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CRISE IVOIRIENNE : La neutralité suspecte du Ghana

Publié le lundi 10 janvier 2011 à 02h19min

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Le président ghanéen John Atta-Mills

Le président sortant de la Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo, est aujourd’hui en passe de gagner son pari. Nonobstant les multiples pressions internationales qui s’exercent sur lui pour qu’il cède le pouvoir à son rival, Alassane Dramane Ouattara, Gbagbo n’en a cure et donne, en plus, l’impression d’avoir de l’aplomb. Sans doute donc qu’il finira un jour par avoir tout le monde à l’usure.

Certes, on savait jusque-là, qu’en dehors des dirigeants de la "modeste" Gambie, les chefs d’Etat de la CEDEAO (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) étaient unanimes quant au départ inconditionnel et immédiat de Gbagbo du palais de Cocody et ce, même par l’usage de la force si nécessaire. Hélas ! Les fêlures longtemps redoutées semblent aujourd’hui se dessiner et risquent d’affecter durement la position de l’institution sous-régionale qui, de toute évidence, joue sa crédibilité dans cette crise ivoirienne. En effet, après avoir annoncé le 30 novembre 2010 que le Ghana n’enverra pas de troupes en Côte d’Ivoire, le président John Atta Mills, a cyniquement déclaré vendredi dernier, que son pays ne "prendrait pas parti" dans la crise que vit la Côte d’Ivoire, et soutiendrait le gouvernement "quel qu’il soit". Une attitude caméléonesque qui suscite bien des interrogations : que veut réellement le Ghana ?

Le président Atta Mills tire-t-il profit de la crise ivoirienne au point de se démarquer outrageusement de ses pairs de la CEDEAO ? Ce qui est sûr, c’est qu’il ne saurait arguer d’une quelconque appréhension de réprésailles à l’encontre de la diaspora ghanéenne en Côte d’Ivoire, d’autant que certains pays de la sous-région, en l’occurrence le Burkina et le Mali y comptent plus de ressortissants. Il y a là anguille sous roche, surtout que le président ghanéen avait signé le 7 décembre 2010 le communiqué final de la CEDEAO qui reconnaissait non seulement la victoire de Alassane Ouattara mais enjoignait également Laurent Gbagbo de céder instamment le pouvoir, sous peine d’intervention militaire.

En tout cas, la situation actuelle en Côte d’Ivoire est telle, qu’aucun Etat, pour autant qu’il soit sincère et lié aux décisions de la communauté internationale, ne peut prétendre rester neutre. Refuser de prendre position, c’est faire preuve d’hypocrisie. Et cela, il faut le dire, le président Atta Mills soutient Gbagbo et défend sans doute des intérêts en Côte d’Ivoire. D’ailleurs, il aurait mieux fait de se taire que de nous servir une sortie iconoclaste avec une position apocryphe.

En tant que bel exemple de démocratie dans la sous-région, le Ghana, plus que quiconque, était mieux placé pour défendre le droit et le principe de l’alternance, n’en déplaise à tous ceux qui portent entorse aux valeurs républicaines et au respect des institutions. Pour tout dire, c’est une grave faiblesse doublée de pharisaïsme de la part d’un Etat qui assure actuellement la présidence de la Commission de la CEDEAO, que d’adopter une telle position. Que fera désormais le président de la Commission, lui-même Ghanéen ? Adoptera-t-il la position officielle de son pays ou écoutera-t-il le président en exercice de l’institution, le Nigérian Goodluck Jonathan ? Le président Atta Mills, en réalité, a trahi ses pairs de la CEDEAO et a décidé d’immoler un idéal commun sur l’autel de l’ambition et cela, sous le couvert d’une suspecte neutralité.

Boundi OUOBA

Le Pays

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