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GUINEE BISSAU : Quand les putschistes narguent la CEDEAO

Publié le vendredi 20 avril 2012 à 01h53min

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En réagissant avec promptitude et fermeté au coup d’Etat survenu au Mali, la CEDEAO s’était fait la défenderesse intrépide des valeurs démocratiques dans son espace communautaire. En dépit des lacunes de l’accord arraché à la junte, elle a pu tout de même imposer son autorité. C’est cependant tout le contraire qui semble se dérouler en Guinée Bissau, un autre pays du champ, victime des turpitudes de son armée. Une comparaison rapide montre que l’émotion et le déchaînement qui ont suivi le putsch au Mali, ne sont pas de mise pour la Guinée Bissau. Les faits se sont en effet enchaînés pour créer un effet d’étouffement des locataires du camp de Kati : sommet d’urgence des chefs d’Etat, réunion des chefs d’état-major, sanctions diverses (suspension de la CEDEAO, embargo, etc.).

Pour la Guinée Bissau, rien de tout cela. La suspension systématique des instances de la CEDEAO, première mesure que prend l’institution dans ces circonstances, n’a pas encore été prononcée, près d’une semaine après le putsch. La CEDEAO traîne le pas, alors même que son partenaire habituel, l’Union africaine, a pris les devants et ne cesse de tonner. L’organisation panafricaine vient ainsi de suspendre le pays de ses instances. Il en est de même de certaines institutions financières comme la Banque africaine de développement et la Banque mondiale, qui ont coupé le robinet de leur aide. Pourquoi donc la CEDEAO, qui allait à une allure de TGV pour résoudre le cas malien, rétrograde-t-elle en ce qui concerne la Guinée Bissau ?

Un fatalisme s’est-il emparé de la CEDEAO face à un pays ayant une sulfureuse réputation de narco-Etat ? Est-ce la tradition putschiste des militaires qui refrène les ardeurs de l’institution ouest-africaine ? Ou alors la collusion entre militaires et certains hommes politiques l’a-t-elle contrainte à la prudence ? On n’osera pas imaginer que la mollesse du président en exercice de la CEDEAO et du président de la Commission, tous deux francophones, est liée à l’appartenance de la Guinée Bissau à la sphère linguistique lusophone. Alors, pourquoi ces atermoiements, surtout face à des putschistes arrogants qui se permettent de tourner en bourrique la CEDEAO, voire de la narguer, en lui imposant son agenda ? Dans le cas malien, la CEDEAO s’est posée clairement en redresseur de torts, déterminée à faire appliquer sa loi partout dans sa zone d’influence. La Guinée Bissau a beau être occupée depuis de longues années par des bandes de militaires affairistes, il n’en demeure pas moins qu’elle appartient à la CEDEAO dont les valeurs de démocratie sont inscrites à son fronton. Aucune distinction ne doit donc être établie entre les pays membres sur l’obligation du respect des règles de convergence démocratique.

Du cancre au meilleur élève de la communauté, ce doit être la même rigueur. Sinon, tous les efforts en vue d’instaurer un climat de paix et de stabilité dans la sous-région tomberaient à l’eau. Ce serait signer le retour des coups d’Etat, que d’adopter une attitude de faiblesse face aux militaires bissau-guinéens.

Mahorou KANAZOE

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 20 avril 2012 à 11:00 En réponse à : GUINEE BISSAU : Quand les putschistes narguent la CEDEAO

    deux poids deux mesures...,

  • Le 20 avril 2012 à 11:21, par idéaliste En réponse à : GUINEE BISSAU : Quand les putschistes narguent la CEDEAO

    BADO Laurent disait "...Je suis pour les coups d’état salvateurs..." donc face à des politiciens véreux et sans scruptules, pensant que l’Etat est leur royaume où ils ont droit de vie et mort sur tout...n’est-il pas necessaire qu’une frange de l’armée par ces fameux coups d’état les fasse sortir de leur sommeil ou de leur rêve...cette crainte de rebellion ou de coup d’état pousserait certains hommes politiques à gouverner avec prudence et loyauté craignant d’être délogés de force par les armes au cas où ils auraient réussi à tricher dans les urnes pour rester éternellement au pouvoir...?
    Le fameux printemps arabe (Egypte, Tuinisie,...), ce sont des coups d’état militaires voilés...car la population seule ne peut pas faire grand chose contre ces gens...sans l’aide des armes. C’est ainsi qu’en Egypte et autres l’armée a pris le pouvoir...!
    Pour éviter les coups d’état militaires, ils serait juste et utile que la classe dirigeant opte pour la vraie démocratie et non la mascarade servie à nos jours....

  • Le 20 avril 2012 à 15:52, par Bob En réponse à : GUINEE BISSAU : Quand les putschistes narguent la CEDEAO

    Si ce pays intéressait la France il y a longtemps que la CEDEAO aurait réagi. La réaction rapide de la CEDEAO dans le cas malien est due aux injonctions de Paris.
    Comme il n’y a pas d’ordre venant de Paris, il n’y a point de réaction significative de la CEDEAO. Croire que la CEDEAO est souveraine et agi dans l’intérêt de l’Afrique, c’est faire preuve de naïveté !

  • Le 20 avril 2012 à 20:48, par KOHOLE En réponse à : GUINEE BISSAU : Quand les putschistes narguent la CEDEAO

    Le vent des coups d’Etat militaires qui soufflent dans l’espace CEDEAO marquent une phase de sa mise en épreuve par rapport à sa capacité à réguler les conflits intercommunautaires et à harmoniser les politiques sectorielles. C’est l’occasion pour la CEDEAO de faire son autocritique et bien sur de s’amender pour réussir son avenir, son pari, ses defis. Nous sommes tous, en tant que membre de l’espace, interpelles à soutenir et à aider la CEDEAO dans ses efforts, d’une façon ou d’une autre, à travers nos comportements, nos écrits, nos critiques, tout en acceptant l’évidence que son échec ne peut qu’être l’échec à tous et non de la CEDEAO seule en tant qu’organe administratif.

    La tendance actuelle serait de doter la CEDEAO d’une armée multinationale forte à même de juguler de telles crises et d’assurer la securite de sa marche economique. Une structure fédérative telle la CEDEAO n’a d’intérêt que lorsqu’elle dispose des moyens de sa politique.

    Vive la CEDEAO

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