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De la dépénalisation des délits de presse

Publié le lundi 20 septembre 2004 à 08h18min

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Dans sa livraison du 15 septembre 2004 et sous la rubrique "On murmure", Sidwaya nous apprenait que le gouvernement a décidé dans le cadre de la relecture du code de l’information de dépénaliser les délits de presse.

Si ce "murmure" devait devenir réalité, ce serait un nouveau printemps pour la presse au Burkina Faso et un pas de plus dans le renforcement de la culture démocratique.

La dépénalisation des délits de presse n’est pas un effet de mode. Il est vrai que nombre de gouvernements connus jusque-là comme hostiles à tout ce qui ressemble de près ou de loin à la liberté d’opinion ont fini par introduire des mesures moins répressives dans l’exercice du travail des journalistes. Nous sommes dans un contexte de domination des technologies de l’information et de la communication, ce qui donne un accès plus facile aux informations.

La liberté d’opinion est un des principes fondamentaux des droits humains. Enfermer un journaliste pour ne citer que cet exemple-là pour délit d’opinion, c’est aussi enfermer la liberté d’opinion. La prison d’un journaliste pour délit d’opinion ne devrait pas être une maison d’arrêt et de correction comme celle de Ouagadougou mais les instances de régulation et d’autorégulation comme le Conseil supérieur de l’information (CSI).

Pendant longtemps, les Burkinabè ont été privés de parole. Au point qu’aujourd’hui, on en ressent toujours les séquelles chez certains citoyens quand on leur donne la parole. Dans la société de l’information actuelle, la presse doit œuvrer à donner à ses lecteurs, auditeurs ou téléspectateurs des moyens d’être critiques et responsables.

Pour former des citoyens critiques et responsables, le journaliste doit être à la hauteur. En dépénalisant les délits de presse, on appelle le journaliste à plus de responsabilité. D’aucuns diront qu’on revient au thème rebattu de la responsabilité du média. Le journaliste qui se veut un médiateur social, doit être à la hauteur de sa tâche. C’est cet homme qui évite la diffamation, les manquements à l’éthique. C’est aussi cet homme en phase avec l’évolution intellectuelle du monde. Autrement dit, n’est pas journaliste qui veut.

La presse burkinabè, malgré ses limites et ses tares, est de bonne tenue. Elle est loin de ces médias du crime, de la haine. Elle souffre, admettons-le, d’insuffisance de moyens matériels et financiers pour certains médias, d’insuffisance de formation professionnelle pour d’autres. La presse burkinabè, comme bon nombre de secteurs d’activités se libère. Si la dépénalisation des délits de presse, comme on le murmure, se concrétisait, ce serait la porte ouverte à plus de responsabilité et non à l’impunité comme d’aucuns le soutiennent.

Dépénaliser les délits de presse, c’est le combat de l’Union internationale de la presse francophone (l’UPF). A ses assises de novembre prochain à Ouagadougou sur la déontologie professionnelle et la protection des journalistes, l’UPF réitérera certainement sa position sur ce sujet et pense même demander aux chefs d’Etat lors du Sommet de la Francophonie qui se tiendra, à la fin du même mois toujours dans la capitale burkinabè de ne plus emprisonner un journaliste pour délit de presse.

Il faut d’ores et déjà saluer à sa juste valeur cette initiative et ceux qui en sont à l’origine, surtout la société civile qui se bat quotidiennement pour un élargissement des espaces de liberté. En tous les cas, il faut encourager les décideurs politiques, les pouvoirs publics à aller dans le sens d’une plus grande responsabilisation des médias. C’est à ce prix qu’on en fera des interlocuteurs ou des médiateurs plus crédibles parce qu’ils sauront jusqu’où doit aller la liberté des journalistes dans une société de l’information.

On sait que les armes du journaliste sous tous les horizons sont et restent ses talents professionnels et son respect de l’éthique. C’est un truisme de dire qu’il n’y a pas de démocratie sans liberté de presse, sans libération de la parole.

Si la dépénalisation des délits de presse est prise, le Burkina Faso n’aurait fait qu’aller dans le sens de l’histoire et montrer le bon exemple.

Bessia BABOUE

Sidwaya

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