Ce qui est choquant et inquiétant dans cette affaire, c’est que ce sont des cadres et des salariés de la FFF qui ont osé aborder un sujet aussi grave dans une instance qui, jusque-là, a su symboliser le rêve français. Le sport, et surtout le football, a été et est toujours un facteur d’intégration. C’est le secteur où s’exprime le particularisme français en Europe : cette diversité et cette mixité culturelles qui font que cette nation ne ressemblera jamais à une autre sur le vieux continent. C’est l’aboutissement d’un processus historique, politique et social dont les traces les plus évidentes se retrouvent dans la colonisation.

Cette mixité est un héritage qu’il faut savoir assumer malgré les soubresauts du moment et éviter de céder aux sirènes de la discrimination et de l’exclusion. Malheureusement, la droite française, à force de vouloir couper l’herbe sous le pied du Front national, propage à tous vents ses idées, sans toujours se soucier ni de leur dangerosité ni de leur impact. Au nom de quoi doit-on interdire ou limiter la sélection de joueurs d’origine noire ou maghrébine dans les centres de formation et dans les sélections nationales ? Parce qu’ils sont moins français que les autres ?

Cette histoire n’est pas sans rappeler le tragique concept de l’ivoirité qui a conduit la Côte d’Ivoire là où elle se trouve aujourd’hui. Ce scénario est naturellement à exclure en France mais, le simple fait que des personnes, à de hauts niveaux de responsabilité, aient pensé à cette éventualité, fait frémir. On pourra dire merci à la taupe qui a éventé cette affaire car elle fait œuvre d’utilité publique.

Avec cette affaire qui fera tomber probablement quelques têtes de la fédération, le constat est fait que les idées du Front national gagnent du terrain. Il n’ est pas exclu que dans d’autres secteurs d’activités et au sein d’autres instances, cette réflexion entamée, il y a six mois au niveau du football, s’impose. Les quotas d’étrangers à l’immigration ou dans certains postes de travail dans des secteurs d’activités, passe encore. Mais des quotas entre Français noirs, blancs ou beurs, il y a un palier qu’il faut éviter de franchir au nom de l’unité et de la cohésion nationales.

Si les enfants issus de l’immigration devraient être ainsi discriminés, c’en serait alors fini du principe d’égalité que la République doit garantir à tous les citoyens. Peu importe l’origine des joueurs, pourvu qu’ils soient Français, compétents, talentueux et prêts à se battre pour la France et gagner avec elle comme l’a fait la génération "blanc-black-beur".

Par Abdoulaye TAO

Le Pays