LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

Côte d’Ivoire : Mamadou Koulibaly toujours égal à lui-même

Publié le mercredi 25 mai 2011 à 02h27min

PARTAGER :                          

La récente intervention, sur les ondes d’une radio internationale, du président de l’Assemblée nationale ivoirienne, Mamadou Koulibaly, n’a pas fait que situer davantage l’opinion sur la déconfiture du Front populaire ivoirien (FPI), parti de l’ancien président Laurent Gbagbo. Elle a aussi et surtout donné une idée de l’état d’esprit, des convictions politiques et idéologiques de l’actuel président de l’Assemblée nationale ivoirienne, en ces temps de grands changements en Côte d’Ivoire.

A priori, sur cette intervention, l’on peut être tenté de parler de revirement chez Mamadou Koulibaly. Surtout lorsqu’on l’entend dire ne pas en vouloir à la France de Sarkozy pour ce qu’elle a fait pour accélérer la chute de son mentor, ou quand il paraît bien s’accommoder du nouveau président élu ; lui qui, naguère, dans ses propos comme ses écrits, était farouchement contre une prise du pouvoir en Côte d’Ivoire par le leader du Rassemblement des Républicains (RDR) et anti-français.

Sur ce dernier point, il suffit de penser aux titrailles de certaines publications de M. Koulibaly : « La guerre de la France contre la Côte d’Ivoire » ou « La servitude du pacte de colonial ». Tous ces ouvrages, évidemment, sont loin de jeter des fleurs à Paris. Vu sous cet angle, certains peuvent légitimement s’interroger sur la fidélité de l’homme à ses idées. Pour autant, doit-on en conclure qu’il a changé de cap ?
Rien n’est moins sûr en politique. Mais, à notre sens, Mamadou Koulibaly, demeure toujours, jusqu’à preuve du contraire, égal à lui-même : un anti- néocolonialiste, un homme convaincu de la capacité des Africains à se prendre en charge et à être maîtres de leur destin.

Dans sa logique, il ne s’agit pas pour le continent de se mettre en marge du monde, mais à agir de sorte à être considéré comme un acteur à part entière des processus de développement de l’humanité. En cela, les titres de certains de ses ouvrages sont suffisamment éloquents : « Le Libéralisme, Nouveau départ pour l’Afrique noire » ; « Sur la route de la liberté » ; « Afrique, Oser une nouvelle voie » ou encore « Leadership et développement africain ».

Brillant économiste panafricain désireux de voir le continent s’assumer, l’ex-ministre de l’Economie et des Finances poussera la réflexion jusqu’à proposer des pistes de solution aux dépendances monétaires des Etats africains. « La souveraineté monétaire des pays africains », ainsi s’intitule son ouvrage consacré à la question.
Et quand l’idéologue du Front populaire ivoirien dit aujourd’hui ne pas en vouloir à Paris, il faut aller au-delà des mots, comme l’expliquera lui-même, pour mieux saisir la profondeur de sa pensée.

En effet, il estime que c’est parce que les Ivoiriens ne se sont pas bien assumés que l’Hexagone a été obligé d’intervenir. Bien sûr, lorsque le vice-président du FPI parle ici d’Ivoiriens, il faut surtout comprendre les Ivoiriens qui ont sollicité l’aide de Sarkozy pour sortir le pays de l’impasse. Suivez mon regard.

Evidemment, dans le camp frontiste, l’on ne comptait pas du tout sur Paris pour dénouer la crise. Il fallait une fois encore s’assumer en tant qu’Ivoiriens. Et en ce qui le concernait, l’agrégé d’économie de l’Université d’Aix- Marseille III a avait jugé bon avec des camarades d’entamer secrètement une mission de bons offices auprès de Ouattara et de Gbagbo pour que les leaders politiques puissent se rencontrer, se parler et régler leur différend à l’ivoirienne.

Malheureusement, il n’a pas été écouté et sa mission est restée vaine.
En outre, Coulibaly n’a pas changé de principe quand il indique ne pas partager au fond l’idée d’un gouvernement d’union nationale, comme l’a souhaité le président Alassane Dramane Ouattara, dans le cadre de la réconciliation des Ivoiriens. Son principe, c’est que le pouvoir ne se saucissonne pas. Il se gère en entier et en toute responsabilité. Et c’est d’ailleurs au nom de ce principe qu’il s’était déjà opposé aux Accords de Linas- Marcoussis, tout comme à l’Accord de Ouagadougou qui ont préconisé des équipes gouvernementales d’ouverture pour sortir de la crise.

