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CRISE IVOIRIENNE : Le triste spectacle du clergé

Publié le mardi 11 janvier 2011 à 23h54min

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Le Cardinal Bernard Agré

La crise postélectorale ivoirienne finira par avoir raison de tout le monde à cause de son enlisement. Même ceux que l’on disait neutres, au-dessus de la mêlée, ont fini par prendre position soit pour le président sortant, Laurent Gbagbo, soit pour le président démocratiquement élu, Alassane Dramane Ouattara (ADO). C’est le cas notamment du clergé ivoirien. Coup sur coup, les responsables de l’Eglise catholique ont fait trois sorties contradictoires sur la crise qui n’en finit pas. D’abord, c’est la conférence épiscopale qui, dans une déclaration, a demandé que soit privilégié le dialogue pour une sortie de crise pacifique.

Et cela sans prendre parti ni pour Gbagbo, ni pour Ouattara. De l’équilibrisme compréhensible vu que l’Eglise ne fait pas de politique même si, suivant la situation, elle peut être amenée à se prononcer sur des sujets politiques. Mais la suite de ce que l’on croyait être la position officielle du clergé ivoirien allait brouiller les lignes. Le cardinal émérite, Bernard Agré, a cru bon de donner lui aussi sa position sur cette crise qui commence à lasser la communauté internationale.

Le patron de l’Eglise catholique ivoirienne, aujourd’hui à la retraite, a demandé que soit respecté le verdict du Conseil constitutionnel. Ce qui veut dire clairement qu’il reconnaît la victoire du président sortant, Laurent Gbagbo. Il a beau préciser qu’il s’exprimait à titre personnel, sa sortie fait désordre. Bien qu’étant à la retraite, la dissociation n’est pas facile à faire au sein de l’opinion publique entre Bernard Agré, ancien chef de l’Eglise ivoirienne, et Bernard Agré, simple citoyen pouvant librement donner son point de vue sur tout sujet. D’où d’ailleurs la volée de bois vert à son encontre de la part de certains partisans de ADO. Le plus célèbre d’entre eux, Venance Konan, journaliste et écrivain, s’en est vertement pris au prélat dans une lettre ouverte. Et comme si tout cela ne suffisait pas, un autre homme d’Eglise s’est aussi invité dans la confusion.

Prenant le contre-pied du cardinal émérite, Mgr Jean Salomon Lezoutié, évêque coadjuteur du diocèse de Yopougon, a conseillé à Laurent Gbagbo de reconnaître sa défaite et de quitter, par conséquent, le pouvoir. Pour éviter toute équivoque, il a lui aussi précisé qu’il parlait à titre personnel. Ce qui ajoute à la confusion par rapport à la position officielle de la conférence épiscopale. Si Monseigneur Agré peut, dans une moindre mesure, être excusé parce qu’étant en retraite, et donc pas astreint au droit de réserve, ce n’est pas le cas de l’évêque de Yopougon qui est toujours en activités. De ce fait, il est lié par la position officielle du clergé, donnée à travers la déclaration de la conférence épiscopale. L’attitude du coadjuteur est donc incompréhensible surtout qu’il est allé à l’encontre de la neutralité du clergé. On aurait compris qu’il voulait recadrer son émérite aîné pour éviter toute confusion au niveau des citoyens et des fidèles s’il s’était contenté de rappeler ce qui a été arrêté de commun accord.

Mais en optant de ramer à contre-courant, même s’il dit s’exprimer à titre personnel, il n’a fait que révéler au grand jour la division qui a gagné l’Eglise par rapport à la crise postélectorale. Pour tout dire, on assiste donc à un spectacle triste et désolant qui rejaillit sur le clergé. Tout compte fait, le cardinal émérite et l’évêque auraient dû se taire. Ils auraient rendu un grand service à la Nation ivoirienne en adoptant le silence. Il ne faut pas parler pour parler surtout après que des instances ou des voix indiquées l’ont fait. Persister à le faire, c’est s’offrir en spectacle, provoquer une désunion. Les sorties malheureuses des deux hommes d’Eglise offrent une image de division, de mésentente au sein de la communauté chrétienne ivoirienne. Elles sont susceptibles de semer le doute dans l’esprit de bon nombre de fidèles qui ne croiront plus à la neutralité de ceux qui sont chargés de leur prêcher la bonne nouvelle. Il y a lieu de mettre fin à cette cacophonie. Le Vatican gagnerait à recadrer le clergé ivoirien en crise.

