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MANIFESTATIONS VIOLENTES DES ELEVES DE DEDOUGOU : Des sacrifices pour conjurer le mauvais sort

Publié le mercredi 27 avril 2011 à 01h44min

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En dépit des appels au calme et à la retenue des autorités coutumières, religieuses et administratives, les élèves de Dédougou continuent de débrayer. Les manifestations ont dérapé le 13 avril 2011 par des actes de vandalisme du petit marché du lycée municipal et du domicile de l’ambassadeur du Burkina en Libye. Face à cette situation jamais vécue à Dédougou, les coutumiers de la cité de Bankuy ont organisé le 21 avril 2011 des rites sacrificiels. Il s’est agi d’une procession de masques en feuilles sur l’ensemble des sites sacrés de la ville et d’offrandes de poulets aux "Nansiè" (1) afin d’exorciser les esprits pour un retour à la paix.

Pathétiques, les rites sacrificiels des coutumiers de Dédougou pour exorciser les esprits du mal suite aux manifestations violentes des scolaires l’ont été en cette matinée du 21 avril 2011. Du Gnilé au Loboa en passant par le Lognou, le Doosin etc., des poulets (plus d’une vingtaine) ont été offerts aux "Nansiè". Le tout a été accompagné d’incantations, de cris et de danses rituelles des masques en feuilles. Selon Kaza Kondé, le forgeron en chef qui a conduit de bout en bout le rite, l’objectif recherché n’est autre que de solliciter les mânes des ancêtres pour un retour à la paix.

Prenant à témoin les sages et autres notables de l’ensemble des 37 villages environnants, il s’est exprimé en ces termes : "Depuis la création de Bankuy, nom authentique de Dédougou, jamais nous n’avons assisté à des actes de vandalisme qui ont perturbé la quiétude des populations de Dédougou. Des manifestations de scolaires et de la société civile, nous en avons vu. Mais jamais, au grand jamais, des domiciles privés ou des édifices publics n’ont été la cible des manifestants. Pour éviter qu’on ne sème la graine de la haine, de la violence, de la division et pour un retour à la paix, les coutumiers ont décidé de prendre leurs responsabilités pour faire honneur et respecter la volonté de Koé, le fondateur de Dédougou."

Gare à celui qui s’entêtera !

Le chef forgeron a poursuivi en rassurant les uns et les autres que cette cérémonie ne vise aucune personne prise individuellement. "Ce qui est passé est passé. Et nous demandons au Dô de pardonner tous ceux qui, de près ou de loin, ont semé le désordre durant tout ce temps. Nous osons espérer que chacun saura raison garder pour un repentir définitif. Cependant, après ce rite, toute personne qui s’entêtera à casser, à brûler ou à perturber les cours et la quiétude des populations sera responsable de ce qui adviendra." Sans vouloir dévoiler les éventuels châtiments, le forgeron en chef nous a simplement demandé d’observer le déroulement du sacrifice qui consiste à tenir le poulet par les pattes et de cogner violemment sa tête sur le fétiche. Il a également prévenu que les conséquences sont, hélas, inéluctables.

Des poulets ont été sacrifiés tout autour du lycée municipal de Dédougou, considéré comme l’épicentre des manifestations, pour conjurer les mauvais esprits. Au-delà de la cité de Bankuy, les coutumiers disent que la crise que vit le Burkina les inquiète à plus d’un titre. C’est pourquoi ils disent avoir également invoqué les mânes de leurs ancêtres qui ne sont que des dieux protecteurs pour un retour à la paix dans toutes les localités du Burkina. Cette sortie exceptionnelle des masques à cette période à Dédougou n’a laissé personne indifférent et les badauds étaient tenus loin. Seuls les initiés débarrassés des vêtements rouges et des chaussures pouvaient s’approcher des sites des autels de sacrifices. Pour Lombo Dayo, chargé du protocole du chef de canton de Dédougou, tous les allogènes ont souscrit à l’idée du rite.

Il a demandé aux élèves d’entendre raison en reprenant immédiatement les cours au risque de compromettre leur chance aux examens et concours. De même, il a invité ceux ou celles qui, selon des rumeurs, devaient incendier des domiciles et des édifices privés et publics à renoncer à leur projet. "La machine des coutumiers est en marche pour apporter sa contribution au retour de la paix à Dédougou et partout au Burkina mais aussi pour punir tous ceux qui auront une conduite maladroite pouvant compromettre l’avenir de nos enfants", a-t-il martelé. Les délégations de l’ensemble des 37 villages environnants de Dédougou qui ont assisté à ces rites devraient à leur tour faire la même chose chez eux.

Serge COULIBALY

Le Pays

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