Pour lui, c’est parce que ses camarades ont souscrit à ces solutions compromettantes que le FPI se retrouve dans sa situation actuelle : sans pouvoir, décapité et accablé de tous les manquements et dérives. En homme bien, honnête et visionnaire, il n’aimerait donc pas faire aux nouvelles autorités ce qu’il avait voulu éviter à ses compagnons en refusant de cautionner les initiatives antérieures visant la mise en place de gouvernements à irresponsabilités illimités.
Toutefois, en bon démocrate, le président par intérim du FPI se dit prêt à accepter une entrée de son parti à un gouvernement d’union nationale au cas où la proposition serait avalisée par la base.
Et certainement, c’est encore au nom de son attachement au principe démocratique qui veut que les vaincus s’inclinent devant la victoire des vainqueurs du jeu électoral, que M. Coulibaly ne se gêne guère aujourd’hui d’appeler l’ex- paria, Alassane Dramane Ouattara, « Le Président de la République ».

En démocratie, il faut savoir parfois jouer beau perdant. Accepter sa défaite aujourd’hui, c’est déjà préparer sa victoire de demain. A cet égard, Mamadou Koulibaly a certes changé de ton, d’approche, compte tenu de l’évolution de la situation politique dans son pays. Mais il reste fortement ancré dans ses convictions et idéologies politiques.

Grégoire B. BAZIE

Lefaso.net

PARTAGER :                              

Vos commentaires

  • Le 25 mai 2011 à 12:22, par Raogo En réponse à : Côte d’Ivoire : Mamadou Koulibaly toujours égal à lui-même

    En démocratie, il faut savoir parfois jouer beau perdant. Accepter sa défaite aujourd’hui, c’est déjà préparer sa victoire de demain. A cet égard, Mamadou Koulibaly a certes changé de ton, d’approche, compte tenu de l’évolution de la situation politique dans son pays. Mais il reste fortement ancré dans ses convictions et idéologies politiques.
    c’est cela etre Democrate ! vivement de telles Monsieur dans notre cher Faso !

  • Le 25 mai 2011 à 12:33, par L’esprit En réponse à : Côte d’Ivoire : Mamadou Koulibaly toujours égal à lui-même

    Bonjour,
    Merci pour cet article qui ne fat que rendre à César ce qui est à César ;
    M. COULIBALY est un homme politique exceptionnel,courageux et convaincu.
    En ce sens, il est le seul qui peut encore jouir d’une crédibilité en Cote d’ivoire !!
    Merci !

  • Le 25 mai 2011 à 13:00, par O.Abdou En réponse à : Côte d’Ivoire : Mamadou Koulibaly toujours égal à lui-même

    Je connais un peu ce grand homme économiste agrégé dès l’age de 30 ans et et homme de paix que certains qualifient à tord de nationaliste et d’extrémiste au regard de ses positions tranchées quant il parle de la France. J’ai reçu une formation en Août 2009 où il a été co-formateur sur les idées de liberté dans toutes ses dimensions. C’est d’ailleurs à l’issue de cette formation que j’ai reçu pas mal d’écrits de Mamadou Koulibaly parmi lesquels figurent l’essentiel de ceux cités par le journaliste. A lire ces ouvrages de près on se rend compte surtout celui sur "les servitudes du pacte colonial" que tromperie, simulation, dissimulation sont monnaie courante de la France à l’égard de ses ex colonies. Mamadou Koulibaly a démontré avec des arguments solides le rôle joué par la France dans le déclenchement de la crise du 19 septembre 2002.Le sens de l’engagement de Laurent Gbagbo dès qu’il est arrivé au pouvoir a été de rompre avec les vestiges du pacte colonial afin de relancer son pays sur la voie du développement. Chirac, président français d’alors a trouvé entre temps que le pacte colonial était mis en mal par le régime en place en ce moment, régime qu’il a alors qualifié d’inexpérimenté, d’anarchiste à vouloir refonder l’ordre établi depuis (il s’agit du pacte du colonial), la suite on la connait.
    Sur le plan économique, l’existence du fameux compte d’opération logé dans le trésor public français ne contribue qu’à accentuer notre marasme économique.En plus ce sont les intérêts générés(issus de placement) par ce compte d’opération qui nous reviennent souvent sous forme d’aide public au développement. Le taux de conversion
    1 euro= 655,957 FCFA a été fixé sur quelle base ? pourquoi ? Aucun document à ma connaissance ne le dit. Le taux de dévaluation de 50% du FCFA devait il être uniforme pour chaque ex colonie ? Des taux modulés étaient certainement mieux adaptés. mais tout ça a été mécanique.
    J’ai pris connaissance du pacte colonial signé entre la Côte d’Ivoire sous Houphouet Boigny et la France, mais pour mon pays le Burkina Faso je sais pas si un tel document est gardé top secret puisque je suis à sa recherche depuis. Mais je suis convaincu que c’est pratiquement les mêmes accords bidons qui ont été signés avec ces ex-colonies à quelques différences près. A quand l’Afrique ? a écrit Ky Zerbo.
    Le problème de développement de l’Afrique est moins un problème de ressources qu’un problème d’élites, de leadership.Pourquoi un pays comme la RDC, le Gabon,l’Angola ayant des sous sols riches en ressources naturelles sont encore classés parmi les plus pauvres au monde ? Pourquoi la suisse, le Japon n’ayant pas de ressources naturelles particulières sont parmi les plus développés ? La réalité est simple et nous contredit : le leadership africain a été défaillant.
    Mamadou Koulibaly est un visionnaire hors pair et la jeunesse africaine devrait s’inspirer de ses actes.
    Il y’ a tellement de choses qu’on peut dire...
    Vive l’Afrique.

