, la Centrafrique et le Congo Brazzaville). Nos stagiaires viennent aussi de plus loin comme des Comores dans la corne de l’Afrique. Ces stagiaires bien évidemment occupent ou ont occupé des postes de responsabilité, voire même de prestigieux postes ministériels dans leurs pays. Nous pouvons ainsi dire qu’au Burkina Faso, 80% environ des personnels de l’administration financière (impôts, trésor, services centraux du ministère de l’économie et des finances et un tout petit peu la douane) ont été formés à l’ENAREF. Nous avons ainsi permis aux administrations financières de nos pays de s’offrir des cadres en quantité et en qualité.

L’ENAREF est aujourd’hui sur un site de huit hectares, ce qui lui permet d’offrir aux étudiants et au personnel un espace de travail appréciable. Elle dispose de ce fait d’une trentaine de salle de formation dont deux salles informatiques et une bibliothèque moderne. Au regard de tout cela, nous pouvons affirmer que le bilan de l’ENAREF est largement positif, même s’il convient aussi de relever quelques difficultés liées à l’insuffisance quantitative du corps professoral permanent, à des équipementsqu’il convient de renouveler et à la nécessité de revisiter complètement les cours et les enseignements afin de prendre en compte les nouveaux enjeux et défis de nos administrations.

Vous avez été nommé après la crise qui a secoué le Burkina Faso. Quels sont les grands défis qui se présentent aujourd’hui à l’ENAREF ?

Ma nomination n’est pas liée à la crise dont vous faites cas. J’ai été nommé, certes après la crise, mais en réalité le processus de choix était lancé. Je dois vous dire que j’ai été nommé suite à un appel à candidature, ce qui immanquablement m’a permis de présenter un programme d’activités que je m’efforce de mettre en oeuvre. Pour l’heure, l’ENAREF se doit de relever trois grands défis. Le premier est celui de la qualité du management il nous parait essentiel que l’ENAREF se dote des instruments modernes de gestion, basé sur la qualité et répondre très rapidement aux risques qui peuvent survenir. Il y a aussi celui de la qualité des programmes de formation. Il s’agit pour nous de répondre efficacement aux attentes de nos clients que sont les Etats, les collectivités territoriales et les entreprises privées.

Lorsque nous parlons de clients, il s’agit de nos clients nationaux que nos clients au plan international. C’est dans ce sens qu’il nous parait important d’élargir nos compétences et nos prestations de services en termes d’offres de formation. Nous devons prendre en compte des thèmes tels que les fonctions économiques de notre ministère de tutelle. En effet, nous estimons que la fonction économique n’est pas suffisamment valorisée. Il importe de former davantage des économistes à même d’élaborer, de conduire et d’évaluer les politiques de développement. Nous devons aussi prendre en compte les nouveaux défis qui se présentent à nos Etats que sont par exemple les métiers liés au contrôle des comptes publics, à la mise en œuvre des référentiels dans nos pays comme la Stratégie de croissance accélérée et de développement durable (SCADD) au Burkina Faso.

Enfin nous devons intégrer la variable perfectionnement et recyclage des agents qui sont en poste dans les services aussi bien au Burkina Faso qu’à l’extérieur. Le renforcement des capacités doit être pour nous un travail permanent. Il nous appartient de créer les conditions pour cela. Le dernier défi est la régionalisation de l’école. Il apparait comme la conséquence des deux premiers défis. Il nous faut faire de l’ENAREF un centre d’excellence incontournable en Afrique francophone.

La vocation régionale de l’école doit être cultivée et des initiatives doivent être prises pour qu’il en soit ainsi et ceci de manière définitive. Dans ce sens, nous devons mieux nous faire connaitre de nos partenaires étrangers, des Etats de l’UEMOA et de l’Afrique centrale et ailleurs, en menant une politique d’approche cohérente et efficiente. Nous devons intégrer leurs préoccupations en terme de contenus des programmes de formation. La crédibilité de l’école doit être un letmotiv pour les agents. Nous envisageons ainsi d’organiser systématiquement des tests d’entrée ou de niveau pour tous les candidats qui aspirent entrés à l’ENAREF. Ces tests auront bientôt lieu dans trois pays que sont le Tchad, le Gabon et la Centrafrique.

Certaines personnes estiment que les impôts ne sont pas bien prélevés au Burkina du fait de l’incapacité des agents. Est-ce une défaillance de la formation ?

Non, ce que vous désignez comme défaillance est dû à plusieurs facteurs. La pression fiscale est effectivement en dessous du seuil recommandé par l’UEMOA, mais les explications sont connues. Entre autre raison, il y a l’insuffisance de la fiscalisation du monde agricole et plus généralement ce que les spécialistes appellent l’assiette fiscale qui n’est pas très large. Il est en effet indéniable que l’assiette fiscale de notre système fiscale ne prend pas en compte un certain nombre de matières imposables, qui auraient dû l’être. Par ailleurs, nous sommes un pays dont l’économie est sensible aux effets des crises économiques et politiques des pays voisins. A titre illustratif, la crise politique en Côte d’Ivoire a eu des effets négatifs sur notre économie même si les pouvoirs publics ont pris des mesures pour y faire face.

