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SNC 2012 : « La foire à la SNC, c’est tout simplement du n’importe quoi », dixit Rasmané Ouédraogo, artisan

Publié le mercredi 28 mars 2012 à 04h16min

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Le marché culturel commercial, communément appelé foire a ouvert lui aussi ses portes le dimanche 25 mars dernier à l’occasion de la 16e édition de la semaine nationale de la culture. A l’analyse, on pourrait confirmer qu’il s’agit de la tranche de la SNC qui intéresse le plus de monde. Réservée à la promotion des produits culturels, la réalité est pourtant toute autre. La foire est envahie de produits provenant d’ailleurs, et notamment chinois, et de marques de toutes sortes. Les expositions traditionnelles sont submergées par ces dits produits. C’est à peine, si l’on peut les identifier sur le site.

Le premier stand de la foire est situé juste à l’entrée à gauche. Là, ce sont des chaussures visiblement vieilles qui sont à la vente. En plus des chaussures, on y vend des habits modernes, tels que les robes, jeans, et autres « hauts et body ». Plus loin, ce sont des ustensiles de cuisines en plastiques et des fleurs décoratives made in Dubaï. Dans une autre boutique, on peut visiter et acheter des mèches, des habits prêt-à-porter (…). Un autre quartier et pas des moindres, généralement très prisé par la population : c’est l’aire réservé aux maquis et restaurants où se vend de la boisson, des brochettes…

Seuls quelques deux « quartier » sont réservés à la vente des produits locaux : produits de pharmacopées, habits traditionnels Danfani, chaussures en cuir, objets d’arts… En parcourant le site, on rencontre quelques produits traditionnels, éparpillés sur le site. Mais envahis par les produits made in China, made in Dubaï.

Cette situation amène à se questionner sur le sens réel de cette fenêtre dédiée à la commercialisation des produits culturels. Cyriaque Labdiego, ingénieur brasserie et responsable de la bière Metiss (une bière brassée à base de sorgho rouge et blanc) ne mâche pas ses mots. « Je fais de la bière locale appelée bière métisse. C’est la première fois que je participe à la SNC et ça marche bien. Mais il faut reconnaitre que c’est très dommage de voir des produits qui n’ont rien à voir avec la nature et le sens même de la SNC. Cette situation alourdit les choses. Les gens préfèrent consommer les boissons ordinaires dans les petits maquis au détriment des boissons locales », fustige-t-il.

Pour Oumar, un exposant d’objet d’art, cette situation bien que déplorable a une explication : les africains ne s’intéressent pas aux produits locaux. Pour eux, les objets d’arts sont fabriqués pour des occidentaux. « Je pourrai donc affirmer que certains africains n’ont vraiment pas l’idée réelle de l’importance des produits africains », s’insurge-t-il. Ces artisans qui ont loué les stands au même prix que les commerçants se soucient de la rentabilité au regard de la situation qui prévaut. « Voyez-vous, il n’y a même pas de passage. Les commerçants sont installés à même le sol. Les gens peinent à passer, encore qu’ils viennent vers nous », indiquait le vieux Oumar. Comme solution à cette situation, l’homme propose tout simplement l’implication des artisans dans l’organisation et l’attribution des stands.

Pour Rasmané Ouédraogo artisan et vendeur d’habit traditionnel : « la foire à la SNC, c’est tout simplement du n’importe quoi. On ne sait pas de quel marché il s’agit en réalité. Au lieu de la promotion et valorisation des produits locaux burkinabè, c’est plutôt celle des produits chinois ». Il propose alors que les organisateurs s’inspirent du SIAO (salon international de l’artisanat de Ouagadougou) où, sur l’aire du marché, on ne peut rencontrer que des produits artisanaux. Il faut prioriser les artisans pour la promotion de leurs œuvres.

La foire de la 16e édition de la Semaine nationale de la culture est inondée des produits modernes. Et ceux qui le vendent ont bien leurs raisons. « Nous sommes bien conscient que nos articles sont loin de la culture africaine. Mais on nous autorise l’accès de la foire pour les écouler. Et ça marche bien. Surtout que nous n’avons pas loué de stand. Nous exposons à même le sol et nous payons juste 5000 FCFA ou 10 000 FCFA pour la semaine », indique Moussa, un vendeur de Nounou. A les écouter, il faut aussi ces genres d’expositions pour donner un « autre gout » à la foire. Patrice, vendeur de friperie et de cellulaires venus de la capitale estime lui aussi qu’il faut la présence de ces genres d’articles qui intéressent plus la gente féminine.

D’une certaine manière, ces vendeurs contribuent à l’économie locale. Pour autant, faut-il leur laisser autant de place, au risque de dénaturer ce qui fait la richesse de la SNC ?

