LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

Crédit « Res publica » aux producteurs : Un prélude à l’indépendance financière

Publié le jeudi 19 mai 2011 à 00h48min

PARTAGER :                          

La promotion des activités rémunératrices de revenus constitue l’un des axes d’intervention de l’ONG française « Res publica » dans les communes rurales de Pella, Nanoro et Soaw. Grâce à des prêts octroyés sans intérêt, des hommes et des femmes améliorent leurs conditions de vie. A l’instar de nombreuses localités du Burkina Faso, la pauvreté monétaire représente l’une des faces les plus illustratives de la misère humaine dans les communes rurales de Pella, Nanoro et Soaw. Le microcrédit est l’une des armes utilisées par l’ONG française, « Res publica », pour insuffler un contexte de création des richesses.

Les activités rémunératrices de revenus connaissent un engouement particulier. La ligne de crédit ouverte en 2008 s’adresse aux acteurs d’une variété de secteurs d’activités dont les plus en vue, l’embouche bovine, la préparation de boisson locale (dolo), la maraîchéculture, la production vivrière, la riziculture, la restauration, le commerce du beurre de karité, la transformation des produits locaux, etc. Les ressources allouées évoluent d’année en année. Ainsi le crédit maraîcher a nécessité 4 749 050 F CFA en 2008, 6 913 865 F CFA en 2009 et 460 000 F CFA en 2010 avec un taux de remboursement compris entre 66,32 % et 100 %. Le prêt accordé aux riziculteurs s’opère en nature (dotation en engrais) et se rembourse sous forme de troc (un sac de 50 kg d’urée ou de NPK équivaut à 100 kg de riz paddy à la récolte). Cette forme de microcrédit a mobilisé 159 sacs en 2009 et 162 en 2010 pour un taux de remboursement de 100%.

Les crédits alloués dans le secteur agricole peuvent être, toutefois, perturbés par la qualité de la campagne. « La difficulté majeure de la microfinance dans l’agriculture résulte du fait que le recouvrement est susceptible d’être entravé par la mévente. En cas de mauvaise récolte, le processus de remboursement risque de chambouler », avertit Hubert Ouédraogo, Responsable du Programme de microcrédit.

« Res publica » n’étant pas une institution de microfinance, son intervention concerne essentiellement les personnes qui n’ont pas accès aux structures classiques de microcrédit. Son accompagnement vise à préparer les producteurs et les jeunes, essentiellement des parents d’élèves, à bénéficier des prêts des caisses populaires. De même, le riz troqué contre des dotations en engrais n’est pas commercialisé sur le marché traditionnel. Il est destiné aux cantines endogènes des écoles primaires publiques des zones d’intervention de l’Association. Ainsi, les élèves consomment et soutiennent les productions de leurs parents. Du coup, le riz produit localement s’assure d’un écoulement certain.

Dans la relation « créancier-débiteur », « Res publica » privilégie avec les contractants, un dialogue franc axé sur une compréhension mutuelle. Au regard de la mauvaise saison de 2009, l’ONG a consenti le remboursement des prêts sur un délai exceptionnel de deux ans au lieu d’un. Cette épreuve n’a pas entravé les crédits individuels.

Petit argent, gros bénéfices

En 2009, 3 270 000 F CFA ont été alloués à 34 producteurs, 4 935 700 F CFA en 2010 à trois producteurs, 247 500 F CFA en 2011 pour une personne. Avec le prêt de 3,3 millions F CFA obtenu en 2010 remboursable en trois ans, Marcel Kientéga de Nazaonga dans la commune rurale de Nanoro a acquis une décortiqueuse de riz paddy. En plus de ses activités de maintenance de forage pour lesquelles "Res publica" a débloqué 750 000 F CFA pour assurer sa formation et sa dotation en matériel, ses nouvelles occupations lui procurent de réels revenus. En 2010, sa machine a décortiqué 17 t de riz paddy et 16 t en 2010 à raison de 25 F CFA le kg décortiqué. Cette belle embellie des affaires agricoles a contribué à rembourser déjà 2 millions sur les 3 millions empruntés. « De nouvelles connaissances et de nouvelles activités sont toujours source de bénéfices. Elles ont conforté ma place de chef de famille car avec mes revenus, mes responsabilités en matière de nourriture, de santé ou d’éducation sont pleinement assumées », rappelle Marcel Kientéga, réparateur de forages et propriétaire d’une décortiqueuse.