Séni DABO

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 12 janvier 2011 à 03:10, par Bobolais En réponse à : CRISE IVOIRIENNE : Le triste spectacle du clergé

    L’église catholique à travers le sinistre Agré, xénéphobe et anti burkinabè à souhait et la conférenece épiscopale ont pris vertement fait et cause pour Gbagbo. Je ne sais pas pourquoi vous hésitez à reconnaitre que la conférence épiscopale dans sa déclaration soutient Gbagbo. Donc acte.

  • Le 12 janvier 2011 à 09:15, par le clairvoyant En réponse à : CRISE IVOIRIENNE : Le triste spectacle du clergé

    Bonjour ! Analyse tres pertinente. Rien à redire

  • Le 12 janvier 2011 à 09:21, par yizom En réponse à : CRISE IVOIRIENNE : Le triste spectacle du clergé

    la prise de position publique de ces evêques ivoiriens est condamnable, je suis chrétien catholique, et je suis pour une église apolitique ; mais Jésus nous avait déjà mis en garde contre ce genre de pasteur : "Alors Jésus, parlant à la foule et à ses disciples, dit:Les scribes et les pharisiens sont assis dans la chaire de Moïse. Faites donc et observez tout ce qu’ils vous disent ; mais n’agissez pas selon leurs œuvres. Car ils disent, et ne font pas.
    Ils lient des fardeaux pesants, et les mettent sur les épaules des hommes, mais ils ne veulent pas les remuer du doigt". Matthieu 23, 1-4
    "ils sont comme des tombeaux, blancs à l’extérieur et pourris à l’intérieur"

  • Le 12 janvier 2011 à 09:38, par Sabari San En réponse à : CRISE IVOIRIENNE : Le triste spectacle du clergé

    Merci bien cher Dabo pour cet écrit.

    Tout juste, deux remarques :
    1. Le rôle de l’Eglise n’est pas d’être "neutre", mais de prendre position pour la vérité des faits !

    2. Comment le Vatican pourrait-il "recadrer" le clergé, puisque d’après Jeune Afrique, édition autour de Noel 2010 (photo à l’appui), le Nonce Apostolique c’est-à-dire le Représentant du Pape a pris fait et cause pour Laurent Gbagbo (qu’il congratule) en lui donnant du "Monsieur le Président de la République".

    3. Je suis très heureux que Mgr AGRE ait été contredit par son compère de Yopougon : ça signifie au moins que l’Eglise n’a pas une vision "gbagoïste" de cette crise. Et ça c’est très reconfortant !

  • Le 12 janvier 2011 à 09:46, par Coffi En réponse à : CRISE IVOIRIENNE : Le triste spectacle du clergé

    Je crois qu’il faut préciser que le compte rendu de la position officielle de la conférence épiscopale de Côte d’Ivoire que fait Séni DABO n’est pas tout à fait exact. Certains passages de cette déclaration ressemblent curieusement au discours du camp Gbagbo :

    " Nous, Evêques de Côte d`Ivoire, demandons avec insistance - Que l’ONU se conforme aux principes fondamentaux qui la régissent et qui sont respectueux des droits de l`homme. Qu`elle fasse usage des moyens pacifiques de
    règlement du différend en vue d`apporter sa contribution à la résolution de la crise et s’en tienne strictement au maintien de la paix ".

