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Les adieux de Luc Adolphe Tiao aux Burkinabè de France

Publié le lundi 11 juillet 2011 à 04h30min

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Le 5 octobre 2008, ils étaient venus nombreux lui offrir le Zom Koom de bienvenue à Luc Adolphe Tiao en tant que nouvel ambassadeur du Burkina en France. Un peu moins de trois ans après, ils étaient à nouveau venus en grand nombre samedi 9 juillet 2011, dire au-revoir à celui qui est devenu depuis le 18 avril Premier ministre. Il était accompagné des ministres de l’Industrie, du commerce et de l’artisanat, Arthur Kafando et celui de la Communication, porte-parole du gouvernement, Alain Edouard Traoré.

Au nom de la communauté burkinabè de France, le doyen Christian Ouédraogo a félicité Luc Adolphe Tiao pour sa nomination avant de demander aux ancêtres de bien vouloir l’accompagner et le protéger dans l’accomplissement de la mission qui lui a été confiée. Quant au coordinateur du Conseil supérieur des Burkinabè de l’étranger, (CSBE), Ambroise Bassolet, il l’a remercié pour tout ce qu’il fait pour les Burkinabè, et relevé qu’il a toujours été disponible et à l’écoute des préoccupations de ses compatriotes. « Vous qui êtes allergique à tout ce qui est statique, sachez que nous soutenons le programme de changement que vous avez annoncé dès votre arrivée », a t-il déclaré, puis a demandé une minute de silence à la mémoire des victimes de la dernière crise que le pays a connue.

Prenant la parole, le Premier ministre Luc Adolphe Tiao s’est d’abord excusé d’être arrivé avec un retard de près d’une heure, son agenda étant très chargé puisqu’il est là pour faire ses adieux diplomatiques aux autorités françaises, et pour rencontrer les organismes internationaux avec lesquels le Burkina entretient des relations. « Pour le Burkina nouveau que nous voulons construire, on ne doit pas voir de pareilles choses » a-t-il confessé. Dans un discours plus long que prévu, il a dressé une sorte de bilan de son passage en tant qu’ambassadeur à Paris et expliqué la philosophie qui l’anime à son nouveau poste de responsabilités.

En arrivant à Paris en 2008, ses objectifs étaient bien évidemment de renforcer les relations de coopération entre le Burkina et la France, d’ouvrir l’ambassade au monde extérieur, notamment vers les Burkinabè vivant en France et à tous ceux qui s’intéressent au Burkina pour qu’ils en fassent réellement leur maison, et apporter un peu plus de dynamisme dans le fonctionnement de l’ambassade à travers les multiples manifestations qui y sont organisées. Dans cette optique, il avait souhaité organiser une semaine culturelle du Burkina à Paris et surtout doter ses compatriotes d’une « Maison du Burkina ». Par manque de moyens, la semaine n’a pu être organisée et la « Maison » reste encore au stade de projet au moment où il quitte la capitale française. Il se dit toutefois confiant « qu’un jour, ces projets verront le jour ».

Sur l’accord signé le 10 janvier 2009 entre la France et le Burkina relatif à la gestion concertée des flux migratoires, Luc Adolphe Tiao a été d’une franchise peu habituelle chez les hommes politiques. « Je suis conscient que beaucoup de Burkinabè doivent être déçus, à commencer par moi-même », a-t-il déclaré. Il s’agit notamment du volet de la régularisation des sans-papiers, pour lequel « je suis triste de n’avoir pas pu régler ce problème avant de partir, surtout que c’est le gouvernement français qui avait pris l’engagement de permettre à quelques centaines de Burkinabè en situation irrégulière d’avoir des papiers ». Le texte prévoit que ceux qui sont arrivés sur le territoire français depuis novembre 2007 et qui sont capables de justifier d’une promesse d’embauche peuvent bénéficier d’une régularisation administrative. Mais sur la centaine dossiers déposés, aucun n’a encore abouti, en raison, entre autres, des nombreux changements de ministres de l’Intérieur intervenus depuis cette date.

Sur le co-développement, Luc Adolphe Tiao aurait aimé voir l’application de l’accord, ce qui aurait permis d’obtenir 3,5 millions d’euros pour le financement de projets et programmes au profit de la jeunesse burkinabè. Sur ce point aussi, il espère qu’avec le soutien de l’ambassadeur de France à Ouagadougou, les choses vont s’arranger le plus rapidement.

