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Limaniya, le nouvel album live de Bebey Prince Bissongo

Publié le lundi 28 novembre 2011 à 01h54min

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Limaniya, le nouvel album live de Bebey Prince Bissongo

Bebey Prince Bissongo, un des talentueux ambassadeurs de la musique burkinabè et africaine vient de mettre sur le marché, il y a quelques semaines, son dernier album live, un Opus de 13 titres d’une qualité exceptionnelle. Avec le « Fasobeat international », le style musical qui est sa marque, puise sa source dans les rythmes et sonorités traditionnels burkinabè, mais aussi du blues et du jazz. Un album à consommer nécessairement. Sans modération !

Que signifie le titre de votre dernier album, "Limaniya" ?

"Limaniya" signifie la Tolérance en langue dioula, bambara. Ce second album traduit une volonté de l’acceptation de l’autre. Soyons tolérants les uns envers les autres, tel est le message de "Limaniya". Etant né à Bobo- Dioulasso, grandi au Camp Ouezzin Coulibaly de Bobo-Dioulasso où toutes les ethnies du Burkina y sont présentes, et ayant des parents mossi et gourmantché, j’ai eu cette chance d’avoir acquis ces différentes cultures et langues qui cohabitent au Burkina. Cet album est donc un aperçu de mon interprétation des musiques traditionnelles qui m’ont influencé jusque-là, et que j’ai juste exprimé à l’occasion de deux concerts-enregistrés à l’Opéra de Lyon. C’est un album- live de mon deuxième album, le premier, "Pogsongo" est sorti en 2006 en France.

Il y a un mélange de rythmes traditionnels burkinabè, de jazz et blues. Mais comment qualifiez-vous votre style musical ?

Les différents rythmes traditionnels côtoient en effet d’autres influences qui m’ont aussi traversé tout au long de ma carrière comme le jazz ou le blues. On y retrouve l’esprit jazz ou blues du fait que dans ma musique, les instruments sont libres d’expression, et gardent une place aussi importante que la voix. Et n’oublions pas que le jazz, le blues sont partis d’Afrique noire, je considère donc que c’est une partie de ma culture aussi. C’était l’expression de la douleur à travers la musique de nos ancêtres enlevés à leurs terres pendant la période ignoble de l’Esclavage. Ainsi, tout en restant enraciné dans mes traditions, ma musique veut de s’ouvrir vers des horizons divers, pour toucher les sensibilités au-delà de nos frontières. Alors, pour me définir, m’identifier c’est difficile de me mettre dans une "case". Je vous dirai que je fais du "Fasobeat International" (Rires)

Vous êtes donc un « musicien monde ? »

On peut le dire ! Je suis un musicien burkinabè et africain. Je joue de plusieurs instruments, qu’ils soient traditionnels ou modernes. Lorsque je joue dans les festivals, ou dans les salles de concerts en Europe, très souvent, c’est pour représenter l’Afrique en général, mais il arrive que par ma nationalité burkinabè, je sois amené à représenter mon pays lors de concerts organisés par des Associations ou des Collectivités qui œuvrent avec ou pour le Burkina.

Comment faire pour exister quand on a un père célèbre (L’Empereur Bissongo) et qui continue de faire la musique ?

Je suis heureux quand je vois encore mon père sur scène avec des jeunes musiciens qu’il ne cesse de former et qu’il semble infatigable après tant d’années données à servir la musique et son pays. Il est une de mes sources d’inspiration de référence, car il a déjà fait un grand chemin en imposant son style "le Tantchar-wa" (un mélange des rythmes gourmantchés et mossis). Ainsi, nous, ses enfants qui font de la musique (car il y a aussi Mariah Bissongo, ou Bissongo Junior ou encore Ahmed Smani mon cousin), on a plus qu’à emboîter ses pas en essayant d’y apporter nos touches personnelles. C’est ce que j’essaye de faire pour ma part et je crois qu’il est fier de moi.

Envisagez-vous donner des concerts au Burkina et dans d’autres pays africains ?

