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Démonétisation dans l’espace UEMOA : Les victimes de la "série A"

Publié le vendredi 24 septembre 2004 à 06h17min

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L’opération de démonétisation de la gamme de 1992 crée une race de consommateurs malheureux, coupables de posséder des billets de la "série A" estampillés Côte d’Ivoire. Entre les humiliations, ceux-ci sont accusés à tort de faussaires, tellement la série A suscite la peur chez les commerçants.

Depuis le 15 septembre 2004 (et ce jusqu’au 31 décembre de la même année), la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) procède à la démonétisation des coupures de 1992. Sont concernés par cette opération, les billets de 10 000 F, 5 000 F, 2 500 F, 1 000 F, 500 F.

L’opération a cours dans les huit pays de la zone franc de l’Union économique et monétaire Ouest africaine (UEMOA). Il s’agit du Bénin, du Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire, du Mali, du Niger, de la Guinée Bissau, du Sénégal et du Togo. Selon les prévisions de la BECEAO, environ 850 milliards de F CFA devront, à travers cette opération, être "déclassés". Le pari est possible car, une semaine après le début de l’opération, plus de 250 milliards de F CFA avaient déjà été récoltés sur toute l’étendue de l’espace UEMOA.

Mais pendant que la BECEAO se frotte les mains et se félicite pour ce bon départ, les consommateurs ici au Faso, triment. Car une rumeur insidieusement distillée a envahi les grandes villes du Burkina Faso (Bobo-Dioulasso, Ouagadougou).

En une traînée de poudre emportée par un cyclone, la rumeur s’est répandue dans tous les coins et les recoins du pays. A telle enseigne qu’on ne sait plus où mettre son CFA. Les billets de série (de 10 000 F, 5 000 F, 2 500 F, 1 000 F, 500 F ) ne sont plus acceptés. Au début, c’était seulement quelques commerçants qui les refusaient. Mais maintenant c’est presque devenu général. De la vendeuse de soupe au grossiste.

Ceux qui ne sont pas au courant se font avoir.

Faut-il accepter la "série A" ou non ?

Après avoir fini de consommer dans un restaurant, en compagnie de sa dulcinée, un jeune homme a essuyé la honte de sa vie. Car non seulement, le gérant a refusé son argent, mais en plus, il l’a taxé de "faux type, d’escroc, de faussaire, de voleur" . Il a échapé de peu à un passage à tabac. Le "tort" du monsieur, c’est d’avoir, après consommation, donné un billet de 10 000 F de série A pour régler la note. Son "autre tort", c’est de n’avoir sur lui, au moment où le problème s’est posé que ce seul billet de 10 000 F. Par conséquent, il était "coincé". C’est en définitive, la jeune fille qui a tiré son copain d’affaires. Elle a emprunté de l’argent auprès d’un client du restaurant de ses relations pour régler la facture. L’incident était peut-être clos, pour ce couple. Mais ça ne l’est pas pour de nombreux consommateurs. Car combien sont-ils qui, à travers le pays continuent de faire les frais de la "série A".

Dans la ville de Ouagadougou circulent des coupures de "série A" qui semble-t-il, proviennent de sources douteuses. Les listes des mauvais billets établies par la BCEAO diffèrent d’une personne à l’autre et ne sont pas authentifiées. Certaines listes sont devenues illisibles car elles sont passées au moins une centaine de fois sous des photocopieuse. Malgré l’existence de ses listes d’origines diverses, certains commerçants disent ne pas avoir du temps pour faire des vérifications. Par conséquent, ils rejettent systématiquement toutes les coupures de "série A".

Tant que la Banque centrale ne se décidera pas à communiquer pour apaiser la tension, nul doute que les désagréments et autres frustrations auront toujours cours dans nos cités.

Certains citoyens de bonne foi se feront humilier, honnir ou même lyncher à cause des billets de "série A" .

Le mystère des billets de la "série A"

Mais d’où viennent ces coupures de "série A" tant décriées au Burkina Faso ? Pourquoi font-elles si peur aux commerçants ? Jusque-là ces questions restent sans réponse officielle. Alors, quand c’est ainsi, la rumeur prend le dessus. Dans la ville de Ouagadougou , plusieurs raisons sont avancées. La rumeur la plus persistante soutient que les coupures de série A sont celles que les rebelles ivoiriens ont emporté après avoir cassé à plusieurs reprises des agences de la BCEAO situées dans la partie nord du territoire sous leur contrôle. Estimées à plusieurs dizaines de milliards les sommes emportées seraient majoritairement de série A.

Si tel est le cas, pourquoi la BCEAO a-t-elle attendu la présente opération de démonétisation pour donner la réplique aux rebelles ? N’était-il pas plus judicieux de sonner l’alarme plus tôt afin d’éviter que les sommes volées ne soient "déversées" sur le marché ? S’il se trouvait qu’une telle mesure est prise pour contrer les rebelles, elle est à présent caduque car ceux-ci ont dû bénéficier d’assez de temps pour transformer leur butin en devises étrangères ou en biens immobiliers. De nos jours, ce sont des consommateurs "innoncents" qui paient cash ce forfait des rebelles ivoiriens. Les problèmes engendrés par la série A continueront de faire des victimes collatérales si des mesures drastiques ne sont prises.

Rabankhi Abou-Bakr ZIDA
rabankhi@yahoo.fr


Une liste de billets chez des commerçants

Des commerçants affichent sur leurs étagères une liste de numéros de billets de banque de la série A de la gamme de 1992, qu’ils consultent dès qu’un client leur remet un billet.

Certains prônent le tout-sécuritaire en affichant des notes comme celle-ci : "Nous vous informons que tous les anciens billets de la série A ne sont pas acceptés’’.

Sidwaya

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