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Tout en s’efforçant de s’approprier la Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo entend en réécrire l’Histoire à son avantage (2/2)

Publié le lundi 21 février 2011 à 00h04min

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Il y a eu Félix Houphouët-Boigny, qui a gouverné la Côte d’Ivoire de 1960 à 1993 ; et il y aurait, désormais Laurent Gbagbo, son plus direct successeur.

Il a été élu à une présidentielle en 2000 (alors que son prédécesseur, Henri Konan Bédié, était un « successeur constitutionnel » qui a été élu, par la suite, en 1995 dans une élection sans réels adversaires) et, surtout, a été le challenger du « Vieux » dès la présidentielle de 1990. Houphouët a construit la Côte d’Ivoire ; Gbagbo s’est efforcé non seulement de faire vivre le multipartisme (dont il se veut « l’inventeur » dans le pays) mais plus encore d’apporter aux Ivoiriens une « souveraineté » que ne leur avait pas encore permis de conquérir une indépendance sous tutelle de la « Françafrique ». Bédié et son « tombeur », le général Robert Gueï, ont failli ; il reste donc dans l’Histoire de la Côte d’Ivoire deux géants qui se sont affrontés par le passé : Houphouët et Gbagbo. CQFD.

C’est le scénario que veut nous faire accroire celui qui a accédé au pouvoir, en 2000, dans des conditions « calamiteuses » et qui depuis a entrepris de s’y ancrer après avoir perdu la présidentielle de 2010 qui devait mettre fin à une situation transitoire qui aura duré cinq ans (et qui est loin d’être achevée). C’est pourquoi, pour Gbagbo, il était essentiel d’aller au bout de son « faux » deuxième mandat (2005-2010) et d’être le (faux) président en exercice lors des cérémonies du cinquantenaire de l’indépendance. La construction de sa légende et la réécriture de l’Histoire de la Côte d’Ivoire, Gbagbo l’a confiée à Laurent Dona Fologo, actuel président du Conseil économique et social mais, surtout, l’homme qui a été de tous les régimes (et de toutes les compromissions) depuis que la Côte d’Ivoire est indépendante. Fologo, ancien secrétaire général du PDCI-RDA, va donc préfacer le volumineux ouvrage intitulé « Houphouët-Boigny. Vie et témoignages », dont la mise en œuvre a été confiée à Liliane Lombardo.

Cette « productrice multimédia » (cf. LDD Côte d’Ivoire 0300/Mercredi 16 février 2011) a été l’instigatrice du « Paroles d’honneur » publié voici quatre ans (février 2007). Elle est une des personnalités de cette nébuleuse qui compose l’entourage de Gbagbo et a entrepris de tisser autour de la présidence de la République un réseau dense de personnalités à la dévotion du « maître » sans jamais perdre de vue que « charité bien ordonnée commence par soi-même ». On se souvient que « Paroles d’honneur » avait été co-publié par Ramsay et Pharos/Jacques-Marie Laffont. Jean-Marie Laffont s’est illustré en tant qu’éditeur avec des ouvrages consacrés à l’univers « people », ex-stars de la télé, de la chanson. Rien de bien consistant. Mais l’irruption de Lombardo dans l’entourage de Gbagbo va changer la donne. En janvier 2006, l’avocat Jacques Vergès avait publié un petit fascicule intitulé « Halte aux massacres en Côte d’Ivoire ». Alors que le pays était livré aux exactions des « Jeunes Patriotes » de Charles Blé Goudé, c’était une dénonciation des « Forces Nouvelles » de Guillaume Soro. L’éditeur en était Jean Picollec, une société d’édition dans l’orbite du groupe Bolloré qui s’est illustrée, par le passé, par ses positions anti-républicaines. Le livre de Vergès n’aura pas d’impact malgré les efforts de Lombardo pour trouver des témoignages accablants pour les FN. Le couple va revenir à la charge avec un ouvrage plus dense : « Crimes contre l’humanité. Massacres en Côte d’Ivoire ».

C’est, cette fois, Jacques-Marie Laffont qui en sera l’éditeur, en juin 2006, dans le cadre de Pharos. Mais c’est la co-édition de « Paroles d’honneur », six mois plus tard, qui le propulsera sur le devant de la scène africaine. Ce n’était pourtant pas sa première incursion dans les zones d’ombre de la brousse ivoirienne. En mai 2004, il avait été l’éditeur de « Scandales à l’Elysée », signé de Robert Montoya et de Véronique Anger. Montoya n’était pas encore la star médiatique qu’il deviendra par la suite. Mais il était déjà étiqueté « marchand d’armes ». Ancien gendarme né en Algérie, c’est en Corse qu’il se fera une solide réputation dans le « renseignement » et les diverses connexions dont l’île est emblématique. Ex-membre de la cellule antiterroriste de l’Elysée, il avait pris sa retraite de la gendarmerie pour se développer dans la « sécurité privée ». Une activité qu’il va développer en Afrique à partir de Lomé (Togo). Son nom va être associé à des opérations de recrutement de mercenaires et de livraisons d’armes. En 2002, au lendemain de la tentative de coup d’Etat en Côte d’Ivoire, il va être rapidement opérationnel pour soutenir Gbagbo dont il devient le conseiller militaire technique. Il sera mis en cause dans l’affaire du bombardement de Bouaké. Il est alors à la tête d’une entreprise qui emploie plus de 2.500 personnes dans sept pays africains !

Laffont (à ne pas confondre avec Michel Lafon ou Robert Laffont, tous deux également éditeurs) a édité le dernier livre de Christine Deviers-Joncour, celle qui se faisait appeler « la Putain de la République », mise en cause dans « l’affaire Elf », ex-maîtresse de l’avocat Roland Dumas qui s’est récemment déplacé à Abidjan avec Vergès pour apporter son concours à Gbagbo face à Ouattara. Laffont est aussi l’éditeur du livre signé par le président congolais Denis Sassou Nguesso : « L’Afrique : enjeu de la planète. Les défis du développement durable ». C’est également lui le promoteur du « Gotha noir de la France ».

Mais revenons à Liliana Lombardo. Après le débarquement très médiatisé, à Abidjan, des « papys » du barreau de Paris, Vergès et Dumas, il était espéré l’arrivée dans la capitale ivoirienne de sept personnalités françaises dont cinq députés UMP. Au programme des 5, 6 et 7 février 2011, deux rencontres avec Gbagbo, le président du Conseil constitutionnel, le président de l’Assemblée nationale, des membres de la Commission électorale indépendante, les ministres de la Défense, de l’Intérieur, des Affaires étrangères, Blé Goudé, etc. Invitation lancée (et payée) par l’Assemblée nationale ivoirienne. Tête d’affiche de cette balade : Jean-François Mancel. Ce député du RPR, dont il a été un des patrons, a été exclu de son parti en 1998 pour avoir appelé le Front national de Jean-Marie Le Pen à faire « partie de la droite de demain ». La justice s’intéressera à lui pour ses connexions avec la société Européenne de conseil et communication (Euro2C) dont les collaborateurs (notamment Alain Gouttman) ont été très présents sur le terrain angolais au temps de… Jonas Savimbi, le leader de l’UNITA. Mancel a été membre de la Coordination des observateurs franco-africains (COFA) qui a apporté sa caution, en juillet 2009, à l’élection « libre et démocratique » de… Sassou Nguesso au Congo. On retiendra surtout que lorsque l’Elysée a donné, in extremis, son veto au voyage des députés UMP, le seul commentaire alors rendu public a été celui de Liliana Lombardo : « Quel dommage que Jean-François Mancel n’ait pu venir s’informer et avoir une vision plus claire de ce qui se passe ici ».

On pourrait à l’infini tirer ainsi sur le fil des connexions franco-ivoiriennes qui composent une étonnante nébuleuse autour de Gbagbo. Car ce qui peut étonner, c’est que ses meilleurs soutiens viennent de la droite, de l’extrême-droite et du monde du « business » alors qu’il ne cesse de dénoncer, justement, une « Françafrique » dont les réseaux auraient entrepris de le déstabiliser. Mais il y a bien longtemps que chacun sait que la conduite de Gbagbo n’est plus dictée par une quelconque idéologie politique ; sa seule motivation, c’est « l’appât du gain ». Félix Houphouët-Boigny n’avait pas moins d’intérêt pour l’argent ; mais il avait fait sa fortune (et celle de son entourage) en construisant la Côte d’Ivoire (même s’il y avait de nombreux défauts de construction). Gbagbo, lui, y parvient en la détruisant et en la ruinant. Pour longtemps.

