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Déclaration du 10 juin 2011 de la société civile à propos des réformes politiques

Publié le vendredi 10 juin 2011 à 04h13min

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« L’histoire de notre pays est émaillée de crises socio-politiques multiples, plus graves les unes que les autres, avec des particularités et des solutions liées à la nature des régimes qui les ont assumées. A l’origine de telles crises, et cela est principalement vrai pour celle présentement vécue, s’inscrivent la rupture de confiance et le déficit de dialogue entre les acteurs politiques et les populations d’une part et d’autre part entre le pouvoir et l’opposition. Or, la confiance, source de légitimité et le dialogue sont le fondement de tout Etat moderne, et démocratique dont la gestion repose, avant tout, sur la responsabilité. Aussi, l’espoir de vivre enfin une véritable démocratie, appelle à stigmatiser les solutions expéditives ou militaires auxquelles hélas, notre pays a payé un lourd tribut ».

Ces propos du Collège de Sages méritent d’être rappelés tant ils résonnent avec une pertinente actualité. La crise sociopolitique qui a cours dans notre pays, marquée par des formes de plus en plus violentes de lutte se traduisant par la destruction de biens publics et par des soubresauts militaro-politiques suivis d’actes de pillage et de vandalisme, est la résultante d’une gouvernance sous-tendue par une culture politique monopolistique et d’exclusion, qui au fil du temps a engendré, frustration, exaspération et lassitude.

Cette manière singulière de gérer le processus démocratique a entraîné une désaffection profonde des citoyennes et citoyens à l’égard du débat public, perceptible à travers des signes patents comme la faiblesse de la participation électorale, le manque d’ardeur au travail, l’incivisme, le manque évident de respect vis-à-vis des symboles de l’Etat, l’érosion de l’autorité de l’Etat, la perte de crédibilité des relais habituels de la contestation sociale, la paupérisation croissante des populations, la perte des valeurs fondatrices de la société, le déficit de crédibilité du système judiciaire, etc. En somme, le constat est celui d’une démocratie à basse intensité citoyenne.

Voilà pourquoi il est heureux que les gouvernants de l’heure, face à la crise profonde qui secoue notre société, aient changé leur fusil d’épaule et se proposent d’explorer les vertus du dialogue. Cependant, une chose est d’appeler au dialogue une autre est d’asseoir un véritable dialogue. Comment dialoguer, avec qui et dans quel but ? Telle est la question centrale qui si elle est escamotée risque de semer dans le corps social les germes de la suspicion, de la division et de la haine.

En effet, l’histoire politique de la IVème république est riche de ces structures et exercices ayant suscité un grand espoir et une adhésion populaire et qui à l’arrivée se sont révélés des manœuvres politiciennes sans véritable prise sur notre démocratie. Il en a été ainsi du Collège de Sages, du Comité National d’Ethique, du MAEP dont les pertinentes conclusions ou productions ont été remisées aux oubliettes une fois le vent de la crise et de la délégitimation passé. Ces entourloupes politiciennes ne peuvent que saper la confiance et installer la méfiance quant à la bonne foi du gouvernement à initier un dialogue constructif, profond et effectif.

C’est l’impression qui se dégage à l’examen du format de dialogue proposé par le gouvernement à travers le Conseil Consultatif sur les Réformes Politiques (CCRP). En effet il ressort de l’analyse du décret N°2011-262/PRES/PM/MPRP portant création, attributions, composition, organisation et fonctionnement d’un Conseil Consultatif sur les Réformes que cette structure n’est pas à même de conduire un véritable dialogue inclusif et participatif. Bien au contraire !

A la vérité, le CCRP a vocation à initier et conduire :

- un dialogue encadré et téléguidé : il est une structure du ministère chargé des réformes politiques (article 2) ; il est présidé par le Ministre d’Etat auprès de la Présidence chargé des Réformes politiques (article 5 in fine) ; c’est ce ministre qui par arrêté fixe les règles d’organisation des travaux du CCRP (article 15)

- un dialogue escamoté et superficiel : au regard de la profondeur de la crise, il est paradoxal que le CCRP ne dispose que d’un délai de 3 semaines pour compter de la date de son installation pour déposer son rapport définitif auprès du Président du Faso (article 13) ;

- un dialogue factice et spécieux : le décret ne fait aucune mention du sort qui sera réservé aux propositions consensuelles retenues. Tout au plus apprend-t-on (article 13) que le rapport définitif est déposé auprès du Président du Faso qui en fait ce qu’il veut. En cela le CCRP apparaît comme une boite à idées à charge d’élaborer une « shopping-list » à la discrétion du Président du Faso. Quand on sait le sort qui a été réservé aux travaux du Collège de Sages et du MAEP on est en droit de douter de l’aboutissement des conclusions.

Il apparaît, au regard de ce qui précède, que le dialogue auquel invite le CCRP est un dialogue biaisé, bancal et sans lendemain. Ce faisant, nos organisations ne sauraient cautionner ce qui ressemble par avance à une mascarade surtout à un moment où notre processus démocratique a besoin de réformes vivifiantes et non d’un ravalement de façade. Nous devons tirer leçon des errements du passé pour ne pas nous fourvoyer une fois de plus dans des impasses savamment construites.