Il a salué l’engagement des milliers de bénévoles mobilisés dans près de 160 communes françaises pour construire des écoles, dispensaires, et parrainer des enfants, autant de geste de solidarité et d’humanisme dans un monde d’égoïstes, sans oublier les consuls honoraires qui se dévouent remarquablement pour la cause du Burkina.

De son séjour à Paris, il a ressenti de la ferté dans le comportement des Burkinabè de France connus pour leur « sérieux, leur modestie et qui jouissent d’une bonne image auprès des autorités françaises ». Solidaires de leur pays d’origine, ils ont mobilisé 40 000 euros (un peu plus de 20 millions de F CFA) et des dons en nature pour venir en aide aux sinistrés des inondations du 1er septembre 2009. « Les vrais ambassadeurs du Burkina ici en France, c’est vous », leur a-t-il lancé, et annoncé que les dispositions seront prises pour que la diaspora puisse participer à la deuxième phase des débats sur les réformes politiques et institutionnelles actuellement en cours.

C’est un nouveau Premier ministre animé d’une volonté de changement et ayant le souci de l’éthique dans la gestion de la chose publique qui s’est adressé aux Burkinabè dans la salle des fêtes de l’ambassade samedi dernier.

Il a ainsi déclaré que plus rien ne sera comme avant dans la maison des étudiants à Paris, communément appelée Fessart, dans le 19e arrondissement. Rappelant que la vocation de cette cité universitaire est d’accueillir les fils et filles de parents modestes, il a martelé que « ceux qui ont les moyens d’envoyer leurs enfants étudier à Paris doivent aussi leur trouver un logement en ville », et qu’il ne sera plus toléré que certains y restent durant cinq ou six ans, alors qu’ils ont épuisé leur temps de séjour. Est-ce suffisant pour que Fessart retrouve la mixité sociale qui a longtemps caractérisé sa population, et qui a disparu au profit des « fils de…sans une nouvelle politique d’attribution des bourse fondée sur le mérite ? », l’avenir le dira.

En dépit de la mobilisation de nombreux ambassadeurs africains, la menace d’expropriation de la maison des étudiants d’Afrique de l’Ouest dans le 12e arrondissement, par la mairie plane toujours. Propriété des pays d’Afrique de l’ouest francophones, « Ponia » comme on l’appelle couramment est dans un état jugé dangereux par la mairie qui aimerait bien la récupérer pour, parait-il, en faire des logements sociaux. Les résidents font de la résistance, mais la balle est dans le camp des chefs d’Etats, seuls capables d’éviter le scandale de l’éventuelle expropriation.

Le Premier ministre est revenu bien évidemment sur la crise que le pays a connue récemment et à la faveur de laquelle il a été appelé « en pompier » par le président Blaise Compaoré. Selon lui, si la crise a atteint une telle ampleur, c’est parce que la mort de l’élève Justin Zongo a été mal traitée au début, que les magistrats burkinabè sont trop politisés et que les fruits de la croissance économique n’ont pas été équitablement redistribués. « Alors qu’elle a atteint une moyenne de 5 à 6% ces dernières années, la croissance économique n’a malheureusement pas profité aux pauvres, et n’a pas permis la naissance d’une classe moyenne ». On est loin du cas brésilien où la politique économique et sociale du président Lula a permis de sortir 39 millions de Brésiliens de la pauvreté entre 2003 et 2011. Il est vrai que l’ancien syndicaliste s’était donné les moyens de sa politique en payant la dette du pays vis-à-vis du FMI et la banque mondiale, ce qui n’est pas encore le cas de nombreux pays africains dont le Burkina, où seule une minorité s’est beaucoup enrichie, pendant que « les gens ne mangent pas à leur faim, et qu’à l’hôpital, des femmes qui viennent d’accoucher sont dans les couloirs avec leur bébé ».

