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Mohamed Sané Topan, Ambassadeur du Burkina au Mali : « Les burkinabè vivent ici comme chez eux »

Publié le mercredi 1er février 2012 à 01h16min

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En marge du forum national de l’eau et de l’assainissement tenu à Bamako du 23 au 25 janvier 2012, nous nous sommes rendus à l’ambassade du Burkina au Mali. Accueilli par Son Excellence Mohamed Sané Topan, ambassadeur du Burkina au Mali, nous lui avons arraché une interview. Occasion pour lui d’adresser ses vœux de nouvel an à l’ensemble du peuple burkinabè mais aussi se prononcer sur la coopération Mali-Burkina et l’intégration de la diaspora burkinabè au Mali. La crise socio-militaire de 2011, les élections couplées à venir, son séjour malien, étaient également au menu de l’entretien.

Lefaso.net : A l’orée de la nouvelle année, quels sont les vœux que vous voudriez formuler à vos compatriotes ?

Mohamed Sané Topan : Je voudrais à travers vous-même et à toute votre équipe exprimer ma reconnaissance au Faso.net pour le travail remarquable qui est accompli par l’ensemble des animateurs de ce portail très important qui constitue une des vitrines très prisées des burkinabè et des amis et sympathisants du Burkina. Je voudrais très modestement encourager l’ensemble des communicateurs qui animent et qui alimentent régulièrement cette vitrine, les encourager et formuler des vœux de bonne et heureuse année pour eux d’abord. Me tournant donc vers mon pays le Burkina Faso, je voudrais adresser aux plus hautes autorités de mon pays, à commencer par le président du Faso, le chef du gouvernement, le président du parlement, à l’ensemble des dirigeants, je voudrais formuler des vœux de santé, de prospérité et de succès dans toutes leurs entreprises.

En direction du peuple burkinabè, des populations laborieuses de mon pays, je voudrais souhaiter bien sûr la santé, mais surtout la persévérance dans l’effort. Nous sommes dans un pays sahélien, cette année, éprouvé par la crise alimentaire. Que Dieu continue à pourvoir à nos besoins ! Mais que nous soyons nous-mêmes les premiers acteurs de notre développement afin que nos partenaires qui nous accompagnent constituent un appoint. Donc, des vœux de paix, de sécurité, de sérénité et surtout que le Tout Puissant comble notre peuple de Sa grâce pour nous préserver de tout ce que nous avons vécu en 2011. Que tout cela soit derrière nous. Les Mossi aiment à dire « La pluie d’hier est passée avec son vent violent ». Profitons donc des bienfaits de l’eau. Tirons leçon de ce qui s’est passé l’année dernière et regardons l’avenir avec assurance et espoir.

Lefaso.net : Justement, parlant de la crise qu’a connu le Burkina en 2011, comment l’avez-vous vécu, loin de votre pays ?

Mohamed Sané Topan : C’est du passé et il n’est pas toujours bon de regarder dans le rétroviseur. Nous avons été aussi éprouvés, préoccupés par ce qui se passait au pays à partir du Mali. C’est non seulement au niveau de l’ambassade, tout le personnel, mais aussi l’ensemble de la diaspora vivant ici et même nos frères et sœurs du Mali étaient véritablement en communion avec nous pour prier tous les jours afin que nous puissions nous en sortir de cette situation. Je le dis sans fausse modestie que nos dirigeants et le peuple ont su gérer avec clairvoyance et beaucoup de patience cet épisode douloureux de notre histoire. C’était une période historique difficile, mais dans la vie de toutes les nations, il ne s’agit pas d’un fleuve tranquille. Il y a des moments où il y a des bourrasques, il y a des moments où il y a des vagues. Je crois que c’est cette période que nous avons traversé. Mais, nous devons pouvoir tirer toutes les leçons, faire en sorte que plus jamais cela ne se reproduise et que nous puissions, par nos attitudes, nos savoir-faire, amener la jeune génération vers un avenir radieux en les impliquant, en leur faisant prendre conscience que c’est ensemble dans le consensus, dans le dialogue que nous devons trouver des solutions aux problèmes qui se posent à nous.