C’est pourquoi, prenant en compte les enseignements du passé, nous, organisations de la société civile réunies au sein de la coalition des OSC pour les réformes politiques et institutionnelles :

* Rejetons le CCRP comme cadre de dialogue pour un véritable enracinement de la démocratie au Burkina Faso ;

* Exhortons le chef de l’Etat et le gouvernement à prendre la vraie mesure de la soif de changement pour asseoir un réel dialogue inclusif et participatif ;

* Réaffirmons notre attachement au contenu des rapports du collège de Sage et du MAEP bases incontournables pour des réformes patiemment mûries ;

* Engageons les différents acteurs à faire preuve de clairvoyance en vue de l’instauration d’un dialogue sincère débouchant sur des réformes complètes conformes aux ambitions de construction d’une démocratie véritable au Burkina Faso ;

* Appelons l’ensemble des forces démocratiques à se mobiliser pour la tenue des Etats généraux de la démocratie burkinabè gage de réformes abouties et globales.

Fait à Ouagadougou le 10 Juin 2011

Ont signé :

MBDHP, GERDDES Burkina, CGD, RADHO, MBEJUS, LIDEGEL, CEJ, FOCAL, SBM, UJAB, CN-OSC, ONG et les 52 signataires de la déclaration du 20 Mai 2011.


PS : Cette déclaration fait suite à celle du 20 Mai 2011 à l’initiative des partenaires de l’ONG Diakonia (à laquelle ont souscrit 52 organisations) et est portée par la Coalition des OSC pour les réformes politiques et institutionnelles, plate - forme ouverte à toutes autres organisations s’inscrivant dans une dynamique de recherche d’un dialogue sincère et fécond, avec en perspective, un atelier pour l’adoption proactive d’un cahier de propositions de réformes politiques et institutionnelles alternatives à inscrire sur l’agenda des états généraux de la démocratie, ainsi que des actions de plaidoyer/information/mobilisation.

L’Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 10 juin 2011 à 10:17, par AN En réponse à : Déclaration du 10 juin 2011 de la société civile à propos des réformes politiques

    Restons vigilents,l’heure des manipulations est révolue.il faut des réformes concrètes pour approfondir notre démocratie.vive le faso démocratique.

  • Le 10 juin 2011 à 14:04, par elcohote En réponse à : Déclaration du 10 juin 2011 de la société civile à propos des réformes politiques

    N gaow !! Dr BOBOGNESSAN t’a entendu ? je te disait quoi !!!!!

    Touche pas à mon article 37 !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

    sinon, OSC, Opposition, ANEB, UGEB, et nous les "on a plus rien à perdre, puisqu’on avait jamais rien eu" , tu nous verra sur ton chemin. passe nous dessus et modifie ton article 37 ; Mr Sinistre de l’article 37.

  • Le 10 juin 2011 à 17:50, par le bon citoyen En réponse à : Déclaration du 10 juin 2011 de la société civile à propos des réformes politiques

    L’éléphant n’a qu’à beau maigrir, il ne deviendra pas comme une chèvre (proverbe dioula).
    On ne peut pas attendre un changement radical avec ce régime. Il nous reste à prier dieu pour qu’en 2015, Blaise s’en aille. Sinon comment comprendre cet entêtement à vouloir instituer un CCRD alors que des propositions de réformes existent ?

    Blaise et ses acolytes doivent comprendre que les burkinabè sont comme cela. On vous a proposé le rapport du collège des sages, vous avez refusé, le rapport du MAEP, vous avez refusé et aujourd’hui vous voulez réunir les gens encore sur les mêmes sujets. Vous pouvez faire ce que vous voulez, le peuple vous observera car il sait qu’il a le dernier mot.

  • Le 10 juin 2011 à 18:01, par Koutou En réponse à : Déclaration du 10 juin 2011 de la société civile à propos des réformes politiques

    Je salue ce courage de la coallition des OSC. Son message est clair : Le pouvoir doit savoir qu’on peut tromper tout le peuple une partie du temps, qu’on peut tromper une partie du peuple tout le temps mais qu’on ne peut pas tromper TOUT le peuple TOUT le temps. Je voudrais ajouter aux documents de reference deja cités (rapp du collège des sages, MAEP) la declaration de la conference des évêques du BF. Tout y est également. Je crois que la récréation est terminée pour tout le monde. La seule issue c’est d’être honnête, de jouer franc-jeu. Personne ne boit l’eau par les narines dans ce Burkina.

  • Le 10 juin 2011 à 21:15, par un prevoyen En réponse à : Déclaration du 10 juin 2011 de la société civile à propos des réformes politiques

    bravo OSC une très sage decision restons evueiller.Blaise ;Bobognesan et ses alcolites doivent savoir que les burkinabes ne boivent pas de l’eau avec les narines.Tirez une leçon a la situation actuelle que nous VIVONS.Si vous aimez votre peuples ecouté ce qu’ils disssent.si non il y’aurra plus pire !!!!

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