Dès sa prise de fonction, Luc Adolphe Tiao avait annoncé que le changement n’épargnera aucun secteur, et après relevé de leur fonction de nombreux directeurs de société, il a promis à nouveaux que la mobilité reste son crédo. Les ministres sont invités à promouvoir des jeunes talents à des postes de responsabilité, seule moyen d’éviter les frustrations de ceux qui ne demandent qu’à mettre leur expertise au service du pays. Une lutte sans merci sera menée contre ceux qui prennent des libertés avec la loi et désormais, ceux dont la gestion est épinglée par la Cour des comptes ou l’Autorité supérieure de contrôle de l’Etat devront démissionner et s’expliquer devant la justice. Il a prévenu que les derniers rapports de ces structures de contrôle seront examinés de près et les gestionnaires indélicats ne perdent rien à attendre.

Mais la lutte contre la corruption passe aussi par l’indépendance de la justice et la formation des magistrats en matière de délinquance financière. « Comment voulez-vous qu’un juge traque la corruption alors qu’il ne connait pas grand-chose sur les questions financières ? », s’est-il interrogé.

Sur la gestion des mutineries qui ont éclaté dans plusieurs villes du pays, le Premier ministre a expliqué que le gouvernement a surtout privilégié la concertation et la discussion pour trouver une solution aux revendications formulées par les soldats. La décision de mater les mutins de Bobo-Dioulasso n’a été prise qu’en dernier ressort, après que les soldats aient refusé toute idée de discussion et se livrant à des actes qui relèvent davantage du grand banditisme qu’une manifestation de revendications corporatistes. L’Etat, a-t-il dit, entend assumer fermement ses responsabilités vis-à-vis des hors-la-loi et c’est dans cette logique que la décision a été prise de radier purement et simplement 550 soldats des effectifs de l’armée, de juger 160 autres reconnus comme meneurs et qui sont actuellement arrêtés et détenus en prison.

L’article 37 va-t-il être révisé ? Sur ce sujet qui cristallise depuis des mois les débats, le Premier ministre estime que l’opposition ferait mieux de travailler à convaincre les Burkinabè dans la perspective des prochaines échéances au lieu d’occuper les colonnes des journaux à ne parler que de ça, courant le risque de rater le rendez-vous de 2015. « Le souci du président Compaoré n’est pas forcément ce qu’on peut croire, il veut surtout doter notre pays d’institutions fortes au moment de quitter le pouvoir », a-t-il confié

Séquence émotion de cette rencontre d’adieux, l’ancien ambassadeur a salué la loyauté de ses collaborateurs, promis d’apporter des réponses aux doléances du personnel recruté sur place et qui fait face à une situation « inhumaine », remercié ceux qui l’ont aidé à trouver ses marques à son arrivée à Paris, et rendu hommage à son épouse qui le supporte, lui « l’époux pas facile et capricieux », et demandé pardon à tous ceux qu’il a involontairement offensés.

Joachim Vokouma

Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 11 juillet 2011 à 05:02 En réponse à : ou est Me Kere dans tout ca ?

    Je suis inquiet face au mutisme de l’inenarable Me Kere. Il n’a jamais ecrit par rapport a la crise nee des mutineries ni lu de message a la rencontre d’aurevoir de l’ambassadeur. Pour ceux qui lisent lefaso.net et connaissent la loquacite de Kere, son silence est inquietant. Quelqu’un en France peut il nous rassurer que notre loquace est en bonne sante ?

    • Le 11 juillet 2011 à 12:38, par Lejohn51 En réponse à : ou est Me Kere dans tout ca ?

      Eviter de déplacer le débat Monsieur. Le premier ministre n’est venu pour Me Kéré. Ta réaction est quand même surprenante et hors sujet. Si Me Kéré le juge nécessaire il répondra dans le cas contraire la vie continue Monsieur. Qu’as tu à ajouter concernant la rencontre d’aurevoir de Son Execellence ?
      Bref ce type, à l’entendre parler rassure. Je pense que depuis sa nomination il a fait un bon boulot. Nous ne pouvons que l’encourager dans sa nouvelle mission et qu’iln ne modifie pas sa ligne qu’il a adopté.

      • Le 11 juillet 2011 à 15:26, par Rawende En réponse à : ou est Me Kere dans tout ca ?

        Bonjour,

        La remarque est effectivement hors sujet mais qu’on se le dise, il fait bien d’en parler et il y a quand un même un miniscule lien entre ce qu’il dit et le nouveau premier ministre.