Lefaso.net : A combien peut-on estimer la diaspora burkinabè au Mali actuellement et quel est son état d’intégration ?

Mohamed Sané Topan : Le nombre importe peu de mon point de vue. Nous avons une forte communauté au Mali et les maliens ont une forte communauté au Burkina. Ce qui est important à relever, c’est que de part et d’autre, les gens vivent comme s’ils étaient véritablement chez eux parce qu’ils le sont. Les gens vivent en parfaite harmonie avec les populations de part et d’autre. Je dirai qu’il s’agit d’une fraternité réelle et la coopération qui s’accroit de jour en jour à travers l’interpénétration, le brassage sur tous les plans possibles (commercial, économique, culturel, social avec des mariages), contribue à fortifier les relations entre les maliens et les burkinabè qui constituent en réalité un même peuple qui se trouve aujourd’hui au niveau de deux Etats. Dieu merci, il y a des avancées et je crois que toutes les activités qui sont entreprises aujourd’hui contribuent à les renforcer.

Je voudrais vous donner deux exemples. Il n’y a pas longtemps, dans le domaine de l’éducation à Madouba et également à Benena, les deux ministres ont célébré une coopération fort réussie en matière d’alphabétisation, en matière d’enseignement non formel à travers les sites qui ont été érigés de part et d’autres avec des échanges de personnel enseignant éventuellement.

D’ici le 17 février, c’est un centre de santé érigé en territoire burkinabè qui va accueillir du personnel soignant malien et burkinabè. Ces médecins, infirmiers vont soigner les populations maliennes et burkinabè sans distinction. Ce centre a été construit parce que les deux pays ont voulu que le partenaire construise ce centre jusqu’à concurrence de près de 300 millions de francs. Donc c’est une infrastructure importante et je crois que c’est une première entre deux Etats que d’avoir une même structure sanitaire avec deux administrations différentes mais qui soignent ensemble les mêmes populations.

Je prends la rencontre tripartite que nous avons eu à Sikasso il y a quelques jours pour qu’on transforme la zone de Korogho, de Sikasso, de Bobo-Dioulasso et Banfora, en une zone de développement intégré avec les acteurs maliens, ivoiriens et burkinabè. C’est dire qu’au-delà du Mali-Burkina Faso, nos chefs d’Etat sont véritablement engagés à promouvoir l’intégration au niveau de notre sous-région. Nous nous mettons dans ce sillon pour que cela se concrétise et je crois que les populations suivent également. Nous espérons avoir l’accompagnement de nos partenaires pour que cette intégration aille de l’avant.

Lefaso.net : Y a-t-il un cadre pour accueillir les burkinabè ayant des difficultés de logement ou qui arrivent pour la première fois au Mali ?

Mohamed Sané Topan : Je ne peux pas dire qu’il y a un cadre formel mais nous sommes organisés, nous avons des structures. Il y a l’association des ressortissants burkinabè qui peut, en cas de besoin, apporter son soutien. Il y a aussi l’Ambassade qui est là en permanence et qui accueille des burkinabè tous les jours. Il y a également une amicale au niveau des fonctionnaires et chaque fois que nous recevons un fonctionnaire qui arrive dans le cadre des organisations interafricaines ou du système des Nations –Unies, nous le dirigeons vers l’amicale, libre à lui d’adhérer et d’être dans son milieu. Nous avons également une association dynamique de jeunes, ils ont un centre que l’Ambassade paie, où les jeunes peuvent se retrouver. C’est également un cadre où le jeune burkinabè qui arrive ici pour la première fois peut y aller.

Lefaso.net : Ce centre pour jeunes était une doléance des jeunes burkinabè au Mali lors d’un passage du président du Faso. C’est désormais chose faite, mais certains se plaignent encore de l’emplacement ?

