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Commune rurale de Bana : Des cotonculteurs défendent leurs champs

Publié le mercredi 27 juillet 2011 à 05h29min

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La commune rurale de Bana, dans la province des Balé, a été le théâtre d’affrontements sanglants entre des producteurs de coton, le vendredi 22 juillet 2011. L’intervention des forces de sécurité a permis d’éviter le pire. Cinq blessés graves, des dégâts matériels importants, des hectares de coton détruits, ainsi que des interpellations ont été enregistrés.

Dans cette commune rurale perchée sur des collines, les choses se précipitent en cette matinée de ce 22 juillet 2011.Vers 6h30 du matin, alors que la brume est encore visible et les derniers chants de coqs se faisaient encore entendre, le tambour de guerre bat le rappel des troupes. Le griot fait la ronde des quartiers et invite vieux et jeunes, à se tenir prêts à défendre Bana. Le maire, Mahama Kélétigui Coulibaly, arrivé environ 30 mn plus tôt, a le téléphone sans cesse scotché à l’oreille. Il communique tantôt avec le gouverneur de la région de la Boucle du Mouhoun, tantôt avec les conseillers municipaux des différents villages. Les rumeurs faisant état de la destruction des champs de coton par des frondeurs venus de plusieurs villages se font de plus en plus belles.

Quelques instants seulement après le passage du griot, la place de l’ancienne mairie, a refusé du monde en armes venu de tous les quatre coins de cette commune de 10 villages. Des machettes, haches, lances, flèches, frondes, mais aussi un nombre important de fusils de chasse de calibre 12, ainsi que des fusils traditionnels constituent l’essentiel de l’armement de cette population qui entend défendre, par tous les moyens, ses champs de coton.

Sur place, la tension est palpable. Les mines graves, les populations attendent, de pied ferme, les destructeurs. Le maire et le préfet de la localité sont en concertation permanente. Soudain, un premier détachement de la Compagnie républicaine de sécurité (CRS) fait une arrivée fort remarquée.

Les jeunes venus par dizaines sur le lieu du rassemblement, se distribuent des banderoles bleues et blanches, en guise de signes distinctifs. Les premières informations font croire que les grévistes qui projettent de détruire les champs sont en réunion à Fobiri, à Sinkoro et à Wona, des villages non loin de Bana. Aux environs de 11 heures, un autre détachement de la CRS arrive en renfort.

La tension monte d’un cran lorsque des informations font état de l’attaque imminente du siège de la mairie par les grévistes. La population armée, estimant la CRS lente dans son action, décide de prendre les devants et de descendre dans les champs. Pour rassurer la population en colère, un policier, sans doute le commandant du détachement, s’adresse à un responsable : "Vous connaissez cultiver le coton. C’est votre travail. Mais en pareille situation, c’est ce que nous savons faire le mieux. Attendez et vous verrez les résultats". Rien n’y fait.

Les pressions de la foule s’accentuent sur le président de l’Union départementale des producteurs de coton, Seydou Davou. De la foule, surgit un vieux sexagénaire, les lèvres tremblantes de colère. "Démocratie démocratie hèè pèyèè ?" littéralement :

« démocratie, démocratie,

c’est quoi ? » Cette phrase pour repondre à l’appel lancé par le commandant de la CRS de laisser uniquement les forces de l’ordre faire leur travail. Ainsi, la police décide de rentrer en action dans les champs, pendant que déjà, une foule immense de frondeurs étaient déjà à la tâche en détruisant les champs de coton. Selon le conseiller villageois de développement (CVD) de Wona, Lassina Dao, joint au téléphone, les frondeurs sont venus de plusieurs villages. En effet, pendant qu’ils s’affairent à arracher les plants de coton, de maïs mais aussi de mil, des griots, à l’aide de tam-tams, les galvanisaient. En quelques temps, ce sont plusieurs dizaines d’hectares de coton et autres spéculations qui ont été ainsi détruits. Mais l’absurde va vite tourner au drame. La contre-attaque de la population de Bana, descendue à son tour dans les champs comme un seul homme, a provoqué une scène indescriptible.

Des coups de feu, par-ci et coups de machettes, par-là. Cinq (5) personnes, selon le maire, ont été grièvement blessées par balles ou par des coups de machettes, puis évacuées d’urgence à Boromo pour des soins appropriés. Au dispensaire, elles baignaient dans leur sang. Des engins, notamment des motos et des vélos des frondeurs, ont été également détruits ou confisqués. Des frondeurs ont échappé de peu au lynchage et l’action des forces de sécurité, à travers des tirs de sommation et de gaz lacrymogènes, a permis d’éviter la catastrophe. Une vingtaine de personnes a été interpellée.

Protéger, à tout prix, les champs de coton à Bana

En mission de bons offices, le député Mohamadou Touré, accompagné du chef de Boromo, est arrivé à Bana, dans la soirée, vers 17h, après les affrontements. Sa mission le conduit dans d’autres localités pour la même cause. A Bana, les populations ont été, on ne peut plus claires. « Dites au gouvernement de rester sur la voie de la vérité .S’il y a des gens à rencontrer, c’est bien ceux qui se promènent pour arracher notre coton et pas nous. Nous ne demandons qu’à pouvoir produire. Ne soignez pas les pieds de quelqu’un qui souffre de maux de tête », a laissé entendre un vieil homme.

Pour le président de l’Union des producteurs de coton de Bana, les choses se sont précisées avec les rencontres successives avec le ministre de l’Agriculture et le Premier ministre, sur certaines revendications des cotonculteurs. A l’issue de ces rencontres, la liberté a été laissée à ceux qui sveulent produire, cette année, du coton de le faire. « Après avoir rencontré les différents groupements de producteurs de coton de la commune de Bana, nous avons décidé de cultiver », a-t-il poursuivi. Il dit ne pas comprendre la manière avec laquelle les frondeurs ont voulu amener les paysans à les suivre dans leur humeur. Sans demander la parole, un ancien combattant a laissé entendre que Bana ne se laissera pas faire et les populations se battront pour sauver leur coton jusqu’à la dernière goutte de leur sang. Il a, par ailleurs, fustigé ceux qui interviennent pour faire libérer ceux qui sont interpellés. « La loi c’est la loi, que le gouvernement reste ferme », a-t-il insisté.

Certains producteurs pensent déjà à leur engagement contracté pour les semences, les intrants et les pesticides. D’autres producteurs accusent le deuxième adjoint au maire et le CVD, tous de Wona, de complicité avec les fauteurs de troubles. « Les réunions pour arracher notre coton se tenaient là-bas. Ils n’ont pas été capables d’en informer le maire ou le préfet, encore moins la CRS, des mouvements de la population qui ont contraint les gens à suivre les grévistes." En tous les cas, le maire Mahama Coulibaly a demandé à ses concitoyens de rester soudés et de produire toutes les spéculations qu’ils désirent.

Moussa CONGO

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 27 juillet 2011 à 16:39, par la patate chaude En réponse à : Commune rurale de Bana : Des cotonculteurs défendent leurs champs

    Pour memoire retenons ceci : dans un pays des cotonculteurs manifestent pour révendiquer la hausse du prix d’achat du kilo du coton graine. Leur organisation "UNPCB" sensée les défendre se repand dans les médias pour vilipender cette demarche, en traitant les "marcheurs" d’utopistes ou tout simplement de manquer de réalisme. Cela m’a tout de suite paru ahurissant, et il faut être dans un pays comme le Burkina pour voir une scène pareille. A partir de pà j’ai tout de suite compris que les choses allaient se "gater" ! Bon ! les responsables de l’UNPCB me donnent envie de vomir ! ils n’ont aucun crédit et doivent donc bouger leur "cul".
    Ensuite l’analyse des prix mondiaux montrent que le kilo de coton s’achète à un peu plus de 2000f à Londres, toute chose égale par ailleurs la SOFITEX devrait l’acheter ici à un prix minimum de 600f le kilo. En rappel les cotonculteurs demandent 500f. Au lieu de cela la SOFITEX ne propose que 240f (quelle arnaque !) !
    Quant aux évènements qui se déroulent dans les champs "silence on massacre" ! ainsi va le Burkina du gentil beau Blaise !

  • Le 27 juillet 2011 à 16:41, par le bon citoyen En réponse à : Commune rurale de Bana : Des cotonculteurs défendent leurs champs

    Votre est bancale, on n’arrive pas à comprendre qui fait quoi ? Quelles sont les frondeurs et les autres ?
    Très très confuse, votre histoire.

    Mais le gouvernement doit prendre des dispositions pour arrêter cette histoire de coton. Car ce n’est pas des milliards de CFA qu’on récoltera à la fin, mais des milliers de morts et des gurres civiles.

  • Le 27 juillet 2011 à 20:04 En réponse à : Commune rurale de Bana : Des cotonculteurs défendent leurs champs

    c’est simplement triste. k dieu sauve le faso

  • Le 28 juillet 2011 à 17:24, par Pako En réponse à : Commune rurale de Bana : Des cotonculteurs défendent leurs champs

    Je suis assez surpris car ma contribution postée hier n’a pas été publiée. Puis je savoir en quoi elle constituait une contre vérité ? SVP PUBLIEZ CE QUE J’AI DIT, CAR LES LECTEURS ONT BESOIN D’ETRE INFORME SUR CE QUI S’EST REELLEMENT PASSE.

  • Le 1er août 2011 à 03:22, par Pako En réponse à : Commune rurale de Bana : Des cotonculteurs défendent leurs champs

    "Démocratie démocratie hèè pèyèè ?" littéralement :
    " démocratie, démocratie, que du MENSONGE " voilà ce que ça veut dire en langue dafing/marka. La traduction faite par le journaliste n’est pas tout à fait exacte.
    Le sentiment qui m’anime ici est celui de la désolation. la situation vécue à Bana n’est une surprise pour personne. Depuis bientôt un mois, les menaces se font persistantes sur les villages qui ont opté pour la culture du coton cette année. Les concernés le savent et les autorités (sofitex, préfets, maires, et autres députés) aussi ont eu l’information en temps réels. Aussi bien à Bana, à Pompoï, à Kokoï et autres, la situation est similaires. Chacun est sur le qui vive. On dort et on se réveille dans la crainte d’être attaqué.Où est notre Etat ? celui la même qui dit maîtriser les rouages de la concertation et de la médiation ? fallait on attendre que ce drame se produise pour envoyer des multitudes de missions sur le terrain ? Ce n’est pas juste. La culture du coton profite certes aux paysans, mais quand on fait les classements au niveau sous régional ou africain, c’est pas eux qui sont auréolés. Il sont tous venus au coton parce que c’est une orientation nationale. Dans cette affaire, il faut que chacun prenne ses responsabilités et que le premier ministre demande une enquête sur la situation. En effet pour penser ces plaies entre populations qui vivent ensemble depuis toujours et qui sont en réalité des familles, ce ne sera pas facile. Il faut néanmoins commencer à entreprendre des actions préventives pour que ce ne soit pas un effet domino, pour que cela ne se répète pas dans les villages jugés à risque présentement.
    Je suis vraiment désolé pour mes parents.

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