    " Nous, Evêques de Côte d`Ivoire, Nous lui demandons avec insistance de respecter la souveraineté de notre pays.(….) Cherchons à sauvegarder et à préserver la dignité et la souveraineté de notre pays en respectant et en
    faisant respecter ses institutions dans le dialogue vrai et dans la concertation fraternelle. Quand il s’agit de choisir entre la Côte d’Ivoire et les ennemis de la Côte d’Ivoire, nous choisissons la Côte d’Ivoire. "

  • Le 12 janvier 2011 à 10:09, par Malclom X En réponse à : CRISE IVOIRIENNE : Le triste spectacle du clergé

    Bonjour,

    Je pense que -surement- vous n’avez pas bien lu le papier de Mgr Jean Salomon Lezoutié.Je l’ai lu plus d’une fois (compte tenu de la teneur du message)et, en vérité, il n’a été question d’aucune prise de position en faveur de l’un ou de l’autre. Certes, il dit à Gbagbo de quitter le pouvoir. Mais dans le même temps, il demande aussi à ADO de reconnaître Gbagbo comme président légal, même s’il l’est de manière illégitime.

    Tout au plus, on peut dire que Mgr joue aussi à l’équilibriste. Mais ce qu’il a de plus comme qualité, c’est qu’il a osé affirmé qu’en tout état de cause,le président "final" de la RCI sera celui que la vérité aura désigné. Bon, je passe sous silence les autres détails.

    Il faut seulement reconnaître que ce Mgr est un grand homme. Certes, je ne le connais pas, et n’ai jamais d’ailleurs entendu parler de lui, si ce n’est lors de sa sortie sur la crise. Mais il a des qualités : il est hautement cultivé (lorsque vous lisez son papier,pour vous rendre compte de la connaissance qu’il a du droit, même si par modestie il dit s’excuser pour ses carences en la manière)et il est vraiment sage.

    En tout état de cause, je pense même qu’il est temps que l’Eglise arrête de se réfugier derrière les histoires de "neutralité" et faire toujours éclater la vérité en toute chose. C’est cela sa mission. Jean-Baptiste a dit la vérité au Roi Hérode, et on l’a décapité ; n’empêche qu’il a fait sa mission et ce qui est juste. Jésus Christ a dit la vérité, et on l’a crucifié, ce n’est pas cette mort qui a empêché sa résurrection ! Il y a bien d’autres exemples.

    Donc, il faut que l’Eglise arrête de jouer à l’autruche. Sinon, elle faille à sa mission. Neutralité pour sauvegarder quelle paix !!! Non, arrêtez ça maintenant. Seule la vérité rend les choses droites et durables.

    Bien entendu,il faut prendre position, mais la bonne, c’est-à-dire celle éclairée par l’Esprit, la vérité. Par conséquent,certes, il est donc prudent de ne pas s’aventurer sur des terrains glissants impliquant par exemple le droit constitutionnel quant on ne s’y connaît pas (bon, seulement là, on peut tolérer la neutralité). C’est dans ce sens que je crois que Mgr Agré s’était fourvoyé, sans doute de bonne foi (j’espère !!).

    Mais l’autre Evêque, Salomon, est loin de son compère. Mais, je le repète, il n’a pas pris position en faveur ni de l’un ni de l’autre. Il a pris position, à la fois et successivement contre et pour l’un et l’autre.

    Sur le plan de l’argumentation, son papier est sans reproche. Même dans le fond -c’est-à-dire au delà de la logique- il a dit la vérité, en vrai "patriote", selon son propre vocabulaire !

  • Le 12 janvier 2011 à 13:45, par Founpiim En réponse à : CRISE IVOIRIENNE : Le triste spectacle du clergé

    Mr Dabo Seni,
    Je vous invite, ainsi que tous vos collegues du pays d’ailleurs, a bien relir la declaration de la conference episcopale ivoirienne, et vous comprendrez qu’elle apporte son soutien a Gbagbo, en bien lisant entre les lignes !
    C’est ce qui a fait sortir l’eveque de Yopougon de sa reserve ! Precisons au passage que si vous lisiez bien entre les lignes, vous auriez compris que l’eveque "reconnait" ne pas avoir votrer pour ADO. La neutralite de l’Eglise est ainsi retablie. Le Cardinal Agre, c’est qui ? La chute de Gbagbo va permettre de savoir rapidement le role qu’il a joue dans la mort de Guie : ceci explique cela.
    Je vous invite a lire Anne Ouloto aussi, porte parole de ADO pour vous en convaincre, si besoin etait.
    Merci

  • Le 12 janvier 2011 à 21:38 En réponse à : CRISE IVOIRIENNE : Le triste spectacle du clergé

    Juste un petit correctif de terme si l’auteur le permet. Dans le texte, plusieurs fois il répète l’expression « Cardinal émérite ». Les cardinaux dans l’Église catholique sont nommés à vie. L’adjectif « émérite » à côté de « cardinal » ne sonne pas juste. « Émérite » est lié à la fonction d’évêque ou d’archevêque dans ce cas. Il serait plus correcte de dire par exemple : « Cardinal X, évêque ou archevêque émérite de tel ou tel diocèse ». Merci pour la compréhension.

