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INTERVENTION DES OCCIDENTAUX EN AFRIQUE : A qui la faute ?

Publié le mercredi 31 août 2011 à 02h07min

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On assiste depuis un certain temps à des interventions militaires occidentales en Afrique au nom de la démocratie. C’est un sujet qui fait des gorges chaudes tant les avis divergent. Si tous sont unanimes à vouloir la fin des régimes dictatoriaux et des règnes sans fin ni partage, la façon d’y parvenir ne fait pas l’unanimité. Pendant que certains applaudissent à tout rompre, ils ne sont pas moins nombreux à estimer que derrière ces interventions se cachent des visées impérialistes. En fait, il convient de noter qu’il appartient à chaque peuple, au premier chef, d’œuvrer à préserver ses intérêts. Dans le désert libyen ou au-dessus des immeubles du Plateau en Eburnie, les avions de combat occidentaux ont joué un rôle essentiel pour imposer la démocratie. Dans un cas comme dans l’autre, l’Afrique n’a vraiment pas pesé dans la recherche de la solution la plus idoine.

Pour un Africain, il n’y a vraiment pas de quoi être fier. Mais à qui la faute ? Elle revient en premier lieu, aux dirigeants africains. Trop enclins à protéger leurs privilèges, ils ne se soucient pas de bâtir leur gouvernance sur des bases solides. Forts de leur capacité de dissuasion, du pouvoir manipulateur de l’argent face à des populations affamées, ils règnent sans partage, répriment sans remords. Ces dirigeants-là, qui ont les mains dégoulinantes du sang de leurs populations, créent toutes les conditions pour que les troupes occidentales aient à intervenir en Afrique. Ils leur en donnent, consciemment ou non, les prétextes sur un plateau d’or.

Il y a également la responsabilité des populations qui n’ont pas le courage de s’assumer, de demander des comptes à leurs dirigeants et d’exiger une bonne gouvernance. A la décharge de certains Africains, leur faible niveau d’instruction et d’information y est pour quelque chose. Car celui-ci ne leur permet pas de disposer de tous les moyens nécessaires à une participation citoyenne pleine à la gestion de la chose publique. Ceci étant, le degré de culpabilité des élites au pouvoir, mais aussi de certains intellectuels dans l’avènement de ces situations humiliantes pour le continent, se trouve décuplé. Au lieu de jouer leur rôle de veille prospective, d’éclaireurs de consciences, la plupart des intellectuels africains, par cupidité ou par lâcheté, se sont mués en zélateurs surdoués et infatigables des princes du moment. Ce faisant, ils créent et entretiennent l’obscurantisme au sein des populations et l’égarement chez les dirigeants.

Ces intellectuels-là sont pour beaucoup dans les malheurs et les humiliations que subit le continent. La faute revient également aux instances africaines, notamment à l’Union africaine. Ces organisations montrent, à la faveur des crises, qu’elles manquent de verve, de solidité. Tergiversant, l’Union africaine qui a longtemps ressemblé à un syndicat de chefs d’Etat, de par son manque de fermeté envers les présidents en place dans les différents pays quant au respect des valeurs démocratiques, a suffisamment fait preuve de toute son incapacité à imposer son autorité, à se faire respecter. Les Africains sont tous, à quelques rares exceptions près, ceux qui, par action ou par omission, ont permis aux Occidentaux d’intervenir militairement sur le continent. Il n’est pourtant pas évident que les Français, les Américains et les Britanniques et alliés viennent seulement pour les beaux yeux des populations. Le cas malheureux de la Syrie où les autorités répriment dans le sang sans réelle levée de boucliers des mêmes Occidentaux jusque-là, est symptomatique du "deux poids deux mesures" longtemps décrié.

Leurs attitudes peuvent être plus ou moins dictées par des raisons inavouées et inavouables. Il appartient de ce fait aux Africains de travailler à préserver leurs intérêts, leurs ressources face à leurs dictateurs, mais aussi face aux Occidentaux si d’aventure ceux-ci ont d’autres visées. Car, l’impérialisme est aussi une dictature. Sauf à dire qu’elle est sournoise, rampante et tue à petit feu, notamment à travers les crimes économiques. Il faut donc que les nouveaux régimes installés ou qui s’installent grâce à une main extérieure trouvent le bon équilibre entre le sentiment de reconnaissance envers leurs soutiens et la souveraineté des Etats avec ce que cela comporte en matière de défense des intérêts nationaux.

A l’Afrique de se ressaisir et de bâtir une gouvernance solidement orientée sur l’intérêt suprême des populations et d’éviter que la présidence d’Etat continue d’être une fonction qu’on exerce à sa guise, un patrimoine qu’on n’accepte de céder pour rien au monde. C’est une question de responsabilité. C’est un des meilleurs antidotes à l’interventionnisme extérieur. On ne le dira jamais assez : la respectabilité se mérite et il appartient à tous et à chacun d’y œuvrer avec ardeur.

« Le Pays »

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