En s’appuyant sur les opportunités de leur environnement immédiat, des initiatives de productivité sont entreprises pour fructifier et rembourser les prêts. Ceux octroyés aux femmes revêtent une attention particulière. Sept groupements féminins ont bénéficié de 3,3 millions F CFA en 2009 et six de 770 000 F CFA en 2010. « Res publica a permis à un grand nombre de femmes d’ici d’accéder aux sources de crédit pour être productrices. Aussi modestes qu’elles puissent paraître, les ressources allouées produisent de gros bénéfices », convainc Mme Léonie Bazié/Kanzié, du groupement des femmes du secteur N°4 de Nanoro et gestionnaire du point de ventes des produits mis au point par ses camarades. Cet ancien magasin de « FasoYaar » a été réhabilité et ouvert, le 8 mars 2011, par l’ONG pour servir de vitrine aux fruits des activités génératrices de revenus. Là sont stockés et proposés à la clientèle du savon, de l’huile de graine de Neem, de la purée de tomate, de la poudre de feuille de Moringa, etc. Environ une centaine de femmes regroupées au sein de sept (7) associations réparties dans la seule commune rurale de Nanoro expose leur création. Après avoir initié les postulants à la production de certaines denrées, la manne leur a agréablement souri. Avec une mise de 50 000 F CFA pour la transformation de la tomate en purée et 200 000 F CFA pour l’extraction de l’huile de neem, le groupement féminin du secteur N°4 de Nanoro tire son épingle de jeu. Cet investissement de « Res publica » a aidé ses onze membres à produire 130 boites de purée de tomate à raison de 1 000 F CFA chacune et 7,5 bidons de 20 litres d’huile de neem à raison de 50 000 F CFA chacun.

Comme la « Grameen Bank » de Muhammad Yunus au Bengladesh

Etalé sur un an, le remboursement exempt de tout intérêt pour les prêts accordés aux femmes a un impact réel sur leurs efforts à sortir de la pauvreté. « Les activités de microcrédit répondent à un souci de pérenniser l’investissement et de créer les conditions d’autofinancement », indique André Kaboré, le représentant de « Res publica » dans la zone Pella-Nanoro-Soaw. Les bénéfices réalisés permettent de constituer un capital pour les années suivantes et souvent rémunérer chaque membre sous forme de dividendes. Depuis trois ans, les douze membres du groupement féminin « Kiswendsida » s’investissent dans les deux activités majeures : la transformation de tomates et l’extraction d’huile de Neem. Les résultats atteints sont à la satisfaction des bénéficiaires. Et le taux de remboursement rassure pourvoyeur et bénéficiaire.

Un regroupement féminin de la commune rurale de Pella a même réalisé la prouesse de rembourser un prêt de deux millions en onze mois. Cette marque du respect des engagements a tellement ému l’époux de la première responsable de l’ONG qu’il a tenté une expérience personnelle en octroyant 300 000 F CFA à une Association de mères éducatrices (AME) à Sèguèdin dans la commune rurale de Soaw afin qu’elle finance ses activités génératrices de revenus. « Nos activités ont conforté notre rôle dans la famille. Notre indépendance et notre autonomie financières se sont accrues. Nous disposons maintenant d’un pouvoir de participation financière aux besoins du ménage et de nos enfants », raconte Mariam Kondombo, la présidente. A la date du jeudi 14 avril 2011, le site de vente propose à la clientèle 218 litres d’huile de neem à 3 000 le litre et 200 boites d’un litre de purée de tomate à 1000 la boite. Soit une immobilisation financière temporelle de 855 500 F CFA sans oublier que le renouvellement s’effectue chaque semaine. « Les femmes perçoivent leurs nouvelles occupations comme une source de libération d’un fardeau de l’inutilité dans la société. Dorénavant, elles disposent d’un créneau pour prendre part à la vie socioéconomique de leur environnement », rappelle Martine Bonkoungou, responsable des activités rémunératrices des femmes de « Res Publica ».

Jolivet Emmaüs (Joliv_et@yahoo.fr)

Sidwaya

PARTAGER :                              

Vos commentaires

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Burkina : Une économie en hausse en février 2024 (Rapport)