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Attaque du commissariat de Boussou : Autorité de l’Etat, où es-tu ?

Publié le mercredi 17 août 2011 à 02h20min

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Une vengeance meurtrière dans un commissariat ; c’est l’écho qui nous revient de la région du nord du Burkina, précisément dans la commune rurale de Boussou, relevant de la province du Zondoma. Les auteurs de cette infraction gravissime, survenue le 9 août dernier, seraient allés, explique-t-on, venger un des leurs, mort par suite de rixe avec un berger allogène. Ce dernier, bien qu’en garde-à-vue pour la même cause dans le commissariat de police de la localité, n’échappera pas à la furie des parents de sa victime. Ils l’ont fait passer de vie à trépas sous le regard impuissant des quatre agents de sécurité, dont certains portent encore des stigmates des coups de leurs assaillants. Un fait divers, dira-t-on, mais qui est loin de relever d’un phénomène anodin.

Dans un Etat de droit, si chaque citoyen doit avoir recours à la force pour se faire justice, ça risque de nous conduire tout droit sur la voie de la jungle. Les causes lointaines d’une telle situation, on le sait, sont le fait que les gens, de plus en plus, n’ont plus confiance aux structures normales de règlement des conflits sociaux, qu’il s’agisse de la police judiciaire, de la gendarmerie ou de la justice elle-même. Parmi les causes immédiates, on se rappelle encore, comme si c’était hier, cette crise sociopolitique sans précédent, même s’il y a une accalmie, qu’a connue le Burkina au début de l’année et qui est née d’agissements de policiers. Au début était donc l’affaire Justin Zongo, dans laquelle se sont, par la suite, engouffrés les syndicats et les militaires ainsi que bien d’autres citoyens à travers tout le pays.

On comprend donc que les forces de sécurité soient aussi circonspectes depuis cette époque pour faire leur travail normal a fortiori faire usage de la force. C’est vrai que les commissariats étaient déjà dégarnis aussi bien en matériels (moyens de locomotion, armes, carburant…) qu’en hommes, comme le sont d’ailleurs la plupart des commissariats du Burkina. Quand un commissaire a sous ses ordres trois hommes, il ne faut pas leur demander l’impossible, mais, pour le cas échéant, ils avaient la possibilité d’utiliser la force, parce qu’on n’assiège quand même pas une entité militaire ou paramilitaire de la sorte. Mais qu’est-ce qui se serait passé ? C’est sûr que ces agents ne disposent pas de gaz lacrymogènes, l’arme la plus inoffensive, ni encore de balles en caoutchouc comme les policiers londoniens. Il est évident que, s’ils avaient utilisé la force, cela aurait été le doum-doum avec les conséquences que cela pouvait avoir.

Cet incident dans le Zondoma, soulignons-le avec force, est symptomatique du délitement de l’Etat et de son autorité. Maintenant, il faut espérer que les auteurs de ces agissements seront punis à la hauteur de leur incivisme criminel ; cela, pour qu’à l’avenir, des citoyens, parce qu’ils ne sont pas contents, ne s’en prennent plus impunément aux symboles de l’autorité de l’Etat pour une quelconque raison. Car si l’on ne sévit pas, ce sera la porte ouverte à toutes les dérives, de la même manière qu’au début on a regardé faire les militaires, qui se sont tout permis.

Il faut également souhaiter que l’autorité de l’Etat soie enfin restaurée pour que l’adage selon lequel « la vue du gendarme est le début de la sagesse » soit une réalité partout au Burkina. Mais aujourd’hui, au lieu que la vue du gendarme assagisse le voyou, c’est à peine si on n’ira pas le cogner et poursuivre son chemin. Certes, on peut bien comprendre que les dépositaires de l’autorité de l’Etat, pour diverses raisons, fassent aujourd’hui beaucoup attention pour ne pas jeter de l’huile sur le feu. Mais il va falloir enfin arrêter l’anarchie, pour ne pas dire le bordel. Car, comment comprendre qu’on puisse réprimer des militaires qui ont troublé l’ordre public, et qu’on n’applique pas la même fermeté vis-à-vis des civils qui franchissent le Rubicon en attaquant un commissariat. Gageons également que ces policiers, blessés dans l’exercice de leur fonction, seront soignés au compte de la princesse, car des cas, on en a vu avec des handicaps à vie, qui n’ont bénéficié d’aucune assistance de l’Etat.

Hamidou Ouédraogo

L’Observateur Paalga

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