        Il fait allusion à ce qu’à connu le BF ces derniers mois et c’est ce qui a conduit l’ancien ambassadeur où il est.

        Vu ce qu’à connu le Burkina il est surprenant que Mr Kéré ne se soit jamais prononcé..... C’est une remarque qui mérite d’être soulevée même si elle n’a pas de lien directe avec l’aurevoir de notre nouveau premier ministre.

    • Le 11 juillet 2011 à 17:22 En réponse à : ou est Me Kere dans tout ca ?

      Comme vous êtes préoccupé du sort de Me Kéré,pourquoi ne pas la contacter directement au lieu de nous saoûler avec votre hors sujet ?Sur internet vous pouvez obtenir directement ses coordonnées à Nancy avec adresse,téléphone,fax et mail.Le sort des Burkinabè n’est pas lié à celui d’un seul individu et à bon entendeur,salut !

    • Le 11 juillet 2011 à 23:38, par Fils de Zabré En réponse à : ou est Me Kere dans tout ca ?

      salut.
      je vous rassure que le digne fils fils du faso va bien.je pense plutot qu il n etait pas au courant des aurevoirs de mr le Premier Ministre.
      Sinon pour rien au monde il ne privera de prendre la parole.
      Son absence s etait fait savoir.
      Maitre fais signe.

    • Le 11 juillet 2011 à 23:56 En réponse à : KERE va bien ?

      C’est avec une certaine satisfaction positive que je constate que finalement, certains de mes compatriotes burkinabè se soucient de ma santé et surtout de mes prises de positions sur la situation de notre pays même si j’en conviens que le combat pour les idées doit être collectif et non pas personnel.
      Je dois d’abord dire ici et maintenant que je me porte bien même si je suis un peu submergé par mes multiples occupations associatives, professionnelles et lion’s club.
      Ceci étant, il n’est pas cependant juste d’affirmer sans aucune vérification approfondie que je ne me serais jamais prononcé sur les mutineries au Burkina Faso ainsi que sur la situation nationale de mon pays. Pour preuve, Monsieur Joachim VOKOUMA a publié dans le fasonet mon article le 6 mai 2011, pamphlet de de 6 pages sur mon opinion politique concernant la situation nationale et les perspectives d’avenir de notre pays. Enfin, je n’ai pu assister à la rencontre du 9 juillet écoulé pour des raisons de calendrier dont je prie mes compatriotes et les autorités diplomatiques de bien vouloir m’en excuser. Me Paul André Dieudonné KERE.

    • Le 12 juillet 2011 à 11:34 En réponse à : Article de Me KERE sur la situation nationale au Burkina Faso.

      Voici l’article de Me KERE

      « Le Burkina Faso après les récentes secousses socio politiques : Analyse et thérapies.

      Depuis le 24 février 2011 de graves incidents viennent entacher le processus démocratique au Burkina Faso et ont ainsi provoqué la dissolution du gouvernement et la nomination de Son Excellence, Monsieur Luc Adolphe TIAO en qualité de Premier Ministre.

      De la mutinerie des militaires de notre armée nationale, en ce compris les protestations des soldats du Régiment de Sécurité Présidentielle pour non-paiement d’indemnités diverses, suivies des marches de protestation de certains commerçants victimes, en passant par les manifestations (souvent émaillées d’incendies domiciliaires) de nombreux élèves et étudiants en réaction à la mort de Justin ZONGO, force sera de constater que, finalement, la paix, était et sera toujours un trésor, bien plus fragile qu’on ne pouvait le croire. Si le crépitement des armes ou les manifestations de civils sont devenus, en l’espèce de quelques temps, un mode usuel de revendication, c’est qu’à l’évidence, la communication entre la hiérarchie intermédiaire et la haute hiérarchie n’a pas fonctionné de manière efficiente. De ce point de vue, il n’est pas surprenant que le Président Blaise COMPAORE ait fait confiance à un fin « communicateur » en la personne de Monsieur Luc Adolphe TIAO. Conscient de la gravité de ces manquements récurrents dans la communication, le Président du Faso, a décidé de conserver, « himself », le portefeuille du Ministère de la Défense. Peut-être que les révélations sur le fonctionnement des finances dans les garnisons qui lui auraient été faites à l’occasion des concertations directes par les sous-officiers et les hommes du rang lui ont paru suffisamment graves pour qu’il s’auto - saisisse d’office, de manière régalienne, de la question militaire. N’est-il pas d’ailleurs, sur le plan constitutionnel, le chef suprême des armées ? Dans ces conditions, celui-ci demeure dans ses attributions constitutionnelles en dépit des dispositions pertinentes de l’article 42 de la loi fondamentale.

      Mais c’est bien connu, la discipline constitue la force principale des armées, mais il faut ajouter aussi que l’argent demeure toujours le nerf de la guerre. Visiblement, une meilleure organisation des finances au sein de l’armée permettra certainement au Président du Faso de régler, durablement, cette crise militaire.

      Cependant, il serait souhaitable de veiller à toujours respecter une certaine égalité de traitements des salaires entre les militaires et les civils dans un souci permanent de sauvegarder le pouvoir d’achat de chacune des catégories socio professionnelles. De ce point de vue, l’apurement des corrections des avancements des fonctionnaires au plus tard en septembre 2011 va dans le bons sens…

      Quoi qu’il en soit, tant, au sein des casernes militaires que dans la vie civile au Burkina, le fait générateur de ces incidents réside indéniablement dans le sentiment d’injustice…, et la perception par une frange majorité de nos populations d’une apparente et trop grande disparité du niveau de vie entre citoyens d’un même pays. Ce sont là, incontestablement, des facteurs incandescents universels de déstabilisation de la paix sociale et du « vivre ensemble ». Comment donc le nouveau Premier Ministre pourrait-il travailler à résoudre durablement les causes de ces incidents à répétition ?

      Présenté péjorativement par de nombreux médias nationaux comme le « pompier de service » ou par d’autres comme « l’homme de la situation », il semble prématuré, et ce, avant le délai habituel de grâce (que d’ailleurs tout le corps social vient de lui consentir), de porter une quelconque appréciation sur la capacité du nouveau Premier Ministre et sa nouvelle équipe à endiguer la crise actuelle, en raison, essentiellement, de la complexité de la tâche qui lui a été assignée par le Président du Faso.
      D’ores et déjà, il convient de souligner que la crise est structurelle et elle exige des mesures idoines par le nouveau Premier Ministre et son gouvernement afin de sortir le pays de cette crise et le mettre sous « orbite de l’émergence ». Et sur ce plan, (la suppression de la TDC, la réduction de 10% du taux de l’IUTS, la baisse (grâce aux subventions étatiques) des prix des produits de première nécessité, la suppression de la tarification des actes médicaux, la suppression exceptionnelle des pénalités résultant des factures d’électricité, le traitement diligent des dossiers judiciaires) constituent inéluctablement un bon début.

      Même si on ne peut prétendre bien connaître un homme, Luc Adolphe TIAO s’est unanimement révélé en ce début de période d’observation comme un homme de foi, de paix, et de conviction. Au vu de ces premières mesures urgentes, il semble avoir pris le taureau par les cornes et, notamment, par l’impressionnante liste de consultations des autorités coutumières et/ou religieuses, des partis politiques de la majorité présidentielle, de la société civile et surtout des partis politique de l’opposition. D’autres actions concrètes devront certainement être jointes à ces premières mesures. C’est dans cet optique qu’il convient d’inviter tous les burkinabé, chacun à sa manière, à y contribuer activement. En effet, pendant ces vingt dernières années, quoi qu’on puisse critiquer (rien n’est parfait, loin s’en faut !), le Burkina Faso est réputé pour sa stabilité et sa paix sociale.

      Ces acquis de stabilité méritent bien d’être préservés car c’est sur ce socle que nous devons consolider le processus démocratique. Il n’est pas plaisant de constater une impressionnante liste d’annulations de voyages en direction de notre pays depuis le début des incidents, le Quai d’Orsay ayant même fortement découragé officiellement la destination de notre pays.

      Par ailleurs, le départ de la totalité des volontaires japonais de notre pays est également un signe qui ne doit pas nous satisfaire. Il est donc impératif de trouver les voies et moyens afin de sortir très rapidement de cette crise. Sur ce plan, il faut saluer la rencontre du Ministre des Affaires Etrangères avec les représentants des corps accrédités au Burkina Faso. De même, espérons que la future rencontre du Ministre des Affaires Etrangères avec la communauté burkinabé de France soit fructueuse dans ce sens. Le Burkina est un pays sûr et de nombreux étrangers qui s’y sont installés sont sans aucune crainte. Cette affirmation est confortée par le fait que le nombre de français vivant au Burkina excède manifestement celui des burkinabé en France. Ce qui n’est pas le cas des autres pays africains. L’image même du burkinabé, qu’il soit à l’étranger ou au pays est une excellence image. Efforçons-nous donc de conserver cette belle image qui fait sans doute la fierté de notre pays. Et en cette période controversée et de turbulence politique, dès à présent, des solutions thérapeutiques rapides doivent être expérimentées afin de contenir de préjudiciables dérives et nous gagnerons tous à nous préoccuper aujourd’hui de l’essentiel. Certes, faut-il le rappeler, le nouveau gouvernement a, d’ores et déjà, procédé à certaines mesures qu’il convenait de saluer.

      Cependant, plusieurs autres défis majeurs sont à relever ici et maintenant : Et quels sont-ils ?

      - Le référencement et le contrôle strict des prix des produits de première nécessité :

      Le prix des denrées alimentaires et de certains produits de première nécessité en ce compris le carburant ne doivent pas seulement faire l’objet de subventions étatiques. Ces prix devront, absolument, de plus, faire l’objet d’un référencement et d’un strict contrôle afin de permettre aux populations de maintenir un pouvoir d’achat minimal. Il ne servira à rien d’augmenter les salaires des fonctionnaires ou des militaires si les prix des produits de première nécessité ne cessent de grimper concomitamment. C’est le serpent qui risque de se mordre la queue. La réglementation du prix des produits de première nécessité ne doit pas faire oublier la primauté de la santé.

      - La Santé Publique : La problématique consiste à faire accéder toutes les populations rurales à l’eau potable et aux soins médicaux. De ce point de vue, si la suppression de la tarification des actes médicaux peut constituer une première réponse, force sera de constater qu’il conviendrait d’aller plus loin par la mise en place, d’un kit d’urgence : en effet, nombreux sont les populations désargentées qui arrivent à l’hôpital et ne peuvent faire face au paiement de la première ordonnance médicale. La mise en place d’un système médical de prise en charge initial gratuit notamment par la dotation d’une trousse médicale urgente gratuite serait une avancée considérable. On peut légitimement opposer la faiblesse des moyens financiers de l’Etat. Mais ne dit-on pas que la santé n’a pas de prix ? Quoi qu’il en soit de ces mesures sanitaires salutaires, l’aboutissement et la perfection de ce système de santé résiderait dans la mise en place d’une forme de Caisse d’Assurance Maladie Universelle (CAMU) qui intègrerait l’ensemble de la population dans ce système de prise en charge des soins de santé. De ce point de vue, la Caisse Nationale de Sécurité Sociale pourrait constituer le socle de cette mutualisation en attendant d’intégrer les cotisations symboliques des autres populations. En tout état de cause, s’agissant des soins de santé de nos populations, aucun sacrifice n’est jamais suffisant. Le spectre d’une hospitalisation constitue toujours un cauchemar supplémentaire pour celui qui ne peut faire face aux frais médicaux. Ce sera un choix politique judicieux. Le pendant de la santé publique demeure l’éducation nationale car mieux nos populations seront sensibilisées sur certains risques pathologiques, mieux elles pourront, préventivement, les éviter.

