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REORGANISATION DE L’ARMEE IVOIRIENNE : Les travaux d’Hercule d’ADO

Publié le mercredi 28 décembre 2011 à 01h32min

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La Côte d’Ivoire vit un contexte de tensions multiformes et de troubles en cette fin d’année 2011. Aux crises politiques nées des élections présidentielle et législatives, le nouveau pouvoir d’Alassane Dramane Ouattara (ADO) doit également faire face à de véritables guet-apens au plan sécuritaire. A l’évidence, il n’est pas facile de mettre au pas aussi bien des bandes de civils désorganisées que des militaires et des para- militaires égarés pendant un moment du fait des troubles et événements survenus ces dix dernières années dans le pays. Les résultats des dernières élections législatives semblent avoir provoqué une onde de choc chez certains acteurs politiques.

Dans le camp des Houphouëtistes, le RDR sort grand gagnant ; mais il y a comme un arrière-goût amer au PDCI où le score obtenu est mal digéré. Ce sera difficile de revendiquer ouvertement le poste de Premier ministre même si celui-ci lui avait été promis. Par ailleurs, des remous politiques s’annoncent et les caciques du PDCI vont devoir composer avec la fronde de jeunes plus ambitieux. ADO devra donc, d’une part, faire face au dépit de ses vieux amis et, d’autre part, éviter de s’empêtrer dans les querelles intestines de leur parti. Le nouveau chef de l’Etat ivoirien n’aura donc pas que les récriminations des pro-Gbagbo à gérer.

Il va devoir lutter pour renforcer la cohésion politique au sein de la famille houphouëtiste. Ce travail se révèlera sans doute moins préoccupant que l’instauration de l’ordre et de la discipline dans les bandes armées qui composent les FRCI. Le programme de remise en ordre a peut-être commencé, mais les fruits sur le terrain se font attendre. Les incidents armés qui surviennent par-ci et par-là à travers le pays montrent bien que les choses sont plus complexes qu’on ne l’imaginait. Visiblement, on n’a pas la même analyse de la situation, tant au sein de la classe politique et des élites militaires qu’au niveau des éléments de base ayant contribué à la chute de l’ancien régime. Sinon, comment prendre des mesures et croire un seul instant que tout va se dérouler comme dans une salle de classe ?

Du reste, aujourd’hui, même le maître a du mal à faire régner la discipline à l’école. Les FRCI sont un regroupement hétéroclite de gens de tous bords. Des citoyens volontaires n’avaient pas hésité à tout abandonner, pour venir sauver la patrie en danger. D’honnêtes gens, en uniforme ou pas, ont ainsi fraternisé avec des gens d’autres conditions et sans doute animés d’autres intentions. Toujours est-il qu’ensemble, ils ont combattu le même ennemi et l’ont finalement vaincu. Pour certains, l’avenir est facile à tracer : un emploi, une carrière, des ambitions, des études étaient en vue ou ont tout simplement été interrompues ou définitivement compromises. S’y ajoutent de nombreux cas de chômage et surtout l’oisiveté. Dans tous ces cas de figure, l’équation à résoudre ne paraît pas si complexe. Par contre, la chose prend des allures de casse-tête lorsqu’il s’agit de fouiller dans la vie de l’autre groupe qu’il faudrait tout de même aider à intégrer la communauté.

Il se compose de gens eux-mêmes se sachant « difficiles à gérer ». Qu’a-t-on vraiment prévu pour ceux-là ? Des problèmes de hiérarchie semblent miner les FRCI. On a eu beau dire que tout est fini, les chefs de guerre continuent d’agir en électrons libres et leurs hommes se promènent, armés jusqu’aux dents. Ils ont acquis de nouvelles habitudes et rythmes de vie qui leur donnent satisfaction. Prébendes et autres formes de rackets semblent prédominer dans certains cas sur les engagements à protéger biens et personnes. S’ils se donnent des airs de liberté, c’est que certains d’entre eux ignorent la discipline ; du moins, ils n’ont appris à obéir qu’à un nombre réduit de personnes. Il est vrai que dans un certain sens, leur présence permet de tenir en respect les miliciens du camp adverse.

Mais, à ce stade du processus, les règlements de comptes sont difficiles à éviter. Des résurgences de combats ne sont pas à exclure, vu l’indiscipline qui règne dans les troupes. Etant donné la frayeur des populations, il paraît utile de prévenir les dérives. Après la victoire, la paix et la réconciliation étant en chantier, comment attendre de tous la même compréhension, le même niveau d’analyse et la même synthèse d’une situation qui égare même des gens considérés comme les mieux « éclairés » ? Comment ADO et son équipe devront-ils donc s’y prendre, à la fois pour préserver la paix et parvenir à créer une armée républicaine vraie, incarnation d’une armée nationale véritable ? Certes, de manière générale, promesse avait été faite d’aider chacun à réintégrer la société. Mais, aujourd’hui se pose avec acuité le défi d’amener les différents clans à composer réellement avec le nouveau pouvoir. Il faut éviter de tomber dans les pièges de la bureaucratie et de l’élitisme. Ils conduisent facilement à des analyses à courte vue et donc à la prise de décisions erronées. Il faut absolument prendre le temps d’écouter ces milliers d’hommes qui n’ont rien à perdre et qui ne craignent rien.

Ils ont aussi du mérite. Il faut savoir les rassurer et travailler à les amener progressivement à composer avec les exigences du nouveau contexte, avec de nouvelles causes à défendre. Cela prend du temps et beaucoup de tact, d’autant qu’ils sont convaincus d’être presque toujours des laissés-pour compte. Au bord de la Lagune Ebrié, perlent donc à l’horizon des problèmes épineux de gestion de ressources humaines. La tâche apparaît aussi immense que les travaux d’Hercule. Mais avec de la sagesse, un peu plus d’écoute et beaucoup moins d’empressement, ADO et les siens peuvent réussir là où d’autres ont échoué sur le continent. Aux autres forces politiques ivoiriennes de comprendre que leur concours est tout aussi précieux. Il y va de la Côte d’Ivoire d’aujourd’hui et de demain.

"Le Pays"

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Vos commentaires

  • Le 29 décembre 2011 à 23:00 En réponse à : REORGANISATION DE L’ARMEE IVOIRIENNE : Les travaux d’Hercule d’ADO

    Le titre, une fois ne cadre pas avec le fond de l’article.

  • Le 30 décembre 2011 à 00:59, par KallyJo En réponse à : REORGANISATION DE L’ARMEE IVOIRIENNE : Les travaux d’Hercule d’ADO

    Eééh FASO.NET, où est passé l’article sur Bechir Ben Yahmed et Jeune Afrique ?

    La Francafrique fait peur, hein ? Puisque le bédouin Yahmed ne peut se permettre de terroriser impunément des Chefs d’Etat Africains sans de solides soutiens d’en-haut.

    Dommage tout de meme que l’article ne soit plus là.
    Mais pendant qu’on y est encore, il faudrait certainement tout un bouquin pour extirper tous les dessous sales du contentieux entre les Kabila, le pere et le fils, et la coterie Yahmedienne.

    Euh enfin, comprend-t-on enfin pourquoi quelqu’un avait tant voulu mouiller le bon Atiéké ou le benga chaud (c’est selon) electoral de Kabila, avant meme qu’on le lui serve.
    Franchement, l’Africain vaut, de tres loin, mieux que ces intrigues de bas etages.

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