    • Le 25 mai 2011 à 13:37 En réponse à : Côte d’Ivoire : Mamadou Koulibaly toujours égal à lui-même

      Je suis d’accord avec vous sur le principe : il faut préserver les intérêts de l’Afrique dans nos accords avec les puissances coloniales et autres.
      Mais il ne faut pas perdre de vue que les équilibres ou, du moins les déséquilibres que nous dénonçons, doivent être remplacés par un meilleur système. Il ne suffit pas de critiquer et de dononcer, il faut surtout, à l’ouvrage, montrer qu’on travaille pour l’intérêt de tous et restez constant dans ses convictions.
      Nous constatons malheuresement que les régimes prétendument anti-impérialistes pèchent cruellement par infidélité aux principes qu’ils dénoncent à longueur de journées : comptes à l’étranger, corruption, détournement de deniers publics, népotisme etc.. En sommes, ils apportent de mauvaises réponses à des questions très pertinentes !!!!

    • Le 25 mai 2011 à 14:47, par Alexio En réponse à : Côte d’Ivoire : Mamadou Koulibaly toujours égal à lui-même

      C est clair et simple pourquoi on est en retard en afrique par rapport au Japon et autres soit-disant developpes.L Afrique n a pas sa langue ecrite comme les pays que ses pays.La mathematique,l electronique,les sciences socio-politiques etc.Si elles etaient dans nos langues aujourdhui on allait pas parler de l ecole coloniale,d analphabetes.prendre l exemple sur les pays arabes d afrique comme le Maroc.l algerie,l egypte,la Tunisie.En Asie,la chine, l Inde etc tous ses pays ont leurs langues,oral qu ecrit voila la difference.

  • Le 25 mai 2011 à 14:29 En réponse à : Côte d’Ivoire : Mamadou Koulibaly toujours égal à lui-même

    Moi, j’aurais préféré des qualificatifs comme honnêteté, sincérité dont on attend surtout des hommes politiques. Avec ces qualités, l’Afrique serait mieux, et Mamadou K. aurait démissionné depuis longtemps du FPI après avoir constaté que ce parti avait dévié de sa mission.
    Par ailleurs , on ne l’a même pas entendu demander pardon aux ivoiriens pour les récents évènements.Il s’est trouvé que quelques anciens miliciens qui se sont humiliés pour le faire. Je salue plutôt ce genre de comportement.

  • Le 25 mai 2011 à 15:23, par OKOK En réponse à : Côte d’Ivoire : Mamadou Koulibaly toujours égal à lui-même

    Vous allez finir par encenser Gbagbo et autres. la France aurait-elle intervenu en RCI si les ivoiriens n’étaient pas tués par leur gouvernement ? La rebellion de 2002 aurait-elle eu lieu si des populations entières n’étaient-elles pas privée de leur citoyenneté ? ... La cause de nos problèmes ne sont pas ailleurs mais chez nous. Quelque soient les accords sordides avec la France, ce sont nos dirigeants qui provoquent tout. Le bon critère pour juger du leadership sera le respect de ses concitoyen à commencer par le respect de leur droit à la vie. Je préfère le diable venu d’ailleurs que le patriote qui tue les autres chez moi.

  • Le 25 mai 2011 à 21:32, par N’dabi En réponse à : Côte d’Ivoire : Mamadou Koulibaly toujours égal à lui-même

    A mon avis cet homme n’est pas digne des qualificatifs que vous l’attribuez, car,il aurait dû en bon visionnaire constater la zénophobie que son parti le FPI alimentait en son temps. Et dès lors, il aurait dû prendre ces distances et oeuvrer dans le bon sens.
    Ainsi, si ses écrits peuvrent l’honorer, il en est pas de même dans son comportement.

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique