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Crise politique en Côte d’Ivoire : Des prélats avancent démasqués

Publié le mardi 11 janvier 2011 à 23h53min

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L’imbroglio politico judiciaire qui secoue la Côte d’Ivoire depuis l’issue contestée du second tour de la présidentielle s’enrichit de nouveaux épisodes. Malheureusement ils ne présentent pas vraiment de motifs d’apaisement.

Loin s’en faut ! A une première déclaration du cardinal archevêque émérite d’Abidjan monseigneur Bernard Agré sonne, comme une réplique cinglante, celle de monseigneur Jean Salomon Lézoutié, actuel évêque coadjuteur du diocèse de Yopougon.

Alors que le cardinal, fidèle à sa traditionnelle et indéfectible amitié qui le lie à Laurent Gbagbo, affirme, une fois de plus, avec force que « lorsque le Conseil constitutionnel s’est prononcé, tout le monde doit s’incliner », l’ancien recteur du Grand Séminaire d’Anyama trouve, pour sa part, que ledit Conseil constitutionnel n’est « ni infaillible, ni au-dessus de tout soupçon ». Et, dans la foulée, d’inviter le président sortant à entrer dans l’Histoire par la grande porte empruntée avant lui par Abdou Diouf, plutôt que par celle utilisée par Charles Taylor. Si on n’est pas en présence d’une véritable passe d’armes, cela y ressemble fort.

Et ce désaccord évident des hommes d’Eglise viendra, sans doute, ajouter à un climat politico-social suffisamment délétère pour qu’on songe à en rajouter. Pouvait-on s’attendre vraiment à autre chose ? Assurément oui. Et le simple fait de voir que l’imbroglio des politiques ivoiriens déteint sur le monde religieux, le scinde et le divise, n’en est que plus la preuve qu’il est plus que temps qu’une solution idoine soit trouvée, qui ramène apaisement, sérénité et paix des cœurs en territoire ivoirien.

Mais pour le moment, on est loin du compte. Fort heureusement cependant, il faut se faire violence et tâcher de garder la dissension dans le cadre strict qui est le sien, sans vraiment se tromper de protagonistes. Les déclarations de ces deux prélats émanent de deux hommes d’Eglise. Elle ne sont pas parole d’évangile, tout comme elles ne sont pas le produit d’une déclaration officielle de l’instance épiscopale qui, en la matière, seule, a autorité pour le faire.

Les dires des deux évêques, à la toute limite, n’engagent que deux citoyens ivoiriens, qui, après tout, ont eux aussi le droit d’exprimer ce qu’ils pensent de la crise que traverse leur nation. On en dirait autre chose si d’aventure l’un ou l’autre des hommes d’Eglise, en s’exprimant, avait mandat de la Conférence épiscopale ivoirienne. Par bonheur, doit-on dire, on n’en est pas encore là et peut-être bien que dans les jours à venir ladite instance s’évertuera à sauver encore ce qui pourra l’être.

Sauver ce qui peut l’être, car nul doute que de pareilles déclarations ne peuvent que semer le doute dans l’esprit de fidèles ivoiriens déjà traumatisés et, sans doute, dépassés par ce qui leur arrive. Fallait-il absolument faire entendre ces sons de cloches dissonantes ? Peut-être pas. Le fidèle quidam, sans nier à son pasteur d’être un citoyen ivoirien, ne s’attendait, sans doute, pas à le voir prendre si ouvertement position en faveur de l’un ou l’autre des candidats d’une élection décidément à problèmes dans un pays éploré et, depuis fort longtemps, exsangue et au bord d’un abîme.

Car le prélat qui prend la liberté de le faire, même s’il peut toujours se défendre, arguant que ce qu’il dit n’engage que lui, en réalité, ne fait pas autre chose que jeter le flou dans la tête de ses ouailles. A un moment où en Côte d’Ivoire on recherche vainement la clarté, c’est plus qu’un péché véniel. Pour le moment, ces deux hommes d’Eglise sont les seuls à s’être affichés. Il faut souhaiter que leurs pairs manifestent plus de réserve et se montrent plus vigilants.

Et ce n’est pas confiner les hommes d’Eglise à la sacristie que de le penser ainsi. Il est des moments dans la vie où il convient, par sagesse, de renoncer à un droit légitime, dans le but de sauver une situation. Cela s’appelle aussi rechercher un bien supérieur. Les prélats ivoiriens ont charge d’âmes, de toutes les âmes : Cura animarum. A défaut de le faire, ils finiront par perdre toute crédibilité.

Et alors, exégèse et herméneutique ensemble réunies ne pourront plus empêcher le fidèle d’avoir la désagréable impression que son pasteur, en dépit de ce qu’il est censé représenter, n’est qu’un mauvais pion inféodé qui roule pour tel ou tel leader politique. Reste à savoir pour quoi et en vertu de quoi. La mauvaise passe dans laquelle se trouve la Côte d’Ivoire, pour éprouvante et éreintante qu’elle soit, ne devra pas venir à bout des hommes d’Eglise ivoiriens à l’usure.

Plus qu’ailleurs, et au regard de la situation difficile qui prévaut en ce moment dans leur pays, ils se devront de savoir se montrer les véritables gardiens du Temple, à un moment où presque tout et tous s’écroulent autour d’eux : c’est leur devoir de se montrer des artisans de paix. De cette paix dont la nation ivoirienne toute entière a si cruellement besoin.

Ils rentreraient, eux aussi, dans l’Histoire par la grande porte si d’aventure ils administraient la preuve qu’au plus fort de la tourmente, ils se seront montrés les refuges providentiels qui accueillent, abritent et secourent tous ceux qui auront eu besoin de leur aide, leur affection, leur humanité. Il faut alors prier que le Tout-Puissant leur accorde à tous la grâce nécessaire à pareil achèvement.

Jean Claude Kongo

L’Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 12 janvier 2011 à 09:26, par yizom En réponse à : Crise politique en Côte d’Ivoire : Des prélats avancent démasqués

    la prise de position publique de ces evêques ivoiriens est condamnable, je suis chrétien catholique, et je suis pour une église apolitique ; mais Jésus nous avait déjà mis en garde contre ce genre de pasteur : "Alors Jésus, parlant à la foule et à ses disciples, dit:Les scribes et les pharisiens sont assis dans la chaire de Moïse. Faites donc et observez tout ce qu’ils vous disent ; mais n’agissez pas selon leurs œuvres. Car ils disent, et ne font pas.
    Ils lient des fardeaux pesants, et les mettent sur les épaules des hommes, mais ils ne veulent pas les remuer du doigt". Matthieu 23, 1-4
    "ils sont comme des tombeaux, blancs à l’extérieur et pourris à l’intérieur"

  • Le 12 janvier 2011 à 15:11, par SAKO En réponse à : Crise politique en Côte d’Ivoire : Des prélats avancent démasqués

    EST-QUE PAR APOLITIQUE IL FAUT COMPRENDRE MENTEUR ?

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