Mohamed Sané Topan : Effectivement le président du Faso m’avait instruit de trouver un bâtiment pour ces jeunes qui ont sollicité un lieu où ils pourront se retrouver. Mais la question de la position géographique ne dépend pas de l’ambassade, ni des jeunes eux-mêmes. Lorsque vous devez louer un bâtiment, vous le louez là où vous le trouver. A partir du moment où les jeunes qui résident ici ne se plaignent pas, ceux qui arrivent pour la première fois, ça dépend. Quand vous arrivez dans une grande ville de 40km de diamètre, il est évident que ça dépend de part où vous arrivez. C’est possible qu’il y ait des problèmes mais pour le moment, on ne m’a pas saisi officiellement sur cette question.
Lefaso.net : Il semble que vous faites partie des diplomates les plus populaires et les plus intégrés du Mali, quel est votre secret ?
Mohamed Sané Topan : En termes d’intégration, même avant de venir comme ambassadeur au Mali, j’avais beaucoup d’attache avec le Mali. J’avais beaucoup de sympathie pour les maliens et pour le Mali de façon générale, au regard de la position géographique même de mon village d’origine (ndlr : Kiembara dans la province du Sourou).

On écoutait la radio du Mali, les voyages se faisaient beaucoup au Mali, pas forcement à Bamako mais en territoire malien. Et d’ailleurs je vous dis quelque chose : lorsqu’on va à Dialsago en territoire malien, on ne se rend pas compte qu’on traverse une frontière. Et lorsque les maliens viennent au marché de Nouhoro dans notre région, ils ne se rendent pas compte qu’ils sont en territoire burkinabè. La proximité fait que c’est vraiment un brassage depuis la nuit des temps entre ces deux peuples.

Lefaso.net : Vous êtes le plus aimé des diplomates vivant au Mali, nous a-t-on dit ?

Mohamed Sané Topan : Ça me gène de répondre à cette question. C’est d’autres personnes qui peuvent vous apprécier. Merci de me le dire. Je suis véritablement avec des frères et des sœurs. C’est comme le malien qui est au Burkina et qui vit avec des frères et des sœurs. Pour dire que les burkinabè vivent ici comme chez eux. J’essaie avec l’équipe de l’ambassade d’accomplir ma mission dans la limite de mes possibilités. Si vous estimez que je donne satisfaction à certains, c’est du tant mieux, mais personnellement je n’ai pas d’opinion pour cela.

Lefaso.net : Vous êtes diplomate, mais aussi homme politique, votre avis sur les élections couplées en préparation au Burkina ?

Mohamed Sané Topan : Avant d’aborder la question des élections couplées, je voudrais me réjouir du fait que mon pays s’inscrive dans le cadre d’une démocratie et la démocratie ayant ses règles, c’est l’organisation régulière, au regard du contenu de la loi fondamentale, des élections pour permettre au peuple de renouveler sa confiance aux dirigeants. Cette année, nous aurons pour la 5e fois sans discontinuer, des élections législatives et la 4e fois pour les élections municipales. C’est important à relever. J’ai noté hier (ndlr : l’interview a été réalisée le jeudi 26 janvier) au conseil des ministres qu’il y a un projet de loi tendant à proroger le mandat des députés jusqu’à la validation du mandat des prochains députés. Cela indique que le terme de la présente législative ne sera plus le mois de juin mais éventuellement novembre, décembre ou même 2013. Tout dépend des étapes de préparation puisque la notion de la biométrie intervient. Je voudrais de tout cœur souhaiter que l’ensemble des acteurs politiques, sans passion, se préparent parce qu’il s’agit d’échéance. Que la structure chargée d’organiser le scrutin prenne toutes les dispositions pour l’organisation d’élections libres, transparentes et équitables afin qu’il n’y ait pas de tiraillement. Nous voulons qu’il y ait des élections apaisées.

C’est une première expérience, il s’agit d’élections couplées pour minimiser les charges qui sont déjà aggravées par la biométrie. Je souhaite qu’il y ait suffisamment de sensibilisation et cela ne devrait pas être du fait du gouvernement seulement mais de l’ensemble des partis politiques, une sensibilisation suffisante afin que le militant, le sympathisant ou le citoyen qui va accomplir son devoir patriotique sache exactement comment se comporter une fois en face des deux urnes pour pouvoir mettre le bon bulletin dans l’urne pour l’élection du député et dans l’autre urne pour l’élection de son conseiller municipal.

