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Démonétisation : Cacophonie autour d’une opération

Publié le lundi 27 septembre 2004 à 07h57min

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Dessin de JJ

En mondovision depuis sa terre natale, le grand banquier de l’Afrique de l’Ouest, Charles Konan Bany, annonçait le 31 août 2004 que, pour compter du 15 septembre, son institution entreprendrait de retirer du circuit monétaire tous les billets arrivés dans nos porte-monnaies en 1992.

Sont concernées par l’opération les coupures allant de 500 FCFA à la plus grosse jusque-là, celle de 10 000 balles ou, pour épouser l’esprit de certains milieux, le "tais-toi".

Décision effective puisqu’à la date indiquée, même si les gens ne se bousculèrent pas devant les guichets, on vit çà et là quelques grands commerçants ou leurs émissaires accomplir le rite. Pour les autres, le 31 décembre, c’est encore loin et l’on peut toujours attendre. Même si cela leur sera des plus préjudiciables au regard de la tournure qu’a prise l’événement.

Car, en effet, beaucoup risquent de se retrouver avec des billets sans valeur au bout du compte pour diverses raisons. Parmi celles-ci, la réticence, justifiée ou non de commerçants à encaisser tout billet de la série A c’est-à-dire destiné à la Côte d’Ivoire. Eh oui ! A cela, personne n’échappe, même celui qui est détenteur des tout nouveaux billets. D’explications, on en entend d’officieuses et de non officielles : ainsi, à Bobo où la liste des "papiers" suspects aurait vu le jour, on avance la proximité de la ville avec celles qui ont connu des casses de banques en Côte d’Ivoire voisine.

Même son de cloche à Ouagadougou, où certains n’hésitent pas à prétexter du passage de Sia Popo Prosper dans la capitale pour justifier leur méfiance. Tant et si bien que tout le monde voit derrière tout billet de la série A du papier-monnaie à même de conduire son détenteur dans quelque salle obscure d’une prison. Résultat : le client tend sa "feuille", attend l’aval, après vérification par le commerçant d’une liste de billets étiquetés collés au fond de sa boutique, avant d’être servi.

Pourtant, que de pays sont déjà passés par des opérations analogues sans trop de cacophonie ! Il a suffi pour cela un moratoire raisonnable appuyé d’une sensibilisation conséquente de la part des institutions bancaires. Or, tel ne semble pas avoir été le cas pour la présente où, à peine énoncée, la mesure entrait en vigueur avec un délai d’exécution qui nous colle aux fesses comme pour l’exécution d’un chantier de travaux publics.

Et si la BCEAO continue de garder le silence et de camper sur ses positions, personne ne s’étonnera qu’au soir de la Saint-Sylvestre, le bilan n’incite guère aux congratulations. Car pas même les communiqués d’information ne semblent venir à bout des irréductibles, qui ne jurent que par d’autres séries que la "A". D’où la nécessité d’une autre approche au regard des réalités de nos différents pays, où le bouche-à-oreille est le médium le plus écouté.

Aux dernières nouvelles, l’institut d’émission s’est certes fendu d’un communiqué dans lequel il indique en substance que les billets suspectés ont toujours cours légal dans tout l’espace UEMOA, où ils conservent leur pouvoir libératoire jusqu’au 31 décembre 2004, mais il faut attendre d’en voir l’effet, tant la psychose est solidement installée.

Rabi Mitibkèta
Observateur Paalga

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