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Burkinabè de l’étranger : Les oubliés de la nation

Publié le mercredi 20 octobre 2004 à 06h25min

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C’est avec des fortunes diverses que des Burkinabè qui s’étaient rendus en Libye en vue d’améliorer leurs conditions de vie ont été expulsés. Certains d’entre eux ont pu sauver leurs meubles, d’autres sont revenus sans leurs biens. A qui la faute ?

Les autorités burkinabè auraient été informées de l’expulsion programmée de leurs ressortissants dès la mi-juillet 2004. Elles ont regardé venir cette échéance fatale et, avec elle, un contingent d’hommes qu’il va falloir gérer.

A tort ou à raison, l’analyse est que l’Etat burkinabè a mal géré ce dossier. Devant l’évidence du retour de nos émigrés, l’Etat aurait dû devancer les événements. L’opinion publique aurait dû être informée officiellement du sort qui attendait nos compatriotes de Libye et ceux-ci auraient pu être organisés pour leur rapatriement, de sorte à ne perdre ni la face ni leurs biens. Sans jouer au Moïse conduisant le peuple d’Israël hors d’Egypte, l’Etat aurait pu mettre à la disposition des nôtres, les moyens de transport appropriés pour leur retour dans la dignité. Une telle option aurait été un motif de fierté pour nos compatriotes et une preuve du sens de responsabilité de l’Etat burkinabè aux yeux du reste du monde.

Le problème des rapatriés de Libye fait remonter en surface la question de la gestion des Burkinabè de l’extérieur. Bien que premier pays d’émigration des Burkinabè, le nombre de nos ressortissants en Côte d’Ivoire par exemple est depuis toujours, précédé de l’adverbe "environ" : "il y a environ trois millions de Burkinabè en Côte d’Ivoire". Or, nul n’ignore l’apport des Burkinabè de l’extérieur dans l’économie nationale. Des contrées comme Béguédo et Niagho respirent à pleins poumons la manne venue de leurs ressortissants d’Italie.

Avec une bonne politique d’émigration, l’excellence des relations au sommet entre les chefs d’Etat libyen et burkinabè aurait pu être utilisée pour obtenir au profit des nôtres, un traitement préférentiel. Le Burkina est souvent accusé d’être un pion de la Jamahirya arabe libyenne, mais les amours à la base ne sont pas parfaites.

L’absence de réaction officielle face aux expulsions de Libye est difficile à comprendre. Ces expulsions sont à mettre au même niveau que celles qu’avaient organisées le Nigeria au début des années 80 et le Gabon dans les années 90. Ce sont des pratiques qui vont à l’encontre de l’unité dont l’Afrique a tant besoin. Venant du colonel Kadhafi, le géniteur de l’Union africaine, il y a de quoi perdre son latin. Surtout que dans ce dernier cas, les expulsions semblent avoir été faites à l’aveuglette. Elles n’ont épargné ni les sans papiers ni ceux qui étaient munis des documents nécessaires pour leur séjour libyen. Ceux qui ont payé le prix fort sont les ressortissants de l’Afrique au Sud du Sahara.

Beaucoup n’ont pas manqué de conclure à un comportement raciste qui ne dit pas son nom, et cela n’est pas une première. Des Burkinabè avaient été obligés de quitter la grande Jamahirya il y a environ deux ans et l’on se rappelle les doléances qu’ils avaient émises de leur "gîte" du stade du 4 août. Des doléances qui n’ont pas connu de suite favorable.

Cette première expérience, ajoutée entre autres aux problèmes que vivent nos compatriotes de la Côte d’Ivoire, aurait pu servir d’élément enclencheur pour mettre en place une sorte de mécanisme pour donner aux candidats à l’émigration, les informations relatives aux réalités de leur pays de destination. Une structure comme le Conseil supérieur des Burkinabè de l’étranger (CSBE) pourrait jouer un tel rôle, à l’image de son homologue français. Il est nettement insuffisant de compatir à la douleur de ceux qui rentrent malgré eux. Il faut les préparer pour qu’ils n’entrent pas de manière calamiteuse.

La diaspora burkinabè ne doit pas être une entité oubliée de la nation. Des mécanismes doivent être mis en place pour leur pleine participation à la vie de la nation. Cela passe entre autres par la reconnaissance de leur droit de vote. Une telle hypothèse changerait radicalement la nature des relations que l’Etat entretient avec eux. Mais il appartient à cette diaspora de se battre pour arracher ce droit fondamental qu’est le droit de vote.

Le pays

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