Lefaso.net : Vous êtes politique, membre du CDP, serez-vous candidat ?

Mohamed Sané Topan : En attendant, je suis ambassadeur tant que le président du Faso va continuer à m’accorder sa confiance. Je crois qu’il faut permettre à d’autres acteurs également d’être sur d’autres fronts parce que tout concourt au même, c’est-à-dire apporter notre contribution au développement de ce pays. J’appartiens à un parti politique. Je demeure militant de mon parti et je reste à la disposition de mon parti pour toute charge que le parti voudra bien me confier. Mais en attendant, en tant que représentant du Burkina ici, il m’est difficile de dire que je serai candidat pour être conseiller municipal ou député à l’assemblée nationale ?

Lefaso.net : Le mot de la fin ?

Mohamed Sané Topan : Je voudrais encore saisir l’occasion que vous m’offrez en début d’année pour remercier lefaso.net. Vous jouez véritablement le rôle de relai. Pour toutes les missions diplomatiques du Burkina, vous êtes des adjuvants et vous ne pouvez même pas vous rendre compte de tout ce que vous faites, non seulement pour nous informer mais aussi informer l’opinion sur les activités qui se déroulent dans nos missions parce que régulièrement quand j’ouvre lefaso.net, je regarde d’abord Diaspora, je regarde Coopération. Je lis ces articles d’abord avant de venir d’autres articles politiques et économiques. Et régulièrement nous avons des informations sur ceux qui sont aux USA, en France, au Maroc… je voudrais encore vous féliciter et vous remercier pour tout ce que vous faites pour le Burkina et vous encourager dans cet esprit de discernement et d’information objective des populations.

Interview réalisé par Moussa Diallo à Bamako

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Vos commentaires

  • Le 1er février 2012 à 10:24, par Abdoul Baro En réponse à : Mohamed Sané Topan, Ambassadeur du Burkina au Mali : « Les burkinabè vivent ici comme chez eux »

    Monsiuer l’Ambassadeur,je suis désolé !les Burkinabè vivent tout sauf se sentir chez eux !Un langage diplomatique ou quoi ?Faite un tour en ville en laissant votre véhicule de fonction,pour emprunter un autre immatriculé BF pour découvrir la réalité !
    Un autre fait ;Dans les râfles la nuit,malheur à vous si vous presentez une Cnib,vous êtes tout de suite conduit au poste !même pour un séjour de courte durée,on vous reclame la carte consulaire.
    Monsieur l’ambassadeur,vos allégations sont loin d’être une réalité,évidemment de votre fauteuil douillé,vous ignorez tout de la souffrance des Burkinabè dans ce pays frère !Commandez une enquête,ou un sondage avant toute choses.Essayez un tant soit peu de vous rendre à Bammako en véhicule Immatriculé BF Pour vous faire une idée nette de la situation.
    Je reste une personne ressource à votre disposition monsieur !
    Abdoul 00226 70100304/78825787

  • Le 1er février 2012 à 10:42, par penda En réponse à : Mohamed Sané Topan, Ambassadeur du Burkina au Mali : « Les burkinabè vivent ici comme chez eux »

    Merci Excellence pour les voeux. Mais, à mon avis, l’ambassadeur Topan a trop duré à son poste. Il faut de l’alternance de ce côté de diplomatie aussi. Donc le Blaiso devrait pensé à le ramener au bercail maintenant

  • Le 1er février 2012 à 18:11, par nounalais En réponse à : Mohamed Sané Topan, Ambassadeur du Burkina au Mali : « Les burkinabè vivent ici comme chez eux »

    entretien très édifiant sur les qualités humaines et intrinsinques de ce monsieur que je connaîs depuis ma tendre enfance.
    Rien de surprenant pour moi car vous avez toujours mis l’homme au centre de tout ce que vous entreprenez.
    je vous souhaite une santé de fer.

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