Bassératou KINDO

Pour leFaso.net

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Vos commentaires

  • Le 28 mars 2012 à 11:30, par Nidale En réponse à : SNC 2012 : « La foire à la SNC, c’est tout simplement du n’importe quoi », dixit Rasmané Ouédraogo, artisan

    qu’on se comprenne bien, je suis pour la valorisation de la culture, encore faut -il que l’on sache ce qu’est la culture !
    1) Nous réduisons la culture à l’art (si vous posez la question suivante : le tam -tam est -il un objet culturel, 100% vous dirons oui ; mais si vous demandez si l’avion est un objet culturel, je crains fort que la majorité ne réponde non, alors que :
    2) la culture c’est l’interface entre l’homme et la nature. L’avion est un objet inventé pour faciliter le déplacement des hommes. C’est dire que la façon de se soigner d’un peuple, les modes de réjouissance d’un peuple, même la façon de régler ses litiges d’un peuple sont des "objets" culturels. La culture est trop vaste pour être "enfermée" dans un ministère, à moins qu’on ne confonde justement art et culture.
    3) la culture a une dimension opérationnelle : c’est dire que si un peuple abandonne ses objets culturels pour la culture d’un autre peuple, on peut en déduire (comme tout homme est rationel) que ces objets répondent mieux au besoin de celui qui les acquiert. conclusion, les promoteurs de la culture doivent travailler à adapter leur biens (matériels et immatériels) au besoin de leur peuple.
    J’invite les uns et les autres à approfondir la réflexion à travers un débat constructif.
    merci

    • Le 28 mars 2012 à 18:10, par tièkadiyé En réponse à : SNC 2012 : « La foire à la SNC, c’est tout simplement du n’importe quoi », dixit Rasmané Ouédraogo, artisan

      Heee ! Toi là il faut quiter là-bas avec ton gros français là. Ici nous, nous parlons Français facile. Tu peux aller dans les atéliers et autres séminaires thèser. Il n’est pas question que des produits comme ceux qu’on voit occupent l’aire d’exposition. Il faut se conformer à l’esprit de la SNC. Et cet esprit, tout le monde la connaît sauf les pseudo-intellectuels qui, du haut de leurs nombreux parchemins acquis à la sueur de nous tous, ignorent qu’ils ont vendu leur âme au point de nous faire croire que les produits manufacturés à l’étranger sont des produits de l’artisanat.

      Tu peux critiquer les termes mais pas l’esprit de ces termes-ci.

  • Le 28 mars 2012 à 18:56, par kabjojo En réponse à : SNC 2012 : « La foire à la SNC, c’est tout simplement du n’importe quoi », dixit Rasmané Ouédraogo, artisan

    je suis entièrement d’accord avec le 2ème intervenant. Une telle foire a pour but de promouvoir nos arts. Mais que des objets étrangers viennent envahir les lieux c’est dommage.

    L’analyse de l’inculte du 1ème intervenant est très ridicule et répugnant. Qu’il sache que nous sommes africains( je ne sais pas qui il est mais surement pas africain) et comme tel voudrons-nous mettre en valeur nos produits made in africa.

    Les autorités sont entièrement responsables de ce manquement de cette dérive grave. Puisque c’est eux qui octroient les stands. Ce qui les intéressent ce sont les recettes sur les stands. peu importent les produits exposés.
    Alors les autorités doivent se ressaisir et éviter une telle désordre dorénavant.

  • Le 28 mars 2012 à 19:11, par OUATTARA En réponse à : SNC 2012 : « La foire à la SNC, c’est tout simplement du n’importe quoi », dixit Rasmané Ouédraogo, artisan

    Bel article !! Belle analyse !! Un appel à la reflexion !!

    Je me souviens des éditions des années 90 où la SNC etait un moment pour nous de VISITER et de s’OFFRIR les produits qu’on trouvent pas sur les marchés ordinaires.

    Actuellement il n’y a pas de differences entre la FOIRE et le GRAND MARCHE de bobo si ce n’est que les produits sont plus chers à la FOIRE. Très TRISTE !!!

    Je pense qu’il faut etre categorique, la SNC est une occasion qui permet d’amener la population en une SEMAINE à s’interesser a sa propre culture !! TRES IMPORTANT !! N’exposer à la FOIRE que des produits valorisant notre culture : les mets, les habits, les moeurs, la boisson, etc. Dire que sans les produits made in china rien ne va marcher c’est FAUX !! Archi FAUX !! N’oubliez pas que pour un local rien que visiter ces richesses culturelles peut le plonger dans une meditation profonde. Et que diront les etrangers ? Ils diront simplement que nous n’avons RIEN à valoriser made in CHEZ NOUS !! Voila pourquoi la FOIRE est innondée par des MADE IN CHINA !!

    LA reflexion doit etre menée à plus grande echelle !!

    MErci de soulever le probleme BASSERATOU.

  • Le 28 mars 2012 à 19:28, par Nidale En réponse à : SNC 2012 : « La foire à la SNC, c’est tout simplement du n’importe quoi », dixit Rasmané Ouédraogo, artisan

    A Kadjojo et KeKadjé, c’est vous qui êtes acculturés. Les Européens vous font croire que la culture c’est les chants et les dances et vous vous laissés prendre ! Relisez mon analyse et vous verrez que ça dépasse la dimension "alimentaire" de la SNC (qui est le souci des exposants, ce qui est du reste normal) pour s’incrire dans la culture comme ressources permettant à un peuple de surmonter toute les adversités de la nature.
    je ne devrais même pas vous répondre du fait de votre manque de courtoisie.
    Merci

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