J’ai donné deux concerts en juin dernier à l’Institut français de Ouaga et à Bobo lors du Festival Jazz à Ouaga 2011. Je suis allé avec tout mon groupe au pays mais la période n’était pas vraiment propice à la grande fête, car il y avait les tensions au pays. Mais Dieu merci, la paix est revenue et nous aussi on envisage d’y revenir très vite.
J’ai aussi joué à Alger, et l’été prochain on sera du côté du Maroc entre autres. Ce n’est pas facile d’aller jouer en Afrique sub-saharienne car les billets d’avion reviennent chers et sans subventions, il est difficile aux organisateurs de spectacles de s’en sortir vraiment quand ils vous invitent. Mais j’espère faire une tournée africaine bientôt.

L’album est-il distribué en Afrique ? Si oui, où le trouve t-on et à quel prix ? Si non, pourquoi ne l’est-il pas ?

L’album est sorti chez Harmonia Mundi, il y a juste un mois, on le retrouve en Europe, en Amérique, en Asie mais pas encore en Afrique. Le label avec lequel j’ai signé m’a cédé les droits pour le continent africain, alors je recherche en ce moment des partenaires avec lesquels je pourrai traiter en vue de le sortir et le vendre dans les pays qui seront intéressés.

La raison c’est que les gros labels n’ont pas vraiment d’intérêts en Afrique noire à cause de la piraterie. Ils préfèrent se tourner vers les continents où on achète en euro ou en dollars. Ce qui se comprend d’un point de vue commercial.
Pour l’instant, seules les radios vont recevoir bientôt des disques en vue de diffusion sur les ondes du Burkina. Le montage vidéo des deux concerts à l’Opéra de Lyon sont en cours aussi pour les télévisions du pays et d’ailleurs.

En France, l’album coûte entre 15 et 16 euros (environ 10.000 fcfa) chez Harmonia Mundi, à la Fnac, à Virgin, et sur plusieurs sites de téléchargement légal sur le net. Il suffit de taper "Limaniya Bebey Prince" sur Google et on peut acheter en ligne, morceau par morceau ou l’album entier.

Votre style musical est particulier, loin des rythmes habituels d’ambiance joués dans les maquis et les boites de nuits. Est-ce que ce choix ne vous prive pas une clientèle assez importante sur le continent africain ?

Non je ne crois pas, car en Afrique, ce n’est pas tout le monde qui partage cette philosophie de la musique qui se veut d’ambiance mais qui est plutôt bruyante. Il y a beaucoup d’Africains qui connaissent la vraie musique, bien que je n’ai rien contre les artistes qui s’adonnent à cœur joie à ce méga- big plagiat, des copier-coller qui, à écouter de prêt est une répétition inlassable des mêmes thèmes, des mêmes mélodies... Justement, je veux rester moi-même parce que c’est seulement ainsi que je me sens bien et si je me sens bien, il y aura des mélomanes qui se sentiront aussi bien en écoutant ma musique. Qu’on soit Sénégalais, Haïtiens, Angolais, Malgache ou Européen, j’ai vu plusieurs nationalités vibrer en même temps au son de ma musique. Cela me suffit pour être ravi ! Richard Bona est l’un des artistes africains les plus doués et connus mondialement, et pourtant on ne l’entend pas beaucoup dans les maquis. Cependant, je ne crois pas que la plupart de ce qu’on écoute dans les maquis comme vous le dites puissent traverser les frontières nationales.

Il y a environ 90°/° de ces dites œuvres au Burkina par exemple qui sonnent faux musicalement. Par contre, bravo aux 10°/° restantes qui font la fierté des Burkinabè de par leur approche musicale très riche et leur simplicité que j’admire beaucoup. Floby ou Alif Naba sont de ceux-là ! Quant on va au Sénégal, au Niger, en Guinée ou au Mali, on se rend compte que nous n’écoutons pas pareillement la musique. Dans ces pays, on est loin des tapages diurnes et nocturnes auxquels on assiste chez nous à longueur de journée. La route semble encore bien longue pour nous musiciens et auditeurs burkinabè. Je dis juste ce que j’ai vu et ce que je pense, c’est aussi ça être intègre !

Propos recueillis par Joachim Vokouma, Lefaso.net

Bebey Prince Bissongo : Limaniya ; 13 titres ; 16 euros

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