Fin
Jean-Pierre BEJOT
La Dépêche Diplomatique

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Vos commentaires

  • Le 19 février 2011 à 13:20, par AK47 En réponse à : Tout en s’efforçant de s’approprier la Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo entend en réécrire l’Histoire à son avantage (2/2)

    Gbagbo, où tu as déniché cette femme-là même. C’est à cause d’elle tu es aigre comme cela !!!!!

  • Le 19 février 2011 à 17:02 En réponse à : Simon-Gbagbo contre Ouatt-Dominique

    Vraiment quand on compare la photo du couple Gbagbo et celle de Ouattara (qui etait poste il y a quelques jours), il n y a pas match.
    Le couple Ouattara est bien eduque, beau (blanc et noir) et tres sympathique et sensible aux souffrances des pauvres (foundation Children of Africa de la femme de Ouattara).
    Par contre, quand on regarde Simone, vraiment elle n’est pas jolie et n’a pas d’idees pour developper la CI. Dominique vient de recevoir un prix INTERNATIONAL europeen en Belgique. Simone n’a jamais rien eu. Vive Ouattara et Dominique le beau couple.

    • Le 20 février 2011 à 00:26, par Kim Yong Il En réponse à : Simon-Gbagbo contre Ouatt-Dominique

      Allez jouer ailleurs il n’est pas question de sentiment mais d’objectivité,de role dans l’histoire,de ce que les gens ont apporté ;le prix qu’elle a remporté est-il basé sur le mérite ?j’en doute..donc allez jouer ailleurs
      ne faites pas d’amalgame entre noir et blanche, ou blanc et noire ce qui compte c’est l’apport de la personne, et pour celà les milliers de morts directement ou indirectement dûs à la crise depuis 2002 attendent que justice soit faite ;que l’on nous montre si un licencié a assez de moyens pour faire une révolution ?et qu’ensuite pourquoi il n’a jamais été inquiété ?

      • Le 20 février 2011 à 19:43, par decalvinos En réponse à : Simon-Gbagbo contre Ouatt-Dominique

        merci toi au moins tu comprends ... trop de tares sur ce site ou est ce que on, va les dénicher.

    • Le 20 février 2011 à 19:40, par decalvinos En réponse à : Simon-Gbagbo contre Ouatt-Dominique

      on a pas besoin d’un beau couple pour diriger la cote d’ivoire , idiot !!! et quand on sait pas certaines choses on la ferme grande gueule...

    • Le 20 février 2011 à 20:13 En réponse à : Simon-Gbagbo contre Ouatt-Dominique

      Le couple Ouattara est comme le couple KoffiAnnan. Leurs femmes sont des intellectuelles belles et bien eduquees. La femme de Koffi Annan est la fille d’un diplomate Norvegien ou Suedois.
      Le couple Gbago ressemble a un couple de Gorilles noirs sortis tout droit de la foret tropicale ivoirienne, leurs faces ressemblent a des gorilles

    • Le 21 février 2011 à 14:19, par adama En réponse à : Simon-Gbagbo contre Ouatt-Dominique

      salut.ouattara et sa femme spont des gens qui ont assez d’ospitalité et ils meritent de gouverner la CI. avec laurent la CI ne sortira jamais de la crise et toute l’éconmiie de l’UEMOA VA SE STAGNANTER. a mon avis aucune mediation ne peut faire partir ce criminel. je propose plutot une intrevention militaire et le rapidement possible

    • Le 21 février 2011 à 15:00 En réponse à : Simon-Gbagbo contre Ouatt-Dominique

      DIEU EST PITIE DE TON AME:regardez au temps:DIEU SAURA HUMILIEZ LES COUPABLES ET je prie que toute voix qui aura parlé à tord soit confondue !

    • Le 21 février 2011 à 16:21, par rachel de cocody En réponse à : Simon-Gbagbo contre Ouatt-Dominique

      c’est com cela tu refléchis ?? beau et belle ? c’est ton échelle d’évaluation ? Tu vas durer sur terre !
      ce qui est sur son beau ne gouvernera jamais la CI. leur ’’bellesse’’ qu’ils aillent la vendre ailleurs pquoi pas au BF ?
      Stupide réaction

  • Le 19 février 2011 à 22:24, par Témerité En réponse à : Tout en s’efforçant de s’approprier la Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo entend en réécrire l’Histoire à son avantage (2/2)

    T’as raison, Cette dame ne ressemble à rien !!!! Elle est ...vilaine comme la haine !

