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TUNISIE : Les limites du pouvoir de la rue

Publié le mardi 1er mars 2011 à 00h43min

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La révolution tunisienne vient de faire une nouvelle victime. En effet, le 27 février dernier, Mohamed Ghannouchi, Premier ministre de la Tunisie, a dû se résoudre à jeter l’éponge sous la pression de la rue. Issu du sérail du président déchu Ben Ali, Ghannouchi avait du mal à se faire accepter au sein des révolutionnaires du Jasmin. Sa présence à la tête du gouvernement qui a la lourde mission de conduire la transition, ne rassurait pas du tout la rue qui y voyait un risque de "détournement" ou de récupération de sa révolution.

Il a fallu cependant attendre encore que la rue bande ses muscles, que du sang coule encore pour que Ghannouchi se résolve à partir. Les politiciens tunisiens n’ont pas encore compris que le peuple est prêt à tous les sacrifices pour conserver ce pouvoir qui lui a été confisqué depuis des décennies. Il ne veut plus en être spolié ; plus jamais. C’est pour cette raison que toutes les personnes suspectées d’avoir fricoté avec l’ancien régime sont ouvertement décriées par la rue. Elles n’auront pas voix au chapitre. Telle semble être la volonté du peuple qui veut que cette transition ayant pour mission de réorganiser la dévolution du pouvoir d’Etat ne porte pas la marque ou l’influence des caciques du pouvoir de Ben Ali. Ces derniers, malgré un lourd passif à justifier, ne semblent pas non plus vouloir être mis hors-jeu.

Le RCD (Rassemblement constitutionnel démocratique), en tant que parti politique dominant, est peut-être mort politiquement, mais ses partisans voudraient bien survivre à cette révolution du Jasmin, d’une façon ou d’une autre, et se refaire une certaine santé politique si possible. La rue est vigilante, trop vigilante même au point de contester à nouveau la nomination du nouveau Premier ministre tunisien, Béji Caïd Essebsi. Ce vieil homme de 84 ans a beau avoir un curriculum vitae alléchant et le profil de l’emploi, il ne fait déjà pas l’unanimité.

L’erreur de casting est manifeste parce que l’homme, même si c’est de lointaine mémoire, a été un acteur du système. Deux autres ministres viennent également de démissionner. Autant dire que l’on devra, à ce rythme, faire table rase de l’équipe actuelle, en reprenant tout à zéro. Et si l’on n’y prend garde, le pays court tout droit vers une nouvelle contestation, comme s’il n’y a avait pas d’autres dossiers plus importants à gérer, notamment les propositions du Comité supérieur de réalisation des objectifs de la révolution et des réformes qui sont toujours attendues. Cette erreur de casting est à mettre à l’actif du président par intérim Fouad Mebazaa, sous la houlette duquel les espoirs de la révolution du Jasmin doivent être concrétisés.

Celui-ci aurait dû prendre le temps nécessaire pour consulter largement mais diligemment les forces en présence afin de nommer une personnalité moins marquée. En cela, il sera comptable des manifestations qui ne vont pas manquer de réclamer la tête du nouveau venu. Un cercle vicieux qui a le désavantage non seulement de fragiliser l’autorité qui a en charge la gestion de la transition, mais également, de jouer sur le retour des investisseurs et des tours opérateurs. En Tunisie, la rue veille donc sur sa révolution et les autorités de la transition doivent savoir l’écouter pour être en phase avec ses aspirations.

Dans le cas contraire, le risque est grand de voir la rue imposer son diktat chaque fois que de besoin. Et dans ce cas, on n’est plus très loin de l’anarchie. C’est en cela que résident les limites du pouvoir issu de la rue.

"Le Pays"

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Vos commentaires

  • Le 1er mars 2011 à 06:48, par sonia En réponse à : TUNISIE : Les limites du pouvoir de la rue

    encore un donneur de leçon. encore un qui s’autorise à s’ériger en donneur de bons et de mauvais points. encore un qui se croit autorisé à perler au nom du peuple et de la révolution. il y en a assez.

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