Les performances d’un système fiscal sont fortement dépendantes de la santé économique de ce pays. Il faut donc intégrer cette variable dans votre appréciation du prélèvement des impôts. Il reste aussi quele contenu de la formation reçue ne peut pas être écarté dans les résultats obtenus. Nous en sommes bien conscients. C’est la raison pour laquelle nous insistons sur la qualité de la formation, sur la nécessaire adaptation des programmes et le contenu à l’évolution des activités et même des comportements des contribuables.

Les agents du Ministère de l’Economie et des Finances ont eu à organiser des manifestations pour réclamer leur part des Fonds Communs. Pensez-vous qu’ils avaient raison de revendiquer ?

Pour le peu de choses que nous connaissons du fonds commun, il faut dire que la situation ne date pas de maintenant et ne se pose pas seulement dans notre pays. Il s’agit d’un problème récurrent et si on prend la peine de voir ce qui se passe ailleurs, on se rendra compte qu’il est posé avec beaucoup plus d’acuité dans d’autres pays. Si les revendications des agents sont conformes aux textes en vigueur et qui traitent du fonds commun, nous pensons qu’elles doivent se situer dans ce contexte et seulement dans ce contexte. Autrement, ce que vous appelez revendications doivent se situer dans un cadre stricte de la légalisation, en tout cas tant que les textes n’ont pas été modifié. Ce qu’il faut regretter, c’est la trop grande exposition de ces problèmes aux yeux de l’opinion publique susceptible d’entrainer des incompréhensions y compris des contribuables, au détriment du travail colossal que font les agents des impôts, auxquels il convient d’ajouter la douane et tous ceux qui travaillent dans la chaine des dépenses publiques.

L’heure est actuellement, au plan national, à la gestion de la crise sociopolitique. Quelles sont vos missions en tant que DG de l’ENAREF ?

Nos missions ont été déterminées dans une feuille de route qui est la lettre de mission du ministre de l’économie et des finances, qui devons-nous vous rappeler est notre autorité de tutelle. Elles découlent de la vision que le ministre entend imprimer et aux propositions que nous avons formulé à diverses occasions comme lors de notre installation officiel le 9 novembre 2011. De ce point de vue, nous sommes redevables du ministre de l’économie et des finances pour avoir accepté d’intégrer nos préoccupations dans la lettre de mission et des objectifs stratégiques du département qu’il dirige auxquels il convient d’associer le plan stratégique 2010-2019 de l’ENAREF. Parmi les tâches importantes que nous avons souhaité conduire sont d’une part soumettre l’ENAREF à la certification ISO, c’est-à-dire soumettre la gestion de l’école aux normes internationales et d’autre part la refonte complète des textes que sont les statuts et les programmes de formation afin de prendre en compte les nouveaux enjeux et défis relatifs aux finances publiques.

Comment est le quotidien d’un DG ?

Nous ne connaissons pas le quotidien de tous les directeurs généraux, mais pour ce qui concerne le nôtre, il est composé de plusieurs séquences. Il commence par un réveil matinal. Après avoir réglé quelques problèmes familiaux et jeté un coup d’œil aux cahiers des enfants, nous sommes au service entre 7 h et 7 h 15mn. Les cours devant débuter à 7 h 30, nous devons nous assurer, en association bien évidemment avec les autres directeurs et chefs de services, que les élèves, stagiaires et les enseignants sont bien en place à l’heure. Il en est de même du personnel. Après cela, nous tenons des réunions de travail selon un calendrier (réunion de direction, conseil de direction, etc.) ceci jusqu’aux environs de 10 h. Il faut préciser que nous avons gardé quelques cours que nous animons, ce qui nous permet de connaitre de manière pratique ce qui se passe dans les salles de classe et les préoccupations des élèves.

Certaines réunions se passent hors de l’établissement comme il nous arrive de rendre visite à des partenaires ou des clients dans le cadre de la formation continue. Tout ceci nous emmène à 12 h 30 et s’il y a du « boulot », nous restons au bureau pour le terminer. L’après-midi est consacré aux tâches quotidiennes de gestion comme les réponses à apporter aux préoccupations des collègues de travail, aux élèves et stagiaires. Nous restons au bureau après les heures de « descente » car propice à la réflexion et au traitement des dossiers comme le courrier. La journée s’achève aux alentours de 21 h, voire 22 h quand les circonstances l’exigent. C’est un rythme de travail qui nous parait normal notamment dans cette période où nous engageons de nombreux chantiers.

Interview réalisée par Jacques Théodore BALIMA
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