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Reprise du trafic ferroviaire : « Redonnez-nous nos voiturettes », dixit les commerçantes

Publié le mercredi 7 décembre 2011 à 02h25min

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La crise post-électorale ivoirienne avait conduit à l’arrêt du train en 2010-2011, mettant au chômage des centaines de commerçants et commerçantes. Aujourd’hui, ces mauvais souvenirs relèvent du passé. Le trafic a repris depuis juin 2011. Tout semble bien fonctionner, sauf que les commerçantes réclament « les voiturettes » pour pouvoir faire des achats et des ventes tout au long du trajet Ouaga-Abidjan.

Claire, c’est ainsi qu’on l’appelle. Comme tous les lundis, son colis vient d’arriver avec le train. 30 sacs de 50 kg d’attiéké petit grains et gros grains. Son jour, c’est lundi. « Chacun a son jour. On a essayé de s’arranger entre commerçants parce que si on envoie tous nos marchandises les mêmes jours, ça va saturer le marché et on va faire des pertes », noue confie-t-elle.

A notre arrivée aux environs de 12h30, elle avait déjà réceptionné le colis. Elle avait même fini la livraison. Comme quoi, les choses marchent en cette période de fin d’année. Pour son prochain coli, Claire prévoit d’augmenter la quantité pour répondre à la demande.

Juste à côté, Ramatou Samandoulgou, la cinquantaine bien sonnée, tient son étal. En pleine discussion avec ses filles. Ici, le commerce des produits venant de la Côte d’Ivoire est une histoire de famille. On y trouve pêle-mêle attiéké, alloco, ananas, placcali, savon Kabakourou, etc. Pour ce voyage, Mme Samandoulgou a fait venir 15 cartons d’ananas, 100 sacs d’alloco et attiéké. Elle exerce cette activité depuis 20 ans. « La crise de l’année dernière nous a beaucoup affectées. Mais, depuis la reprise, ça va. Al Hamdoulillahi, on remercie Dieu parce qu’on gagne notre pain quotidien. », ainsi rend-elle grâce au seigneur. Seule plainte, « nous commerçantes, on nous fatigue un peu sur la route », ajoute-t-elle.

En plus de l’attiéké « prêt à consommer », les commerçants envoient de la patte de manioc. Le manioc est pilé, mis dans des sacs, puis convoyé vers Ouagadougou. Arrivé au Burkina, les gens transforment cette patte de manioc en Attiéké. « La transformation de la patte de manioc en attiéké au Burkina, ce sont les femmes rapatriées de Côte d’Ivoire qui ont commencé ça ici. Au fur et à mesure, celles qui connaissaient cette activité s’y sont adonnées, d’autres ont appris avec ces dernières », confie Noufou Sanga qui fait ce commerce depuis 2002.

Forcé de rentrer au bercail après la crise ivoirienne de 1999, M Sanga fut le pionnier dans l’importation de la patte de manioc. A nos jours, il est une référence dans ce commerce et convoie environ 600 sacs de 50kg par semaine. Et ça ne suffit pas. A présent d’autres femmes l’ont rejoint dans ce commerce. Apparemment, ça marche bien toujours.

C’est Mlle Konkobo et ses sœurs qui sont les plus amères sur ce qu’elles vivent sur la route. Elle est, comme la plupart ici, grossiste d’attiéké, de banane à la gare de train. Le poisson et l’huile de palme font partie de leur étal. Grosssite, Mlle Konkobo vend aussi au détail. Avec sa mère et ses sœurs, elles vivent de cette activité depuis 2004. « Avec la crise qui est mondiale, ça ne va pas actuellement. Même si c’est la fin d’année, les salaires n’ont pas augmenté », lance une de ses voisines.

La plainte n’est pas tant la crise mais « les voiturettes » dont disposaient les commerçantes voyageant en train et qui leur permettaient d’acheter et de vendre à tous les escales du train. Cette voiturette aurait été supprimée bien avant la crise post-électorale ivoirienne qui avait conduit à l’arrêt du trafic ferroviaire ivoiro-burkinabè.

« On refuse à ce que nous montons dans les voiturettes avec nos bagages. Ils veulent que nous partions tous dans les collecteurs, or, ça ne nous arrange pas. Le commerçant, c’est celui qui vend et qui achète. On ne peut pas nous demander d’embarquer tout depuis Abidjan et déverser tout sur Ouaga. Le marché sera saturé », se plaint Mlle Konkobo, soutenue par ses sœurs et tout le voisinage. Pire, certains bagages restent sur la route. « On demande à ce qu’on nous redonne nos voiturettes, nous sommes dedans, on vend et on achète », clament-elles. Les frais de transport remontent selon ces vendeuses à 50 000f pour l’aller-retour. Il faut donc trouver un moyen pour rentabiliser.

C’est l’avenir de plusieurs familles qui est en jeu

Plusieurs commerçantes auraient arrêté de prendre le train à cause la suspension de ces fameuses voiturettes. « Tout notre souhait est qu’on ait notre voiturette pour pouvoir payer et vendre sur la route », martèle Mlle Konkobo. La raison évoquée pour cette suppression : « on dit que nous salissons le train », ajoute-t-elle, amère.

« Souvent, on dit vos sacs sont descendus à Bouaké, vos sacs sont descendus à Bobo. Lorsque ces sacs arrivent, la banane est déjà abîmée et on ne nous rembourse rien. Vraiment, si de par votre voix, nos autorités compétentes peuvent nous entendre et nous aider, aidez-nous, si non ça ne va pas », implorent-elles.

En tout cas, ce cri de cœur des commerçantes de la gare de train de Ouagadougou semble partagé, à voir l’applaudissement qui suivit cette prise de parole. Charretiers, taximen et autres dockers y font également de bonnes affaires depuis la reprise du trafic ferroviaire.

Nous avons cherché à rencontrer les premiers responsables de SITARAIL afin d’avoir leurs avis mais notre demande s’y trouve toujours avec nos contacts téléphoniques. Quand nous tracions la dernière ligne, nous n’avions toujours pas reçu d’appel.

Moussa Diallo

Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 7 décembre 2011 à 09:18 En réponse à : Reprise du trafic ferroviaire : « Redonnez-nous nos voiturettes », dixit les commerçantes

    Félicitation pour ce reportage ; quand à la direction de Sitarail, il ne faut rien attendre d’elle ;ces gens font de la détention de l’info, ne communiquent pas sur les chiffres du trafic, c’est l’opacité totale ; j’ai fait le siège de la direction pour avoir des infos sur la reprise du trafic et je me suis retrouvé devant une grosse dame qui me dit d’envoyer une demande ; même à Moscou, on ne fait plus ça ; il faut que ça change ! Si tu veux des infos, vas voir la douane

  • Le 7 décembre 2011 à 16:15, par sougri En réponse à : Reprise du trafic ferroviaire : « Redonnez-nous nos voiturettes », dixit les commerçantes

    oui donner leur 2 wagons a chaque depart car se sont des braves femmes qui gerent des familles.

  • Le 7 décembre 2011 à 19:53 En réponse à : Reprise du trafic ferroviaire : « Redonnez-nous nos voiturettes », dixit les commerçantes

    C’est vraiment dommage que SITARAIL privilégie seulement de se faire des sous alors que l’adjonction des voiturettes demandées par ces braves femmes ne devrait pas trop leur couter. Cela permettrait de lutter contre la pauvreté de façon objective car l’argent gagné par ces dames leur permet de faire face aux besoins essentiels des familles entieres. Vivement que les Autorités, le Ministre des transports en tete usent de tout leur pouvoir pour leur faciliter la tache.

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