      - L’Education Nationale : De notre point de vue, c’est le défi le plus crucial pour l’avenir du pays. Mieux nos générations de jeunes seront formées à relever les enjeux du siècle à venir, plus nous aurons accru les chances de développement de notre pays et de mieux être de nos populations. il s’agira donc que nous cultivions plus, le sens de la Nation et le sens de l’Etat pour imaginer, concevoir, construire et perfectionner notre système éducatif qui formera notre jeunesse dans des disciplines et à des métiers réellement indispensables à notre développement et à notre mieux-être. Il n’est pas étonnant que les travaux de finition de nos maisons soient déplorables parce que nous n’avons pas les meilleurs plombiers et/ou spécialistes du solaire ou de la climatisation, les meilleurs plaquistes, les meilleurs charpentiers, les meilleurs menuisiers….Il conviendrait de vulgariser la création des écoles professionnelles de climatisation, du solaire, de menuiserie, de mécaniques diverses…De même, il est souhaitable que le système de l’internat et de la cantine scolaire soient restaurés dans les écoles primaires, les lycées et collèges. Enfin, et c’est primordial, il conviendrait de créer une meilleure adéquation entre les emplois disponibles et les compétences qui seront formées dans nos instituts et écoles de formations professionnelles qui doivent rester accessibles au commun des burkinabé. Il est plus que désespérant, tant pour les parents que pour les jeunes eux-mêmes, élèves ou étudiants en fin de cycle de ne pas trouver un emploi. Et la fonction publique ne doit pas constituer le seul débouché important. Les orientations des élèves et étudiants devront donc se faire en fonction des débouchées et des disponibilités de l’emploi dans les secteurs référencés. Ce travail statistique d’adéquation doit être mis en œuvre à travers les départements d’études et de planification (DEP) de concert avec une commission paritaire constituée entre le Ministère des Enseignements Secondaires Supérieurs, la Recherche scientifique, d’une part, les responsables différentes écoles professionnelles et le Ministère de la Jeunesse, de la Formation professionnelle et de l’emploi, d’autre part, et ce, en vue du renforcement d’une économie pérenne.

      - L’économie : Elle est, par excellence le socle de toutes actions politiques. Pour « compétir », il convient d’avoir des entreprises compétitives et un marché intérieur qui soit porteur. Le Burkina Faso est le principal fournisseur du Ghana, de la Côte d’Ivoire et bien d’autres pays de la sous-région en viande… Plus que jamais, le défi consisterait à renforcer davantage une économie essentiellement tournée vers nos propres atouts. De ce point de vue, nous disposons de nombreuses ressources humaines, non pas seulement intellectuelles, mais aussi, rurales, agricoles, pastorales et artisanales, que bien d’autres pays nous envient. Nous devons revaloriser activement ces différents secteurs à travers nos collectivités territoriales. C’est à partir d’elles et de leur revalorisation que nous devons repartir, étape par étape à la reconquête d’un développement durable de notre pays. De ce point de vue la mise en œuvre de nombreuses retenues d’eau dans les villages, le développement d’industries légères de transformation et la poursuite d’une économie émergente de services ou du tertiaire permettront, sans aucun doute, de résorber, non seulement le chômage des jeunes, mais également de renflouer les caisses de l’Etat par des devises étrangères. Ce n’est qu’à ce prix que la confiance sera renouvelée aux hommes et aux femmes politiques.

      - Sur le plan politique : L’alternance.

      L’alternance, au-delà des règles constitutionnelles de la limitation actuelle du mandat présidentiel à deux, constitue inéluctablement une loi naturelle….et aucun dirigeant planétaire ne pourrait s’y opposer durablement…. Au Burkina Faso, la question récurrente de la révision de l’article 37 taraude les esprits. Plusieurs responsables politiques, tant de la majorité présidentielle que des partis de l’opposition se sont déjà exprimés sur cette révision ou non - révision constitutionnelle. Les deux positions sont inconciliables. A notre humble avis, cette révision constitutionnelle ne saurait se concevoir dans les circonstances actuelles, sans le consentement et l’adhésion totale de toutes les composantes de notre peuple en ce compris les partis de l’opposition. Il n’y a donc aucune ambiguïté et les récentes manifestations diverses doivent nous servir de gouvernail.

      En effet, les frustrations évidentes des partis de l’opposition burkinabé peuvent se comprendre. Ces partis de l’opposition sont bien conscients que dans le jeu démocratique actuel au Burkina Faso, ils ne pourront, (sauf à faire preuve de meilleure mobilisation de l’électorat dans les villes et surtout dans les campagnes), accéder majoritairement à la représentation nationale et encore moins au plus haut sommet de l’Etat.

