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Lucien Marie Noël Bembamba, ministre de l’Economie et des Finances : « La Banque mondiale et le FMI se sont montrés très enthousiastes à accompagner le Burkina Faso »

Publié le jeudi 6 octobre 2011 à 01h17min

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Une forte délégation du Burkina Faso, conduite par le ministre de l’Economie et des finances, Lucien Marie Noël Bembamba, a pris part du 23 au 25 septembre 2011 à Washington D.C, aux Etats-Unis d’Amérique, aux travaux des assemblées générales du FMI et de la Banque mondiale. Dans l’entretien qui suit, le ministre de l’Economie et des Finances fait le bilan de la participation de la délégation du Burkina Faso à ces rencontres, apporte des commentaires sur les performances récentes de l’économie burkinabè en 2010 et en 2011.

Pierre Wango (P. W.) : Vous avez conduit la délégation du Burkina Faso aux assemblées annuelles de la Banque mondiale et du FMI qui se sont déroulées du 23 au 25 septembre dernier, à Washington. Quel bilan tirez-vous de cette participation ?

Lucien Marie Noël Bembamba (L. M. N. B) : Ce qu’il faut rappeler, c’est que ces assemblées annuelles de la Banque mondiale et du FMI offrent chaque fois, l’occasion de réunir les principaux responsables du monde de la finance pour évaluer l’évolution économique récente du monde et ses perspectives. Elles permettent d’analyser ensemble les problèmes qui se posent à l’économie mondiale du moment, afin de dégager des propositions de solutions. Toute chose qui peut nous permettre, en tant que ministre en charge des Finances, d’en tirer des leçons et d’en tenir compte dans la définition de notre politique économique nationale. Nous sommes dans un environnement économique qui montre quelques difficultés et il faut nécessairement en tenir compte. Mais, les assemblées annuelles du FMI et de la Banque mondiale, ce n’est pas que cela.

C’est aussi et surtout, l’occasion de rencontres bilatérales. Notre délégation a ainsi eu des rencontres, d’abord avec un certain nombre d’institutions financières internationales comme la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI), mais aussi des partenaires bilatéraux. L’intérêt de ces rencontres, c’est aussi d’échanger, de faire avec eux, l’évaluation de notre coopération et de notre partenariat. Cela nous permet, dans le contexte actuel difficile de l’économie mondiale, de voir comment renforcer ce partenariat pour qu’il soit encore plus fructueux.

P. W. : A l’occasion de ces rencontres, vous a-t-il été possible de passer en revue l’état des projets et programmes sous financement de ces bailleurs de fonds ?

L. M. N. B. : C’est vrai qu’avec le groupe de la Banque mondiale, nous faisons traditionnellement ce que nous appelons la revue de notre portefeuille. Cette revue permet d’évaluer le comportement de notre portefeuille. S’il y a des difficultés, c’est l’occasion de voir comment ensemble les lever. A ces occasions, nous soumettons aussi de nouveaux projets et programmes qui nous tiennent à cœur et nous en discutons avec nos partenaires. Mais l’un dans l’autre, ce que je peux retenir, est que nous avons pu faire partager à nos partenaires, ce que nous avons comme priorités au niveau du gouvernement. En particulier, nous avons présenté à ces assemblées annuelles, nos ambitions qui ressortent dans notre Stratégie de croissance accélérée et de développement durable (SCADD).

Nous avons été heureux de constater que nos partenaires partageaient nos orientations. Nous saisissons l’occasion pour porter à leur connaissance, que nous entendons organiser, probablement au mois de février 2012, une conférence de financement de la SCADD. La Banque mondiale et le FMI se sont montrés très enthousiastes à nous accompagner, à nous aider ; et même à mobiliser les acteurs du secteur privé pour nous venir en appui.

Mais, s’il y a un secteur qui a été au centre de nos échanges à Washington avec le FMI et la Banque mondiale et bien d’autres partenaires, c’est bien celui de la crise de l’emploi. Nous avons d’ailleurs porté à la connaissance de nos partenaires que le gouvernement entend lancer très prochainement, un programme spécial de création d’emplois pour les femmes et les jeunes. Sur cette préoccupation, nos partenaires se sont montrés très réceptifs. C’était d’ailleurs un thème très important débattu, au cours des travaux de ces assemblées d’automne. La Banque mondiale s’est montré très disposée à nous accompagner. Prochainement, cette institution enverra une équipe à Ouagadougou, pour nous accompagner dans la finalisation d’un programme spécial de création d’emplois avec l’appui du secteur privé. C’est dire que nos priorités ont été discutées, au cours des rencontres de Washington et dès notre retour, nous mettrons en place un programme de suivi pour une concrétisation de tous nos engagements.

P. W. : Un certain nombre de projets et programmes sont en exécution au Burkina, grâce à l’appui de nos partenaires. Avez-vous porté vos échanges sur ces dossiers avec ces derniers ?

L. M. N. B. : Tout à fait. Ces secteurs sociaux intéressent nos partenaires au développement, parce que dans le cadre des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), l’aspect accès aux services sociaux de base est très important. Ils tiennent à ce que les ressources financières mises à notre disposition nous permettent de pouvoir créer les conditions pour que ces objectifs se réalisent. Par conséquent, nous avons passé en revue ces projets et programmes.
C’est ainsi qu’au niveau de l’éducation, nous avons constaté qu’il y a quand même, eu une certain évolution, au regard des indicateurs atteints par notre pays, surtout en ce qui concerne la parité hommes-femmes. L’écart entre le nombre de garçons et les filles scolarisés se rétrécit. Ce qui est une bonne tendance. Mais nous avons fait observer à nos partenaires que parler éducation, c’était aussi parler alphabétisation et pas seulement enseignement de base. Côté santé, nous en avons beaucoup discuté. A ce niveau, la préoccupation est de savoir comment faire pour rapprocher les infrastructures de santé des populations et augmenter le taux de fréquentation des services de santé et faciliter l’accessibilité financière aux soins. Ces projets et programmes sont d’ailleurs contenus dans la SCADD.