  • Le 13 janvier 2011 à 07:10, par damne2laterre En réponse à : Appel du 12 janvier 2011 pour la démocratie en Côte d’Ivoire

    Appel du 12 janvier 2011 pour la démocratie en Côte d’Ivoire

    Mes frères et mes sœurs,

    La situation en côte d’ivoire est très grave. Deux camps s’opposent et le pays est divisé.
    Je connais la situation politique de la côte d’ivoire depuis mes nombreux séjours à Abidjan de 1996 à 2001.J’ai ensuite suivi l’évolution de la situation grâce à internet depuis 2002.
    Je ne veux pas revenir sur les facteurs de divisions et les rancœurs passées, ils sont trop nombreux. Il faut maintenant œuvrer pour la paix en côte d’ivoire et le développement de la démocratie en Afrique.

    Je suis Français et je suis farouchement opposé à ce que l’on nomme la Françafrique.
    J’ai été révolté par l’élection de Faure Gnassingbé au Togo ou Ali Bongo au Gabon.
    J’ai acquis la nationalité Burkinabé en 2005 et les 23 ans de pouvoir de Blaise Compaoré représentent à mes yeux un danger pour le développement harmonieux de ce pays qui est aussi le mien.

    Aujourd’hui, j’entends des voix qui s’élèvent contre l’ingérence de l’ONU, de Sarkozy, des présidents mal élus des pays voisins. Certain prennent ainsi parti pour Laurent Gbagbo, le fier patriote qui défendrai l’Afrique contre le reste du monde... et j’ai envie de pleurer.
    J’ai envie de pleurer pour tous ces Ivoiriens qui vivent dans la terreur en ce moment. J’ai envie de pleurer pour tous ces Africains, Burkinabé, Maliens, Guinéen..., qui subissent les exactions de ce pouvoir depuis tant d’années.

    Mes frères et soeurs, vous avez vu comme moi les images de la confiscation du pouvoir par le clan de Laurent Gbagbo. Ce scénario bancal était prévu en cas de défaite dans les urnes. Les suspicions de fraudes, le blocage de la commission électorale, le mensonge du président du conseil constitutionnel, la répression, la terreur, tout devait être fait pour confisquer le pouvoir.
    Je reçois la RTI en France et je me demande qui peut me contredire quand je dis que cette chaine est un instrument de propagande, de mensonges, de manipulation et de haine d’un régime aux abois.

    Je ne sais pas comment finira cette crise. Tous les scénarios sont possibles, surtout les pires. Je lance seulement un appel à toutes les bonnes volontés pour réclamer que le choix des Ivoiriens soit respecté et que la démocratie et la paix s’installe en Côte d’Ivoire et que ce pays soit un modèle pour l’Afrique de demain.

    Merci de faire suivre, de copier/coller, d’envoyer ce message partout autour de vous, jusqu’à la victoire finale.

    Signé : DAMNE 2 LA T’R

  • Le 22 janvier 2011 à 05:30 En réponse à : CRISE IVOIRIENNE : Le triste spectacle du clergé

    Je pense qu’il est très facile de juger les propos de l’Eglise, de tel ou tel Homme de DIEU. lorsque l’Egilse ne parle pas, on s’en plaints.Lorsqu’elle parle sans prendre position, on dit qu’elle est équilibriste. Quand elle prend position, on trouve qu’elle est partisane. Que voulez-vous de l’Eglise ??? Ce qui envenime cette crise, ce sont les commentaires que l’on fait des propos des uns et des autres... Pour une fois, ivoiriens et amis de la côte d’Ivoire, arrêtons de juger les autres, posons nous la question de notre propre responsabilité.

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