      Quoi qu’il en soit, nous gagnerons tous au Burkina Faso en associant toutes les composantes de notre peuple y compris les acteurs de la société civile et les partis de l’opposition aux réformes politiques annoncées et, notamment, en prenant en compte les profondes aspirations élémentaires de nos populations (éducation, santé, emploi …)

      Ce n’est qu’en luttant efficacement contre les inégalités sociales, en offrant notamment plus de partages équitables des richesses existantes dans notre pays que nous pourrons rassembler, toutes nos forces et nos intelligences au service de notre peuple. Nous sommes parfaitement conscients à travers ce pamphlet, qu’il est plus facile d’écrire que de mettre en pratique ces vœux en raison des contraintes de toutes sortes.

      Cependant, gouverner, c’est prévoir et prévoir, c’est tenter de régler ici et maintenant les difficultés existentielles de notre peuple. Il y va de la responsabilité de nos gouvernants et, chacun en ce qui le concerne, à quelque niveau qu’il se situe, devra apporter sa contribution salutaire à la construction de l’édifice burkinabé. Ensemble, nous vaincrons !

      Paul KÉRÉ
      Docteur en Droit
      Avocat à la Cour de Nancy
      Chevalier de l’Ordre « National »

  • Le 11 juillet 2011 à 05:38 En réponse à : Les adieux de Luc Adolphe Tiao aux Burkinabè de France

    Monsieur le PM,nous espérons toutes et tous que vos paroles seront traduites concrètement en actes car nous sommes tellement habitués à des belles paroles d’une bonne partie de notre classe politique mais jamais suivies d’effets.Mais une question tout de même.Les 550 militaires sont radiés ou seront radiés ?En tout cas,c’est la première fois que j’entends parler de cette histoire de radiation mais c’est une très bonne chose et je vous prie de ne pas les remplacer par de nouveaux recrus.D’ailleurs il faut réduire de manière drastique le nombre de nos militiaires.Ils sont trop nombreux avec trop de désoeuvrés et budgetivores.Courage Mr le PM,le chantier pour le redressement de notre cher pays est titanesque

  • Le 11 juillet 2011 à 13:17, par Jean Claude, France En réponse à : Les adieux de Luc Adolphe Tiao aux Burkinabè de France

    Me Kere s’occupe de ses affaires... Parfois, il faut savoir se taire pour mieux cener la situation et décider de la statégie à mettre en place pour assurer un vrai changement. Il ne faut pas parler pour parler, c’est pas constructif.

  • Le 11 juillet 2011 à 13:19 En réponse à : Les adieux de Luc Adolphe Tiao aux Burkinabè de France

    Il y a un passage intéressant « Le souci du président Compaoré n’est pas forcément ce qu’on peut croire, il veut surtout doter notre pays d’institutions fortes au moment de quitter le pouvoir », c’est que les populations veulent entendre. Qu’il le dise et qu’il mette en place des institutions fortes et la classe politique va se redessiner pour une vraie conquête du pouvoir.

  • Le 11 juillet 2011 à 14:29, par Super En réponse à : Les adieux de Luc Adolphe Tiao aux Burkinabè de France

    A mon excellence monsieur le premier ministre,à quand porteriez-vous à notre humble connaissance la liste complète de ces 550 pseudo militaires radiés ?Je suis particulièrement toujours sous le choc traumatique de leurs actes indignes et ça sera une façon pour moi de surmonter mon traumatisme en voyant la liste de ces bannis de l’armée.Merci d’avance monsieur le PM et courage car nous avons besoin de vous pour qu’ensemble,le Burkina soit enfin un pays de droit

  • Le 11 juillet 2011 à 17:27 En réponse à : Les adieux de Luc Adolphe Tiao aux Burkinabè de France

    Mr. le journaliste, il n’ya point de Burkinabe de France, seulement des Burkinabés en France. Merci !

  • Le 11 juillet 2011 à 22:58 En réponse à : Les adieux de Luc Adolphe Tiao aux Burkinabè de France

    Radier 550 soldats rebels de « l’armée »

    Voici encore une grosse va ou vient de commettre. 550 soldats radiés, c’est lacher dans la nature 550 éventuels brigands et coupeurs de route. Surtout avec toutes ces armes dispersées, non rendues après les casses de dépôts.

    Le mieux c’était de les maintenir dans l’armée pour mieux les controler car il n’y a pas assez de gendarmes et de policiers pour veiller sur nos villes et nos routes.

    Le gouvernement a opter pour la solution de facilité. Il n’a pas analysé suffisamment les conséquences de cet acte.

    Que Dieu sauve le Burkina

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