P.W. : Et le projet de construction de l’aéroport international de Donsin ?

L. M. N. B. : Nous avons, avec nos partenaires, échangé sur le sujet. Parce que c’est un projet qui nous tient à cœur. Mais au départ, ce projet a connu quelques incompréhensions, notamment avec la Banque mondiale. Maintenant, tout est aplani et cette institution a même pris le leadership dans ce domaine et nous lui avons renouvelé notre souhait qu’elle nous accompagne. Nous sommes maintenant sur le volet étude de ce projet, et bientôt une équipe de la Banque se rendra à Ouagadougou pour nous apporter son assistance pour leur finalisation. Après quoi, nous mettrons en place la cellule économique pour prendre en charge la construction de cet aéroport.

P.W. : En 2010, le Burkina a connu un fort taux de croissance salué par les partenaires de notre pays. Quel sera, selon vous, le niveau de ce taux en 2011 ?

L. M. N. B. : A ce niveau, les partenaires ont salué notre performance de l’année dernière. Surtout quand nous avons essayé de leur expliquer l’origine de ce fort taux de croissance. Ce qui s’est passé en 2010 est à rechercher dans les incitations mises en place par le gouvernement au profit des producteurs : subvention des engrais, distribution gratuite des semences améliorées, distribution de matériel aratoire et petite motorisation, etc. L’autre source de la croissance est celui des mines par l’augmentation substantielle de la production d’or. Avec le cours élevé de ce métal, notre pays en a tiré profit. Ce qui a contribué à tirer notre taux de croissance en 2010 vers le haut. C’est tout à fait encourageant.

En 2011, c’est certain que nous n’allons pas atteindre le taux de l’année dernière. Certainement que la crise que nous avons vécue en mars et avril derniers, nous fera un petit impact. Mais nous espérons tout de même un taux de croissance assez raisonnable. Vous savez qu’avec la SCADD, nous espérons des taux de croissance à deux chiffres.

P.W. : Les partenaires du Burkina que vous avez rencontrés se sont-ils inquiétés de l’impact de la crise sociale qu’a vécue notre pays en mars et avril derniers sur l’exécution de nos projets et programmes de développement ?

L. M. N. B. : C’était un des sujets qu’il fallait aborder avec nos partenaires. Nous avons souhaité leur faire la situation actuelle de cette crise et surtout, les rassurer que nous sommes dans un processus de retour à la normale. Ce que je retiens de ces échanges, lorsque nous avons abordé le sujet est que, pratiquement, tous nos partenaires ont salué la façon dont le Burkina a géré sa crise. Ils ont noté qu’à différents échelons de l’Etat et du gouvernement, nous avons privilégié le dialogue et la concertation. Les partenaires ont tenu à nous adresser leurs encouragements, mais surtout ils nous ont demandé de continuer sur cette voie. Ils nous ont, pour leur part, réaffirmé leur disponibilité à nous accompagner dans la mise en œuvre des résultats de nos concertations nationales. Ils estiment que c’est là, la seule voie de sortie de crise pour notre pays et pour un apaisement social durable. Ils ont également noté- remarquez que ce sont des financiers- le fait que dans la gestion de la crise, nous avons travaillé à préserver les équilibres financiers du pays. Et que nous avons pu gérer la crise sans dégrader nos équilibres financiers et sans remettre en cause la mise en œuvre de nos projets et programmes. Ils ont fait observer que cela a été possible, grâce à la stabilité et à la solidité du cadre macroéconomique qui caractérisait la situation antérieure.

P.W. : Peut-on alors affirmer que vous repartez à Ouagadougou avec une confiance renouvelée de vos partenaires ?

L. M. N. B. : Je pense qu’aujourd’hui, les partenaires nous l’ont d’ailleurs affirmé, la crise pour eux, est passée. Mais, ils soulignent le fait qu’il faut tout de même tirer les leçons. Ensuite, les partenaires se sont dit prêts à nous accompagner sur la base de notre nouvelle stratégie qu’est la SCADD. La plupart des responsables des institutions que nous avons rencontrés, ont promis d’envoyer, dans les jours qui suivent, des missions pour que nous puissions concrétiser ce que nous avons pris ensemble comme engagements. Des échanges avec nos partenaires, je retiendrai aussi qu’ils ont insisté sur le fait que nous fassions appel de plus en plus au secteur public.

P. W. : les altermondialistes trouvent ces genres de rencontres sans retombées réelles pour les populations, au nom desquelles on se réunit. Votre point de vue, au sortir de ces rencontres de Washington ?

L. M. N. B. : Je pense qu’il faut être raisonnable. Certainement qu’en venant à ces rencontres, je ne m’attends pas à des remèdes-miracles pour mon pays. Mais, je pense que ce sont des occasions de rencontres entre les principaux responsables financiers du monde. Nous sommes dans un contexte de globalisation ou de mondialisation et aucun Etat seul ne peut résoudre ses problèmes.

Entretien réalisé par Pierre WAONGO,
Attaché de presse,
Ambassade du Burkina, Washington D.C.

Sidwaya

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