  • Le 19 février 2011 à 22:30 En réponse à : Tout en s’efforçant de s’approprier la Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo entend en réécrire l’Histoire à son avantage (2/2)

    L’eau te lave mais l’ argent te rend encore plus propre. Quelqu’ un peut- il poster sur lefaso.net la photo de Mme Simone Gbagbo de la periode ante- milliardaire ? Je suis qu’ elle a du evoluer a la vitesse du son meme si c’est pas encore arrive.

  • Le 20 février 2011 à 07:02, par Inoussa Verité En réponse à : Tout en s’efforçant de s’approprier la Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo entend en réécrire l’Histoire à son avantage (2/2)

    Moi je trouve que Simone Gbagbo est jolie ; seulement elle d’une violence inouie qu’on trouve rarement chez les femmes. Elle est insensible comme si elle avait un caillou à la place du coeur.

  • Le 20 février 2011 à 08:42 En réponse à : Tout en s’efforçant de s’approprier la Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo entend en réécrire l’Histoire à son avantage (2/2)

    Mes freres et soeurs ce n’est pas une femme qui dirige un pays mais Dieu. C’est Dieu qui donne le fauteuille pas un Homme, pourqoi vous parler pas ainsi a Blaise Compaore, Alassane a provoquer la guerre, juste pour devenir president tuant combien de personne ? quelqu’un d’autre doit etre le president sauf Alassane Ouatarra et Gbagbo.

  • Le 20 février 2011 à 09:35, par G Yongolim En réponse à : Tout en s’efforçant de s’approprier la Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo entend en réécrire l’Histoire à son avantage (2/2)

    Je voudrait soumettre les deux paragraphes a M. Barry et M. ou Mm. L’anonyme qui aligne les noms des grand progressiste Africains par pur forme, sans analyse sérieuses encor une fois je vais croire que les soit disent intellectuels sont contre productive et aussi les opposants historiques sont du même acabit nocives pour l’Afrique les premier discours du Président Condé me font peur en Guinée.

    Or les connexions entre les groupes français et la « mafia gbagboïste » (à ce niveau-là, on ne peut plus parler de classe politique) sont étroites. Marcel Gossio, directeur général du Port autonome d’Abidjan (PAA) et un des plus grands voyous de la République de Côte d’Ivoire, est tout autant l’homme de Bolloré que l’homme de Gbagbo (« Vous connaissez les liens qui m’unissent à Gossio, votre directeur général. Gossio est mon ami, il est mon petit frère » a déclaré Gbagbo lors de sa rencontre avec les agents du PAA le mardi 3 octobre 2006). Résultat : quand le journaliste Pascal Airault interroge Gossio sur le lancement d’un appel d’offres lorsque la concession du groupe Bolloré arrivera à expiration en 2018 (ce n’est quand même pas demain) - concession qui a fait l’objet initialement d’un marché de gré à gré - Gossio répond dans frémir : « On peut tout simplement reconduire la concession de la SETV dont nous sommes très satisfaits. Vincent Bolloré a investi dans la modernisation des activités au-delà de nos espérances » (Jeune Afrique - 8 août 2010). On remarquera l’étonnant enthousiasme de Gossio vis-à-vis de l’opérateur français, ce qui n’est pas une démarche véritablement « commerciale », ainsi que l’identification du groupe Bolloré au seul Vincent Bolloré. C’est tout dire.
    Autant d’éléments qui permettaient à Philippe Bernard d’écrire dans Le Monde (daté du 16 février 2011) : « Tout en agitant une rhétorique antifrançaise et en cultivant une image anti-impérialiste, M. Gbagbo a confié à des entreprises issues de l’ancienne puissance coloniale les clés d’une grande partie de l’économie ivoirienne. A elles seules, les 600 entreprises françaises implantées en Côte d’Ivoire assurent 40 % des recettes de l’Etat ». C’est dire que cela fait quelque peu désordre alors que les soutiens africains et internationaux de Gbagbo se trouvent dans le camp considéré comme « progressiste » : Angola et Afrique du Sud, dont les partis au pouvoir (MPLA et ANC) sont tous deux membres de l’Internationale socialiste (tout comme le FPI de Gbagbo) ; Russie et Chine, deux piliers du « stalinisme » (ou de ce qu’il en reste, c’est-à-dire le pire, des dictatures bureaucratiques fondées sur l’action des services secrets).

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